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Epuration et recyclage des eaux résiduaires de déminéralisation à la sucrerie d'Eppeville

29 octobre 1976 Paru dans le N°10 à la page 59 ( mots)
Rédigé par : Jacques BONNIER et Roger DEBUIRE

M. Jacques BONNIER – M. Roger DEBUIRE

Service Études et Travaux NeufsSucrerie d'Eppevillede la GÉNÉRALE SUCRIÈRE S.A.

[Photo : Vue générale de la sucrerie d’Eppeville (Somme).]

La France est le sixième producteur mondial de sucre (Métropole + D.O.M.), le deuxième producteur mondial de sucre de betteraves (entre 3 et 3,2 millions de tonnes/an), après l'U.R.S.S. et avant les U.S.A., et le premier producteur du Marché Commun.

À l'heure actuelle, on recense sur le territoire métropolitain 88 sucreries gérées par 44 Sociétés Sucrières Françaises Métropolitaines, le groupe « GÉNÉRALE SUCRIÈRE S.A. » se situant au deuxième par ordre d'importance avec une production globale de l'ordre de 450 000 tonnes/an pour 8 sucreries :

- EPPEVILLE (Somme),

- CAGNY (Calvados),

- NASSANDRES (Eure),

- MONTEREAU (Seine-et-Marne),

- ÉTRÉPAGNY (Eure),

- AULNOIS-SOUS-LAON (Aisne),

- FISMES (Marne),

- ROYE (Somme);

et 2 raffineries :

- MARSEILLE et

- NASSANDRES ;

et, pour mémoire :

- 5 ateliers de conditionnement de sucre, et

- 2 distilleries.

LA SUCRERIE D’EPPEVILLE

La Sucrerie d'Eppeville a été construite de 1919 à 1922. Elle remplaçait 14 sucreries détruites pendant la première guerre mondiale, et sa capacité journalière de traitement était à l'origine de 3 500 tonnes de betteraves pour une production d'environ 450 tonnes de sucre par jour ; fortement endommagée en 1940 et 1944, elle a été reconstruite et modernisée.

Actuellement, grâce à l'élargissement de son secteur d'approvisionnement en betteraves, l'accroissement de sa capacité de traitement, l'automatisation des matériels d'extraction du sucre, l'amélioration des techniques et la compétence de son personnel, la production journalière de sucre est de l'ordre de 1 300 tonnes, la plus grande partie en sucre extra blanc répondant aux normes de la qualité européenne n° 1.

L'atelier de conditionnement, ou bien transforme le cristal de sucre en morceaux, en poudre (sucre semoule), en farine (sucre glace) ou en sirop (sucre liquide), ou bien l'emballe tel que produit (sucre cristallisé) pour la vente aux consommateurs.

L'établissement d'Eppeville produit l'énergie dont il a besoin et dispose de fours à chaux.

Ses ateliers d'entretien assurent la maintenance des installations.

De plus, il compte un atelier de déshydratation des pulpes et une station de production d'engrais en suspension.

L’établissement emploie toute l'année 650 ouvriers, employés, agents techniques et agents d'encadrement. Le personnel saisonnier est d'environ 350 personnes.

La campagne sucrière démarre fin septembre/début octobre, pour se terminer, en principe, fin décembre ; elle dure de 80 à 100 jours selon la récolte betteravière.

La campagne 76, qui est au démarrage au moment où le présent article est rédigé, sera une campagne seulement moyenne, du fait de la sécheresse, bien que le secteur Aisne-Somme, qui fournit la betterave (21 300 hectares pour 1 450 planteurs) n'ait pas été des plus sinistrés en la matière.

La production de sucre à Eppeville est de l'ordre de 100 000 tonnes/an ; il s'agit de la plus importante sucrerie du groupe G.S., et d'une des premières de France, ayant « travaillé » ces dernières années les tonnages de betteraves suivants :

Tonnages des betteraves

En sucrerie seuleTotal sucrerie + distillerie
• 1972874 000 T905 000 T
• 1973973 000 T1 000 000 T
• 1974857 000 T893 000 T
• 1975761 000 T850 000 T

LA FABRICATION À EPPEVILLE

Pendant la campagne, les betteraves arrivent à l’usine par camions. Une partie importante de ces betteraves (20 000 hectares pour 1 400 planteurs) sont réceptionnées en pesée géométrique, c’est-à-dire que les poids et la richesse en sucre sont déterminés dans les champs des planteurs après qu’aient été prélevés, dans les différentes pièces de betteraves, des échantillons aussi représentatifs que possible.

