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Eaux pures et ultrapures : à chaque usage sa pureté

30 octobre 2008 Paru dans le N°315 à la page 41 ( mots)
Rédigé par : Christian LYON

Il n?y a pas une sorte d'eau pure, la pureté se décline selon l'usage. La manière de produire cette eau pure dépend de la ressource utilisée et des volumes nécessaires. Vu les coûts de production, il est souvent avantageux de recycler. Chaque usage et situation sont donc des cas particuliers : les opérations unitaires de purification sont connues, reste à créer leur assemblage pour obtenir le procédé le plus économique relatif à un site. Les procédés physiques prennent le pas sur ceux utilisant des réactifs chimiques.

Il n’y a pas une sorte d’eau pure, la pureté se décline selon l’usage. La manière de produire cette eau pure dépend de la ressource utilisée et des volumes nécessaires. Vu les coûts de production, il est souvent avantageux de recycler. Chaque usage et situation sont donc des cas particuliers : les opérations unitaires de purification sont connues, reste à créer leur assemblage pour obtenir le procédé le plus économique relatif à un site. Les procédés physiques prennent le pas sur ceux utilisant des réactifs chimiques.

Réalisé par , Technoscope

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On pourrait croire que la pureté de l’eau est absolue, il n’en est rien. Elle se discute en fonction de l’usage final et de ses contraintes techniques, physico-chimiques et biologiques, lesquelles peuvent se doubler d’exigences réglementaires, notamment ce qui concerne la santé. Plus que la pureté absolue, souhaitée uniquement par l’industrie électronique, c’est donc la recherche d’une qualité spécifique de l’usage, fondée sur des taux d’impuretés acceptables ou non en fonction de l’usage final qui va orienter le choix sur tel ou tel procédé et la manière de l’exploiter. D’autres paramètres orientent le choix des procédés utilisés pour la production d’eau pure : la consommation journalière et les débits de pointe à fournir, la capacité à moduler les débits, certains procédés étant plus souples que d’autres. Les résines échangeuses d’ions supportent des variations de débit, les membranes requièrent des débits plutôt constants. Rien de commun entre une centrale électrique qui produit de la vapeur à raison de plusieurs centaines de tonnes par heure et un atelier de production de quelques dizaines de mètres-cubes par jour.

[Encart : Les grands intervenants de l’eau ont développé des services d’approvisionnement d’urgence parfois de très grosse capacité capables d’intervenir en quelques heures à travers l’Europe. Principaux procédés mobiles utilisés, les membranes (osmose inverse) et l’échange d’ions installés sur des remorques mobilisables en quelques heures. Ici, une unité mobile Pall Aria.]

Le coût de production est impacté par la nature de la ressource, la consommation énergétique et les consommables, que l’on peut globalement relier à des préoccupations environnementales. Les ressources en eau doivent être épargnées, il faut économiser en mettant en œuvre des circuits de circulation d’eau intelligents : cascades de rinçages, réintroduction d’eau peu polluée en amont du cycle... etc. Réduire

[Encart : Du nouveau en matière de filtration sur charbon actif Pentair Water Filtration est spécialisé dans la filtration de l’eau dans le domaine industriel, qu’il s’agisse de purifier l’eau, de réduire ou d’éliminer des contaminants d’un fluide dans un process, de protéger un équipement sensible ou d’en allonger la durée de vie. De la filtration des sédiments à la filtration absolue en passant par la filtration sur charbon actif, de nombreuses cartouches sont disponibles en plusieurs dimensions avec un grand choix d’embouts selon les applications. Le choix en corps de filtres, qu’ils soient en polypropylène ou en inox, est également étendu et permet de réaliser des systèmes de filtration performants. En matière de filtration sur charbon actif, la dernière née de Pentair Water Filtration est la cartouche ChlorPlus Big Blue®. Existant en 9 3/4’’ et 20’’, son diamètre « Big Blue® » de 117 mm vient compléter la gamme déjà existante des ChlorPlus en diamètre 72 mm et permet de traiter des débits encore plus conséquents. La ChlorPlus Big Blue® présente des performances intéressantes d’adsorption du chlore et permet aussi de réduire efficacement les chloramines. En charbon de bois extrudé, en µm nominal, elle est particulièrement adaptée aux applications critiques de traitement de l’eau, notamment en protection des membranes d’osmose.]

