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Géosynthétiques : soigner la mise en oeuvre

29 mars 2013 Paru dans le N°360 à la page 57 ( mots)
Rédigé par : Christian GUYARD

Sous ce terme sont regroupés plusieurs familles de matériaux offrant différentes propriétés au premier rang desquelles l'étanchéité à l'eau mais aussi le renforcement ou encore la filtration. Les applications courantes sont couvertes par les produits actuels ; les progrès portent sur leur durabilité, leur résistance mécanique et sur la combinaison de propriétés différentes au service d'applications particulières. Quelles que soient les qualités intrinsèques des géosynthétiques mis en ?uvre, l'important est de les utiliser à bon escient et de respecter les techniques de pose.

Les géomembranes et géosynthétiques sont des produits apparus relativement récemment sur le marché, à partir des années 1960 pour les géomembranes. D’autres produits sont arrivés en France au début des années 1980 pour des procédés d’étanchéité hydro-gonflants à base de bentonite. On peut citer les ouvrages sur les lignes de métro à Lyon en 1982 ou encore Orlyval en 1985. Ils n’ont été réellement mis en œuvre sous forme de géosynthétiques bentonitiques que peu avant l’an 2000 et intégrés dans les normes en 2006 (norme NF EN 13491 puis 2009).

[Photo : Firestone propose des géomembranes EPDM en panneaux de grandes dimensions : jusqu'à 15 m x 61 m soit 930 m² sans aucun joint. Ils sont susceptibles d’être pré-assemblés en atelier.]

Dans le fascicule 67). Les géocomposites, développés depuis une quinzaine d’années, intègrent plusieurs fonctions : étanchéité, drainage, renfort mécanique du terrain… Les géogrilles sont monofonctionnelles : uniquement du renfort mécanique de terrain, une application qui se développe bien en ce moment. D’autres produits ont pour fonction principale l’anti-érosion vis-à-vis des entraînements par ruissellement d’eau ou par le vent (talus notamment).

Les matériaux sont anciens mais les produits sont jeunes si l’on compare l'expérience acquise au regard de la durée de vie souhaitée de l’ouvrage construit pour plusieurs décennies et même au-delà du siècle pour certains d’entre eux. Leur pénétration sur le marché face aux solutions classiques et plus rigides (béton, enrochements, etc.) est lente mais constante. Yves Durkheim, vice-président du Comité Français des Géosynthétiques (CFG), note que les maîtres d’œuvre sont de mieux en mieux informés sur les multiples applications des géosynthétiques. Il constate aussi une évolution marquée de ces produits vers des applications plus spécifiques, soit en composant différentes fonctions (séparation, étanchéité, renforcement) avec un seul produit, soit en s’attaquant à des cas d'application plus difficiles.

L’étanchéité : de grandes surfaces

La fonction étanchéité réalisée par certaines géomembranes est l’application la plus courante avec de grandes surfaces mises en œuvre. Tubosider propose par exemple des géomembranes élastomères EPDM destinées à la réalisation d’ouvrages de stockage : des bassins de lagunage, des réservoirs d’orage, etc. Firestone propose de son côté des géomembranes EPDM en panneaux de grandes dimensions : jusqu'à 15 m × 61 m soit 930 m² sans aucun joint. Ils sont susceptibles d’être pré-assemblés en atelier. Cultisol propose quant à elle une géomembrane EPDM assemblée par vulcanisation à chaud réalisée en usine, et ce jusqu'à 45 m × 40 m soit 1 800 m².

Les exigences sur la réalisation des centres de stockage de déchets (CSD) à forte-