À la sortie de ces opérations de réception, les betteraves une fois arrachées et stockées en bordure de champs sont chargées et transportées à l’usine ; à leur arrivée, elles sont soit débasculées au point fixe d’alimentation de la râperie, soit stockées à la grue en silos d’attente, pour être ensuite acheminées par un courant d’eau, des caniveaux aux lavoirs de la râperie.

Là, les betteraves passent dans des auges successives où elles se débarrassent, sous l’action de l’eau, de la terre, des pierres et des herbes.

DIFFUSION

BETTERAVES PROPRES

Transportées par convoyeurs et élévateurs jusqu’aux coupe-racines, les betteraves y sont découpées en fines lamelles, appelées « cossettes », et acheminées dans deux diffuseurs continus.

L’extraction du sucre de la cossette se fait dans les diffuseurs par osmose, c’est-à-dire que le sucre traverse les parois de la cossette pour gagner l’eau. Les diffuseurs connus d’Eppeville sont des cylindres de 6,25 m de diamètre et 40 m de long, équipés intérieurement d’une hélice à double spire. Les cossettes, introduites à une extrémité du cylindre, cheminent dans les couloirs formés par deux spires vers l’autre extrémité.

La cossette désucrée, sortie du diffuseur, est pressée et livrée à la culture pour l’alimentation du bétail, soit en l’état sous le nom de pulpe, soit déshydratée et agglomérée sous le nom de pellets.

Au cours de l’extraction, le jus de diffusion est non seulement chargé de sucre, mais aussi de sels minéraux et de composés organiques qui vont être éliminés par un traitement calco-carbonique.

Ce procédé consiste à précipiter, par de la chaux, les matières qui constituent le non-sucre et à les fixer dans les cristaux de carbonate de chaux formés au sein du jus grâce à un courant de gaz carbonique. Il reste ensuite à éliminer, par filtration, les grains de carbonate retenant prisonnières les impuretés pour obtenir un jus clair.

JUS VERT

ÉPURATION

PRÉCHAULAGE

CHAULAGE — 1ʳᵉ CARBONATATION

FILTRATION

CHAULAGE — 2ᵉ CARBONATATION

ÉCUMES

FILTRATION

JUS CLAIR LÉGER

Cette opération de filtration a lieu sur des épaississeurs et des filtres continus ; les pertes de sucre dans le carbonate de chaux éliminé doivent, bien entendu, être aussi faibles que possible.

Le jus épuré, contenant environ 12 % de sucre et 88 % d’eau, est, après décalcification et déminéralisation, concentré en continu par évaporation pour obtenir un sirop épuré à cuire.

Les opérations de décalcification et de déminéralisation consistent à retenir sur des résines échangeuses d’ions une partie des non-sucres n’ayant pas été fixés à l’épuration calco-carbonique.

[Photo : Le premier corps de l’évaporation et la thermo-compression.]

CRISTALLISATION ET CENTRIFUGATION

CHAUDIÈRE 1ᵉʳ JET — CHAUDIÈRE 2ᵉ JET — CHAUDIÈRE 3ᵉ JET

MALAXAGE 1ᵉʳ JET

MALAXAGE 2ᵉ JET

MALAXAGE 3ᵉ JET

CENTRIFUGATION — SUCRE 1ᵉʳ JET

CENTRIFUGATION — SUCRE 2ᵉ JET

CENTRIFUGATION — SUCRE ROUX AFFINÉ ET REFINÉ

Épuration des jus

Balance d'eau privée

[Schéma : Schéma récapitulatif de l'épuration des jus]

Le but étant de produire à la fin des opérations de cristallisation, le maximum de sucre cristallisé et le minimum de mélasse (sucre non cristallisé).

