Your browser does not support JavaScript!

Effluents vinicoles : quelles filières de traitement choisir ?

30 mars 2006 Paru dans le N°290 à la page 65 ( mots)
Rédigé par : Pierre SERPOLET

Les effluents vinicoles résultent d'une activité agroalimentaire saisonnière où l'essentiel de la pollution est rejeté sur trois à quatre mois à partir des vendanges. En moyenne, un volume donné d'effluents viticoles est près de dix fois plus polluant que le même volume d'effluents urbains. Chaque litre de vin produit générant une pollution organique de 12 g de DCO, on estime que les effluents vinicoles représentent chaque année une pollution équivalant à 10 millions d'E.H. Comment traiter efficacement ces effluents au meilleur coût ? Cet article tente de répondre à ces questions.

[Photo]

La filière vinicole utilise de grandes quantités d’eau. On estime que la production d’un hectolitre de vin entraîne une consommation moyenne de 1 à 2 hectolitres d’eau dans une fourchette allant de 0,5 à 10 hectolitres d’eau selon les chais. Cette consommation intervient lors des différentes étapes du processus d’élaboration du vin, de la vinification à la mise en bouteilles avec une nette prépondérance des eaux de lavage du matériel, des locaux, etc.

La pollution contenue dans ces effluents provient soit des composants même du raisin (rafles, sucres, acides, alcool, polyphénols), soit des eaux de nettoyage, soit des composants qui interviennent dans le processus de vinification (média filtrants ou colles) ou bien encore d’effluents comportant des produits de nettoyage, voire de détartrage. À l’exception de cette dernière catégorie, tous concourent à faire de la matière organique la principale source de pollution. Fortement biodégradable, elle provoque le développement de microorganismes qui consomment l’oxygène de l’eau à l'origine d’effets dévastateurs sur le milieu. Collectés pour être traités en station d’épuration municipale, leur concentration en DCO est la cause de nombreux dysfonctionnements. On estime en effet que les effluents vinicoles sont environ dix fois plus concentrés que les effluents urbains ! L’acidité de ces effluents engendre également des phénomènes de corrosion dans les réseaux.

Ces particularités sont renforcées par le caractère éminemment saisonnier de ces effluents : au cours des vendanges, les charges atteignent des valeurs extrêmes, qui décroissent ensuite jusqu’à la fin de l’année pour s’établir à un niveau quasi nul pour les élevages de courte durée. Pour les chais élevés en barriques, la production d’effluents est moins irrégulière.

Vaslin Bucher propose un procédé de traitement biologique “extensif”, de type de stockage aéré avec un traitement sur massif de sable.

La pollution est concentrée sur les périodes de vendanges et de vinification. Le traitement est effectué tout au long de l'année.

[Photo : Les phases 1, 2, 4 sont basées sur l'aération des effluents et boues, le rendement hydraulique du matériel est donc très important pour assurer un rendement épuratoire satisfaisant.]

Nombre de jours

Nombre de jours
010100300365
1Stockage aéré
2Oxygénation forcée
3Décantation minéralisation + épuration sur massif de silice (vidange tous les 5 ans)
4Minéralisation des boues

Les phases 1, 2, 4 sont basées sur l'aération des effluents et boues, le rendement hydraulique du matériel est donc très important pour assurer un rendement épuratoire satisfaisant.

L'impact de l’activité vinicole sur l'environnement est donc très important. Il est à l'origine de contraintes réglementaires très strictes qui sont fonction de la capacité de production des chais.

Des contraintes réglementaires très strictes

Le contexte réglementaire propre à chaque catégorie de ces établissements fait partie des contraintes. La tendance est que la filière vinicole intègre de plus en plus le domaine industriel. Car le décret du 29 décembre 1993 a intégré l’activité vinicole dans la nomenclature des ICPE sous la rubrique n° 2251 « préparation et conditionnement des vins ».