L’utilisation de produits chimiques, donc les effluents, est un avantage des procédés membranaires qui n’ont pas besoin d’être régénérés à la différence des résines échangeuses d’ions (le nettoyage des membranes peut nécessiter des produits mais de manière moins massive). Les économies sont importantes puisque cela supprime toute une partie gestion des produits et traitement d’effluents sans parler d’une emprise au sol moindre et de l’élimination de certains risques.

La chasse aux coûts, une certaine tendance vers l’externalisation de services jouent aussi dans la production d’eau pure : faut-il conserver en interne la production, la propriété des installations ou tout déléguer ? Selon l’importance des besoins, de la pérennité envisagée de la production, les généralistes tels Veolia Water STI, Ondeo Industrial Solutions, Permo ou encore des spécialistes tels que Degrémont Technologies-Aquasource, Pall ou encore Rohm and Haas proposent toute une gamme de solutions, jusqu’à la prestation sécurisée d’un débit d’eau avec une qualité donnée au point de consommation. Dans ce cas l’eau pure devient une commodité au même titre que le courant électrique et d’autres fluides. L’eau très pure est un élément clé du procédé de fabrication : toute interruption de fourniture entraîne des coûts de non-production qui peuvent se chiffrer en millions d’euros par jour. Les grands intervenants de l’eau ont développé des services d’approvisionnement

[Encart : Quelques technologies en bref Trois technologies de base : * échange d’ions : agit sur la conductivité ionique, élimine les espèces ionisées, cations et anions de toutes sortes, y compris certaines matières organiques. Ces résines spécifiques sont régénérables, parfois jetables pour la très haute pureté. Élimination totale des ions dans la limite des équilibres chimiques. Capables de grands débits. Pas stérilisables. * membranes : de microfiltration MF, ultrafiltration UF, nanofiltration NF et osmose inverse OI, par taille décroissante des espèces retenues, depuis des particules en suspension jusqu’à des espèces dissoutes. Peuvent éliminer des gaz dissous (CO₂, oxygène, ammoniac...). Rétention sur un mode statistique : 95…99 % de “particules” retenues. Avantages principaux : modularité, pas de régénération par produits chimiques. * électrodéionisation (EDI) : combine l’échange d’ions aux techniques membranaires avec pour agent régénérant le courant électrique, donc sans réactifs chimiques. Utilisé en aval de l’OI pour déioniser. Les chaînes de purification d’eau utilisent des procédés connexes comme le charbon actif (adsorption d’espèces organiques dissoutes, oxydants) ultraviolet et l’ozone pour la stérilisation au niveau des stockages et boucles de distribution d’eau.]

d’urgence parfois de très grosse capacité capables d’intervenir en quelques heures à travers l’Europe. Principaux procédés mobiles utilisés, les membranes (osmose inverse) et l’échange d’ions installés sur des remorques mobilisables en quelques heures proposées par Veolia Eau Solutions & Technologies (Aquamove™), Ondeo Industrial Solutions (Omobile™), GE Water & Process Technologies (Service Mobile Water), Permo, Pall, Tecnofil Industries, Infilco ou encore Maisonneuve Environnement.

Des technologies matures

Un premier paramètre important est la

[Photo : Pour des besoins ponctuels ou des situations d’urgence, GE Water and Process Technologies propose une large gamme d’unités mobiles : déminéralisation, désoxygénation, filtration, osmose inverse et bien d’autres encore.]

Eau pure, très pure... ?

Le vocabulaire courant est ambigu, chaque secteur utilise son jargon; seule la pharmacopée est précise dans sa terminologie. L'européenne distingue l'eau pour injectable (vaccins, perfusions) qualité PPI, l'eau hautement purifiée pour la préparation de médicaments non injectés (buvable, usage externe...), et l'eau purifiée pour d'autres usages techniques. Les États-Unis retiennent deux catégories : injectable qualité WFI water for injection, et purifiée. L'eau PPI doit forcément être distillée, à la différence de la WFI produite par la seule utilisation des membranes. Un critère essentiel de cette eau est la conductivité de 1,3 µS/cm à 25 °C aux USA et 1,1 à 20 °C en Europe, ce qui revient au même (la conductivité varie avec la température). L'eau purifiée en Europe doit avoir une conductivité inférieure à 4,3 µS/cm à 20 °C et 1,3 à 25 °C aux États-Unis qui se montrent plus exigeants. L'eau hautement purifiée en Europe reprend le critère de conductivité de la PPI, confirme la notion de stérilité (essentielle pour les produits en contact avec les muqueuses) mais accepte une production par procédé membranaire. Les pratiques sur un site, européen ou américain, seront donc influencées par la destination des produits fabriqués :

