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Eaux pluviales : définir une approche globale

30 novembre 2004 Paru dans le N°276 à la page 81 ( mots)
Rédigé par : Marie-odile MIZIèRE et Pascal LYON

La pollution générale du milieu par ruissellement des eaux de pluie urbaines est importante. Les risques d'inondations, liés à l'augmentation constante des surfaces imperméabilisées, s'accroissent. Deux raisons pour traiter le problème des eaux de pluie de manière globale. Les outils et méthodes ne manquent pas.

[Photo : Système “clé en main” Tubosider de gros diamètre : Ø 2800 par tuyaux de 13 m l de long.]

Lors de Novatech 2004, conférence internationale sur les techniques et stratégies durables pour la gestion des eaux urbaines par temps de pluie, Michel Desbordes de l'Université de Montpellier concluait la conférence sur les trois points suivants :

  • Les eaux de pluie doivent se traiter dans une approche globale du problème urbain de l'eau ;
  • Il faut réaliser le contrôle des eaux de pluie en quantité et en qualité le plus en amont possible ;
  • Les techniques dites alternatives (appelées aussi compensatoires) sont arrivées à maturité.

Dans les faits, le traitement des eaux de pluie relève à la fois des problèmes de qualité et quantité. Qualité d’abord, parce que les eaux de pluie, plutôt propres lorsque la

[Photo : Filiale du groupe Bonna Sabla, BMS met sur le marché des cuves béton destinées aux stockages enterrés de grandes capacités.]

La goutte arrive au sol entraînant de nombreuses pollutions particulaires, organiques, minérales et par métaux lourds. Leur traitement s'inscrit directement dans la directive cadre européenne sur le bon état environnemental des ressources en eau (directive cadre de mars 2000 sur la protection de l'environnement, applicable en 2015). Mais ce traitement coûte cher. En investissements d'abord, avec la réalisation d’ouvrages de récupération des eaux pluviales. En traitement de dépollution ensuite, avec la construction de stations d’épuration lorsque les eaux les rejoignent.

Quantité enfin, car les surfaces imperméabilisées génèrent des flux parfois très importants localement. Ils conduisent à des inondations urbaines soudaines et, à une échelle plus grande, participent aux crues de rivières à l'aval (par solidarité dans le bassin versant). De plus, la politique de l’évacuation rapide des eaux de pluie n’est pas favorable au rechargement local des nappes. Devant le manque d’eau récurrent de certaines régions, l'infiltration locale après épuration est une réponse de plus en plus prise en compte dans le monde. Tout ceci passe par une bonne connaissance des flux.

Bien identifier les flux

Au fil des ans, la connaissance de la pollution des eaux de pluie en fonction des surfaces collectées s'accroît. Il faut en tenir compte dans le choix des dispositifs utilisés. Mais le problème n'est pas simple. À l’échelon européen, une réflexion pour le contrôle à la source des eaux pluviales est en cours avec le programme « daywater ». L’objectif est de fournir un système d’aide à la décision.

« Globalement, la tendance qui se dégage pour l’avenir est un traitement à la parcelle pour éviter de concentrer le flux des eaux pluviales et éviter leur rejet direct en rivière » explique Bernard Chocat de l’Insa de Lyon et animateur du Graie. En Europe, les systèmes d’eaux usées et pluviales du futur seront unitaires et très structurés. Le nombre de points de rejet au milieu naturel sera limité et déconnecté des eaux résiduaires pour ne pas les diluer. Localement, celles-ci seront infiltrées et/ou stockées.

* www.daywater.org

Pour ce qui concerne la réutilisation des eaux pluviales, il faut trouver un équilibre entre intérêt privé et public. Les stockages privés (eau des toits) ne représentent pas forcément une réserve de stockage dans une optique de réduction des ruissellements puisque les foyers souhaitent conserver de la réserve d'eau, réduisant d’autant la capacité de stockage transitoire communautaire. En matière d’eaux pluviales, il faut considérer les deux fonctions : la prévention des inondations et le traitement de la pollution de ces eaux.

