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Grâce à l'électronique de pointe, une méthode qui s'impose : la mesure de débits par ultrasons

30 novembre 1978 Paru dans le N°29 à la page 49 ( mots)
Rédigé par : P. ZANCHETTA et F. TRUTTMANN

La mesure par ultrasons d’un débit liquide dans une tuyauterie demande une électronique stable, précise et avancée. C’est pourquoi, bien que l'idée ne soit pas nouvelle, cette méthode n’a pu être réalisée, techniquement et économiquement, qu’à partir des années 1970-1975 au moyen d’appareils de mesure industriels robustes et fiables, faisant largement appel aux circuits intégrés à très grande rapidité de transmission.

Cette méthode de mesure élimine bon nombre des inconvénients dont sont grevés les débitmètres conventionnels. Quant à la précision, les nouveaux appareils électroniques se classent parmi les meilleurs débitmètres traditionnels, tels les débitmètres électro-magnétiques ou ceux agissant par pression différentielle.

Le débitmètre à ultrasons :

  • — a) ne provoque pas de perte de charge,
  • — b) ne demande pas de modification du diamètre de la tuyauterie à l'endroit de la mesure, les impuretés contenues dans le liquide peuvent donc passer librement,
  • — c) ne comporte pas d’éléments mobiles et ne subit donc pas d’usure imposant régulièrement de nouveaux étalonnages,
  • — d) peut mesurer tous les liquides qui ne sont pas fortement amortisseurs du son,
  • — e) ne demande un nouvel étalonnage qu’au changement de liquide, si la viscosité du nouveau liquide et celle du liquide mesuré antérieurement diffèrent sensiblement,
  • — f) est indépendant de la vitesse du son dans le liquide, de sa conductivité, de sa pression, etc., seule l'influence de la viscosité sur le profil du flux est d’une certaine importance,
  • — g) délivre un signal de sortie linéaire sur une grande plage : depuis quelques cm/s jusqu’à un certain nombre de m/s, tant dans les tuyaux de diamètre intérieur de quelques centimètres que dans ceux dont le diamètre se compte en mètres,
  • — h) peut résister à des températures et à des pressions élevées,
  • — i) peut être monté sur la majeure partie des matériaux de tuyauterie, par exemple, sur tuyaux en acier, en béton et en plastique (chlorure de polyvinyle).

F. TRUTTMANN, Ingénieur ENSEM, DANFOSS FRANCE

CONCEPTION ET PRINCIPE DE MESURE

Dans ce qui suit seront étudiés la conception et le principe de mesure d’un type très répandu de débitmètre à ultrasons, comprenant une unité électronique et un jeu de transducteurs disposés de telle sorte que le flux de liquide ait une composante suivant la ligne droite entre les deux transducteurs.

Puisqu'il faut une certaine distance minimale entre les transducteurs, on est obligé, lorsqu’il s’agit de petits tuyaux (inférieur à 100 mm) de placer les transducteurs chacun dans un angle sur un tuyau en U, fig. 1, tandis que, pour les gros tuyaux, on peut les placer sur la paroi du tuyau obliquement l’un par rapport à l'autre, fig. 2.

La mesure proprement dite est basée sur le fait que l'un des transducteurs émet une impulsion sonore dans le sens du courant de liquide dans le tuyau. L’autre transducteur reçoit cette impulsion un temps t1 plus tard. Puis, une impulsion analogue est émise dans le sens contraire, donc à contre-courant du liquide ; cette impulsion est reçue un temps t2 plus tard. Des impulsions sonores sont émises plusieurs milliers de fois par seconde, alternativement dans le sens du courant et contre celui-ci. L'impulsion sonore se mouvant dans le sens du courant est portée par celui-ci, et son temps de transmission est donc plus court que celui de l’impulsion en contre-courant, temps qui sera prolongé en proportion.

En comparant les deux temps de transmission, on peut avoir une expression de la vitesse moyenne du liquide le long de la ligne.

[Photo : Figure 1]
[Photo : Figure 2]

parcourue par le son. En émettant le son tant dans le sens du courant que contre celui-ci, l'expression de la vitesse du débit de liquide devient indépendante des qualités du liquide.