Il est préférable de partir d’une eau de la meilleure qualité possible, mais on ne maîtrise pas la situation géographique ni les variations saisonnières qui conditionnent la qualité et ses variations. Tout le monde n’a pas la chance de disposer d'une eau de forage abondante et douce sous son usine (cf. encadré chimie). On sait traiter toutes les eaux, y compris l'eau de mer, mais le coût final du mètre cube obtenu s’en ressentira. Si la ressource n’est pas de bonne qualité, l'eau subit un conditionnement chimique suivi d’une clarification par coagulation, floculation et décantation, avec filtration du surnageant sur des filtres multimédia de finesse croissante ainsi que sur du charbon actif pour retenir les espèces en suspension, les substances organiques dissoutes et certains ions. Ce prétraitement s'apparente à une potabilisation de l'eau et débouche sur les traitements de purification spécifiques à l’utilisation finale.

Les grands acteurs de l'eau pure s’accordent à dire que les technologies actuelles sont matures même si l'on note encore des améliorations. « Le point critique n'est pas la technologie ; osmose inverse, électrodéionisation... etc. sont maintenant des procédés courants. Ce qu’il faut, c’est trouver la meilleure solution pour le client compte tenu des particularités du site (ses ressources en eau, son personnel, le type d’exploitation et le degré d’automatisation souhaité). Les préoccupations environnementales, le souci de réduire l’utilisation de produits chimiques entrent de plus en plus dans l'esprit du projet » affirme Samah Ringa, Responsable marchés pharmacie et biotechnologie chez Permo BWT.

Bernard Faure, Directeur commercial industrie de Veolia Water STI insiste : « Il ne faut pas se bloquer au départ sur une seule technologie. L’important, c'est la ressource disponible et une bonne étude des besoins du site pour employer au mieux les procédés existants ; rien n'est écrit d’avance, tout dépend du contexte ».

Frédérick Cousin, Chef de marchés chez Degrémont Technologies confirme : « les procédés sont bien connus, il n’y a pas vraiment d’évolution sur les boucles de distribution d’eau pure ces dernières années ».

Les offreurs de technologies et d’installations tels que Degrémont Technologies Aquasource, Degrémont Technologies-Ozonia, Veolia Water STI, Ondeo Industrial Solutions, Pall, Christ, Permo, GE Water Process & Technologies, Tecnofil Industries, France Eau... ont à leur catalogue un large éventail de briques technologiques avec des modules de capacité variée pour réaliser ces assemblages pertinents sous forme de solutions clé en main.

Des avancées technologiques ponctuelles

Les résines échangeuses d’ions proposées par Rohm and Haas, Purolite ou encore Lanxess, bénéficient d’améliorations constantes destinées à accroître leur résis-

[Photo : Unité d'ultrafiltration en micro électronique. Réalisation Christ.]
[Publicité : Afig Foessel]

Sites chimiques : de gros besoins

[Photo : Les sites chimiques consomment de l'eau à la fois pour un usage général, pour l'énergie, la production de vapeur, le refroidissement et pour des usages particuliers au sein des procédés.]

Les sites chimiques sont souvent spécialisés sur un type de production. Ils consomment de l’eau à la fois pour un usage général, pour l’énergie, la production de vapeur, le refroidissement et pour des usages particuliers au sein des procédés ; pour cet usage les exigences sont très bien définies, et pour cause, les chimistes savent ce qu’est la pureté. « Ces utilisateurs savent ce qu’ils veulent, ne souhaitent généralement pas qu’un intervenant extérieur entre dans leur procédé ; chaque industriel veut une production et des boucles à des niveaux de pureté spécifiques. Généralement, ils mettent en œuvre eux-mêmes », explique Frédérick Cousin, Degrémont Technologies.

