À l’aube du XXIᵉ siècle, il est devenu possible de rendre potable toutes ressources en eaux, même fortement contaminées.
En revanche, la difficulté reste de garantir cette qualité au robinet de l’usager.
Le problème de la distribution d’eau se pose alors en termes de qualité des ouvrages, tels que les réseaux de distribution.
En effet, la vétusté des réseaux de distribution pose de nombreux problèmes, à la fois techniques et économiques : doit-on mener des actions préventives et/ou curatives ?
Aujourd’hui, seul un diagnostic précis du réseau de distribution d’eau permet de
[Photo : le véhicule laboratoire “AQUADIAG”]
SARP “Réseaux de Distribution” a mis au point un outil de diagnostic : AQUADIAG.
Cet outil offre une approche globale des problèmes de réseaux de distribution d'eau potable et apporte un ensemble de préconisations aux gestionnaires du réseau en permettant :
- de suivre l'évolution de la qualité sanitaire de l'eau en distribution ;
- d’évaluer le degré d’encrassement des conduites et leur localisation ;
- d'apprécier l'état mécanique des conduites et leur degré de vétusté (métallographie).
Préparation du diagnostic
Le bon diagnostic relève d'une phase indispensable : la synthèse des documents d’exploitation. Celle-ci permettra de définir la campagne de prélèvement.
Menée en collaboration étroite avec l’exploitant du réseau d’eau potable, elle permettra d’obtenir le maximum d'information quant à la conduite d’exploitation. Ci-après sont repris quelques documents nécessaires tels que :
- Carte du réseau ;
- Données géologiques ;
- Âge et nature des conduites ;
- Conduite d’exploitation (volume produit, pressions, débits, temps de séjour...) ;
- Rendement du réseau ;
- Fréquence de renouvellement des conduites ;
- Causes du renouvellement et taux de rupture ;
- Plaintes abonnés avec localisation ;
- Qualité des eaux brutes ;
- Date des installations de filière de traitement (ex : déferrisation, démanganisation, décarbonatation...) ;
- Analyses récentes des eaux de distribution.
Réalisation du diagnostic
Suivi de l’évolution de la qualité de l’eau
L’AQUADIAG est un laboratoire mobile, capable de réaliser in situ des analyses physico-chimiques et bactériologiques. Tous les prélèvements sont effectués sur les hydrants placés sur le réseau, ainsi aucune perturbation d’exploitation n'est engendrée lors du diagnostic.
L’AQUADIAG dispose d'une boucle de prélèvement faible débit (PVC diamètre 40 mm) (figure 1), celle-ci permet de réaliser dans des conditions de parfaite répétabilité des prélèvements de 500 l/h (condition prélèvement abonné). Cette boucle est équipée de capteurs capables de mesurer en continu la turbidité, le pH, l’oxygène dissous, la température et la conductivité (photos 2a et 2b).
D’autres paramètres sont mesurés après prélèvements tels que : fer total, manganèse, titre hydrotimétrique, aluminium, silice, chlore résiduel, coliformes et E. coli. Les mesures bactériologiques sont effectuées au moyen du test Collilert 18 h.
L’ensemble des résultats est présenté sous forme graphique ou cartographique (figures 2 et 3), on visualise ainsi le profil de la qualité.
[Figure : Schéma des boucles de prélèvement à faible et fort débit]
[Photo : Boucle de prélèvement fort débit]
[Photo : Capteurs placés sur la boucle de prélèvement]
[Photo : Présentation des résultats sous forme graphique]
[Photo : Présentation des résultats sous forme cartographique]
qualité de l'eau en distribution.
Localisation et évaluation du degré d’encrassement des conduites
La boucle fort débit (PVC diamètre 100 mm) permet de réaliser à 60 m³/h des prélèvements répétables (figure 1). Pour les conduites de diamètre inférieur à 150 mm, l'effet recherché est la remise en suspension des dépôts présents à la surface interne des conduites.