[Photo : Vue du réservoir de stockage d'eau potable de Rogliano en Corse (45 000 m²). La géomembrane utilisée pour l’étanchéité du réservoir est une géomembrane PVC homogène de 1,5 mm d’épaisseur associée en usine à un géotextile non tissé en fond. La couverture est réalisée avec une géomembrane PVC armée par une grille polyester de 1,2 mm d’épaisseur. Réalisation Rénolit Alkorgéo.]
[Encart : Une profession très organisée Les géotextiles et géosynthétiques et leur mise en œuvre relèvent de quatre associations partenaires du Comité français des géosynthétiques. L’Association Française des Producteurs de Géomembranes (APRODEG) qui regroupe et représente la dizaine de sociétés productrices de géomembranes du marché français. L’Association Française des Producteurs de Géotextiles et produits Apparentés (AFPGA) qui regroupe aujourd’hui 16 sociétés. L’Association Française des Applicateurs de Géomembranes (AFAG) qui regroupe une vingtaine de sociétés. Les membres de ces associations ont le souci de la qualité des produits et de leur mise en œuvre d’où les liens étroits avec l’ASQUAL Association Qualité, accréditée par le COFRAC, pour la certification des géotextiles, des géomembranes et des services d’application de géomembranes. La démarche de qualité est particulièrement importante, d’une part vis-à-vis de la réalisation correcte des ouvrages, et d’autre part vis-à-vis des produits disponibles sur le marché. Des craintes sont exprimées par des industriels notamment vis-à-vis de produits à bas coûts et peu performants. Avec le contexte actuel d’ouverture des marchés, de négociations des prix à la baisse, d’un certain désengagement des services de l’État, les dérives sont possibles. Le renforcement des contrôles, notamment inopinés sur chantier, est un révélateur de ces craintes. À juste titre : un produit insuffisant, des malfaçons lors de la pose ne se révéleront que plusieurs années après la fin du chantier. La formation est un autre cheval de bataille du CFG. Sensibiliser les entreprises, les bureaux d'études à ces matériaux, faire passer les bons messages et combattre les idées reçues… Le CFG organise des sessions de formation. La plus récente a eu lieu à Nancy au début du mois de février en partenariat avec le CNAM et d'autres sont prévues. Les échanges d'information se déroulent aussi lors de journées techniques (Lyon en mars 2012 sur le thème de l'érosion) et bien sûr lors du congrès biennal du CFG dont la prochaine édition se tiendra à Dijon du 9 au 11 avril 2013.]
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Des géocomposites naturels ?

Synthétiques, naturels ? Surtout ne pas les opposer, selon Stéphane Couret, dirigeant d’AquaTerra Solutions. « Les géosynthétiques sont indispensables pour leur durée de vie, leur imputrescibilité, leurs propriétés mécaniques dans des ouvrages de génie civil pérennes. Par contre, on peut avoir besoin de matériaux naturels qui rempliront une fonction pour une durée limitée. C'est typiquement la protection contre l'érosion sur des berges et des talus. La protection est indispensable le temps que la végétation recolonise ces lieux, que la nature se réinstalle et que la berge, le talus soient stabilisés ». Mais le caractère multifonctionnel d'un produit anti-érosion doit primer sur une position dogmatique de “tout naturel”. AquaTerra, qui met en avant les produits biosourcés, a aussi à son catalogue des produits de synthèse. « L’important est d’apporter une solution à une situation locale, pas de vendre des mètres carrés de produits ». Le besoin en produits à durée de vie limitée se développe : une conférence sur le développement des fascines biodégradables sera prononcée à l'initiative de l'AGEBio (Association française pour le génie biologique) lors des Rencontres Géosynthétiques 2013 en avril à Dijon.

Les solutions de géocomposite contre l'érosion sont en concurrence sur le marché avec d'autres solutions comme les enrochements ou d'autres géosynthétiques. Stéphane Couret insiste sur la prise en compte du coût global d'une solution. Exemples : un enrochement a une certaine épaisseur, 70 cm par exemple. Si l'on veut enrocher et conserver la section utile du cours d'eau, il faudra éliminer cette épaisseur, qui représente un volume conséquent à évacuer et ramener autant de rochers. « Notre géosynthétique NAG G350 avec des fibres de coco, d'une épaisseur de 17 mm, remplira la fonction. Ce qui évite des travaux conséquents et leurs délais ». Idem sur la question du prix au mètre carré. Faut-il prendre un produit très bas coût (2 €/m²), difficile à poser, coûteux en main-d’œuvre (par exemple 8 €/m²) ou un produit 50 % plus cher (soit 3 €/m²) dont la pose, plus aisée, ne coûtera que 5 €/m² ? La question vaut d'être posée.