À la sortie de l'évaporation, le sirop, ayant une concentration de 800 g de sucre par litre, est concentré à nouveau (évaporation sous vide à 80 °C de l'eau contenue dans le sirop) dans des chaudières appelées « appareils à cuire ».

Au cours de cette opération, les cristaux de sucre naissent et grossissent. La masse cristallisée, appelée « masse cuite », en fin d'opération, est évacuée vers le malaxeur, pour alimenter ensuite une batterie d'essoreuses centrifuges qui extraient le sucre en le séparant de l'eau-mère au milieu de laquelle les cristaux de la masse cuite ont grossi.

Cette eau-mère, ou égout, est évacuée et chauffée à nouveau pour obtenir une nouvelle cristallisation dans une nouvelle masse cuite qui est essorée à son tour, libérant une nouvelle fraction de sucre dit de 2° jet, ainsi qu'un nouvel égout. Celui-ci est une dernière fois traité et donne un sucre roux de 3° jet, qui est refondu et utilisé en cuisson de premier jet, et un sous-produit : la mélasse.

Le sucre blanc de premier jet, dit « sucre extra », ainsi que le sucre de 2° jet, dit « sucre cristallisé », sont séchés avant d'être mis en sacs ou ensilés. Les sucres stockés dans les silos, en vrac, servent de matière première à l'atelier de conditionnement.

LA DÉMINÉRALISATION SUR ÉCHANGEURS D'IONS

C'est le poste original du processus de fabrication, et la sucrerie d'Eppeville est une des rares sucreries françaises (avec deux autres du groupe G.S. : Nassandres et Aulnois-sous-Laon) à être équipée pour le traitement de déminéralisation des jus sur résines échangeuses d'ions.

L'installation fut construite en 1958 et est utilisée avec satisfaction depuis 17 campagnes. C'est une installation du constructeur hollandais IMACTI – Amsterdam, utilisant les résines « IMACTI ».

Ces échangeurs d'ions se présentent sous la forme de résines synthétiques (en général polystyrènes sulfonés) ionisées et insolubles, qui ont la particularité, quand on les met au contact d'une solution, d'échanger leurs ions contre ceux présents dans la solution, à condition qu'ils soient de même signe. Les ions captés par les résines restent fixés sur celles-ci, tandis que les résines cèdent à la solution une quantité équivalente de leurs propres ions.

Si l'ion échangeable de la résine est un cation, cette résine est un échangeur de cations ; si l'ion échangeable de la résine est un anion, cette résine est un échangeur d’anions.

Le jus sucré épuré est d'abord dirigé à travers la résine cationique qui abandonne ses ions H⁺, lesquels seront remplacés par les cations contenus dans le jus. Le pH du jus baisse jusqu'à la valeur de 2 environ.

Le jus décationisé et acide obtenu est ensuite dirigé à travers la résine anionique. Il n'y a plus alors dans ce jus que des anions et des ions H⁺. Les anions se fixent sur la résine, il y a désacidification et l'on obtient une solution sucrée pure.

Après avoir traité une certaine quantité de jus, les échanges d'ions cessent. Les résines sont saturées ; il faut alors les régénérer en éliminant les ions qu'elles ont fixés, pour leur rendre leur forme initiale.

Le poste de déminéralisation comporte deux batteries, travaillant en alternance.

Chaque batterie comporte :

  • • Une colonne cationique normale (C.N.) de 10 appareils contenant chacun 6,500 m³ de résine cationique « IMAC C. 12 ».

Une colonne cationique spéciale (C.S.) de 2 appareils contenant chacun 6 500 m³ de résine cationique spéciale « IMAC C 12 ».

Une colonne anionique (E.A.) de 10 appareils contenant chacun 2 000 m³ de résine anionique « IMAC A 20 S ».

Préalablement, à chaque mise en service d'une batterie, toutes les résines ont été régénérées et les vannes des appareils sont toutes fermées.

Avant d’alimenter les colonnes de déminéralisation, le jus décalcifié qui est à une température d'environ 90 °C doit être refroidi jusqu'à une température de 15 °C.

Ce refroidissement est obtenu en faisant passer le jus décalcifié à travers des échangeurs de température à plaques du type « ALFA-LAVAL ». On procédera en deux étapes (voir figure).

