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Étude expérimentale de la distribution des temps de séjour dans le réacteur anaérobie de traitement des eaux usées

29 octobre 2018 Paru dans le N°415 à la page 187 ( mots)
Rédigé par : Hichame IHMAINE de Laboratoire de Génie Civil Structure Traitement..., Jaouad ELGHABI de Laboratoire de Génie Civil Structure Traitement..., Ali TARFAS de Laboratoire de Génie Civil Structure Traitement... et 2 autres personnes

Le présent article s’inscrit dans le cadre de l’amélioration du fonctionnement du Réacteur anaérobie pour le traitement des eaux usées domestiques situé à l’Institut Agronomique et vétérinaire Hassan II. Cette étude est consacrée aux paramètres hydrodynamiques caractéristiques du réacteur anaérobie, elle vise principalement la détermination de la distribution des temps de séjours. Le but est la vérification de l’absence de court-circuit ou de volumes morts au sein du réacteur. La méthode de traçage a été faite sur une maquette installée au laboratoire en utilisant le Chlorure de Potassium (KCl) comme traceur avec une injection de type Dirac dans un temps très court. Les résultats obtenus montrent que?: • Les temps de séjour moyens sont très proches des temps de séjours théoriques ce qui confirme qu’il n’y a pas de volume mort ni de court-circuit dans le réacteur. • Le réacteur anaérobie cylindrique peut être assimilé à un écoulement en cascade à deux réacteurs en série.

L’ amélioration des performances dans un réacteur repose sur la combinaison de l’hydrodynamique et des cinétiques réactionnelles.
Pour déterminer le comportement hydrodynamique, nous allons utiliser une méthode de génie chimique qui se base sur le concept de la distribution des temps de séjours (DTS). La DTS est un outil simple et important. Elle permet la caractérisation de l’écoulement hydraulique et par conséquent la détermination du modèle de réacteur qui correspond le mieux à l’installation étudiée. La notion de distribution des temps de séjour (DTS) est utilisée pour caractériser l’hydrodynamique d’un réacteur chimique. Elle permet de :
  • Diagnostiquer la présence de zones stagnantes
  • Etablir un modèle d’écoulement hydrodynamique qui facilite le calcule les performances chimiques.

Matériel et méthode

Principe de la méthode de Traçage
La méthode consiste à disposer en amont du réacteur un injecteur de traceur et immédiatement en aval un détecteur du traceur utilisé.
L’injection doit se faire sans perturber l’écoulement du fluide et le traceur choisit ne doit pas changer les caractéristiques rhéologiques des fluides réactants .
Fig. 1: Dispositif  expérimental du réacteur 
1 : Bac d’eau ;   2 : Pompe ;  3 : La seringue de la solution ; 4 : Le réacteur ; 5 : La prise d’échantillonnage  

La distribution de temps de séjour est une approche statistique valable dans les conditions suivantes :

  • L’écoulement est en régime permanent
  • L’écoulement est ‘’déterministe’’ (absence de basculements de filets ou de tourbillons)
  • Le fluide est incompressible
  • L’écoulement se fait par convection forcée, sans diffusion ni mélange en retour
  • Les conduites d’entrées/sorties sont de petit diamètre devant les dimensions du réacteur
La géométrie du réacteur
La station d’épuration utilisée est implantée à la ville de Rabat qui est située au Nord Ouest de Royaume du Maroc. Et plus particulièrement dans l’Institut Agronomique et vétérinaire (IAV) de Rabat. Cette station épure les eaux usées domestiques par une succession de deux unités à savoir : Post-Prétraitement : Réacteur anaérobie et Post-Traitement : Chenal Algal à Haut Rendement suivi par un bassin de Maturation en séries.
Le montage expérimental utilisé pour cette étude dans le laboratoire est le même que celui utilisé pour l’unité du Post-Prétraitement installée à l’IAV pour le traitement des eaux usées.
La méthode de traçage est faite sur une maquette analogique pour chercher le modèle convenable et identifier les coefficients hydrauliques. Cela pose des problèmes de choix des critères d’extrapolation, c’est-à-dire comment projeter les coefficients ainsi trouvés pour le grand réacteur en question, ce problème fait appel aux méthodes de similitude géométrique et donc la maquette va être dimensionnée en se basant sur ces méthodes.