Mais la performance finale des produits, synthétiques ou naturels, dépend étroitement de la bonne qualité de l'installation. Si les caractéristiques des géotextiles et géosynthétiques sont déterminées de manière précise en laboratoire, il y a parfois des déceptions sur le terrain en raison d'une pose plus aléatoire qu'en laboratoire. De petites améliorations facilitent le travail sur le terrain comme l'explique Stéphane Couret sur un des produits de la société qui nécessite un ancrage variable selon les conditions locales (plus ou moins de fixations par mètre carré) : « En fabrication nous plaçons des points colorés (5 couleurs différentes) correspondant à 5 densités d'ancrage différentes. Sur le chantier il suffit d'indiquer à l'opérateur la couleur des points à ancrer. C'est une sécurité pour le maître d’œuvre et l'entreprise et la garantie d'une bonne mise en œuvre ». Un petit surcoût ; mais prend-on vraiment la mesure des coûts de l'érosion des terrains ? Quel est le coût réel d'une coulée de terre sur une route ? Le nettoyage certes, mais aussi la perturbation engendrée, sans parler de potentiels accidents.

Autre exemple de mise en œuvre plus économique, Covamat type 3, une couverture anti-érosive, une bionatte préensemencée. Dès la pose, elle remplit sa fonction anti-érosive mais surtout, il n’est pas nécessaire de revenir ensuite pour le semis. Les plantes reprendront lorsque les beaux jours reviennent. C'est le cas le long d'une voie ferrée à Lavaudieu (43) où 2 200 m² de talus ont été protégés suite aux terrassements en novembre 2012 qui ont créé des talus raides (1/1). À l'entrée de l'hiver, il était important de protéger immédiatement le sol, ce qui a été réalisé par déroulement des rouleaux de la bionatte par l'entreprise Bouillot BTP.

AquaTerra Solutions a très largement développé ce produit au cours de la décennie passée pour la couverture et l'étanchéité du fond et des parois. Le marché ralentit mais il est compensé par l’accroissement des exigences apportées par la directive-cadre sur l'eau vis-à-vis des ouvrages linéaires que sont les voies routières et ferrées avec une différence : ces ouvrages sont très nombreux et de petite taille (quelques dizaines à centaines de mètres carrés) à la différence des CSD.

Autre application assez courante, l'étanchéité dans les ouvrages souterrains comme par exemple les tunnels. Dans ce cas, et compte tenu des possibilités de perforation liées au poinçonnement par des pierres, la géomembrane est protégée par un géotextile. Les deux produits se posent séparément bien qu'il existe des produits composites.

Six familles chimiques sont utilisées pour ces géomembranes en France : bitumineuses (bitume oxydé et bitume modifié polymères) et polymériques (PVC plastifié, polyéthylène haute densité (PEhd), polypropylène (PP), éthylène propylène diène monomère (EPDM) qui est un élastomère). « Une géomembrane est un produit large d'au moins 1,5 m, et d’épaisseur minimale de 1 mm sur toute sa surface, soudable en continu (thermique ou vulcanisation) ou assemblé par bande autocollante » précise Paul Guinard, directeur Génie Civil et Ouvrage d’art chez Soprema et président d’Aprodeg (80 % du marché français) qui insiste sur les domaines d’application privilégiés de chacun des matériaux : « il n’existe pas de produit miracle, universel ».

[Photo : À Orléans, Maccaferri a fabriqué et fourni 30 000 m² de Macdrain W1060, un géocomposite de drainage composé d'une âme drainante tridimensionnelle en monofilaments extrudés, associée à un feutre géotextile. Ce géotextile non-tissé en polypropylène permet la filtration de fines particules et empêche la terre végétale de venir colmater la nappe drainante tandis que l'âme drainante tridimensionnelle en polypropylène assure le drainage des eaux de ruissellement.]
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[Photo : Geogrip Armatex G de Siplast est une famille de grilles de renforcement qui permet de végétaliser les bassins, cunettes ou fossés.]

Soigner la mise en œuvre des produits

Afitex, Dupont Performance Coatings, Tencate Geosynthetics France, Bonar, Maccaferri, Rénolit Alkorgeo, Sika Membranes, Intermas Geosynthetics, Siplast, Sodaf-Geo, Sol Solutions ou encore Terageos déclinent leurs gammes de produits dont les caractéristiques s’améliorent sans cesse mais sans révolution. On assiste plutôt à des adaptations de caractéristiques (largeur, souplesse, soudabilité) pour des marchés de niche (bassins aux formes compliquées). En recherche permanente d’innovation, Cultisol propose ainsi une offre inédite de conception et de fabrication de géomembrane en trois dimensions. Ces pièces d’étanchéité uniques sont entièrement assemblées par vulcanisation à chaud en usine, et ce jusqu’à 1000 m².

