Your browser does not support JavaScript!

Etude prospective de l'amélioration de la filière de traitement du Mont Valérien

30 septembre 1982 Paru dans le N°67 à la page 27 ( mots)
Rédigé par : Jean CHIESA

Une étude visant à perfectionner le traitement de l'usine d'eau potable du MONT VALÉRIEN a été menée de juin 1978 à février 1980.

L'étude principale avait pour but d'évaluer l'intérêt que présente le couplage d'un traitement physico-chimique classique et d'une filtration lente dont les installations existaient au MONT VALÉRIEN. Cette étude a été menée par le Syndicat Intercommunal de la presqu'île de GENNEVILLIERS pour le service public de l'eau, dont la COMPAGNIE DES EAUX DE BANLIEUE est le concessionnaire, avec l'aide financière de l'AGENCE FINANCIÈRE DE BASSIN « SEINE NORMANDIE ».

La LYONNAISE DES EAUX qui effectuait les analyses nécessaires à cette étude a proposé au Syndicat, au début de l'année 1979, de compléter l'étude initiale par des essais comparatifs entre la filtration lente utilisée en deuxième étage, et la filtration rapide. Ce complément d'étude a aussi reçu l'aide financière de l'AGENCE FINANCIÈRE DE BASSIN « SEINE NORMANDIE ».

L'ensemble des résultats a permis de définir les modifications qui pourraient être apportées aux installations de l'usine du MONT VALÉRIEN.

DESCRIPTION DES INSTALLATIONS DU MONT VALÉRIEN

En 1904 une première installation de filtration lente est aménagée au MONT VALÉRIEN selon le procédé CHABAL. Cette installation comprend deux séries de quatre dégrossisseurs (en parallèle), des préfiltres, et 18 filtres lents. La capacité nominale à l'origine est de 35 000 m³/jour.

Par la suite, l'accroissement de la demande en eau a nécessité des extensions :

  • — en 1950, l'installation de filtration lente CHABAL est agrandie d'une nouvelle série de dégrossisseurs en parallèle aux deux premières et d'une batterie de douze filtres « semi-lents » de 50 m² chacun. Ces filtres semi-lents sont construits comme des filtres rapides avec un lavage à l'eau et à l'air. Du fait de ces transformations, la capacité de la station est portée à 100 000 m³/j (80 000 m³/j pour les filtres lents et 20 000 m³/j pour les filtres « semi-lents »).
  • — en 1960, une chaîne de « filtration rapide » DEGREMONT est mise en service, assurant une production de 50 000 m³/j. Cette installation comprend deux pulsators en parallèle, suivis de 12 filtres rapides. La chaîne normale fait appel à :
    • * une préchloration au break point,
    • * une floculation au sulfate d'alumine avec alginate de soude,
    • * une adjonction de charbon actif,
    • * une filtration sur sable,
    • * un traitement bactéricide final au bioxyde de chlore.

OBJECTIF DE L'ÉTUDE

L'usine de traitement d'eau de Seine du MONT VALÉRIEN comportait donc deux installations fonctionnant de manière indépendante et fournissant un produit fini de caractéristiques conformes aux normes de qualité actuellement en vigueur et de qualités organoleptiques satisfaisantes. Toutefois ces deux filières de traitement pouvaient comporter des limites en ce qui concerne certaines formes de micro-pollution et, dans la perspective de la mise en application des nouvelles normes françaises, une amélioration des performances obtenues devait être recherchée.

[Photo : Filtration rapide sur sable après coagulation et décantation dans un Pulsator.]

SCHÉMA INITIAL DE L'ÉTUDE

La solution envisagée au départ était de coupler le traitement physico-chimique de la chaîne DEGREMONT et l'effet biologique de la filtration lente en mettant les deux installations en série. Si cette solution était retenue en définitive, et afin de conserver dans un stade ultérieur la capacité nominale de l'usine, soit 150 000 m³/jour, avec une marche simultanée de 15 filtres lents sur 18, la vitesse de filtration dans les filtres lents devait être portée à 15 m/jour.

Le pré-traitement physico-chimique choisi pour les essais était celui de la filière DEGREMONT mais sans la préchloration pour éviter la formation d'organohalogènes et sans l'adjonction de charbon actif en poudre, soit une floculation au sulfate d’alumine, coagulation-décantation dans les pulsators, suivie d'une filtration rapide sur sable.

Le post-traitement se composait a priori d'une filtration lente sur un support à préciser, précédé ou non d'une pré-ozonation à faible taux (1 ppm).