Depuis, les établissements vinicoles se répartissent en trois catégories :

  • lorsque leur capacité de production est supérieure à 20 000 hl/an, les installations sont soumises au régime d’autorisation des ICPE ;
  • entre 500 et 20 000 hl/an, ils sont soumis au régime de déclaration des ICPE ;
  • en dessous de 500 hl/an ils ne relèvent pas du régime des installations classées mais restent soumis à plusieurs textes parmi lesquels le règlement sanitaire départemental.

Le contexte réglementaire étant posé, il convient de choisir une filière de traitement susceptible de satisfaire aux exigences de la réglementation tout en étant adaptée aux contraintes techniques de chaque établissement. Avant ceci, des mesures préventives indispensables doivent être mises en place pour limiter la production d’effluents en amont.

Comme il n’existe pas de solution universelle, le choix d'une technique de traitement doit reposer avant tout sur une étude détaillée de la situation et des contraintes propres à l’établissement. Pour ceci, la première étape visant à caractériser la charge polluante et ses volumes est primordiale.

Caractériser la charge polluante et ses volumes

On ne le dira jamais assez, la première des

[Publicité : KWI France]
[Encart : texte : Prétraiter les effluents pour un traitement centralisé en station d’épuration communale À Saint-Julien Beychevelle, dans le Médoc, 24 propriétés vinicoles occupent 55 % de la surface disponible. En 1996, après recommandations de l’Agence de l’Eau, les élus ont choisi de partir sur un projet d’assainissement traitant l’ensemble des effluents produits sur la commune. Coût de l’opération : 2,6 M€ pour 1 200 EH en domestique et 13 000 EH en viticole. Au terme d’une étude confiée à la DDAF de la Gironde, il a été décidé de mettre en place deux réseaux distincts de collecte, dans une tranchée commune. Sur le site choisi pour la station d’épuration, on trouve donc deux filières distinctes de traitement biologique, permettant de réguler et neutraliser l’effluent vinicole avant traitement. Le dispositif fait appel à une quinzaine de stations préfabriquées TOP fournies par Flygt, équipées chacune de deux pompes submersibles Flygt. L’opération a été rendue possible par la constitution d’un GIE qui a financé les 8 km de canalisations, les stations de pompage et la filière d’épuration propre aux effluents vinicoles, soit au total 450 000 €. Sur chaque propriété, l’effluent vinicole est tamisé, décanté, et fait l’objet de contrôles pour en vérifier la conformité avec la convention de rejet. Une convention spécifique a été signée afin que les propriétés participent équitablement aux frais d’exploitation. Le premier avantage pour les viticulteurs est d’ordre économique : l’équipement de chaque propriété aurait en effet coûté plus de 150 000 €. De plus, la station d’épuration communale a été implantée dans une zone basse, impropre à la culture de la vigne, épargnant ainsi le patrimoine foncier.]
[Photo : Station d’épuration du château Lafitte Rothschild à Pauillac.]

actions à entreprendre pour réduire la quantité d’effluents à traiter consiste à agir sur la consommation d’eau. Pour ce faire, des solutions existent. Les réseaux d’évacuation communs aux eaux pluviales et aux eaux de lavage que l'on rencontre aujourd'hui encore dans la plupart des chais doivent être séparés. Autre piste, la conception des chais doit rendre plus facile la gestion et l'utilisation de l'eau. La récupération de sous-produits valorisables (bourbes, lies, marcs) permet également d’alléger les charges transmises aux process de traitement. Enfin, il est absolument indispensable de sensibiliser le personnel pour faire émerger une prise de conscience liée aux conséquences de nouveaux comportements adaptés aux économies d’eau. Ces démarches engagées, il convient de choisir les dispositifs adaptés de traitement. De nombreux facteurs doivent être pris en compte. Ceux-ci sont d’ordre technique (volume et charge des effluents, capacité ou non de stocker les effluents avant traitement), environnementaux (contraintes de rejet, situation de l'exploitation) ou encore économiques (coûts d'investissement mais aussi coûts de fonctionnement), aides éventuelles, etc. Pour satisfaire à l'ensemble de ces contraintes, bon nombre de techniques de traitement se sont développées ces dernières années pour le traitement des effluents vinicoles. S'il n’existe pas de solution universelle, les techniques proposées sont suffisamment vastes pour trouver le bon compromis technico-économique entre le volume de stockage, le dimensionnement du dispositif et la fiabilité de la filière.