L’accent est mis sur les bonnes conditions de leur mise en œuvre. « Un gros effort a été réalisé sur le soudage et l’assemblage avec la qualification des soudeurs selon les catégories de produits » indique Paul Guinard qui souligne ce point critique de la mise en œuvre. L’Apodeg travaille en ce moment sur deux dossiers importants : la révision du fascicule 10, référence du CFG pour la pose des géomembranes à l’horizon mi-2014, et la rénovation du référentiel Asqual sur les performances avec l’établissement probable de seuils minimum sur les épaisseurs, la traction, qui devrait être réalisée pour mi-2013.

La pose est également au cœur des préoccupations de l’AFAG qui représente les applicateurs de membranes dont le Président, Jacques Saintot, met en avant la qualification des entreprises. Une démarche qui en est à ses débuts (deux entreprises actuellement) mais qui devrait se développer à l’instar d’autres points comme le soudage et les soudures. Des travaux sont en cours pour établir des critères de conformité d’une soudure et un référentiel admis par tous les acteurs. La chose n’est pas évidente car les conditions de mise en œuvre sur chantiers peuvent être très diverses (vent, gel, pluie...) et altérer la qualité. Ces conditions rejoignent la préoccupation de sécurité : un livret de sécurité a été édité en 2012.

Des besoins et des applications nouvelles

Une autre fonction des géotextiles est la séparation de couches de matériaux de granulométries différentes qui inclut une fonction de filtration : l’objectif n’est pas d’arrêter la circulation d’eau mais celle des matériaux pour éviter la fuite des matériaux fins vers le bas notamment en évitant des cheminements préférentiels et en répartissant les écoulements (important dans des zones de battement de nappe). Les nappes de non-tissés en différents matériaux sont utilisées.

L’étanchéité sur de grandes surfaces entraîne de facto le besoin de drainage pour évacuer les eaux bloquées, éviter leur accumulation et surtout les collecter proprement s’il y a des risques de pollution. Au niveau des centres de stockage de déchets, le drainage concerne aussi la production des gaz au premier rang desquels le méthane issu des fermentations. D’abord pour éviter son dégagement dans l’atmosphère compte tenu de son action sur l’effet

[Encart : Une fonction nouvelle : la surveillance des ouvrages Les géosynthétiques sont la plupart du temps utilisés pour des décennies, voire des siècles. Enterrés, ils ne sont plus visibles et sont soumis aux mouvements naturels des sols, aux eaux d’infiltration, voire à l’agression par des animaux fouisseurs. Si les ouvrages de génie civil en terre sont calculés de manière fine, ces calculs reposent sur des hypothèses concernant les terrains impactés, l’ouvrage lui-même et les remblais utilisés. Le réel pourra s’écarter du calcul au fil des ans. D’où l’idée d’inclure des moyens d’auscultation des ouvrages au sein du géosynthétique posé. « Ceci est possible grâce à des fibres de verre particulières. Des applications existent déjà sur des ouvrages comme les oléoducs mais Tencate Geosynthetics est la seule société à proposer cela pour les géosynthétiques » explique Olivier Artières, responsable chez Tencate de ce produit appelé Geodetect. L’intégration de la fibre optique dans le géosynthétique Geodetect est réalisée en France, dans l’usine Texinov. Plusieurs applications sont possibles avec une prédilection pour les ouvrages en terre comme les digues de barrage, les digues anti-crue et certaines zones traversées par des voies ferrées ou routières. Olivier Artières cite des chantiers réalisés : instrumentation d’une portion de voie ferrée soumise à des effondrements localisés (ligne Mouchard – Bourg-en-Bresse) ; digues le long du fleuve Jaune où Geodetect sert d’outil diagnostic pour l’étude des déplacements d’enrochements ; équipement de digues en Hollande ; rehausse d’un barrage d’un bassin de décantation sur un site minier au Pérou (hauteur 200 m) ; instrumentation du fond de forme d’un bassin de décantation d’eaux industrielles qui montrait un affaissement (Geodetect en sous-face de la membrane d’étanchéité et du géotextile de renfort installés en réparation). D’autres chantiers sont en cours, car les maîtres d’ouvrage et les exploitants de sites prennent conscience que cette nouvelle méthode leur apporte un moyen d’alerte très précoce et de suivi de l’ouvrage dans le temps. Mais cela nécessite un gros effort pédagogique selon Olivier Artières qui suit ce produit depuis une dizaine d’années. Geodetect est un système complet : la structure géotextile proprement dite, fonctionnelle (drainage, renforcement, etc.), les câbles optiques implantés dedans, l’instrumentation et les logiciels nécessaires à l’exploitation des données. Deux paramètres principaux sont mesurés : la déformation du terrain, car le géotextile et ses fibres optiques suivent les déformations, et la température. Celle-ci permet de suivre les cycles gel/dégel mais aussi des fuites d’eau locales (changement brusque de température). Deux principes sont utilisés : les réseaux de Bragg (gravés dans la fibre) et la mesure distribuée utilisant la rétrodiffusion d’une onde laser monochromatique (spectres Rayleigh et Brillouin). L’auscultation peut être faite en continu avec des équipements de demeure ou périodiquement s’il n’y a pas nécessité du temps réel.]
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de serre (25 fois celui du gaz carbonique). Ensuite pour le diriger vers une torchère ou le valoriser en électricité si les quantités sont conséquentes. Ces émissions gazeuses contiennent parfois d’autres composés organiques volatils.