Les différents supports envisagés étaient des bicouches constituées de :

1) 15 cm de charbon actif  
   (taille effective Ø = 1 mm)  
   + 65 cm de sable  
   (taille effective Ø = 0,5 mm)

2) 15 cm de charbon actif  
   (taille effective Ø = 0,6 mm)  
   + 65 cm de sable  
   (taille effective Ø = 0,5 mm)

3) 30 cm de charbon actif  
   (taille effective Ø = 1 mm)  
   + 50 cm de sable  
   (taille effective Ø = 0,5 mm)

4) 15 cm de biolite  
   (taille effective Ø = 1,8 mm)  
   + 65 cm de sable  
   (taille effective Ø = 0,5 mm)

Afin de limiter les comparaisons à faire, l'étude était divisée en deux phases : pendant les six premiers mois, on se limitait à comparer l'efficacité des différents supports ; la deuxième phase d'étude (un an), adaptée en fonction des premiers résultats, devait venir préciser la comparaison des supports et déterminer la nécessité de pré-ozoner.

L'usine fonctionnant pendant toute la durée de l'étude, les traitements testés pouvaient être comparés à la filière CHABAL, et en été lorsqu'elle fonctionnait à la filière DEGREMONT (pré-chloration, floculation, adjonction en charbon actif en poudre, décantation, filtration).

Il n’était au départ pas nécessaire de construire des pilotes, les filtres semi-lents étant affectés à l'étude ; l'un de ces filtres était utilisé en filtration rapide, quatre autres étant transformés en filtres lents (15 m/jour). (Voir figure ci-dessus.)

RÉSULTATS DE LA PREMIÈRE PHASE D'ÉTUDE

a) Pré-traitement physico-chimique

Le pré-traitement lui-même (floculation, décantation, filtration rapide sur sable) s'est déjà avéré très efficace. L'abandon de la pré-chloration est compensé par une activité bactérienne intense qui en particulier nitrifie l'ammoniaque d'abord dans le décanteur lui-même, ensuite dans le filtre rapide. À la sortie de ce dernier, les teneurs en ammoniaque sont inférieures à 0,1 mg/l en été, et à 0,5 mg/l en hiver.

Les phosphates sont eux aussi éliminés en majeure partie, les teneurs de l'eau étant inférieures à 0,2 mg/l après pré-traitement.

Les polluants minéraux présents dans l'eau (zinc, plomb, cuivre, chlore) sont bien éliminés et leur niveau atteint, après la première filtration, le seuil de détection des appareils de mesure, les abattements étant respectivement de 90 %, 50 %, 50 % et 60 %.

Les paramètres de pollution organique (C.O.T., oxydabilité au permanganate, densité optique, S.E.C., fluorescence, azote kjeldahl) sont réduits avec des abattements allant de 30 % à 70 %.

Pour certains micro-polluants (hydrocarbures, H.A.P.) l'élimination est totale, pour d'autres (lindane, chlore organique) partielle.

[Photo : Figure 0 : Schéma expérimental – 1ère phase]

Pompe de reprise d'eau brute : Q = 250 m³/h (fonctionne en cas d’arrêt de la station de pompage d'eau brute en Seine)

Pulsator

Q = 250 m³/h (arrivée de la station de pompage d'eau brute)(utilisé comme réserve d'eau brute) — Trop plein Q = 50 m³/h

FILTRES LENTS

Nombre : 4Surface filtrante par filtre : 50 m²Vitesse uniforme de filtration : 15 m/jour

Pompe de reprise Q = 150 m³/hEau filtrée (vers stérilisation) :

Trop plein Q = 50 m³/h

Filtre rapide 50 m²Vitesse 14 m/h

NB. En 1er Stade l'eau filtrée aboutit sur chaque filtre lent sans être ozonée.

Matériaux filtrants :

filtre 7 filtre 9 filtre 10 filtre 12
Sable (granulométrie 0,5 à 3 mm) hauteur de couche en cm : — 65 — — 55 — — 60 — — 65 —
Charbon actif (0,25 à 1 mm) : — 15 — — 15 — — 30 — — 15 —
Charbon actif (1 à 3 mm) : — — — — — — — 5 —
Biolite (2 mm à 6 mm) : — * — — * — — — — — — —
Total épaisseur couche filtrante en cm — 80 80 80 80

TABLEAU 1

Pourcentage élimination de la pollution organique par les différentes chaînes de traitement.

b) Filtration lente

La filtration lente complète bien le pré-traitement : ainsi pour le bicouche le plus efficace, composé de 15 cm du charbon de fine granulométrie, l'abattement complémentaire est de 25 % pour le C.O.T., de 40 % à 50 % pour la densité optique, la fluorescence, l'oxydabilité du permanganate. Les pesticides et le chlore organique sont totalement éliminés. Enfin, le seuil de goût tombe à 2 à la sortie du bicouche. (Voir tableau 1.) En moyenne, Ecart-type, n : nombre de mesures.

[Photo : A droite : filtre rapide sur sable. A gauche : filtres lents monocouche et bicouche.]

DEFINITION DE LA DEUXIEME PHASE D'ETUDE(ET DE L'ETUDE COMPLEMENTAIRE)

À la suite des six premiers mois, le bicouche composé de 15 cm de charbon actif de fine granulométrie s'était avéré le plus efficace.