On distingue traditionnellement les traitements discontinus plutôt adaptés aux volumes d’effluents moyens ou faibles, des traitements continus plutôt dévolus aux volumes d'effluents élevés.

Les traitements discontinus : des volumes moyens ou faibles

À condition d’être mis en œuvre dans de bonnes conditions, l’épandage est une méthode économique qui permet une bonne épuration des effluents vinicoles. Cette méthode mise sur la capacité épuratoire du sol. L’épuration s’opère grâce à la transformation de la matière organique par les micro-organismes présents dans le sol en éléments assimilables par les cultures. La difficulté liée à cette technique est de trouver des parcelles réceptrices, d’autant que la réglementation impose qu'une même parcelle soit soumise à l'épandage qu'une fois tous les trois ans.

Le stockage aéré est une autre technique de traitement qui permet d’abattre la DCO pendant la période de stockage. Ce traitement convient bien au traitement des effluents vinicoles dès lors que la production des effluents est limitée dans le temps et que la capacité du bassin peut contenir l'ensemble du volume annuel produit. Euralis Vignes dans le sud-ouest a développé cette technique notamment en travaillant sur la gestion des rejets en lits plantés de roseaux en partenariat avec la SINT. Cette activité a été rachetée par Agro Environnement depuis 2003 et compte actuellement 50 références parmi lesquelles le château Clarke, propriété de la compagnie vinicole Baron de Rothschild, les Domaines Rémy Martin ou le Château d'Angludet à Margaux. Cette activité a fait l'objet d'une extension pour le traitement de vinasses fin 2005. Vaslin Bucher propose par ailleurs deux solutions spécifiquement destinées au traitement des effluents vinicoles, basées sur le principe du stockage aéré dont la société est l'un des pionniers puisque ses premières réalisations datent de 1977.

La première solution est destinée aux caves autonomes, la seconde, collective, s’adresse aux Coopératives d'utilisation de matériels agricoles (CUMA) regroupant plusieurs viticulteurs géographiquement proches. Le procédé Vaslin Bucher, qui s'apparente à un traitement biologique extensif est issu des résultats d'un projet Fair Craft “Clean Oenology” dans lequel Vaslin Bucher a collaboré avec huit partenaires européens, dont les sociétés Purflo-Calona et Flygt, avec la participation d’organismes tels que le CIVC et le CSTB (France), le SLFA (Allemagne) et l’INCAVI (Espagne). La pollution est concentrée sur les périodes de vendanges et de vinification. Le traitement est effectué tout au long de l'année. Aujourd’hui, cette société compte plus de 50 installations en service dont un tiers à l'étranger, principalement en.

[Photo : Procédé à boues activées construit par Ternois Environnement à la cave du Bourdic (Gard).]
[Photo : KWI a réalisé une quinzaine de stations d'épuration dans le domaine vinicole. Avec des particularités intéressantes comme celle mise en œuvre pour Château Giscours qui a consisté à développer un procédé biologique à capacité variable.]

Espagne et au Portugal, mais également en Amérique latine. Elle met en œuvre le même procédé sur le traitement des vinasses de distilleries dans la région de Cognac ainsi qu'aux Antilles françaises.