En premier lieu, le jus sortant de la déminéralisation et qui est froid doit être réchauffé afin de continuer le processus de fabrication. Comme le jus décalcifié doit être refroidi, par mesure d'économie, on lui fait céder ses calories excédentaires au jus déminéralisé. Dans le premier échangeur, le fluide chauffant sera donc le jus décalcifié.

En second lieu, le jus décalcifié n’ayant pas atteint la température de 15 °C, on le fait passer sur un second échangeur à plaques du même type que le précédent, dans lequel le refroidissement sera complété grâce à de l'eau froide (11 °C) venant d'un puits. À la sortie de ce second échangeur, le jus sera dirigé vers la déminéralisation, tandis que l'eau ira alimenter les adoucisseurs.

Sur le schéma de la déminéralisation, on voit que le jus déminéralisé est pompé (vanne 4 ouverte et pompe P 1 en service) vers l'échangeur ALFA-LAVAL (vanne 5 ouverte) d'où il ressortira (vanne 6 ouverte) vers un réchauffeur, puis vers le bac à « jus moyen » et vers l'évaporation.

Au cours du passage du jus dans les colonnes, les résines retiennent Na, K, Fe, H₂SO₄, Ca, bétaïne, acides aminés, NH₄, SO₄, acides organiques, sulfates, chlorures, phosphates, qui se retrouveront dans les eaux de rinçage des résines après régénération.

La résine cationique spéciale « IMAC C 12 » est régénérée à l'acide sulfurique et à l'ammoniaque.

La résine cationique normale « IMAC C 12 » est régénérée à l'acide sulfurique.

La résine anionique « IMAC A 20 S » est régénérée avec NH₄OH.

Les eaux de rinçage des résines, après régénération, constituent des eaux résiduaires très polluantes, étant donné leur charge, et c'est un des problèmes qu'il fallait résoudre.

L’EFFORT POUR REMÉDIER À LA POLLUTION

Le problème fut résolu de la manière que l'on verra plus loin dans le cadre d'un effort général particulièrement important de la Sucrerie d'Eppeville, réalisé par étapes au cours de ces dernières années, pour le traitement de toutes ses eaux résiduaires.

La partie la plus importante des travaux s’est inscrite dans le cadre du Contrat de Branche qui fut signé le 29 août 1975 entre le Ministre de la Protection de la Nature et de l'Environnement (son titre de l'époque) et le Président du Syndicat National des Fabricants de Sucre de France, au nom des industries nationales productrices de sucre de betteraves (voir « L’EAU ET L’INDUSTRIE », n° 2, pages 68 à 70 — « Maintenant, cinq contrats de branche »).

La Sucrerie d'Eppeville figurait en priorité dans le tableau des priorités résultant du schéma d’aménagement du bassin Artois-Picardie et, à ce titre, bénéficie de l'aide de l'Agence Financière de ce bassin.

Il est intéressant de récapituler les investissements réalisés à Eppeville au titre de la lutte anti-pollution :

1970 – Sortie des écumes à sec : 275 000 francs
1972 – Installation d'un condenseur par surface : 1 850 000 francs
1973 – Épandage des vinasses (1ʳᵉ tranche) : 100 000 francs
1974 – Épandage des vinasses (2ᵉ tranche) : 110 000 francs
   – Concentration des eaux de déminéralisation : 7 885 000 francs
   – 1ʳᵉ tranche traitement eaux boueuses : 1 410 000 francs
1975 – 2ᵉ tranche de traitement des eaux boueuses et épandage des eaux condensées : 1 600 000 francs
TOTAL : 13 590 000 francs

Les traitements pratiqués sont actuellement les suivants :