  • — fallait-il pré-ozoner avant la seconde filtration ?
  • — quels étaient les parts respectives entre la filtration, l'adsorption et l'effet biologique ?
  • — enfin l'efficacité du bicouche composé de charbon n'était-elle pas uniquement due au contact de l'eau avec le charbon, la filtration lente n'ayant en fait pas d'effet réel ?
[Photo : Ozoneur d’essai.]

Pour tenter de répondre à ces trois questions, les dispositions adoptées pendant la deuxième phase d'étude furent les suivantes :

  • — deux des filtres lents seraient équipés de sable, l'un des deux filtres recevant de l'eau pré-ozonée ;
  • — les deux autres filtres seraient composés de bicouches charbon/sable, l'un d'eux étant précédé d'une pré-ozonation.

Cette disposition devait permettre de contrôler l'efficacité de la filtration sur bicouche, d'essayer de préciser la nature de son efficacité par comparaison à la filtration sur sable et d'évaluer l'action de l'ozone.

[Photo : Tours de contact pour ozonation.]

Pour pouvoir vérifier si l'effet du bicouche était dû ou non au temps de contact, on construisit trois filtres rapides pilotes de 2 m de haut et 0,25 m de diamètre dans lesquels la vitesse devait être réglée pour y assurer le même temps de contact eau/charbon que dans les bicouches. Un quatrième filtre pilote identique fut construit et équipé d'un bicouche ; la vitesse de filtration y était de 15 m/jour, soit celle des bicouches lents ; il devait servir à contrôler que

[Figure C-0 : DEUXIÈME PHASE D’ÉTUDE]

Dans tous les filtres à sable, le sable employé est de granulométrie 0,3 à 3 mm.

Les trois filtres rapides furent équipés de charbons différents :

PKST 0,25-1 (charbon utilisé pour les bicouches lents)

CHEMVIRON F 400

NORIT ROW 0,8 Supra.

Tous les filtres rapides recevaient de l’eau ozonée.

RESULTATS DE LA DEUXIÈME PHASE D’ÉTUDE

a) Filtration lente

L’ozone réduit la pollution organique. Cependant, si elle permet d’éliminer en moyenne 25 % de l’oxydabilité au permanganate, 40 % de la densité optique et 55 % de la fluorescence, par contre, elle n’abat le carbone organique que de 5 %. L’ozonation a donc surtout pour effet de modifier la structure des molécules organiques et, d’une façon générale, de réduire leur taille.

Le bénéfice du traitement à l’ozone est conservé de la même façon par la filtration sur sable et sur bicouche, et il n’y a ni amplification ni réduction de l’action de ces filtrations du fait de la pré-ozonation.

La filtration sur bicouche étant plus efficace que la filtration sur sable, la filière la plus performante est donc celle qui cumule l’ozonation et la filtration sur bicouche.

Lorsque l’on compare l’élimination du carbone organique total par la filtration sur sable et la filtration sur bicouche, on s’aperçoit que, si le bicouche est plus efficace pendant six mois, après ce laps de temps l’efficacité du bicouche vis-à-vis de ce paramètre tend à se rapprocher de celle du filtre lent à sable. La supériorité du bicouche ne semble donc due qu’aux phénomènes d’adsorption.

b) Filtration rapide

La miniaturisation des filtres n’a pas entraîné de biais dans l’étude. En effet, à la sortie du filtre bicouche pré-ozoné et du filtre miniature lent, la qualité de l’eau est la même tant au point de vue de la pollution organique que de la nitrification biologique, par exemple.

TABLEAU II

Pourcentage d'abattement.

comparer les résultats de la filtration lente et de la filtration rapide.

Quand on compare l'efficacité de la filtration rapide en second étage et de la filtration lente sur bicouche, on s’aperçoit que si au niveau bactériologique ou organoleptique l'eau est sensiblement la même à la sortie des filtres, par contre, la pollution organique est mieux éliminée par les filtres rapides (cf. tableau II). Cependant en période froide (< 5 °C), lorsque la nitrification se fait relativement mal au niveau du pré-traitement physico-chimique, l'ammoniaque restant n'est pratiquement pas éliminé par les filtres rapides et en tout état de cause moins bien que par les filtres lents.

CONCLUSION

Contrairement à l'idée que l'on avait eue au départ de coupler les installations existantes pour effectuer un pré-traitement composé d’une floculation (sulfate d’alumine) ; coagulation décantation ; filtration rapide sur sable ; suivi d'une ozonation puis d'une filtration lente sur bicouche charbon/sable, il semble plus efficace de faire suivre le pré-traitement d'une ozonation à faible taux, puis d’une filtration rapide sur charbon actif en grain.

Il est cependant nécessaire d’avoir en secours une installation de chloration au break point pour éliminer l'ammoniaque restant en période froide.

À la suite de ces essais le Syndicat a décidé de modifier la filière de traitement de l'usine du MONT VALERIEN en conséquence.

[Publicité : GUINARD CENTRIFUGATION]
Cet article est réservé aux abonnés, pour lire l'article en entier abonnez vous ou achetez le
Acheter cet article Voir les abonnements