Les fabricants développent et commercialisent des géosynthétiques correspondant à ces besoins. Ils incluent des drains dans leur structure comme par exemple le Somtube® d’Afitex, un empilement solidarisé d’une nappe filtrante en géotextile PP non-tissé aiguilleté, de minidrains annelés perforés selon deux axes alternés à 90°, une nappe drainante géotextile et un film PE aiguilleté. La capacité de drainage atteint 200 m³/h.

Autre produit, le géocomposite de drainage et de protection mécanique Draintube ACB d’Afitex, utilisé pour le drainage des lixiviats en fond de casier d’installation de stockage de déchets. La mise en œuvre du Draintube ACB sur le fond d’alvéole permet de drainer rapidement les lixiviats en fond d’alvéole, de protéger la géomembrane contre le poinçonnement, de réduire le volume de matériau drainant à mettre en œuvre et d’augmenter la capacité de stockage du casier. En comparaison d’une solution traditionnelle, le Draintube ACB se substitue au géotextile anti-poinçonnant placé sur la géomembrane et à 20 cm minimum de matériau drainant granulaire. La capacité de stockage du casier est ainsi augmentée de façon importante.

Ryb Composites propose le Stabilidrain®, écran drainant en revêt des chaussées (avec avis technique). Les tubes ne risquent-ils pas d’être bouchés par des proliférations bactériennes notamment en fond de CSD ? Des études ont été menées montrant que le risque est faible (cf. revue Sciences Eaux et Territoires n° 80, 2012).

La question du coût de ces matériaux et de leur mise en place doit être relativisée par les économies apportées. La récente Tour Oxygène à Lyon a nécessité un drainage sous dallage des eaux de nappes à 15 m de profondeur. La solution classique consisterait en un apport de matériaux granulaires. L’utilisation de Somtube® FTB a permis une économie de terrassement de 0,90 m donc l’économie de mise en décharge de ce volume, la réduction de la circulation de camions (centre-ville) et une réduction de 6 % des parois moulées et 3 % des trains d’ancrage.

Afitex, qui développe ce produit depuis 10 ans, a obtenu récemment un avis technique pour l’utilisation en drainage sous remblais en remplacement de matériau granulaire, ce qui, d’après Yves Durkheim, ouvre de nouveaux horizons à ces produits en rassurant les concepteurs et les entreprises.

Un autre type d’application des géosynthétiques concerne le remblai sur inclusions rigides (sorte de pieu vertical dans le sol). C’est le cas d’un chantier routier d’élargissement des voies dans une zone sensible. Il s’agit de répartir la charge en tête des inclusions pour éviter des tassements différentiels. Un chantier de ce type réalisé sur la RD 1006 à Bourgoin-Jallieu a fait appel à un tissé multifilament polyester à haut module et un géocomposite de TenCate.

