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Expertise de site, méthodologie: analyse multi critères

30 janvier 1992 Paru dans le N°151 à la page 45 ( mots)
Rédigé par : Philippe SALMON

La production de biogaz dans les CET recevant des ordures ménagères est un phénomène naturel ; La récupération de gaz a débuté pour des raisons de protection de l’environnement et de nuisances olfactives. Aujourd’hui, se greffe un nouveau critère : la mise en sécurité. Afin de juger de l’opportunité d’un captage actif par soutirage, il est important de mettre au point une méthodologie d’expertise de site en vue de hiérarchiser sur une échelle multi-critères le potentiel « risque » de différents sites.

Méthodologie

Analyse multi-critères

— FD Conseil

La production de biogaz dans les CET recevant des ordures ménagères est un phénomène naturel ; La récupération de gaz a débuté pour des raisons de protection de l’environnement et de nuisances olfactives. Aujourd’hui, se greffe un nouveau critère : la mise en sécurité. Afin de juger de l’opportunité d’un captage actif par soutirage, il est important de mettre au point une méthodologie en vue de hiérarchiser sur une échelle multi-critères le potentiel « risque » de différents sites.

Un site se caractérise par la coexistence :

  • • de sources d’émissions ponctuelles dont l’odeur est souvent très intense à proximité immédiate telles que buses, torchères, fissures...
  • • de surfaces parfois non recouvertes qui ne paraissent pas intrinsèquement émettrices d’odeurs fortes.

Un diagnostic subjectif basé sur les perceptions au voisinage immédiat des sites tend à surestimer l’importance des sources ponctuelles et au contraire, à minimiser celles des sources intrinsèquement peu odorantes, mais qui ont une grande surface d’échange avec l’atmosphère.

La détermination des actions à mener en priorité pour réduire la notion de dangers ou de pollution atmosphérique nécessite donc l’estimation et la comparaison des critères multirisques caractéristiques du site considéré.

Ce travail nous a permis de déterminer une meilleure approche des risques dus au biogaz d’un CET, généralement de classe II, par une utilisation aussi rationnelle que possible de l’information de terrain grâce à deux moyens :

  • • une expertise au travers de critères jugés prépondérants pour la production de biogaz,
  • • une définition des recommandations à prescrire pour remédier aux troubles qui seraient décelés par cette étude.

Pour cela, nous avons adopté la démarche suivante pour la mise au point de cette méthodologie :

  • — Définition des critères à risques,
  • — Enquête destinée à rassembler les documents techniques déjà existants ou bien faisant appel à la « mémoire » des exploitants,
  • — Analyses et synthèses de ces documents en vue de hiérarchiser sur échelle multi-critères le potentiel « risque » des différents sites.

Définition des critères

L’analyse de l’ensemble des éléments d’information recueillis lors de la réalisation de cette étude (figure 1) permet de hiérarchiser l’importance des phénomènes qui interviennent dans la génération des risques dus au biogaz et de définir, en fonction des possibilités techniques et économiques d’application, une stratégie globale d’action, étalée dans le temps.

Les critères (figure 2) sont classés en huit centres d’intérêts :

  • Potentiel biogaz,
  • Infrastructure de captage,
  • Méthode d’exploitation,
  • Géologie du sous-sol,
  • Morphologie du site,
  • Nature de la couverture,
  • Climatologie,
  • Localisation urbaine/rurale.

Ces critères ou centres d’intérêts sont affectés de coefficients multiplicatifs. Nous avons arbitrairement imposé un coefficient en fonction de l’importance estimée des impacts mis en jeu.

[Photo : Fiche de renseignements.]

Chaque type de critère.

Ils ébauchent le principe de la méthode, et peuvent être évolutifs et donc discutés.

Chaque critère est constitué par un état bien particulier qui le caractérise. Chaque état est affecté d’un système de « + », de « 0 » ou de « – » suivant que son influence renforce l’idée de risque ou bien la diminue. Ainsi nous déterminons une échelle multi-critères. Bien sûr, ces notes imposées ne doivent pas être tenues pour définitives. Elles permettent de situer chaque cas par rapport à un autre. Toutefois, nous précisons que lors de cette évaluation nous n’avons pas considéré la qualité de combustion lorsque les torchères sont présentes sur le site ; de même la qualité du biogaz n’est pas un critère à noter dans cette expertise (du moins pour l’instant).

Méthode

Le diagnostic que nous avons porté sur le site qui fait l’objet de cette étude s’est déroulé sur plusieurs mois. Nous avons rédigé une fiche de renseignements (figure 1) de manière synthétique, pour faciliter la lecture et le dépouillement rapide des résultats.

Potentiel biogaz

Le coefficient multiplicatif est de l’ordre de 4. C’est en effet à notre avis le critère de base et le plus important dans l’éventualité de nuisances olfactives. Bien sûr, cet élément est basé sur la nature des déchets réceptionnés et enfouis.