Prévenir les inondations

Le choix d'une solution sera très dépendant de la topographie de l'agglomération et du régime de ses précipitations, du réseau existant ou à créer, de la nature des activités locales et des possibilités d’évacuation. Toute une gamme de solutions existe : depuis le très technologique avec « la gestion en temps réel du réseau de collecte et simulation du remplissage de réseau et de bacs intermédiaires », jusqu’à des solutions passives plus rustiques mais élaborées de « rétention graduée des eaux pluviales avec au passage, épuration spécifique par décantation des particules, par filtration par des bassins plantés, voire échange d'ions pour retenir des métaux dissous ». La gestion temps réel, qui suppose une ingénierie bien faite, est conçue pour le quotidien et non pour les événements extrêmes lors desquels le réseau est saturé. Ceci suppose une région instrumentée vis-à-vis de la pluie, disposant d'images radar, d’estimation des précipitations, de pluviomètres et de chroniques de pluies pour pouvoir alimenter le modèle local et prendre les décisions de gestion. Ceci suppose aussi une bonne connaissance de l’organisation des réseaux et de leur état réel. Ce dispositif est assez lourd. Seules certaines villes des pays déve-

[Photo : Vue du caisson d’infiltration nettoyable D-Raintank du groupe Funke.]
[Publicité : TUBOSIDER]

loppés commencent à s’en équiper.

Il est possible d’aller au-delà du problème d’écoulement de l’eau et de s’intéresser au transfert de pollution dans le système.

Gérer les flux et traiter les pollutions

Saint Malo, par exemple, s’est dotée d’un logiciel de simulation dans lequel le paramètre matière en suspension est intégré. Il permet de choisir le mode de gestion du réseau en temps réel qui aura le moins d’impact au niveau des rejets. Dans les faits, sur le terrain, deux options existent, basées sur des dispositifs de surface ou enterrés. Les premiers font appel à l’aménagement de la topographie : réalisation de noues, de tranchées, de bassins, voire l’utilisation de zones inondables dédiées normalement à d’autres activités (installations sportives, promenades) pour encaisser des épisodes centennaux. Très souvent, ces dispositifs ont une capacité naturelle d’épuration par rétention des matières en suspension et minéralisation de matière organique. Ces méthodes alternatives font l’objet d’une base de données internationale (projet Stormwater database*) dans laquelle sont évaluées les performances hydrauliques et dépolluantes de ces ouvrages. Leur emploi se généralise dans une démarche urbanistique globale

*www.bmpdatabase.org

[Photo : Surfsep d’Hydroconcept conjugue dégrillage et décantation.]

comme le montrent de nombreux projets.

Les événements pluvieux diffèrent d’une région à une autre. Leurs intensités n’étant pas linéaires, il est primordial d’en contrôler le débit afin d’optimiser les performances des ouvrages de traitement en aval. C’est pourquoi Techneau, spécialisée dans l’ingénierie de l’eau, a développé une large gamme d’accessoires hydrauliques permettant une gestion optimale des débits de fuite. Les modèles HydroRegul assurent une régulation précise du débit alors que les modèles HydroVortex permettent un contrôle du débit selon une hauteur d’eau définie lors de l’étude (cf. courbes de régulation).

Pour contrôler au mieux l’épuration, il est possible d’installer en aval d’un ouvrage (y compris un déversoir d’orage) des filtres plantés de roseaux comme le préconise Dirk Esser de la société Sint qui a une grande expérience de ce type de filière en matière de traitement des eaux usées. Pour le traitement des eaux pluviales, les filtres ont été conçus pour pouvoir assurer à la fois un rôle de rétention et de traitement. De tels ouvrages tests ont été installés avec succès à Toulouse (31), Neydens (74), Geispolsheim (67) ; et de telles solutions ont déjà été préconisées depuis plus longtemps en Allemagne et au Royaume-Uni, où elles ont prouvé leur efficacité. Prochainement dans le Grand Lyon, une telle installation traitera et retiendra, à la sortie du même collecteur unitaire, les eaux usées prétraitées de quelques habitations par temps sec, et toutes les eaux par temps de pluie, afin de protéger un petit cours d’eau particulièrement fragile.