Plusieurs centaines de milliers de m² de géomembrane Colatchen® SC1 ont été mis en œuvre en 2012 dans le cadre de la réalisation de l’A63 sur l’axe Bordeaux-Bayonne, entre Salles et Saint-Geours de Maremne. Le projet, en conformité avec la loi sur l’eau, imposait de réaliser des cunettes étanches pour recueillir et conduire les eaux de ruissellement de voirie jusqu’aux bassins de rétention. Colatchen® SC1 a été retenu pour ce chantier en raison de sa rapidité de mise en œuvre (absence de géotextile de protection, grandes dimensions, pose mécanisée, compatibilité avec les enrobés) qui a permis une intégration aisée au

[Encart : Le point sur la certification des produits et des pratiques Un nombre croissant de sociétés passent par l’ASQUAL pour certifier leurs produits, leurs pratiques. À fin 2012 la situation était la suivante. Certification ASQUAL – Nombre Entreprises – Nombre Produits GEOTEXTILES – 27 – 233 GEOMEMBRANES – 16 – 54 SOUDAGE – 74 – 368 RC – 31 – 88 Qualification – 2 – / Pour le soudage et la Responsabilité de chantier concernant les géomembranes, le nombre de produits correspond au nombre de certifications délivrées à des personnes pour le service de soudage ou la responsabilité de chantier. La qualification d’entreprises en est à ses débuts. Elle est comparable, dans l’esprit, à une certification ISO 9000 dans sa partie formalisation et écriture de documents. Ceci représente une charge certaine pour de petites sociétés qui mettent en œuvre les géosynthétiques et qui n’ont pas forcément les ressources à consacrer à cette certification. Les géosynthétiques ne relèvent plus de la directive “produits de construction” puisqu’elle est abrogée et remplacée par le Règlement européen n° 305/2011 du 9 mars 2011 sur les conditions harmonisées de commercialisation de ces produits. Ce règlement, qui implique une unification du marquage CE dans tous les pays européens, entrera en vigueur en France au mois de juillet 2013. Les sociétés devront donc d’ici là mettre à jour leurs documentations de produits géomembranes et géotextiles à propos de la déclaration de leurs performances et l’utilisation d’une fiche modèle type. Sur un plan législatif et normatif, les choses évolueront encore avec de nouvelles exigences essentielles relatives au développement durable : utilisation de matières premières, cycle de vie, etc.]
[Photo : Vue de l'installation de stockage de déchets de l’Espérance à la Guadeloupe avec la mise en œuvre en fond de casier du géocomposite de drainage Draintube ACB et en talus du Draintube UV Vert.]
[Photo : Géoalveoles d’AquaTerra Solutions]

phasage chantier) de sa fiabilité de mise en œuvre (masse surfacique importante évitant l’envol, soudures manuelles aisément réalisables par un personnel qualifié, contrôle des soudures associé à la pose) et de son caractère économique (largeurs adaptées au développé des cunettes évitant les découpes et les chutes). À base de bitume modifié par élastomère SBS, cette géomembrane est naturellement compatible avec les enrobés et assure une bonne étanchéité entre la bande d’arrêt d’urgence et le fossé.

Coletanche® SC1 a été mise en œuvre par soudure au chalumeau sans pose de géotextile intercalaire. Les cunettes ont pu être ainsi réalisées à l’avancement, sans crainte des intempéries. La masse surfacique importante et l'absence de géotextiles ont limité les risques d’envol des matériaux d’étanchéité, la sécurité des usagers étant ainsi préservée pendant la phase des travaux. Coletanche® SC1 a permis de réaliser une économie importante, notamment sur les coûts de main-d’œuvre et de mise en œuvre. Axter a également participé à la formation des étancheurs sur site et a assuré le contrôle des soudures sur le chantier.

[Encart : Plusieurs centaines de milliers de m² de géomembrane Coletanche® SC1 ont été mis en œuvre en 2012 dans le cadre de la réalisation de l’A63 sur l’axe Bordeaux-Bayonne, entre Salles et Saint Geours de Maremme.]

Terageos propose de son côté différents géocomposites dont certains, comme le Teradrain® et le Teracro®, sont utilisés dans les alvéoles de stockage de déchets radioactifs. Le Teradrain permet le drainage des lixiviats, des eaux du sol ou des eaux pluviales, grâce à son réseau de mini-drains incorporés entre un géotextile filtrant et un géotextile drainant. Ces mini-drains sont résistants à la compression, ce qui permet d’utiliser le Teradrain sous des remblais de plusieurs mètres de hauteur. Le Teracro® permet de maintenir la terre sur les talus, naturels ou étanchés par géomembrane, grâce à ses barrières filtrantes de 13 cm de haut et à son fond filtrant.

[Photo : Géocomposite Teracro® de Terageos, stabilisateur de talus, naturel ou étanché par géomembrane.]