Les deux temps de transmission seront les suivants :

Dans le sens du courant :

             L  
t₁ = ——————             (1)  
        c + v cos θ  

En contre-courant :

             L  
t₂ = ——————             (2)  
        c − v cos θ  

où L = la distance entre les transducteurs c = la vitesse du son dans le liquide stagnant v = la vitesse du flux dans le tuyau θ = l’angle entre les transducteurs et l’axe du tuyau, voir figure 2.

En résolvant ces deux équations, on obtiendra la vitesse du flux v :

             L  
v = ——————             (3)  
       2 cos θ  

Donc la vitesse moyenne ne dépend que de la géométrie du tuyau et des deux temps de transmission.

Le débit (F) peut alors être trouvé en multipliant la vitesse moyenne (v) par la section intérieure du tuyau (A).

F = v · A             (4)

Dans l’unité électronique, on fait osciller un oscillateur alternativement à une fréquence

                        1                             1  
f₁ = ——— et une fréquence f₂ = ———.  
             t₁                                 t₂  

Si ces fréquences sont portées dans l’équation (3) au lieu de t₁ et t₂, et si les équations (3) et (4) sont réunies, on a l’expression suivante du débit (F) :

             L  
F = —————— cos θ (f₁ − f₂)             (5)

Dans l’unité électronique, il faut donc multiplier la différence de fréquence (f₁ − f₂) par un facteur constant afin de pouvoir obtenir un signal de sortie analogique, par exemple de 0-20 mA ou de 4-20 mA, qui est proportionnel au débit.

Ce signal indique le débit instantané et, si on le désire, il peut être envoyé à un totalisateur pour que le débit soit totalisé.

Un exemple numérique donnera une impression de l’exactitude avec laquelle l’électronique doit fonctionner.

Exemple

Vitesse du flux v = 1 m/s  
Diamètre du tuyau D = 180 mm  
Angle des transducteurs θ = 45°  
Vitesse du son dans l’eau c = 1480 m/s  

La distance entre les transducteurs sera :

L = D/ sin θ = 180/ sin 45° = 254,6 mm = 0,2546 m  

Si l’on porte les chiffres dans les équations (1) et (2), on aura les temps de transmission suivants :

            0,2546  
t₁ = —————— = 171,92 × 10⁻⁶ s  
     1480 + 1 cos 45°  

            0,2546  
t₂ = —————— = 172,08 × 10⁻⁶ s  
     1480 − 1 cos 45°  

Les fréquences d’oscillation correspondantes f₁ et f₂ seront de :

f₁ = 5 816,77 Hz  
f₂ = 5 811,21 Hz  
f₁ − f₂ = 5,56 Hz  

On voit que la différence de fréquence, qui contient l’information sur le débit, constitue environ 1 ‰ des fréquences produites et que l’appareil a un pouvoir de résolution de 1/200 000.

Les fréquences mentionnées ci-dessus n’ont rien à voir avec celle des ultrasons émis. Le signal ultrasonore n’est produit que par le fait que le cristal piézoélectrique d’un transducteur reçoit une impulsion de tension provenant de l’unité électronique. Le cristal continuera ensuite à osciller à sa propre fréquence de, par exemple, 1 MHz pour émettre, dans le liquide, un train d’ondes exponentiellement décroissant. L’autre transducteur, qui reçoit ce train d’ondes, sera mis en oscillation et son cristal fournira un signal de tension qui sera transmis à l’unité électronique.

PRÉCISION

Comme déjà mentionné, le débitmètre à ultrasons peut actuellement être fabriqué avec une précision qui le met au rang des meilleurs types traditionnels de débitmètre.

Dans la mesure de débit par ultrasons, c’est la vitesse moyenne du flux du liquide qui est mesurée suivant la ligne reliant les deux transducteurs. Pour obtenir une mesure exacte on aurait dû mesurer la vitesse moyenne sur la section transversale du tuyau car, en effet, c’est cette vitesse multipliée par la surface de la section transversale qui donne le débit volumétrique.

