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Des sels d'aluminium hautement polymérisés pour le traitement des eaux

30 juillet 1987 Paru dans le N°111 à la page 56 ( mots)
Rédigé par : J.-p. COMMUNAL

Les procédés de traitement physico-chimique des eaux chargées de matières en suspension et colloïdales, notamment dans les secteurs de potabilisation et de préparation d’eau industrielle à partir d’eau de surface, ont évolué depuis une vingtaine d’années vers des filières de plus en plus rapides, dépassant un débit de 10 m³ par m² d’ouvrage. Pour atteindre des vitesses de fabrication dix fois plus élevées que celles permises par les techniques conventionnelles, le praticien disposait, dans le passé, de coagulants métalliques du type monomère (sulfate d’aluminium, chlorure et chloro-sulfate ferrique) auxquels on adjoignait un polyélectrolyte naturel, version alimentaire, dérivé de l’amidon ou des alginates et même, dans certains pays où leur emploi est autorisé, des produits de synthèse de haute pureté.

Afin de simplifier la tâche des exploitants, des produits polymérisés de l’aluminium génériquement nommés P.A.C. (polychlorure d’aluminium), sont alors apparus. Cette forme polymérisée permet d’obtenir des coagulats à cinétique de formation beaucoup plus rapide et de moindre fragilité au cisaillement. On peut les employer sur des filières de coagulation rapide, souvent sans adjuvant, ce qui restreint l’emploi de ce dernier au conditionnement du coagulat. Or, vient d’apparaître sur le marché un produit très hautement polymérisé : le polysulfate d’aluminium (P.A.S.), dont l’intérêt principal réside dans l’amélioration des performances obtenues avec la première génération des P.A.C. :

  • — amélioration de la cinétique de coagulation-floculation ;
  • — alimentation des filières de traitement à haut flux ;
  • — diminution des problèmes relatifs à la génération de boues dues au traitement physico-chimique ;
  • — diminution de la salinité des eaux produites, lorsque ce critère revêt une importance de premier ordre.

Il nous est apparu souhaitable de préciser dans ce cadre les caractéristiques de ces produits qui occupent maintenant une place particulière dans la promotion des techniques dites rapides.

Coagulation-floculation

La déstabilisation des colloïdes est un phénomène réversible, dans lequel le pH du milieu intervient par son action sur les ions fixés aux particules (théorie de Gouy-Chapman). Par ailleurs, les polysulfates d’aluminium (1) se caractérisent par une très haute masse moléculaire qui diminue la sensibilité du produit au milieu et améliore le comportement des coagulats. Ceci se traduit, macroscopiquement parlant, par une grande homogénéité dans la qualité des flocs produits (lesquels présentent peu de microflocs) et par une très bonne décantabilité, ce qui est dû à deux phénomènes :

  • — importante énergie de cohésion des flocs, les rendant moins sensibles à la fragmentation ;
  • — grande activité du pouvoir coagulant de la matière active, permettant de conserver une efficacité floculante, même à très faible taux d’emploi, sur des eaux d’étiage nécessitant peu de traitement.
[Photo : Plage de floculation (eau de Loire très chargée : 100 NTU).]

La possibilité qu’offre le P.A.S. de concilier un traitement coagulant optimum avec une cohésion importante des coagulats permet de simplifier la conduite des installations par un meilleur ajustement des doses de traitement. On peut ainsi, notamment, développer l’automatisation de l’étape physico-chimique des filières, opération que seuls peuvent permettre de façon satisfaisante les réactifs à cinétique rapide adaptés aux traitements de milieux soumis à d’importantes variations de qualité, voire de qualités extrêmes (très chargés ou peu chargés).

