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Histoire d'eau : Flâner le long des quais du 8ème

30 septembre 1994 Paru dans le N°175 à la page 62 ( mots)

Le Sud du 8e arrondissement a la chance de s'ouurir uers la Seine. Ses quais, lieux de détente et de flaneries et ses ponts, oeuvres d'art et voies de communication, font partie de la vie de l'arrondissement.

« Les quais ont toujours été pour les Parisiens de bonne race un endroit de prédilection. Tout le long de la Seine, maintenue dans une atmosphère de haute distinction par le voisinage des bâtiments augustes qui la font royale, et pourtant bohémienne par la présence des bouquinistes, le passage des chalands et les brusques apparitions de sombres poètes au bord des boîtes, la flânerie s’est toujours sentie chez elle. (...) », cette réflexion de Léon-Paul Fargue écrite dans « Le Piéton de Paris », dans les années 1930, semble toujours d’actualité.

À l’arrivée des premiers beaux jours, nombreux sont les promeneurs le long des quais... C’est pourquoi nous vous proposons un itinéraire historique, allant du pont de la Concorde au pont de l’Alma...

Le pont de la Concorde

C’est l’architecte Jean Rodolphe Perronet (1708-1794), fondateur de l’École Nationale des Ponts et Chaussées, qui le conçut. Le pont de la Concorde fut construit de 1787 à 1791, avec le concours de l’ingénieur Demoustier, au moyen de matériaux provenant en partie de la démolition de la Bastille. D’abord appelé « pont Louis XVI », puis « de la Concorde » sous le Consulat, il fut à nouveau baptisé « Louis XVI » au moment de la Restauration, et définitivement « de la Concorde » en 1830.

En 1810, Napoléon demanda que soient dressées, sur les piédestaux placés au-dessus des piles, les statues de 12 généraux tombés pendant les campagnes de l’Empire. Dix-huit ans plus tard, elles furent remplacées par les statues de douze personnages célèbres : quatre grands ministres (Colbert, Richelieu, Suger, Sully), quatre généraux (Bayard, Condé, Duguesclin, Turenne) et quatre marins (Duguay-Trouin, Duquesne, Suffren, Tourville). Le pont étant menacé de s’écrouler en raison du poids de ces statues colossales, elles furent transportées vers la cour des Invalides puis à Versailles où elles restèrent un siècle. Celles qui ont été gardées se trouvent dans les villes d’origine de ces hommes célèbres, Duguay-Trouin, Tourville et Duquesne se dressant dans la cour d’honneur de l’École Navale de Coetquidan. En 1930-1932, le pont vit sa largeur doubler par l’adjonction de travées en aval et en amont. Aujourd’hui, il mesure 153 m par 34 m, avec dos d’âne accusé.

[Photo : Le Pont de la Concorde.]

Le pont Alexandre III

C’est sûrement le plus beau de Paris ! Le pont Alexandre III constitue l’entrée monumentale transversale conduisant aux Champs-Élysées. Dès le début du XIXe siècle, un pont avait été prévu dans l’axe des Invalides. Il ne fut construit qu’entre 1898 et 1900, en prévision de l’Exposition Universelle de 1900. Les ingénieurs Résal et Alby conçurent un pont à une seule arche métallique de 115 mètres de portée sur 45 mètres de large. Cassien-Bernard et Cousin, les deux architectes, eurent pour mission la décoration de l’ouvrage. L’ossature métallique comprend quinze fermes également espacées : les arcs sont en acier moulé, la superstructure en acier laminé et les parties décoratives en fonte.

Le pont Alexandre III fut l’un des premiers « préfabriqués » du monde, les éléments constitutifs, voussures notamment, ayant été fondus au Creusot, amenés sur le chantier par péniches puis mis en place avec un spectaculaire pont roulant enjambant la Seine. Il fallut 200 jours pour réaliser l’arche!

Les quatre piliers d’angle, d’une hauteur de 17 mètres, ornés chacun de quatre colonnes à chapiteaux composites, portent sur leur entablement des groupes équestres en bronze doré. Côté 8e, sur la rive droite, le pilier de droite en regardant les Invalides supporte la « Renommée des Sciences » par Emmanuel Frémiet, avec à sa base, « La France contemporaine » par Gustave Michel. Le pilier de gauche supporte « La Renommée des Arts » par Frémiet, avec à sa base, la « France de Charlemagne » par Alfred Lenoir. Enfin, les grands lions en pierre sont de Gardet.