Selon un schéma testé sur ces 50 installations, chaque station de traitement comporte les équipements suivants :

  • Aération du stockage : 1 ou 2 pompes Flygt C 3085 ou 3102 + hydro éjecteur ;
  • Pompe de recirculation du réacteur au bassin : 1 ou 2 pompes Flygt DP 3067 ou 3085 (+ compresseur d’aération) ;
  • Pompe d'injection sur filtre à sable : 1 ou 2 pompes immergées 5" inox ;
  • Pompe de relevage de la cave vers la station : 2 pompes Flygt C ou D plus éventuellement station préfabriquée ;
  • Pompes de service, de nettoyage automatique des sondes, etc.

Sodev propose un process similaire qui se complète d'un rejet sur filtre planté de phragmites : en fin de process, les eaux sont envoyées sur un filtre à sable planté de phragmites qui retient les MES résiduelles.

Labaronne Citaf propose également un traitement par stockage aéré, via son procédé Mérou'Viti, créé pour répondre aux contraintes des petites et moyennes propriétés vinicoles. Il s'agit d’un procédé rustique, adapté au rythme de l’élaboration des vins, d'utilisation simple pour des non-spécialistes de l’épuration permettant de rejeter l'eau traitée dans les milieux naturels sensibles avec des coûts d’investissement et de fonctionnement maîtrisés. Ce procédé est suivi par l’Agence de l'eau Rhône-Méditerranée-Corse (RMC) depuis l'année 2001. Le Mérou'Viti est une alternative intéressante entre le béton, relativement coûteux en investissement et en entretien, et la lagune (risques de chutes et de nuisances olfactives, impact visuel...).

L’évaporation naturelle ou forcée constitue également deux procédés de traitements intéressants. Le premier est peu répandu car trop largement dépendant des conditions climatiques. Le second a donné lieu à des développements intéressants. Traditionnellement, les systèmes de concentration d'effluents aqueux par évaporation naturelle sont basés sur l'utilisation de bassins peu profonds et étendus. La dimension de ces bassins est peu compatible avec la croissance des besoins et surtout la rareté des surfaces disponibles. Pour remédier à ce problème, Irrigaronne a conçu Nucleos, un système basé sur l'évaporation naturelle, qui accélère le processus et réduit l'espace.

[Photo : Nucleos est un système basé sur l'évaporation naturelle, qui accélère le processus et réduit l'espace occupé pour un prix de revient intéressant. Aux Caves de Vailhaures (34), 14 panneaux traitent environ 5 000 m³/an d'effluents vinicoles.]
[Publicité : ROSEAU PURE]
[Photo : SCM Tecnologie propose une gamme étendue d’équipements d’aération répondant à une grande variété de besoins d’oxygénation dans le domaine des effluents vinicoles.]

L’effluent est projeté sur une importante surface d’échange. La ventilation mécanique accélère le processus d’évaporation. L’effluent excédentaire retourne au bassin de stockage. Avec ce procédé, environ 95 % de l’effluent est évaporé ; il ne reste qu’à gérer les 5 % de concentrat, boues liquides qui peuvent être déshydratées ou valorisées en agriculture.

Sodev propose un procédé similaire avec une pulvérisation des effluents sur une maille en polypropylène.

Les traitements continus : des volumes plus importants

Les traitements biologiques aérobies font intervenir un traitement continu avec séparation de la phase d’aération et de décantation. Ils sont généralement utilisés dans les caves de grandes capacités. Le procédé se suffit à lui-même lorsqu’en raison de la concentration initiale des effluents, il y a plusieurs réacteurs en série. Il se caractérise par de bons rendements avec une élimination de 98 % sur la DCO, 99 % sur la DBO et 98 % sur les MES.