Le rapport entre la vitesse moyenne sur la section transversale et la vitesse moyenne le long de la ligne des transducteurs dépend de la répartition des vitesses dans le tuyau et définit un facteur K de correction du débit dont la valeur peut varier entre K = 0,75 et K = 1,0 pour les tuyaux avec emplacement en biais des transducteurs ; c’est donc un facteur dont il faut tenir compte afin d’obtenir un résultat satisfaisant et qui est connu maintenant avec une grande exactitude.

La répartition de la vitesse dépend de la nature de l’écoulement qui est caractérisée par le nombre de Reynolds qui est égal à :

             Dv  
Re =

PROFIL LAMINAIRE, K = 0,95

PROFIL TURBULENT, K = 0,75

[Photo : Figure 3]

où D = diamètre intérieur du tuyau v = vitesse moyenne ν = viscosité cinématique

Pour un nombre de Reynolds inférieur à 2 300 dans de gros tuyaux, on a généralement un flux laminaire qui, pleinement développé avec profil parabolique de la vitesse, donne un facteur de correction K = 0,75, voir fig. 3.

Pour un nombre de Reynolds supérieur à 4 000 dans de gros tuyaux, on a un flux turbulent dont le profil de vitesse est plus plat et varie pour arriver à un facteur K = 0,90 à 0,95, voir fig. 4.

Avec une bonne connaissance du profil de vitesse dans le tuyau, il est possible de fixer exactement K et de travailler avec une inexactitude inférieure à ± 1 % de la plage totale de mesure.

Dans cet ordre d’idées, il faut s’assurer que la zone de changement entre le flux turbulent et le flux laminaire se situe dans la zone inférieure de mesure. Bien entendu, il vaut mieux que le changement n’ait pas lieu dans la zone normale, ce dont on peut s’assurer en dimensionnant correctement le diamètre du tuyau.

Diagramme KURVE

[Photo : Figure 4]

Pour les petits tuyaux où les transducteurs sont placés sur un coude en U, la perturbation provenant du premier coude dans le sens du courant détermine essentiellement le flux entre les transducteurs. Par le choix correct de la longueur du tronçon entre les transducteurs par rapport au diamètre du tuyau, on peut également obtenir des inexactitudes de mesure inférieures à ± 1 % de la pleine gamme de mesure.

EXEMPLES D’APPLICATION

Les nombreux avantages du débitmètre à ultrasons et, partant, son vaste champ d’application, auront pour effet que ce type sera de plus en plus utilisé dans le domaine du traitement de l’eau.

Installation d’épuration d’eaux usées pour une équivalence de 185 000 personnes

Amenée d'eau par temps sec : 2 250 m³/h et, par temps de pluie : 6 000 m³/h.

Trois pompes refoulent la quantité totale d'eau résiduaire dans l’installation, chaque pompe étant équipée d’un débitmètre à ultrasons qui, sur un tuyau de 500 mm de diamètre, mesure le débit de la pompe.

Le débit total des trois pompes est enregistré sur un compteur volumétrique. Le débit total est également utilisé comme signal de commande pour l’addition de boue de retour depuis les bassins secondaires aux bassins d’aération.

[Photo]

La photo de détail montre le débitmètre monté sur un tuyau vertical de mesure immédiatement après la pompe. L’élément électronique est placé sur le mur.

[Photo]

Production d'eau pour centrale électrique de 630 MW

De l'eau brute venant d’un puits est refoulée vers l’installation de traitement d’eau. Sur la conduite d'eau brute est monté un débitmètre à ultrasons qui enregistre la consommation d'eau.

L’eau traitée est pompée vers deux installations — l'une à eau sanitaire et l'autre d’eau industrielle — jusqu’aux points de consommation. Le débit des pompes est commandé progressivement en réglant la vitesse de rotation au moyen d’un convertisseur statique de fréquence.

Ce ne sont là que deux applications parmi beaucoup d'autres qui ont maintenant démontré l'intérêt de cette nouvelle méthode de débitmétrie qui met en jeu des techniques très élaborées, d'une grande fiabilité et d'une très grande économie d’exploitation tant en ce qui concerne la maintenance qu’en ce qui concerne la consommation d’énergie qui se réduit à quelques watts. C’est certainement dans l'avenir la solution qui a les meilleures chances de prendre le pas sur bien d'autres techniques.

P. ZANCHETTA – F. TRUTTMANN.

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