Le tableau 1 présente les différentes relations existantes entre le réacteur de la station et la maquette.

Le montage expérimental est composé par :
  • Un bac d’eau qui alimente le réacteur en eau du robinet, il est placé au-dessus du réacteur. Le niveau d’eau est maintenu constant et le débit pompé du bac vers le réacteur est variable en fonction de l’expérience.
  • Une seringue de volume 50 ml placée entre le bac d’eau et l’entrée du réacteur pour l’injection de la solution (KCl) ;
  • Un conductimètre, placé après le réacteur pour mesurer les conductivités des échantillons. La lecture des mesures se fait directement sur l’afficheur du conductimètre (figure 3).
  • Un répartiteur en forme de douche de 4 entrées (20mm chacune) est placée au milieu du réacteur pour avoir un mélange des particules.
  • Une sortie du réacteur de diamètre 20 mm placée diamétralement opposée à l’entrée.
  • Un réacteur dimensionné en se basant sur le tableau de similitude et les résultats obtenus par la modélisation numérique (le nombre et le niveau des entrées).
Les dimensions du réacteur de la maquette sont données par le tableau 2.

Le choix de la vitesse de l’écoulement a été fait de telle façon à avoir un temps de séjour de 173, 150 et 125 min.

Les mesures de conductimètre sont basées sur l’utilisation d’un traceur dont la concentration peut être mesurée par la conductivité du milieu. Cette conductivité est due à la présence d’un électrolyte minéral. Cette méthode est courante, rapide et sa mise en œuvre est aisée.
Echantillonnage
La prise d’échantillon pour mesurer les concentrations à la sortie du réacteur doit satisfaire les conditions de représentativité de la concentration, dans le temps et sur l’ensemble de la section de sortie. La représentativité par rapport à la section est assurée par une section de sortie réduite et faible par rapport à la section moyenne du réacteur.
Fig. 2 : Dispositif expérimental .

Le choix de la fréquence d’échantillonnage dans le temps doit être fait avec précision pour éviter que des pics ou que des courts-circuits ne soient pas détectés.

Pour ce faire, des essais préliminaires avec un nombre maximal de prises sont nécessaires, pour fixer la fréquence d’une part et concentrer les prises au voisinage d’éventuels pics de concentration d’autre part.
Fig. 3 : Conductivimètre .

La durée de l’échantillonnage doit permettre la récupération de la totalité (ou 95% au minimum) de la quantité du traceur injecté à la sortie du réacteur. En général, pour un temps de séjour de 3h par exemple, l’expérience va être faite dans une période de 3 fois le temps de séjour et nous allons prendre des échantillons dans un intervalle différent de 5 min à 10 min.

Choix du traceur pour notre expérience
Dans le cas de notre étude, les traçages se font en absence de la biomasse, ce qui conduit à utiliser des colorants ou des sels. Les essais vont être réalisés sur une maquette, les volumes liquides sont assez faibles, ce qui conduit à utiliser le KCl, LiCl ou NaCl.

Notre choix se porte sur le Chlorure de Potassium (KCl),en raison de sa disponibilité dans le laboratoire et sa facilité de mise en œuvre (cf. tableau 3).

Type d’injection du traceur
La détermination de la distribution des temps de séjour dans notre étude se fait à l’aide d’une injection de traceur en impulsion. C’est-à-dire une injection proche d’une injection de type δ de Dirac, dans un temps très court.

Résultats et Discussion

Courbe de DTS
L’injection de type impulsion de traceur a permis de tracer la courbe de la DTS pour différents temps de séjours théoriques. Pour chaque configuration, les courbes expérimentales sont normées afin de pouvoir les comparer.

1ère expérience

La première expérience est faite sur un temps de séjour théorique de l’ordre de 173 min, le tableau suivant récapitule les conditions expérimentales de l’essai (cf. tableau 4).
Fig. 4 : la concentration en fonction du temps pour 173 min.

La courbe de la concentration en fonction du temps pour l’expérience a été tracée en coordonnées réduites (cf. figure 4).

La courbe de la DTS pour l’expérience a été tracée en coordonnées réduites (cf. figure 5).