Plusieurs prestataires proposent aujourd’hui des équipements et services basés sur ces procédés et spécialement dédiés au traitement des effluents vinicoles. C’est par exemple le cas de la société Michael Paetzold qui conçoit et construit des stations d’épuration vinicole individuelles ou collectives, en assure la gestion tout en garantissant la qualité des rejets. C’est aussi le cas d’Agro Environnement : « Nous avons développé en traitement continu des systèmes intégrés dans des cuves en matériaux composites, explique Pierre-Yves Rioual d’Agro Environnement. Ces systèmes, brevetés, sont généralement enterrés. La première propriété à avoir installé un système de ce type pour obtenir un agrément des administrations est le château Cheval Blanc à Saint-Emilion. À ce jour, 180 propriétés nous ont suivis dans le Sud-Ouest de la France et en Espagne, parmi lesquelles Calon Ségur et les propriétés de l’INRA qui possède deux propriétés en Gironde ».

De son côté, Alba Environnement a développé des stations containerisées dont une dizaine fonctionnent actuellement en France : dans un container préfabriqué en béton les équipements (roue, clarificateur, armoire électrique, pompes…) sont montés en usine. Ceci permet une économie de génie civil importante. Ce procédé est constitué par un rotor immergé aux trois quarts présentant à sa périphérie des modules en polypropylène. Grâce à ceux-ci, le rotor assure à lui seul le brassage et l’aération du bassin biologique, tout en servant de support à une culture fixée. La rusticité et la simplicité du procédé le rendent bien adapté au traitement des effluents vinicoles. Une station de ce type a été installée pour traiter les effluents vinicoles du Château Mont-Redon à Châteauneuf-du-Pape (84) dont la production annuelle avoisine les 6 000 hl de vin avec un volume annuel d’effluents de 500 m³/an, une charge maximum en DCO de 17 000 mg/l et en DBO de 10 000 mg/l. Les performances épuratoires de la station ont permis de ramener la concentration en DBO à 100 mg/l, la concentration en DCO à 300 mg/l et la concentration en MES à 35 mg/l. Ce procédé est adapté pour des chais de 4 à 10 000 hl. Au-delà du container, pour les plus grandes capacités, les rotors seront de plus grande taille et installés dans des bassins réalisés sur mesure. La cave des Vignerons catalans (embouteillage de 400 000 hl/an) a été équipée d’une station Alba Environnement en 2005.

À noter qu’Alba Environnement propose également le procédé breveté FGR, un procédé de traitement des effluents par filtration gravillonnaire à recirculation, constitué par une virole remplie de granulats d’une porosité particulière, qui sert de support à une biomasse qui va dégrader la pollution. Une dizaine d’installations sont en service ou en cours de réalisation. Ce procédé a été suivi par l’Agence de l’Eau RMC en 2001. Mais le procédé FGR travaille de façon discontinue, uniquement durant les phases d’activité au sein de la cave. Il n’y a pas de gestion de boues. Il est bien adapté pour les caves de 500 à 3-4 000 hl.

De son côté, Aderbio Développement propose des unités compactes et modulables – STBR 1 (effluents vinicoles) et STBR 2 – intéressantes lorsque la dispersion des exploitations rend rédhibitoires les coûts de raccordement aux stations de traitement collectives. À partir de la fosse de stockage tampon, désormais obligatoire, dans laquelle

[Publicité : alba environnement]
[Photo : La technologie Provoe de Naskéo Environnement traite des vinasses de distillerie issues de la distillerie de Peyriac-de-mer (Aude 11). En régime stationnaire, l'installation fonctionne durablement sur ce digesteur avec une charge organique appliquée supérieure à 30 kg de DCO/m³/jour avec des rendements supérieurs à 80 %.]

On opère un prétraitement, l’effluent est repris à un rythme compatible avec la succession d’opérations de traitement : digestion bactérienne aérobie, précipitation, décantation et filtration, en cuves séparées.

La société Ternois Environnement propose quant à elle trois technologies pour traiter les effluents vinicoles : la traditionnelle boues activées dont un exemple est donné par la station de la coopérative du Bourdic dans le Gard, la technique SBR pour des petites caves (moins de 10 000 hl) comme à la coopérative de Passy Grigny en Champagne et la technique UASB qui met en œuvre des granules anaérobies et qui est en cours de construction chez Champagne Pannier à Château Thierry.