  • • Les eaux boueuses de transport et de lavage des betteraves sont décantées, partiellement dans deux décanteurs, et pour le reste, en bassins. Les eaux décantées sont recyclées au lavoir. En fin de campagne, elles sont stockées dans des bassins à eau de 80 000 m³. Les rejets sont donc supprimés.
  • • La condensation des vapeurs de cuite (et éventuellement du quatrième effet de l'évaporation) s'effectue dans un condensateur par surface, sans contact avec les eaux de refroidissement, qui sont restituées dans le milieu naturel après passage dans un réfrigérant atmosphérique.
  • • Les eaux condensées des derniers effets de l'évaporation et du condensateur par surface sont :
    • — pour une part, refroidies et acidifiées pour alimenter la diffusion. Elles sont donc recyclées et il n'est plus fait appel en diffusion à une consommation d'eau prélevée dans le milieu naturel,
    • — pour le reste, épandues sur des terrains de culture, sous une hauteur d'eau permettant une bonne épuration par le sol.
[Photo : Traitement des eaux résiduaires de déminéralisation.]
[Photo : Salles des pompes de l'évaporation]
[Photo : Partie supérieure de l'évaporateur à 6 effets]
[Photo : Les faisceaux de l'évaporateur à 6 effets]
[Photo : L'unité de cuisson : à droite, le cristallisoir]
[Photo : Le réservoir-malaxeur de produit cristallisé]
  • • Les écumes sont sorties à sec, stockées dans un bassin spécial et livrées en culture, à titre d’amendement calcaire, dans le courant du printemps et de l'été.

LE TRAITEMENT DES EAUX RÉSIDUAIRES DE DÉMINÉRALISATION

Comme on le voit dans l'énumération des dépenses ci-dessus, ce fut le gros poste.

À chaque opération de rinçage, qui a lieu toutes les heures vu la marche en alternance des batteries, c'est un volume d'environ 50 m³/h d'eaux (à 4 % de M.S.) chargées des impuretés lors de la description du procédé, qu'il fallait traiter.

La GÉNÉRALE SUCRIÈRE a doté ses trois sucreries, effectuant la déminéralisation sur résines, d'une installation spéciale d'épuration des eaux résiduaires de déminéralisation, dont le principe a été étudié avec la Société ORSAN et dont la réalisation a été confiée à ALFA-LAVAL.

Le schéma général en est donné à la page précédente.

En premier lieu, les eaux résiduaires de la déminéralisation (ou éluats) qui contiennent environ 4 % de matières sèches sont homogénéisées dans deux bacs munis d'un circulateur, puis réchauffées par l'eau condensée de l'appareil d'évaporation dans un échangeur.

[Photo : Détail du système de distribution du liquide, de l'arrivée de vapeur et du préchauffage du jus — schéma de principe d'un effet]

L'eau résiduaire réchauffée est ensuite refoulée par une pompe, dans un préchauffeur dégazeur à film descendant chauffé par la vapeur prélevée au 5° effet de l'évaporation. À la sortie du préchauffeur-dégazeur, l'eau résiduaire est refoulée par une pompe vers 5 préchauffeurs en série, montés, un dans chaque appareil du quintuple effet.

L'eau pénètre ensuite dans le quintuple effet à flot tombant (ALFA-LAVAL Scheffers), avec recompression de la vapeur du 3° au 1° effet par thermo-compression. Pouvoir évaporatoire du quintuple effet : 50 220 kg/h d'eau.

Le thermo-compresseur est alimenté en vapeur vive à pression réglée (maxi : 29 bars). Les eaux condensées des différents effets circulent de caisse à caisse, jusqu’au 5° effet et au dégazeur d’où elles sont reprises par une pompe et refoulées dans l'échangeur.

Le quintuple effet est à conduite automatique. Le vide et le débit de vapeur étant maintenus constants, la régulation de densité du produit concentré à la sortie du 5° effet agit sur le recyclage du produit concentré du 5° effet vers l'entrée du premier effet.

Entre chaque effet, le produit sortant de l'un est injecté dans le suivant grâce à une pompe et, à la sortie du 5° effet, le produit concentré à 30-33 % de matières sèches environ est dirigé vers le bac d'attente avant cristallisation.

CRISTALLISATION

À partir du bac d'attente, le produit concentré à l'évaporation est aspiré dans un appareil à cuire dans lequel va se poursuivre la concentration et se produire la formation des cristaux.

L'appareil à cuire, qui travaille sous vide, est chauffé par de la vapeur prélevée sur le 3° effet de l'évaporation de la sucrerie, avec possibilité d'utilisation éventuelle de vapeur prélevée sur le 2° effet de cette même évaporation.