Autres solutions, les chaussées et zones de parking à revêtement poreux à structure réservoir.

Simples, ils apportent un effet indéniable sur la lame d’eau. Les solutions techniques mises à disposition sont nombreuses avec des corps de remplissage de formes diverses et de plus en plus à base de polymères à base de matières recyclées. Citons par exemple, Nidaplast Honeycombs et ses plaques Nidagrass et Nidagravel ou encore EcoVegetal et ses structures de

[Photo : Pour le stockage des eaux pluviales, Nidaplast Honeycombs propose Nidaplast® EP ou Nidagreen® EP.]
[Publicité : Rohrenwerk Gebr. Fuchs GmbH]
[Photo : Dispositif de filtration lamellaire et d’obturation.]

rétention végétalisée Ecovegetal Green en matériau 100 % recyclé et recyclable, Europe Environnement et ses panneaux alvéolaires en thermoplastique Pano-Plast ou encore Permavoid et son système géosynthétique qui se substitue à une couche granulaire traditionnelle, grâce à sa résistance mécanique pouvant atteindre 160 tonnes/m³. Ce système peut aussi être utilisé en multicouche en intégrant le Permaceptor, un décanteur intégral pour les huiles et carburants. Ces systèmes ne sont pas passifs et les hydrocarbures y subissent une dégradation.

Une autre solution consiste à ralentir de façon mécanique et hydraulique l'arrivée des eaux de pluie, de ruissellement et de drainage. C’est par exemple la fonction remplie par le régulateur de débit vortex UFT-Fluid-Vertic destiné à limiter le débit des eaux pluviales dirigé vers l'aval du réseau et notamment vers les séparateurs d’hydrocarbures. Les régulateurs vortex FluidCon permettent également la limitation de débit en eaux unitaires. On peut également citer le dispositif de retenue Aqua Regul®, présenté par Prefaest, dans les fossés contigus aux voies de circulation routière. Il s’adapte aussi bien aux fossés existants qu’à ceux nouvellement créés. Ce dispositif rétenteur se dépose tout simplement dans les fossés engazonnés afin de bloquer l'eau. De son côté, Rehau a développé un système de drains spécifique combinant les différentes fonctions dans une tranchée comprenant la diffusion et l'évacuation de l'eau stockée temporairement. La conception du drain Rausikko lui permet ainsi d’assurer le recueil, le stockage temporaire et la restitution régulée soit par infiltration soit vers un réseau public.

Cependant, l’aménagement de surface n'est pas toujours possible, il faut alors recourir à des réseaux surdimensionnés qui font office de capacité de stockage ou à la construction de bassins, à l’installation de modules préfabriqués. Ainsi la surface n’est pas bloquée et peut servir à la circulation par exemple. Dans une configuration analogue, Aquia Environnement propose avant restitution dans le milieu récepteur des eaux pluviales collectées, une gestion des débits en intégrant en aval d'un bassin de restitution de type Nydaplast ou autre, l'intégration d'un régulateur de débit à flotteur latéral suivi d'un décanteur particulaire enterré, à structure lamellaire inclinée, permettant la rétention des particules fines et de la pollution associée (As ; Cd ; métaux lourds...) par sédimentation et flottation des hydrocarbures. La capacité maximum de rétention est détectée par une alarme signifiant l'obligation de vidanger les matières piégées. Cette filière a été mise en œuvre avec succès sur la commune de Deauville-Trouville en collaboration avec le bureau d'études SODEREF.