[Photo : Le Cours-la-Reine.]

Sur la rive gauche, le pilier de droite porte la « Renommée du Commerce » par Pierre Granet, avec à sa base la « France renaissante » par Jules Coutant. Le pilier de gauche supporte la « Renommée de l’Industrie » par Clément Steiner et, à sa base, la « France de Louis XIV » par Laurent Marqueste. Les lions, sur cette rive, sont de Jules Dalou. Les arcs de rive extérieurs sont ornés de motifs décoratifs réalisés par Abel Poulin, qui rappellent la flore et la faune marines.

Aux clefs de voûtes des arcs, ont été installées, en amont, les « Nymphes de la Seine portant les armes de Paris », et en aval, les « Nymphes de la Néva portant les armes de la Russie », de Georges Récipon, auteur des quadriges du Grand Palais.

* Extrait du « Courrier du 8e », mensuel d’information du 8e arrondissement.

Le pont des Invalides

En 1824, l’ingénieur Navier installa à cet emplacement un pont suspendu d'une seule arche, qui, ne présentant pas les garanties de stabilité nécessaires, ne fut pas utilisé. On le remplaça, en 1829, par un autre ouvrage suspendu dit « de l’allée d’Antin », car il se trouvait dans l’axe de cette avenue qui conduisait au rond-point des Champs-Élysées. Ce pont comportait trois travées, 25 mètres d’ouverture pour les arches latérales, 68 mètres pour l’arche marinière centrale.

En prévision de l’Exposition universelle de 1855, qui devait se dérouler sur les Champs-Élysées, au Palais de l’Industrie et des Beaux-Arts, et sur le Cours-la-Reine, on entreprit, en 1854, de remplacer ce pont suspendu par un ouvrage en maçonnerie, plus important, appelé « pont des Invalides » et conçu par les architectes Vaudrey et de Lagallisserie.

Il fallut une année pour le réaliser : il se composait de quatre arches en arc de cercle surbaissé de 32 mètres d’ouverture, prenant appui sur des piles de 5 mètres d’épaisseur ; la largeur du tablier était de 16 mètres. Le pont fut reconstruit en 1879-1880 en raison des crues qui l’avaient abîmé. Sur les avant-becs de la pile centrale furent replacées les allégories sculptées : « La Victoire maritime » par Victor Vilain et « La Victoire terrestre » par Georges Diébolt. Sur les tympans au-dessus des piles latérales droite et gauche, de grands écussons à têtes d’hommes entourés de drapeaux en faisceaux furent sculptés par Lavergne et Horace Daillon.

Le pont de l’Alma

Du vieux pont de l’Alma, construit en 1854 et auquel on donna le nom de cette victoire remportée en Crimée, il ne reste plus que le célèbre « zouave ». Comme le pont des Invalides, il devait être terminé pour l’ouverture de l’Exposition universelle de 1855.

Réalisé dans le cadre des travaux d’Haussmann, ce pont devait permettre de relier les nouveaux quartiers de la rive gauche (autour des avenues Rapp et Bosquet) et ceux de la rive droite (sur la colline de Chaillot, depuis l’avenue Montaigne, jusqu’à l’Étoile et le Trocadéro). Parmi les ingénieurs de ce pont, on retrouve Messieurs Vaudrey et de Lagallisserie, mais aussi M. Darcel.

Sur les avant-becs des piles se trouvaient les statues de quatre soldats. Le Chasseur de Arnaud a été placé près de la redoute de Vincennes-Saint-Maurice, sous un pont de l’autoroute A4. L’Artilleur du même sculpteur est parti à La Fère. Le Grenadier de Diébolt a été emmené à Dijon (ces armes participèrent à la bataille de l’Alma).

Pour en savoir plus sur les quais et les ponts de Paris, vous pouvez consulter le guide historique des « Quais et Ponts de Paris » de Marc Gaillard, Éditions Martelle, 1993.

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