Seulement OM+++
Mélange OM + DIB++
Mélange OM + DIB + DIS+
Mélange DIB + DIS0

Infrastructure de captage de gaz

Le coefficient multiplicatif est de l’ordre de 3. La législation française ne préconise que la mise en place de drains verticaux montés au fur et à mesure de l’exploitation, ou de drains horizontaux enfouis dans la masse de déchets. Le gaz doit être éliminé par brûlage. Afin de résumer la situation existant en France, les infrastructures de dégazage sont classées en quatre catégories :

Inexistante+
Inexistante justifiée0
Existante passive0
Existante active

Mode d’exploitation

Le mode d’exploitation d’un CET influe notablement sur une production de biogaz. Ce centre d’intérêt est affecté d’un coefficient 3. Nous avons considéré les modes connus en France à savoir :

Site compacté
Site broyé de grande épaisseur (> 5 m)+
Site compacté de faible épaisseur0
Site non compacté0

Géologie

La géologie du sous-sol a une action déterminante sur la possibilité d’engendrer les risques. Ce thème est affecté d’un coefficient 2 ; en effet, la géologie n’influe pas directement sur la produc-

[Photo : Fig. 2 : Critères d’expertise.]

tion de gaz mais introduit une notion de risque aux alentours d’un CET (rappelons que divers cas relatifs à des explosions ont été recensés à travers l’Europe).

Pour la clarté de l’enquête, quatre grandes catégories de nature de sous-sol ont été considérées :

Argile0
Autres+
Sable++
Graviers+++

Morphologie du site

Hormis la notion du risque lié à l’impact visuel, la morphologie du site est importante quant aux risques entraînés par des migrations gazeuses latérales. Pour cela, nous avons considéré trois grandes catégories :

Ancienne carrière++
Carrière avec talus+
Tumulus0

Nature de la couverture

La couverture est un élément majeur pour engendrer une étanchéification de l’ensemble du site. Certes, si la qualité est un facteur de bonne reprise pour la végétation, il n’en va pas de même pour le risque lié au biogaz produit par le site. En effet, si le biogaz n’est pas capté par une infrastructure correcte, une accumulation peut se produire à l’intérieur du site et provoquer une migration vers un matériau plus poreux qui, suivant la morphologie du CET, pourra perturber les alentours.

On distinguera donc :

Argile+
Même nature que le sous-sol0
Inexistante/perméable

Climatologie — Localisation

La fermentation méthanique se trouve influencée par divers facteurs. L’humidité est un élément capital pour provoquer le démarrage de la production de biogaz.

La localisation d’un site au nord d’une ligne Bordeaux/Lyon, où la pluviométrie est distribuée de manière plus uniforme, sera considérée comme un élément favorisant la fermentation méthanique :

Nord+
Est+
Ouest+
Sud0
[Photo : Fig. 3 : Synthèse des résultats.]

Tableau I

Valeurs Appréciation du site
0 < X < 8 Bonne prévention des risques
9 < X < 18 Quelques lacunes : certaines précautions sont à conseiller
19 < X < 30 Situation préoccupante : un diagnostic plus fin doit être mis en place

dans un périmètre inférieur à 200 m du site. Mais des cas exceptionnels sont parfois rencontrés. Des locaux sont également installés pour le personnel travaillant sur le site ; nous devons donc examiner ces conditions afin de savoir si elles constituent des cas atypiques de dangers.

Habitations sur site++
Localisation inf. à 200 m+
Localisation sup. à 200 m0

Autres particularités

La multiplicité des cas nous empêche d’établir ici une liste exhaustive. Voici quelques éléments qui peuvent être rencontrés sur ou à proximité de cer-

tains centres. Ces situations exceptionnelles sont des facteurs favorisant le risque d'à une migration incontrôlable des biogaz :

  • Anciennes galeries souterraines
  • Canalisations diverses aux abords ++
  • Instabilité géotechnique
  • Maison sur sous-sol non ventilé +

Chaque particularité a été notifiée par le responsable de l’exploitation lorsque le cas se présentait.

De ces notations, nous pouvons établir un tableau d’appréciation des risques dus au biogaz et classer les sites en fonction du bilan total des notes.

Résultats

Afin de simplifier l'étude qui a été réalisée, nous citerons à titre d’exemple, trois sites (X, Y, Z) qui sont représentatifs pour chaque catégorie. La synthèse des résultats est visualisée dans la figure 3. Cette méthodologie met en évidence des points particuliers caractéristiques de chaque site.

Le résultat total relevé sur le site X est de 26, il est donc classé, d’après notre méthodologie, parmi les sites possédant certaines carences pour lesquelles nous relevons une lacune au niveau de l’infrastructure de captage par rapport au fort potentiel biogaz que révèle le site. Sa morphologie et sa localisation en zone urbaine contribuent à augmenter les risques liés au biogaz.

Cette méthode nous permet d’appréhender d’un point de vue global la problématique de certains sites. Pour tous ceux appartenant à cette catégorie, un diagnostic plus fin doit être réalisé.

Le résultat obtenu sur le site Y est de 16. La synthèse faite, il ressort de façon prioritaire que la géologie du site est la principale source de risques éventuels. La mise en place d’une ceinture drainante périphérique permettant la collecte du biogaz pourrait diminuer de façon importante tout risque lié à une migration latérale de gaz.

Le site Z, avec un résultat de 7, est un site dans l'ensemble bien géré en matière de risque lié au biogaz.

Conclusion

Le tableau donne une classification des sites en fonction des résultats relevés.

À terme, cette expertise aboutit donc à une appréciation des CET concernant l’estimation des risques dus au biogaz. De là, l’observateur peut dégager un diagnostic général du site, complété par un commentaire qui mettra en relief telle ou telle particularité. L’analyse finale peut déboucher sur des conseils ou recommandations afférents à l’exploitation du site, des analyses complémentaires de biogaz, des mesures préventives sérieuses (afin d’éviter ou de supprimer les risques) et, pourquoi pas, une révision de l’arrêté préfectoral suite à la révélation de lacunes administratives pouvant nécessiter un arrêté complémentaire.

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