Des filières de traitement à haut flux

Avec la modernisation des filières de traitement et l’adaptation des unités conventionnelles à des flux de production atteignant ou dépassant 10 m³ d’eau produite par m² d’ouvrage, l’utilisation de polyélectrolytes ou d’adjuvants de floculation de toute sorte est devenue dans certains cas une nécessité, notamment en eau froide, pour les coagulants monomères (figure 3). L’utilisation d’un produit hautement polymérisé permet ainsi :

  • — d’optimiser le fonctionnement de filières existantes ;
  • — de tirer un meilleur parti des adjuvants, dont un dosage mal adapté peut conduire à un colmatage rapide des ouvrages de filtration.

Par ailleurs, les très hauts coefficients de cohésion des boues que l’on obtient, ainsi que la diminution de leur volume font de ce type de produit un réactif de choix à utiliser dans les unités de coagulation sur filtre.

[Photo : Evolution du traitement jusqu’en eaux très peu chargées (courbes-type).]
[Photo : Fig. 3. Coef. de cohésion (courbe type)]

Problèmes de comportement des boues

Les colloïdes et matières en suspension forment des boues qui sont récupérées dans les épaississeurs des ouvrages de décantation. L'utilisation d’un produit de très haute masse moléculaire comme le P.A.S. permet d’obtenir des flocs d’une densité apparente supérieure à celle résultant de l'emploi des produits et techniques conventionnels, ce qui se traduit en pratique par l'obtention de boues dont les vitesses d’épaississement sont plus élevées (dv/dt) de 20 à 100 % (figure 4). La conséquence immédiate de l'opération est la réduction du volume des boues préconcentrées purgées des décanteurs, ce qui a pour corollaire, avec des purges bien réglées, une moindre perte d’eau (– 20 à 40 %). L’économie produite peut atteindre plusieurs points dans les cas difficiles d’eaux très chargées (figure 5).

Une deuxième conséquence est l’amélioration du fonctionnement des épaississeurs, ce qui permet leur meilleur dimensionnement.

En outre, la diminution du poids d’hydroxyde métallique par tonne de pollution éliminée permet l’optimisation des réactifs de conditionnement et, dans certains cas, la diminution du volume global des gâteaux de boues conditionnées.

[Photo : Fig. 4. Épaississement des boues (1/m)]
[Photo : Fig. 5. Production de boues épaissies (30 minutes)]

Diminution de la salinité

L'augmentation de la salinité des eaux, même faible, est une préoccupation majeure :

  • — dans l'industrie, car elle entraîne des problèmes de corrosion des circuits ;
  • — dans le traitement de l’eau potable pour assurer le maintien d’un niveau optimum de qualité.

La nature très hautement basique des P.A.C. et P.A.S. et leur grande efficacité permettent d’optimiser leur emploi, en entraînant une diminution très importante des rapports en ion chlorure (0,048 mg/ppm.¹) et en ion sulfate (0,042 mg/ppm.¹) par rapport aux traitements utilisant les coagulants monomères (figure 6). Il s’ensuit que la très faible augmentation de la salinité entraînée par ce traitement permet de réduire l’importance des postes de conditionnement des eaux pour circuits industriels, notamment dans le cas où l’eau brute employée est de qualité médiocre, ou lorsqu’elle comporte un taux élevé de réutilisation (papeterie, cartonnerie, sidérurgie, industrie lourde, etc.).

Très globalement, ce nouveau réactif présente un bon nombre des avantages que l’on attendait du traitement antérieur, associant coagulant minéral monomère et adjuvant de floculation (polyélectrolyte), sans présenter les inconvénients de colmatage de filtres ou de compétition entre la coagulation des matières organiques et l'amélioration de la floculation par des adjuvants ; il n’est pas concurrent des polyélectrolytes adjuvants de floculation : il permet au contraire d’en tirer le meilleur parti là où ceux-ci sont nécessaires ; il procure ainsi une amélioration de l'homogénéité des traitements et n’entre pas en compétition avec ces derniers dont le domaine reste fixé au conditionnement des boues afin de satisfaire certains cas particuliers.

[Photo : Fig. 6. PAS – apport d’anions pour un dosage de 100 g/m³ (produit technique)]

(1) L’Aqualenc (fabrication Rhône-Poulenc) est lui-même un P.A.S.

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