KWI, qui conçoit et réalise des stations de traitement des effluents industriels et urbains, a également réalisé une quinzaine de stations d’épuration dans le domaine vinicole. Avec des particularités intéressantes comme celle mise en œuvre pour Château Giscours qui a consisté à développer un procédé biologique à capacité variable. La station est constituée de deux bassins (1 bassin tampon et 1 bassin biologique). Hors période de vendange, le bassin tampon est vide et le bassin biologique fonctionne en SBR à mi-volume. Ceci permet de maintenir une quantité de biomasse juste suffisante pour traiter les effluents de l’année (embouteillage, soutirage…) et donc de garantir le rendement sans surconsommation d’oxygène puisque la quantité de biomasse est réduite.

En période de vendange, le bassin biologique est progressivement rempli et la biomasse adaptée à la nouvelle charge alors que le surplus est stocké dans le bassin tampon. Ainsi la quantité de flux polluant est parfaitement contrôlée. Le remplissage progressif du bassin biologique permet de garantir les normes de rejet et l’adaptation de la biomasse à la nouvelle charge. On peut donc passer d’une quantité de biomasse de 3 g/l × Volume du bassin / 2 à une quantité de biomasse de 6 g/l × Volume du bassin complet. Une fois les vendanges terminées et le bassin tampon vidé, on peut alors revenir progressivement à un fonctionnement hors saison.

Depuis le rachat d’Agrochem, fin 2004, Fairtec s’intéresse également au traitement des effluents vinicoles sur des exploitations de moyennes ou grandes capacités. Cette société qui figure parmi les leaders dans le domaine du traitement des levures de vinasses et des déchets des distilleries dispose en effet de toutes les technologies nécessaires (biologiques, membranaires, évapo-concentration, cristallisation…) pour s’implanter sur ce marché et y proposer des solutions adaptées, y compris dans le domaine de la méthanisation.

La méthanisation, un process adapté au traitement des effluents vinicoles

Du côté des traitements anaérobies, la méthanisation est également appropriée au traitement d’effluents vinicoles car elle permet d’abattre la DCO avec des rendements élevés. D’autre part, cette technique permet, si besoin est, un arrêt du réacteur pendant plusieurs mois sans inconvénient majeur. L’épuration s’effectue par des microorganismes anaérobies qui transforment la charge polluante en méthane, dioxyde de carbone et biomasse.

La distillerie de Thouarcé, qui ne souhaitait plus réaliser l’épandage de ses effluents liquides, a par exemple récemment commandé à Proserpol une station clé en main de traitement de ses effluents. Proserpol, ingénierie spécialisée en traitement des déchets liquides, a conçu un procédé en trois phases :

• Méthanisation des effluents avec récupération du méthane produit,

• Traitement biologique aérobie, en procédé SBR,

• Traitement physico-chimique de finition.

Ce process permet un abattement supérieur à 99,9 % de la charge organique biodégradable contenue dans les effluents.

La motivation de la distillerie de Thouarcé est de s’inscrire dans une logique de développement durable qui unit un retour sur investissement à une triple amélioration environnementale :

- Exploiter un important gisement d’énergie : la méthanisation de la biomasse contenue dans les effluents liquides de la distillerie produira chaque année l’équivalent énergétique en méthane de 700 tonnes de fuel lourd, soit une économie annuelle supé-

[Photo : Phytorem a développé un procédé original, le Bambou Assainissement®. Station à long terme et dispositif de goutte à goutte enterré.]

… à 250 000 € sur la facture énergétique de la société.