Comme le souligne Jean-Luc Michaux, directeur technique de Terageos, l’innovation repose d’abord sur l’écoute des clients pour bien comprendre leurs besoins et proposer des solutions adaptées à leurs projets. C’est selon cette philosophie que Terageos a développé un géocomposite multifonction unique en son genre, le Teraplex®, qui rassemble cinq fonctions en un seul produit : antipunçonnant, drainage, renforcement, accroche terre et étanchéité. Ce produit est particulièrement adapté pour les couvertures de décharge, sur les talus, avec un seul produit à poser au lieu de cinq. Grâce à son assemblage, il évite le risque de glissement inter-couches.

Autre innovation, le TechDrain développé par Intermas Geosynthetics permet de répondre aux problématiques liées aux charges importantes appliquées sur les produits lors de leur utilisation ou lors de leur mise en œuvre lorsque de nombreux

[Photo : Vue du bassin anti-pollution de récupération des eaux de l'usine de Méthanisation IDEX à Amiens. Géotextile ACM 300 de Siplast et Géomembrane bitumineuse Coletanche ES2 d'Axter. Réalisation Proterra Environnement.]

Engins lourds doivent être utilisés. Le Tech-Drain est donc employé dans des projets d'installations de stockage de déchets, de génie civil ou lorsqu’une capacité hydraulique élevée d’écoulement est requise sous de fortes charges. Il a par exemple été mis en œuvre lors de la création d'un casier de décharge d'une hauteur totale de 44 m de déchets avec un poids spécifique de 16 kN/m³ qui exigeait un géocomposite de drainage pour la collecte des lixiviats capable de résister à une compression autour de 700 kPa. Un géocomposite de drainage tri-planaire de 5 mm à haute résistance en PEHD laminé avec deux géotextiles 120 g/m² en PP a été choisi par les concepteurs.

40 000 m² de Tech-Drain ont été installés en 2011 dans le but de recueillir les lixiviats dans le fond de l'alvéole avec une inclinaison de 2 % assurant un rendement adéquat. « La durée de vie d'une alvéole étant très longue, il est important de disposer d’un produit possédant un bon comportement au fluage pour assurer une performance optimale sur le long terme » explique-t-on chez Intermas Geosynthetics.

Une autre particularité de ce projet est que cette nouvelle alvéole n’a pas été conçue en terrassant le terrain mais en superposant les déchets au-dessus du niveau du sol, réalisant ainsi une montagne artificielle.

Globalement, selon Patrick Favand, président de l'AFPGA et directeur commercial France-Afrique de TenCate, les produits ont bien progressé en résistance mécanique et au poinçonnement. À propriétés égales, on peut utiliser des grammages plus faibles, donc aller dans le sens du développement durable en utilisant moins de matières premières.

De nouvelles fonctions se développent : détection en insérant des fils aluminium, grilles de drainage, et même la maîtrise de la végétation sur le réseau ferroviaire qui a fait l'objet de réalisations et d’études entre DuPont Performance Coatings et la SNCF.

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[Photo : Une grille à très haute résistance pour protéger les réseaux enterrés.]

Les géotextiles assèchent également

Le séchage de boue intervient souvent dans le traitement des eaux ou de zones de dragage dont les sédiments sont souvent pollués. Il existe des solutions mécaniques (filtres, centrifugeuses, presses, etc.) efficaces mais lourdes à mettre en œuvre. Deux sociétés proposent des produits spécifiques faciles à mettre en œuvre : TenCate et son Geotube™, Maccaferri et son MacTube™. Il s'agit de géotextiles dotés de propriétés mécaniques (résistance à la traction) et filtrantes spécifiques sous forme de longs tubes de quelques décimètres à plusieurs dizaines de mètres en circonférence et de longueur ajustable, parfois sur plusieurs dizaines de mètres. Ils sont disponibles en dimensions standard et sur mesure. Le remplissage s'effectue par tuyaux souples. L'essorage en tube se fait instantanément et la durée du chantier est plus courte, ce qui se traduit par des gains économiques, écologiques et sociaux. La boue, dont le volume a été très réduit, est chargeable par tractopelle. Pour accélérer le processus, on peut ajouter des polymères facilitant la floculation et l'agglomération des solides. Le dispositif est entièrement passif donc économique. TenCate cite comme références le port de Honfleur (25 000 m³ de boues traitées), un port industriel aux Pays-Bas (18 000 m³), etc.