2e expérience
La deuxième expérience est faite sur un temps de séjour théorique de l’ordre de 150 min, le tableau suivant récapitule les conditions expérimentales de l’essai (cf. tableau 5).
Fig. 5 : courbe normée de DTS  dans le réacteur cylindrique  pour 173 min.

La courbe de la concentration en fonction du temps pour l’expérience a été tracée en coordonnées réduites (cf. figure 6).

Fig. 6 : la concentration en fonction du temps pour 150 min.

La courbe de la DTS pour l’expérience a été tracée en coordonnées réduites (cf. figure 7).

Le calcul du temps de séjour moyen
Le temps de séjour t est calculé par la relation suivante à partir des valeurs discrètes :


Ou ∆t est l’intervalle de temps entre deux mesures.
Fig. 7 : courbe normée de DTS  dans le réacteur cylindrique  pour 150 min.

Pour la 1re expérience

Le temps de séjour calculé mesuré à partir de l’expérience est égal 177 min, donc il est possible de voir que le temps de séjour moyen est proche de celui du temps théorique qui égal (t0 = 173,33).
Pour la 2e expérience
Le temps de séjour mesuré de la 2e expérience est environ 147 min. cependant le temps de séjour théorique pris est de l’ordre de 150 min.

Donc il est possible de voir que les temps de séjour moyens sont très proches des temps de séjours théoriques. En définitive, on constate que tout le volume géométrique est parcouru normalement par le fluide réactionnel c’est-à-dire qu’il n’y a pas de volume mort ni de court-circuit dans le réacteur.

Comparaison des résultats obtenus avec les réacteurs maîtrisés
Les courbes de la concentration et de la distribution des temps de séjours présentent un pic et une queue de courbe prolongée, rappelant la même allure constatée dans le cas du réacteur en cascade, mais pour s’assurer nous allons calculer les formules de ce type de réacteur à savoir :
  • le calcul du nombre des réacteurs (n),
  • gamma Г(n)
  • la distribution du temps de séjour
  • E (t).
Le calcul du nombre des réacteurs (n)
Le paramètre clef de ce modèle est le nombre de réacteurs n.
la 1re expérience
En utilisant la formule t = to (n-1)/n Donc n = 2,03. Avec t correspond au maximum de la courbe
la 2e expérience
Toujours en utilisant la formule
t = to (n-1)/n. Donc n = 2,59
En définitive, notre réacteur peut se représenter par une combinaison de deux réacteurs à écoulement Intégral placés en série sachant que pour n proche de 1 on se retrouve dans les caractéristiques d’un réacteur parfaitement agité. Ce modèle a été validé par comparaison des temps de séjour théoriques différents avec les moments statistiques d’ordre 1 autour de l’origine des courbes E (t) expérimentales.
Le calcul du paramètre gamma Г(n)
Puisque (n) n’est pas entier, il est possible de calculer la distribution à l’aide de la fonction gamma. L’expression de la Г(n) de ce modèle est estimer par la formule suivante :

   

   
Le calcul de la distribution du temps de séjour E (t)
la 1re expérience

La distribution du temps de séjour d’un tel système est donnée par l’expression suivante :

la 2e expérience

La distribution du temps de séjour de la deuxième expérience est donnée par l’expression ci-contre :

On constate que le temps de séjour théorique est plus proche de celui expérimental pour chaque débit, cela prouve qu’il n’y a pas de volume mort ni de court-circuit dans le réacteur. De plus, il semble que plus le débit est petit dans le réacteur, plus le réacteur s’approche du réacteur parfaitement mélangé et donc l’hypothèse que le cylindre se comporte comme une seule phase est vérifiée.

CONCLUSION

Dans ce travail, nous avons réalisé une étude expérimentale qui permet l’identification de la distribution des temps de séjour au sein du réacteur anaérobie. Elle a été réalisée sur un réacteur similaire à celui de l’IAV et on peut conclure que :
  • L’écoulement au sein du réacteur anaérobie peut être assimilé à un mélange intégral en cascade à deux réacteurs en série ;
  • La certitude que notre réacteur ne présente aucun dysfonctionnement (court – circuit, volumes morts).
Les paramètres obtenus de ce modèle sont en accord avec les expressions empiriques de la littérature. En effet, la quasi-totalité des réacteurs cylindriques sont proches du réacteur à mélange parfait. 





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