  • Réduire la production de gaz à effet de serre : le remplacement partiel du fuel lourd comme combustible pour les chaudières, par le méthane issu de la biomasse végétale contenue dans les effluents, réduira les émissions de CO₂ fossile dans l’atmosphère de plusieurs milliers de tonnes.
  • Supprimer le transport des effluents : les transports actuellement pratiqués génèrent beaucoup de rotations d’engins agricoles entre la distillerie et les lieux d’épandage. La disparition de ces transports constitue un progrès notable en termes de pollution atmosphérique et de nuisances pour le voisinage.

D’autres prestataires comme Bio-Environnement ou Naskeo Environnement possèdent également une bonne maîtrise de ce process dont les avantages, compte tenu du renchérissement des coûts de l’énergie, sont loin d’être négligeables.

Ainsi, Naskeo Environnement a développé en partenariat avec l’INRA la technologie Proveo® (Procédé de Valorisation des Effluents Organiques). Proveo® combine les points forts de deux technologies bien distinctes : les « lits fixes » et les « lits mobiles ». Dans un « lit fixe », les bactéries se développent sur une structure immobile, alors que dans un « lit mobile », elles s’accrochent à de petits supports mis en mouvement en permanence. Un réacteur pilote industriel est en fonctionnement depuis plus d’un an au Laboratoire de Biotechnologie de l’Environnement de Narbonne. Il traite des vinasses de distillerie issues de la distillerie de Peyriac-de-Mer (Aude 11). En régime stationnaire, l’installation fonctionne durablement sur ce digesteur avec une charge organique appliquée supérieure à 30 kg de DCO/m³/jour avec des rendements épuratoires supérieurs à 80 %.

La technologie SBR (Sequencing Batch Reactor) consiste en un traitement par batch des effluents. Une cuve qui contient les boues reçoit l’effluent à traiter, c’est la première étape. L’aération est mise en route et la réaction biologique de dépollution a lieu, c’est la seconde étape. L’aération est ensuite stoppée et les boues décantent au fond du réacteur : c’est la troisième étape (décantation). Lorsque les boues sont au fond, l’étape d’élimination de l’effluent traité commence : c’est la dernière étape. Le cycle ensuite recommence. Les Ateliers d’Occitanie de Narbonne ont largement appliqué cette technique avec succès. C’est environ 80 références qui ont été réalisées dans les laiteries et dans les caves vinicoles. Pour ces dernières, il faut compter une vingtaine de réalisations. Cette technologie est non seulement rustique mais elle affiche des rendements extrêmement intéressants.

À titre d’exemple, la cave coopérative du Quincié dans le Beaujolais produit 32 000 hl de vin par an. Elle a été mise en service en 1997 et traite 4,6 m³ par jour en période de vendange (avec une DCO moyenne de 21 000 mg/l). Ce procédé est équipé de 3 bassins de stockage de 140 m², de 3 réacteurs biologiques de 85 m² et de deux stockages de boues de 65 m². Les rendements obtenus sont les suivants : 98 % sur la DCO, 99 % sur la DBO et 95 % sur les MES. Le procédé est également proposé par Bio-Environnement en version cuves ou lagunes. Il combine les avantages d’un système extensif en termes de coût d’investissement puisque l’on économise un clarificateur grâce au mode de conduite spécifique et aux équipements, avec les avantages d’une boue activée, c’est-à-dire un encombrement plus réduit.

« Le procédé SBR est intéressant pour les toutes petites propriétés », analyse Pierre-Yves Rioual, directeur général d’Agro Environnement qui le met en œuvre occasionnellement. « Mais nous avons déposé un brevet…