Le pouvoir évaporatoire de cet appareil à cuire est de 3 600 kg/h d'eau, pour une surface de chauffe de 150 m².

La durée d'une opération de cuisson est d'environ 4 h 30.

La conduite de l'appareil à cuire est complètement automatique : il suffit de donner l'impulsion de départ, toutes les opérations étant commandées automatiquement par un programme en huit séquences. Une fois la « cuite » terminée, la masse-cuite obtenue (magma des cristaux + l'eau mère), environ 60 hl, est coulée dans le malaxeur d'attente d'où elle sera reprise par une pompe spéciale qui la refoulera dans l'essoreuse centrifuge continue où s'effectuera la séparation des cristaux et de l'eau mère, ou encore « Égout Pauvre », qui constitue le N.S.R. 80 (N.S.R. : Non Sucre Reconstitué).

Durant l'essorage, les cristaux sont lavés par un courant d'eau chaude ; l'égout obtenu (Égout Riche) sera repris dans l'appareil à cuire en fin d'opération et les sels dissous qu'il contient se déposeront sur les cristaux existants.

À leur sortie de l'essoreuse, les cristaux (sel binaire) sont prêts pour leur utilisation comme fertilisants.

[Photo : A gauche : le tamis à résines ; à droite : l'échangeur à plaques.]
[Photo : Réfrigérants : sortie d'eau refroidie.]
[Photo : Vue arrière du thermo-compresseur de vapeur.]
[Photo : 4 cellules de réfrigérants atmosphériques.]
[Photo : Le tableau de commande automatique de l'installation.]
[Photo : Schéma simplifié du traitement des eaux résiduaires.]

RÉCUPÉRATION DE SOUS-PRODUITS

Cet équipement a permis, en effet, par concentration de ces eaux, puis par cristallisation de la phase minérale, de récupérer un sel binaire (sel double de sulfate de potassium et de sulfate d’ammoniaque) utilisé en agriculture pour la fertilisation des sols, ainsi qu'un produit appelé « N.S.R. 80 » (Non Sucre Reconstitué) utilisé pour l'alimentation du bétail.

Ainsi, durant la campagne de 1975, il a été produit à Eppreville environ :

  • — 2 000 tonnes de sel binaire (sel double de sulfate de potassium et de sulfate d’ammoniaque),
  • — 1 900 tonnes de N.S.R. 80.

Les analyses moyennes du sel binaire donnent environ :

> K₂O ........................................ 18,74 % du produit  
> Na₂O ......................................... 0,77 %  
> Ammoniaque ............................ 13,91 %  
> Azote total ................................. 14,05 %  
> K₂O/N total ................................. 1,33 %  
> Humidité ..................................... 2,67 %

Les analyses moyennes du « N.S.R. 80 » donnent environ :

> Matières sèches .......................... 74,11 % du produit  
> Potassium ..................................... 7,06 %  
> Sodium ......................................... 0,18 %  
> Ammoniaque ............................... 2,39 %  
> Azote organique .......................... 5,67 %  
> Cendres ........................................ 10,29 %  
> pH .................................................. 5,31  

À noter que la vente de ces produits de récupération couvre tout juste, en gros, les frais d'exploitation et d'entretien de l’installation.

RECYCLAGE DES EAUX ÉPURÉES

Les vapeurs de vide issues du préchauffeur dégazeur sont condensées dans un condenseur à mélange, et le condensat obtenu est pompé vers le réfrigérant à air forcé de l'installation.

Les eaux condensées dans les cinq effets (eaux circulant de caisse à caisse) sont utilisées comme fluide chauffant dans un échangeur de température pour réchauffer l'eau résiduaire avant son entrée dans le quintuple effet. À sa sortie de l'échangeur, l’eau condensée refroidie est reprise et envoyée, avec les eaux du condenseur à mélange de l'évaporation, vers le réfrigérant.

Les eaux condensées dans le faisceau de l’appareil à cuire sont dirigées avec les eaux condensées de la sucrerie.

Les vapeurs de l'appareil à cuire sont condensées dans un second condenseur à mélange et le condensat obtenu est, lui aussi, envoyé vers le réfrigérant à air forcé.