La maîtrise des conditions de prélèvement (durée, débit) ainsi que la connaissance de l'hydraulique du réseau nous permet de connaître avec exactitude le linéaire réellement sollicité lors du prélèvement. L'interprétation des résultats d’analyse nous apportera des informations sur la localisation et le niveau d’encrassement des conduites.
Cette boucle est équipée d'un turbidimètre capable de suivre l’évolution de la turbidité sur la conduite sollicitée lors du prélèvement fort débit ; on dispose également d'un cône de prélèvement (10 litres) et d'un dispositif de filtration afin de réaliser des mesures de matières en suspension (photo 3).
D’autres paramètres sont mesurés après prélèvements tels que : fer total, manganèse, TH, aluminium, silice, chlore résiduel, coliformes totaux et E. coli.
L'intérêt d'une double mesure sur un même point de prélèvement (faible et fort débit)
[Photo : Arbre de décision]
[Photo : Le dispositif de filtration]
nous amène à caractériser l’interaction entre conduite et eau, ainsi une zone est définie comme critique lorsque l’encrassement d'une conduite est tel qu’il détériore la qualité de l’eau.
De plus, les mesures bactériologiques effectuées à fort débit nous renseignent des contaminations sous dépôt, cette information ne pourrait être obtenue par une simple mesure à faible débit. L’intérêt étant de pouvoir anticiper par des actions préventives des non-conformités bactériologiques à moyen ou long terme.
Appréciation du degré de vétusté des conduites
Cette étape va consister à prélever des échantillons de conduite sur le réseau afin de pratiquer des analyses métallographiques. Ces prélèvements pourront être effectués soit lors de la réalisation du diagnostic, soit régulièrement dans le cadre de l’exploitation (intervention suite à rupture). Une photo de la coupe transversale (photo 4) est réalisée après avoir défini le niveau d'obstruction selon la classification suivante :
- Niveau I : SL / SN > 75 %
- Niveau II : 50 % < SL / SN < 75 %
- Niveau III : 25 % < SL / SN < 50 %
- Niveau IV : SL / SN < 25 %
SL : surface libre
SN : surface nominale
L’analyse métallographique est précédée d'une étape de sablage qui consiste à remettre à nu les faces interne et externe de la conduite (photo 5). On mesure ensuite un ensemble de paramètres tel que :
- - épaisseur résiduelle de la conduite ;
- - densité de piqûre des faces interne et externe ;
- - profondeur moyenne des 30 plus importantes piqûres sur chaque face.
Ces informations nous permettent de caractériser :
- - l’état de fragilisation de la conduite ;
- - la vitesse de corrosion ;
- - la durée de vie de la conduite.
Synthèse des résultats et recommandations
L’ensemble des résultats est analysé et discuté avec l’exploitant du réseau, ce travail permet d’aboutir sur la mise en forme d’un rapport qui décrira l'ensemble des recommandations. De plus une classification des interventions par ordre de priorité sera proposée.
En ce qui concerne les analyses métallographiques réalisées régulièrement suite à interventions sur réseau (fuite, casse...), les résultats viendront enrichir une banque de donnée confidentielle accessible par serveur (Internet, Intranet...).
En effet, le diagnostic AQUADIAG devra être à même d’apporter aux gestionnaires des solutions concrètes, l'arbre de décision proposé (figure 4) résume la logique de l'approche AQUADIAG.
[Photo : Évolution du niveau d'encrassement sur une coupe transversale]
Conclusion
À ce jour, plusieurs diagnostics ont été réalisés ; ils ont permis au gestionnaire du réseau d'eau potable :
- • de mieux gérer son budget :
- - d'investissement pour le renouvellement des conduites ;
- - d'exploitation pour les campagnes de nettoyage ;
- • d’optimiser la localisation des filières de retraitement en distribution (poste de rechloration, traitement anticorrosion etc.) ;
- • d’optimiser les circulations d’eau.
Véritable outil d’auto-contrôle, l’AQUADIAG vient ainsi s'inscrire dans la démarche Qualité du distributeur d'eau.
[Photo : Conduites obtenues avant et après sablage]