Ces industriels se mettent aussi à externaliser. Veolia Eau gère un gros contrat en Corée du Sud pour quatre usines situées sur deux parcs pétrochimiques : production de caoutchoucs et de résines synthétiques, matériaux pour l’électronique et cogénération chaleur-électricité. Au total 14 500 m³/j d’eaux de procédés, 2 000 m³/j d’eau adoucie, 1 200 m³/j d’eau déminéralisée, plus de 2 000 m³/j d’eau domestique, plus les besoins d’eau de refroidissement et le traitement des effluents.

Autre exemple : Arkema à Balan dans l’Ain, près de Lyon, qui produit notamment du PVC par polymérisation en suspension dans l’eau et du PEVA (acétate de vinyle). Le site dispose d’eau de forage de la nappe phréatique, plutôt pure puisqu’elle serait potable en l’état (très peu de matières en suspension). Cette eau sert au réseau d’eau brute, au réseau incendie et à la production d’eau pure scindée en deux qualités : eau déminéralisée pour le procédé et eau alimentaire pour la chaudière haute pression (40 bar). L’eau déminéralisée est produite à 160 m³/h dans des installations Arkema : le forage alimente directement une succession résine cationique/élimination du gaz carbonique par flux d’air/résine anionique. Les critères principaux sont la conductivité inférieure à 5 µS/cm et la silice inférieure à 200 ppb. Cette eau ne doit pas contenir de substances pouvant déstabiliser l’équilibre délicat nécessaire à la polymérisation en suspension. Comme on lui ajoute le catalyseur et des additifs spécifiques, la pureté souhaitée est transitoire.

L’eau d’alimentation de chaudière est sous-traitée à Nalco. C’est l’eau déminéralisée complétée par des traitements qui éliminent la silice, le fer et l’oxygène dissous à moins de 20 ppb (dégazage thermique et utilisation de produit chimique Eliminox) et corrigent le pH ; conductivité visée : moins de 5 µS/cm. L’eau reçoit des produits spécifiques avant injection en chaudière. Nalco traite aussi les eaux de refroidissement du site. Ce site dispose d’une installation de cogénération exploitée par Dalkia, alimentée par l’eau déminéralisée du procédé. Au travers de cet exemple on voit la diversité des besoins et des réponses possibles en termes d’exploitation.

Leur capacité de rétention et la facilité de régénération (rapidité de l’échange d’ions) sont également déterminantes. Bernard Faure considère comme une avancée technologique importante l’apparition de résines à grande vitesse d’échange. « Cela modifie totalement la conception des installations. Quand la régénération d’un lit prend plusieurs heures, il faut pour assurer le débit utiliser des installations duplex, avec un lit opérationnel et l’autre en régénération. Pendant les temps d’attente l’eau est stagnante, créant un risque de prolifération bactérienne. Si la régénération est rapide, au lieu de travailler avec de grands intervalles entre opérations, on répète l’opération plusieurs fois par jour. Vu les concentrations utilisées en soude et acide, les éventuelles bactéries sont détruites, le risque est ainsi très amoindri. »

Le risque bactériologique est une menace à la fois en pharmacie (risque santé) et en microélectronique (salissure). Les bactéries doivent être inhibées (détruites) et les résidus éliminés. D’où le développement des procédés de stérilisation en considérant les possibilités techniques des matériaux utilisés. En pharmacie, la stérilisation thermique est prisée par les autorités médicales : 121 °C et 20 minutes ou 90 °C une heure, tout le monde est tranquille et, de plus, la traçabilité est facile à établir car ces paramètres sont facilement mesurés et enregistrés. Mais il faut que les matériels utilisés supportent ces conditions de température et de pression (d’où les canalisations inox) ; l’opération est consommatrice d’énergie et de temps. On voit apparaître des dispositifs automatiques de décontamination thermique sur des ensembles OI+EDI. On utilise aussi l’acide péracétique ou le peroxyde d’hydrogène, mais il faut réaliser des cycles de rinçages assez longs. L’alternative est l’ozone, bactéricide puissant, utilisable en désinfection continue et traitement de choc. « D’autant plus qu’on sait le générer in situ, directement à partir de l’eau pure utilisée dans le circuit par électrolyse (appareil Membrel® MKIII) donc sans apport extérieur. L’ozone présente aussi l’avantage de ne pas générer de sous-produits. Pour détruire l’ozone résiduel dissous dans l’eau, on utilise des réacteurs. »

[Photo : Membranes céramiques pour traiter les eaux issues du process textile. Réalisation Fluides et Automation.]
[Photo : Générateur d’ozone Membrel® de Degrémont Technologies Ozonia.]

