« Une pile d’assiettes dont le poids finit par écraser celle qui se trouve au-dessous. Ainsi en va-t-il des couches de terrain surmontant la couche productrice du gisement d’Ekofisk (à 3 000 mètres sous terre) fragilisée par la baisse de pression (410 bars ramenés à moins de 275) résultant du puisage continu (depuis 1971) des fluides (huile et gaz) qu’elle contient.
Le résultat en surface ? Un affaissement du sol marin (d’environ 3,85 mètres actuellement au rythme de 27 centimètres/an), l’enfoncement d’autant des plates-formes et le rapprochement de leurs ponts inférieurs du niveau de la mer (à portée ou presque de la vague centenaire). Ce phénomène, dit de « subsidence » pouvant durer encore quelques années (avant stabilisation de la couche productrice) il fallait intervenir pour que les installations d’Ekofisk demeurent opérationnelles en toute sécurité. Pour le gisement et ses satellites, il reste en effet à produire quelques 83 millions de tonnes de pétrole et 94 milliards de mètres cubes de gaz. De surcroît, transitent par Ekofisk les productions d’une douzaine d’autres gisements à destination de la Grande-Bretagne et/ou de la R.F.A.
La solution proposée (et brevetée) par Technip Geoproduction* a finalement été retenue.
Le principe ? Couper les jambes des plates-formes et intercaler sur chaque jambe un tronçon supplémentaire de 6 mètres de hauteur.
Le principal outil ? De puissants vérins hydrauliques (du type vérins plongeants) capables d’assurer le soutien et le levage de l’ensemble, le temps des opérations précédentes.
* Technip Geoproduction est une filiale à 60 % de Technip (Elf Aquitaine 33,33 %) et à 40 % de l’Institut Français du Pétrole (I.F.P.).
La principale difficulté ? Maintenir identique la course de chacun des vérins. D’où un recours massif à l’informatique pour synchroniser, à quelques millimètres près, leur progression.
L’opération a porté sur les plates-formes à jambes métalliques (six sur un total de sept). Elle aura duré en tout 13 mois, dont 14 jours sur le site, et requis le concours de 72 entreprises, dont 5 françaises.
Après découpe des jambes (31 mai — 25 juillet), les opérations de levage proprement dit ont eu lieu :
- — le 16 juillet pour la plate-forme « quartiers » (7 750 tonnes soulevées par 16 vérins),
- — le 15 août pour la plate-forme « risers », où aboutissent et d'où repartent les productions des gisements satellites (6 829 t ; 16 vérins),
- — le 17 août pour les quatre autres plates-formes, relevées d'un bloc, passerelles et liaisons comprises (450 m de long ; 22 771 t ; 76 vérins).
Les investissements ont été de l’ordre de 2,6 milliards de francs. »
LES PRINCIPALES PHASES DES OPERATIONS
[Photo : Fig. 1 — Mise en place de vérins sur des supports soudés aux jambes des plates-formes.]
[Photo : Fig. 2 — Découpe des jambes et dépose d’un tronçon permettant l’insertion de deux demi-brides.]
[Photo : Fig. 3 — Insertion de deux demi-brides boulonnées ensemble et soudure de chacune sur les jambes.]
[Photo : Fig. 4 — Déboulonnage des demi-brides. Poussée des vérins. Surélévation de la partie supérieure (gain de 6 mètres).]
[Photo : Fig. 5 — Insertion de tronçons de jambes, prééquipés de deux demi-brides à chaque extrémité.]
[Photo : Fig. 6 — Connexion des demi-brides au contact. Démontage des vérins et de leurs supports.]
6 plates-formes à surélever, dont 4 à relever simultanément, passerelles et liaisons comprises. — Au total, plus de 37 000 tonnes à lever. — 47 jambes à découper et allonger. — 108 vérins nécessaires à l’opération.