Une partie de l'eau refroidie dans le réfrigérant est utilisée pour alimenter en eau froide les deux condenseurs à mélange et l'autre partie est utilisée pour les lavages des résines de la déminéralisation, bouclant ainsi un circuit fermé.

ENSEMBLE DE CONCENTRATION DES EAUX RÉSIDUAIRES DE DÉMINÉRALISATION

L'équipement complet est composé de :

Une installation de préparation des eaux, comprenant :

  • — 1 bac de réception des eaux de 15 m³
  • — 2 pompes de reprise des eaux de 150 m³/h
  • — 1 bac d'homogénéisation de 60 m³
  • — 1 circulateur
  • — 8 bacs de stockage de 60 m³ chacun
  • — 1 bac d'ajustage du pH de 2 m³ – Ø 1 600 – h 1 800 mm
  • — 1 pompe avant évaporation
  • — 1 échangeur de température

Une installation d’évaporation des eaux, comprenant :

  • — 1 réchauffeur dégazeur
  • — 1 quintuple effet à flot tombant, système ALFA-LAVAL-SCHEFFERS, avec thermo-compression, séparateurs, réchauffeurs incorporés et pompes de circulation – pouvoir évaporatoire : 50 220 kg/h d'eau
  • — 1 poste de désurchauffe de la vapeur vive

Une installation de cristallisation du produit concentré, comprenant :

  • — 1 bac d’attente du produit concentré de 50 m³ doté de 2 mouvements d’agitation – Ø 3 400 – h 5 500 mm
  • — 1 cristallisoir automatique à séquences préréglées, surface de chauffe 150 m², avec mouvement d'agitation – pouvoir évaporatoire : 3 600 kg/h d'eau
  • — 1 malaxeur vertical de 13 m³ – Ø 1 600 – h 4 800 mm
  • — 1 distributeur de masse-cuite
  • — 2 essoreuses continues ALFA-LAVAL, type SB 350/3, à 3 paniers en série permettant l'essorage, le lavage et le séchage des cristaux de sels binaires
  • — 1 bac de stockage des sels binaires de 35 m³
  • — 1 bac à égouts riches de 5 m³ – Ø 1 800 – h 2 000 mm
  • — 1 pompe à égouts riches de 15 m³/h en acier inox
  • — 1 bac à égouts pauvres de 5 m³ avec mouvement d’agitation en acier inox – Ø 1 800 – h 2 000 mm
  • — 1 pompe à égouts pauvres (N.S.R.)
  • — 1 cuve de stockage du N.S.R.

Une installation de production de vide, comprenant :

Pour la cristallisation :

  • — 1 séparateur de gouttelettes, type cyclone
  • — 1 condenseur à mélange en acier inox
  • — 1 pompe centrifuge d’extraction des eaux condensées
  • — 1 pompe à vide rotative en acier inox AISI 316

Pour l'évaporation :

  • — 1 condenseur à mélange en acier inox
  • — 2 pompes d'extraction des eaux condensées
  • — 2 pompes à vide rotatives en acier inox AISI 316

Pour les deux installations :

  • — 4 tours de refroidissement, type CTF 24/30, de dimensions chacune 3 000 × 2 300 × 3 500 mm

Chaleur totale à dissiper : 7 500 000 kgcal/h

Débit total à refroidir : 500 m³/h de 40 à 25 °C

Pour l'ensemble de l’installation :

  • — Les appareils de mesure, de contrôle, de régulation nécessaires pour la marche en automatique de l’installation.
[Photo : La sucrerie d'Eppeville (Somme)]

CONCLUSION

La Sucrerie d'Eppeville, comme d'ailleurs les deux autres sucreries du groupe G.S. — Nassandres et Aulnois-sous-Laon, ont réalisé, au prix d’un effort d'investissement important, et avec l'aide de l'Agence Financière du Bassin Artois-Picardie, une installation à marche entièrement automatique qui peut servir d'exemple.

La récupération d'un élément fertilisant et d'un sous-produit riche en protéines couvre à peu près les frais de service de cette installation, mais surtout, il n'y a plus de rejet d'eaux résiduaires polluantes ; celles-ci sont totalement recyclées après leur épuration.

J. BONNIER et R. DEBUIRE

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