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Elimination des nitrates sur résine : où en sommes nous ?

30 mars 1985 Paru dans le N°90 à la page 41 ( mots)
Rédigé par : A. DEGUIN

À moins d'un an maintenant de la date fatidique d'août 1985 à laquelle la France devait avoir mis en conformité, avec la directive d’août 1980 de la C.E.E., sa législation sur les eaux destinées à la consommation, il convient de s'interroger sur le devenir du procédé d'élimination de nitrates de l'eau par échange d'ions.

Quelques brefs rappels

À la suite des essais conduits sur pilotes à Plouenan, dans le Finistère avec la participation financière des ministères de la Santé, de l'Environnement, de l'Agriculture, du département du Finistère et de l'Agence de bassin Loire-Bretagne, et sous le contrôle de la Direction départementale des affaires sanitaires et sociales du Finistère et d'un Comité scientifique présidé par le professeur Martin (de l'École Nationale de Chimie de Rennes), les résultats obtenus ont permis de répondre aux questions soulevées à propos des résines et de lancer une procédure d'agrément du procédé (1), (2), (3), (4), (5) et (6).

Les principaux enseignements tirés des essais de Plouenan

Ces enseignements concernent essentiellement l'efficacité du procédé d'échange d'ions dans l'élimination des nitrates. Les résultats des essais démontrent que pour des teneurs en nitrates aussi élevées que 100 à 150 (voire 175 mg/l dans l'eau brute), la concentration résiduelle dans l'eau après traitement sur résine ne dépasse jamais plus de 5 à 8 mg/l et se situe en général entre 2 et 5 mg/l.

Cette constance dans l'efficacité d'élimination des nitrates autorise un mélange ultérieur de l'eau traitée avec une fraction d'eau brute proportionnellement à l'obtention d'une valeur souhaitée (25 mg/l par exemple, pour respecter le niveau guide de la Directive de la C.E.E., ou 30-40 mg/l, et cela si une marge de sécurité est adoptée par rapport à la concentration maximale admissible (C.M.A.) pour la distribution à l'usager).

Le procédé apparaît donc d'une totale fiabilité et l'on obtient en même temps une parfaite maîtrise de son fonctionnement avec un moindre coût des investissements, dû à sa taille réduite et au peu d'équipements nécessaires (un seul filtre suffit en général).

Les essais ont permis de répondre aux questions soulevées concernant les résines :

1) La résine constitue-t-elle un risque de prolifération bactérienne pour l'eau qui la traverse ?

Tous les contrôles bactériologiques effectués sur l'eau après passage sur résine et avant désinfection au cours des essais (pendant 4 mois) ont attesté que la résine ne constituait pas un milieu de prolifération bactérienne, aucun accroissement de germes n'ayant été observé.

En outre, la désinfection finale mise en œuvre après passage sur la résine donne une sécurité identique à

[Photo : La résine (Photothèque SAUR)]

celle observée classiquement sur les installations de traitement d'eau, et représente donc à ce titre un poste complémentaire au procédé.

2) La résine constitue-t-elle un risque sanitaire par le relargage de produits toxiques ?

Au cours des essais, de nombreuses recherches analytiques ont révélé notamment que les produits monomères résiduels entrant dans la fabrication des résines disparaissaient après deux ou trois cycles d'utilisation et que les traces observées (à l’échelle de la dizaine de nanogrammes) n’étaient plus détectables après dix cycles de fonctionnement. Ainsi suffira-t-il de préconditionner la résine par une dizaine de cycles, c'est-à-dire de régénération après saturation de la résine par les nitrates, avant de récupérer l’eau traitée pour la distribuer.

On a constaté également que la résine ne produisait pas de nitrosamines (produits résultant de la réaction des nitrites sur certaines amines). D’autre part, différents tests de cytotoxicité ont montré l’absence de toxicité et d'effet transformant de l’eau traitée sur résine.

D’autres recherches spécifiques ont aussi été pratiquées sans révéler de risques quelconques puisque les quantités de produits détectées se situaient aux limites des méthodes analytiques les plus performantes utilisées (métaux lourds, hydrocarbures polycycliques aromatiques, haloformes, insecticides organochlorés, etc.).

3) Où en est la procédure d’agrément ?

Au vu de ces résultats extrêmement réconfortants, un dossier de demande d’agrément a été déposé par la S.A.U.R. auprès du ministère de la Santé, sur lequel les experts, siégeant au Conseil supérieur d’hygiène publique de France, ont eu à se prononcer.

À la date de rédaction du présent article, nous avons appris que l'autorisation d’éliminer les nitrates sur résine dans les eaux destinées à la consommation devrait être publiée prochainement. À cet effet, la S.A.U.R. développe un procédé de mise en œuvre d'une résine qu’elle a soigneusement sélectionnée, lequel sera commercialisé sous l’appellation Nitracycle ; il s’agit d’un procédé original ayant fait l’objet d’une demande de brevet et dont un prototype d’une capacité de traitement de 25 m³/h est expérimenté sur un puits abandonné à Crépy-en-Valois (voir schéma).

[Schéma : Procédé Nitracycle — Schéma de principe]

Nous nous ferons un plaisir de faire état de ses performances dans un prochain article ; les premiers résultats enregistrés laissent entrevoir qu’au niveau des coûts, tant d’investissement que de fonctionnement, notre procédé devrait remettre en question l’idée selon laquelle traiter l'eau coûte très cher, comme semblent le montrer les procédés biologiques.

[Photo : Installation du prototype - Vue d'ensemble]

Références bibliographiques

(1) Deguin (A), Rouas (P.), Neveu (A), Gaspard (M). - Journal français d'hydrologie, 1978, 9, fasc. 2, n° 26, p. 91, 104.

(2) Deguin (A.). - Thèse de novembre 1980, n° d’ordre 48, Université de Poitiers, U.E.R. Sciences fondamentales et appliquées.

(3) Deguin (A.). - L’Eau et l’Industrie 1981, 11, n° 59, p. 29-30.

(4) Deguin (A). - Tribune du Cebedeau 1982, 1, n° 458, p. 35-51.

(5) Deguin (A.). - L’Eau et l’Industrie 1982, 11, n° 69, p. 39-44.

(6) Deguin (A.). - T.S.M. L’Eau 1983, 10, p. 487-497.

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