La palette des solutions est très large (par exemple le caisson d'infiltration nettoyable D-Raintank du groupe Funke, les modules Nidagreen EP et Nidaplast EP de Nidaplast Honeycombs). Pour résoudre ce problème, Tubosider propose Spir'elle II 125x25, pouvant atteindre 3,6 m de diamètre pour réaliser les réservoirs tampon d'orage. De son côté, BMS, filiale du groupe Bonna Sabla, met sur le marché des cuves béton destinées aux stockages enterrés de grandes capacités. L'offre, composée jusqu'à présent de cuves béton monoblocs de 3 à 30 m³, comprend dorénavant des pièces de 30 à 55 m³. Livrées sur chantier en deux éléments, le montage est réalisé par assemblage mécanique simple et rapide et ne nécessite aucun apport supplémentaire de béton.

Une autre solution consiste à transformer de façon temporaire le réseau en réservoir. Pour cela, les obturateurs, commercialisés par Satujo, Musthane, ou Pronal peuvent constituer une solution intéressante sur une surface limitée.

Dans ces équipements, la pollution peut être éliminée en grande partie au niveau des bassins de stockage transitoire. La chose n'est pas triviale car les particules issues du ruissellement sont très fines et difficilement décantables. Certains bassins sont très élaborés : le séparateur vortex FluidSep développé par la société UFT permet de concentrer les effluents dirigés vers l'aval et de limiter les rejets au milieu naturel. Il permet en outre, à rendement équivalent avec un bassin d’orage classique, de diminuer jusqu’à 40 % le volume du bassin à mettre en place. Les matières flottantes sont également piégées en grande partie dans ce séparateur. Mis en œuvre pour la première fois en 1987, de très nombreuses installations ont été depuis réalisées. Différentes campagnes de mesures ont permis de constater leur efficacité. L’eau est introduite tangentiellement dans l'appareil. Il en résulte un écoulement peu turbulent, très favorable à la séparation des matières en suspension. De par sa conception, l'auto curage de l'ensemble est assuré, ce qui permet notamment de réduire

[Photo : Aqua Regul® de Prefaest s'adapte aussi bien aux fossés existants qu'à ceux nouvellement créés.]
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[Photo : Séparateur Vortex UFT/FluidSep]

les coûts d'exploitations. Cette solution est adaptable à différentes tailles de bassins versants. Dans le même esprit, Bordeaux s'est équipée d’un bassin où l’énergie de l'eau arrivante est canalisée pour réaliser un mouvement circulaire qui favorise la décantation. Degrémont recommande son dispositif Densadeg. Il s’agit d'un décanteur lamellaire physico-chimique (utilisation d’un coagulant et d’un polymère) à circulation de boues. Matières en suspension et colloïdales, DBO5, métaux lourds, phosphore sont éliminés avec des rendements élevés. Un équipement qui s’installe au niveau d'une station d'épuration, des villes comme Metz, Méru, Limoges s'en sont équipées.

Ces ouvrages sont opérationnels après rétention des particules grossières et des déchets qui ne manquent pas d’être entraînés par les fortes pluies. Différentes solutions sont commercialisées.

Pour les déchets fins, UFT commercialise un dégrilleur fin horizontal ROMAG ainsi qu'un tamis filtre rotatif autonettoyant à mettre en œuvre sur un déversoir d’orage avec une maille de 25 x 3 mm, comme cela a été le cas par exemple sur le bassin de Grigny. Ce dégrilleur permet une retenue parfaite des particules en suspension et surnageantes dans l'effluent.

Pour les déchets grossiers, UFT France commercialise un tamis filtre rotatif, un dégrilleur fin et un filtre Vortex pour séparer les particules de 50 à 3 mm de diamètre. Hydroconcept propose la solution Surfsep qui conjugue dégrillage et décantation. Elle est constituée d’une cuve en béton et d'une grille cylindrique, toutes deux installées verticalement.

L’effluent est dirigé tangentiellement au centre de la grille par un anneau en béton. L’eau et surtout les refus de dégrillage (inférieurs à 3 mm), sont mis en mouvement devant la grille, ce qui interdit les phénomènes de colmatage. Ceci aboutit à une séparation indirecte en continu. L’anneau de béton qui constitue une cloison siphoïde, permet la rétention des liquides légers pouvant être déversés accidentellement dans le réseau.

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