Maintenir et mesurer la pureté

Les utilisateurs souhaitent une pureté garantie aux points d'utilisation, ce qui impose d’être très vigilant sur la distribution : stockage, nature des canalisations (matériau et réseau), et installations devant résister aux conditions de stérilisation. Les canalisations pour la pharmacie, la cosmétique, sont en inox alors que la microélectronique privilégie les polymères fluorés genre PVDF pour la tenue à l’oxydation et la propreté particulaire. L’installation ne doit pas contenir de point mort où l'eau risque de stagner. L'eau est distribuée par boucle de circulation reliée à un stockage pour éviter les stagnations et répondre aux fluctuations de demande.

La mesure des paramètres de pureté est automatique en exploitation, complétée par prélèvement pour vérifier l'installation et les instruments. « La mesure devient un réel problème car les niveaux d'impuretés demandés s'expriment en ppt (partie par millième de milliardième 10-12) sur certains éléments ou paramètres comme le COT » souligne Sylvain Zitelli, spécialiste eau pure chez Christ. L'instrumentation arrive à suivre jusqu’à présent. GE Analytical Instruments, avec le Sievers UPW Boron, revendique le seul appareil à mesurer en continu le bore à des concentrations de l'ordre du nanogramme par litre (ppt) dans les eaux déionisées, particulièrement en microélectronique. Un double avantage, car le bore est sans doute l'espèce la plus difficile à retenir (espèce faiblement ionisée) et sa concentration est une indication de la pureté ionique ultime. La société est aussi leader pour la mesure du COT (carbone organique total) dans les eaux ultrapures (Sievers TOC Analyzer 500 RL online et 500 RLe pour la microélectronique, par exemple). Le contrôle de la pureté en laboratoire bénéficie des appareillages les plus sensibles. Mais, aux niveaux de pureté pratiqués, toute opération doit être soigneusement pensée et réalisée. Certains interlocuteurs mentionnent des cas de contamination d’échantillon au moment du prélèvement !

[Photo : Ecoskid* est la dernière génération d’unités compactes de Degrémont Technologies-Aquasource, conçue pour le traitement des eaux industrielles et potables. Sa gamme de production d’eau ultrafiltrée varie de 30 à 200 m³/h par unité.]

Ultraviolet spécialement conçu pour cette application (appareil Aquaray® LPTS) » explique Frédérick Cousin. « L’ultraviolet à 185 nm est actif sur le COT et à 254 nm sur les bactéries » précise Bernard Faure. D'où le fort développement de ces techniques ozone et UV dans la purification d'eau ces dernières années. Avec toutefois quelques limitations : les membranes échangeuses d’ions des procédés EDI ne supportent pas l’ozone (mais supportent maintenant une décontamination thermique à 90 °C) et celui-ci n’est plus soluble dans l'eau à 60 °C, des limitations contournées par une mise en œuvre astucieuse des opérations. Reste à vaincre certaines barrières psychologiques pour qu’ils se généralisent dans tous les secteurs.

En matière de dégazage, ces dernières années, on observe l’utilisation de plus en plus fréquente de membranes pour éliminer le gaz carbonique dissous, responsable de conductivité et peu apprécié des membranes EDI : « mais cela vient doucement », constate Sylvain Zitelli, Christ. Parmi les avancées récentes, et sous la pression de la hausse des coûts de l’énergie, le recyclage d'eau au niveau de l’osmose inverse progresse. « Retraiter une partie de l'eau rejetée par la membrane OI et la récupérer en amont de l’alimentation économise l'eau, d’autant plus qu’on travaille sur de gros débits » remarque Samah Ringa, Permo.