[Photo : MacTube de Maccaferri est un système de confinement géosynthétique constitué d’un géotextile tissé à haute résistance à la traction. Ses nombreux avantages en font un système idéal pour le traitement des boues.]

La souplesse de cette mise en œuvre ouvre un autre usage : la réalisation rapide de barrages et plateformes provisoires lors de travaux (tube simple ou empilement de plusieurs tubes de diamètres différents), des protections locales anti-érosion sur plusieurs centaines de mètres de rivages maritimes. TenCate a même développé un système de largage précis aux endroits immergés de leurs Geocontainer™ moyennant des barges à clapet pour construire des structures maritimes jusqu'à 20 m de profondeur. Laissés à demeure, ces ouvrages « mous » deviennent des refuges et des ancrages pour la réinstallation d'espèces végétales et animales. Pour rester dans l'esprit tube mais en utilisant des rochers et non du sable ou des boues, AquaTetra Solutions propose les Rock rolls : des filets cylindriques que l'on remplit sur place pour réaliser des protections par juxtaposition et empilement de tubes. Le filet a l'avantage de solidariser les blocs de pierre et de résister à des courants assez forts. Également pour l'assèchement et surtout la dépollution des boues, vases, sols, les géotextiles sont utilisés par Phytorestore dans son dispositif de jardins filtrants qui transforment ces boues en « néosols » réutilisables après le processus.

Réseau Ferré de France, en alternative à l'utilisation de désherbants, Cofreder et NTP d'Axter permettent également de réaliser les étanchéités sous les voies ballastées. Très résistant au poinçonnement, ce système se pose sans géotextile de protection et permet également de s'affranchir des traitements phytosanitaires le long des voies.

MDB Texinov, industriel français spécialiste depuis 25 ans des géosynthétiques de renforcement, vient de compléter début 2013 ses gammes Notex® pour les grilles et Geoter® pour les composites par une grille à très haute résistance (60 tonnes en traction) destinée à protéger les canalisations enterrées des coups de pelle. Ce produit de haute qualité est en cours de certification par l'ASQUAL. Présenté en rouleau, il est beaucoup plus facile à poser en tranchée que les plaques polymères utilisées. Cette société réalise des produits très spécifiques et très résistants par le procédé « warp knitting » (tricotage en chaîne) en utilisant des matériaux variés (polypropylène, aramide, polyester haute ténacité, etc.).

[Photo : Membrane EPDM 3D Cultiplast. Les structures alvéolaires ultralégères destinées à la rétention d’eaux pluviales font appel à de nombreux géosynthétiques (géotextile filtration et/ou protection, géomembrane…).]

De nombreux programmes de recherches

Les géosynthétiques font l'objet de nombreuses recherches tant pour les qualifier que pour développer de nouvelles applications. L'université de Münster a par exemple réalisé des essais de performances sur géo-matelas anti-érosion sur différents produits avec un simulateur de pluie et des pentes différentes de talus. Le projet Durageos étudie les mécanismes de vieillissement des géosynthétiques dans les installations de stockage de déchets (PEhd et géosynthétiques bentonitiques).

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qui doivent durer plus d'un siècle. Le vieillissement des géofiltres étudié dans le cadre du projet DrainAgeing lancé en 1993 donne lieu quant à lui à des études devant durer plusieurs décennies.

Geo-Inov est un autre projet de type collaboratif qui rassemble sept membres du CFG sous la houlette de MDB Texinov. Porté par Marie Tankéré, responsable du projet, il rassemble quatre industriels (MDB Texinov, Afitex, Bihr, Egis Géotechnique), des laboratoires de recherche (IFTH, CNAM, 3SR), des collectivités territoriales et les pôles de compétitivité Techtera et Fibres au sein du dispositif FUI (Fonds unique Interministériel). D’un montant de 7,5 M€ sur trois ans, il mobilise une cinquantaine de personnes. Son objectif est de confirmer le bénéfice environnemental des géosynthétiques en matière de génie civil.

Des expériences en grandeur réelle sont en cours. Elles serviront à mettre au point de nouveaux produits pour des sols particuliers : sols karstiques, risques de fontis, sols basiques. Mais aussi à valider des méthodes de calculs et à développer des méthodes de tests et d’essais pour les laboratoires qui ont la charge de qualifier les produits. Le programme doit s’achever en 2014.

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