[Photo : Contre étiquette du Côtes de Provence rosé, du domaine de la Lauzade au Luc en Provence (83)]
[Encart : Une solution écologique pour les viticulteurs et les petites communes ERE, filiale de la branche « Eau » du groupe lyonnais de travaux publics Serpollet (140 M € de CA, 1 000 personnes) va étendre son concept Roseaupare sur le plan national. Ce nouveau marché aura deux cibles : – Les vignerons afin qu’ils ne déversent plus leurs fonds de cuves dans les stations d’épuration communales ; – Les communes de moins de 2 500 équivalents habitants en substitution aux équipements classiques. Né de la recherche d’un groupe d’universitaires de Chambéry et commercialisé sous licence de savoir-faire par ERE depuis 3 ans, Roseaupare présente de nombreux avantages, à la fois écologiques et financiers : il permet une dépuration naturelle par un filtre à base de roseaux ; les eaux sont épurées par les bactéries qui se développent autour des racines. Utilisant la technique dite de lits à macrophytes, Roseaupare combine l’efficacité de filtres à percolation verticale à celle de filtres à écoulement horizontal au travers de complexes drainés et plantés de roseaux. La combinaison des filtrations verticale et horizontale permet un abattement de MES, DBO et DCO de l’ordre de 95 % et une réduction significative du taux d’azote, de phosphore et de bactéries pathogènes. C’est parallèlement une bonne alternative économique puisque le coût est 3 fois inférieur à une station d’épuration classique. Roseaupare ne produit pas de boues et peut garantir une qualité de rejet au niveau « D4 » avec une « qualité baignade ». À la différence des systèmes d’épuration par boues activées, la filtration permet de transformer les matières en suspension en compost ; il n’aura besoin d’être enlevé que tous les 10 à 15 ans. Depuis son lancement, 20 stations ont été équipées dans le grand quart Sud-Est de la France. Des recherches sont actuellement menées sur une unité pilote pour traiter les effluents industriels, phase d’un futur développement de l’entreprise.]
[Publicité : Permo]

l’an dernier qui est une extension du SBR avec possibilité de rejet des boues sur lits plantés de roseaux ».

Enfin, des solutions éprouvées existent également du côté de la phytoremédiation.

La phytoremédiation au secours des effluents vinicoles

Phytorem a développé un procédé original, le Bambou Assainissement®, suivi par l’Agence de l'eau depuis fin 2004 pour le traitement des effluents vinicoles. L’épuration des effluents est assurée par le système {climat-sol-bambou}. Les polluants organiques sont dégradés par la microfaune du sol et les éléments minéraux (N, P, K, Cu...) sont absorbés par le bambou. Ils se retrouvent en effet dans le chaume du bambou qui sera coupé à maturité et valorisé dans une filière bois énergie ou bois matériaux. L’efficacité du Bambou Assainissement® est supérieure à 99 % et ce sur tous les paramètres suivants (DCO, DBO, MES, N, P et Cu).

Elle a été démontrée par un comité scientifique comprenant l’INRA, l’IMEP/CNRS et la Chambre d’Agriculture des Bouches-du-Rhône grâce à un suivi rapproché portant sur le compartiment {eau – sol – bambou}. Chaque station Bambou Assainissement® est conçue sur mesure. Elle comprend une capacité de stockage de cinq jours de production d’effluents en pointe afin de ne pas épandre par temps de pluie et un dispositif de répartition homogène des effluents sur la plantation de bambous.

Le domaine de Sulauze à Miramas (13) a choisi un dispositif de goutte-à-goutte souterrain, tandis que le domaine de la Verrière au Crestet (84) a préféré un épandage par micro-aspersion sur trois terrasses végétalisées et distinctes.

Les eaux usées d’habitations proches ou des bureaux peuvent également être traitées. Contrairement aux systèmes classiques, le Bambou Assainissement® permet d’avoir zéro rejet hydrique par temps sec et le dimensionnement va permettre d’accepter une augmentation graduelle de la production de vin.

Enfin, le Bambou Assainissement® permet aux producteurs d’ajouter une valeur ajoutée environnementale au vin et d’être un acteur à part entière du développement durable comme le démontre le Domaine de La Lauzade dans le Var (83) et sa nouvelle contre-étiquette du millésime 2005.

Cet article est réservé aux abonnés, pour lire l'article en entier abonnez vous ou achetez le
Acheter cet article Voir les abonnements