Des domaines d’application spécifiques

Le secteur le plus exigeant en termes de pureté est la microélectronique, qui ne veut que l'eau H₂O, à sa résistivité théorique de 18,2 MΩ·cm (soit une conductivité de 0,055 µS/cm) à 25 °C, sans particules. La finesse de gravure, la sensibilité des propriétés électriques à certains éléments imposent l'utilisation de tous les procédés connus. Typiquement, après le traitement primaire, l'eau passe par une microfiltration, du charbon actif, deux étages d’osmose inverse, de l’échange d’ion en lit mixte et de l’UVC (COT, bactéries) avant de rejoindre le bac de stockage qui distribue l’eau au travers d’une boucle. Sur cette boucle, et pour garantir la pureté, on retrouve de l’ozone (à détruire par de l’UVC), un dégazeur sous vide et des étages de micro- et ultrafiltration.

La double OI

[Photo : Permo a développé son action industrielle par secteur d’activité. Un groupe d’ingénieurs spécialisés par branche est au service des agences régionales afin d’être le plus au fait des techniques spécifiques à chaque activité et de développer des solutions spécifiques répondant à une demande très précise.]
[Photo : Unité de production d’eau ultrapure. Réalisation Veolia Water STI.]

peut être remplacée par OI et EDI. On utilise aussi certains échangeurs d’ions très spécifiques sous forme de cartouches jetables pour des espèces comme le bore.

Les eaux de chaudière destinées à la production de vapeur pour les turbines électriques nécessitent une haute pureté. On peut produire aussi de la vapeur à des fins de chauffage d’appareillage. Les volumes se comptent en milliers de mètres-cube par heure.

Le traitement primaire d’eau brute est souvent aussi dimensionné à la fois pour la consommation d'eau de refroidissement et la production d’eau pour la vapeur. On distingue deux classes de pression, moyenne (inférieure à 60 bar) et haute pour les pressions supérieures requérant des puretés différentes. En la matière, les prescriptions de la VGB allemande ont souvent force de loi : « le premier critère est la conductivité, inférieure à 0,2 µs/cm complété par des prescriptions sur les teneurs en silice, fer, cuivre, sodium généralement souhaités à moins de 20 ppb. Un paramètre prend de l’importance ces dernières années, le COT (carbone total) souhaité à moins de 0,3 ppm, éliminé par des résines spécifiques » constate Sylvain Zitteli de Christ. Ces substances minérales et organiques en se déposant encrassent les circuits, baissent leurs performances et provoquent des balourds. Le phénomène est particulièrement aigu en haute pression et d’autant moins souhaitable que ces installations fonctionnent en continu sur plusieurs années.

Caractéristique de ces grosses installations, la redondance demandée pour ne pas risquer de rupture d’approvisionnement. « Ce secteur privilégie la déminéralisation par échange d’ions. Notre première référence en France avec membranes d’osmose inverse à double étage et procédé EDI d’électrodéionisation (Septron module spiralé spécifique de Christ) sera bientôt démarrée à Fos-sur-Mer sur une unité de 2 × 20 m³/h. Une chaîne de traitement originale qui se justifie par la faible teneur en COT demandée (0,2 ppm). Nous essayons de pousser cette technologie dans le domaine de l’énergie » explique Sylvain Zitelli. Mais il faudra convaincre ce milieu très attaché à l’échange d’ions.

Le secteur cosmétique suit les exigences de la pharmacie à la différence qu’il n’utilise pas d’eau de qualité injectable. L’échange d’ions est très utilisé, mais aussi l’osmose inverse dans laquelle le double étage fait souvent place à une succession OI + EDI. Là encore, on constate l’arrivée de l’ozone pour la pureté bactériologique. Globalement, les marchés se déplacent vers les pays de l’Est et l’Extrême-Orient, que ce soit pour la microélectronique, la pharmacie (génériques) et l’énergie (chaudières au charbon, en Chine, Inde etc.). À l’avenir, « Les prix de l’eau et de l’énergie façonneront l’évolution des procédés. Des membranes d’OI avec seulement 10 % de rejet d’eau, une plus grande tolérance des membranes d’électrodéionisation EDI à des eaux plus chargées en sels… pourraient élargir les possibilités d’utilisation de ces procédés et modifier les schémas de traitement » promet Bernard Faure.

[Photo : Les systèmes d’ultrafiltration Aquamem de Polymem pour de petits débits (500 l/h à 5 m³/h) sont conçus pour la production d’eau potable ou de process à partir d’eau douce souterraine ou de surface.]
[Publicité : guide-eau.com]
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