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Des canalisations en polyéthylène pour les réseaux d'eau potable

30 mai 1988 Paru dans le N°119 à la page 47 ( mots)
Rédigé par : Louis LE GUERN

En moins de 40 ans, et comme on peut le constater journellement, les produits de l'industrie pétrochimique ont sensiblement modifié notre mode de vie...

Le développement d'un produit pétrochimique repose sur deux éléments : le premier est l’évolution de la croissance économique globale (PNB) ; le deuxième, pour chaque produit, est le coefficient de « pénétration », qui représente son évolution par rapport à la croissance de base.

Depuis sa conception jusqu'à sa « maturité », la croissance du produit est d'abord lente ; elle s'élève ensuite jusqu'à un point d’inflexion à partir duquel elle décroît et, finalement, approche de zéro ou même entame une croissance négative.

On peut définir la pénétration du marché par le rapport qui existe entre la demande et un indice de la production industrielle ; ainsi, la demande peut augmenter si l'économie progresse, même si la pénétration décroît... La figure 1 représente une courbe hypothétique qui indique, pour l’Europe de l’Ouest, la place de quelques-uns des dérivés chimiques principaux sur la courbe de « maturité ». L’ABS, le PP, le PEHD, le PEBDL y sont en progression ; le PEBD, largement développé, atteint son maximum ; les PVC (rigides et souples), comme le SBR, atteignent le stade de la décroissance.

[Photo : Fig. 1 : Courbe de maturité « typique » (Europe de l’Ouest).]

Cette évolution est une caractéristique essentielle de la pétrochimie que son dynamisme innovateur conduit constamment vers le perfectionnement des techniques : des produits qui ont fait leurs preuves font place à des produits plus performants, à des prix souvent plus bas, adaptés aux conditions économiques. Tous les efforts ainsi entrepris pour faire reculer les frontières technologiques reflètent la volonté de progrès de cette industrie après vingt années de production de masse aux spécifications standard.

Des stratégies nouvelles deviennent nécessaires pour accompagner cette évolution. C'est ainsi que des techniques fiables ont permis l'emploi des polyéthylènes haute et moyenne densité (PEHD et PEBDL) pour la réalisation de réseaux de distribution de gaz et de transport d’eau soumis à des pressions atteignant 40 bars, où ils remplacent l’acier et la fonte à des coûts considérablement réduits. La production des tubes, des raccords et autres accessoires suit l’extension constante de la demande.

La densité du PEHD est d’environ 0,95 (1,5 fois moins que le PVC et 8 fois moins que l’acier). Les caractéristiques du produit, définies par des normes (ISO, ASTM, AFNOR, etc.) sont particulièrement remarquables :

  • — résistance à la traction : 19 MPa,
  • — allongement à la rupture > 800 %,
  • — dureté et module d’élasticité élevés 500 N par mm²,
  • — module de flexion 700 MPa,
  • — résistance au choc et à l’effet d’entaille (résilience),
  • — température de fusion de 115 °C environ,
  • — résistance aux solvants et aux hydrocarbures,
  • — imperméabilité aux gaz et vapeurs,
  • — résistance aux fendillements,
  • — résistance au vieillissement, aux agents chimiques contenus dans le sol, aux micro-organismes, insensibilité aux courants vagabonds,
  • — rigidité diélectrique > 10¹² ohms,
  • — résistance à l’éclatement supérieure à une heure à tension de charge de 14,7 MPa à 20 °C,
  • — facilité de mise en œuvre,
  • — durée de vie supérieure à cinquante années.

Les tubes en PEHD et PEBDL les plus utilisés pour distribuer l’eau en France sont en général conformes au standard PN10. Les additifs employés dans leur fabrication sont de qualité alimentaire. Les diamètres courants utilisés pour l’emploi des accessoires électrosoudables s’étagent de 20 à 160 et jusqu’à 250 mm. Il est même possible d’obtenir des tubes extrudés de 450 mm et davantage. Leur rapport diamètre/épaisseur est le plus souvent de 11. Des pièces spéciales existent pour réaliser les liaisons métal-PE.

Dès 1979, Gaz de France a employé ces tubes pour la construction de réseaux de distribution de gaz naturel en moyenne pression (4 bars). 5 000 km ont ainsi été posés en 1985, contre 250 km en 1975. L’ensemble des réseaux construits suivant cette technique atteint 60 000 km.

Base de la technique de pose

Elle repose sur deux principes :

  • — pose de tubes en polyéthylène de grande longueur : plusieurs centaines de mètres d’un seul tenant ;
  • — assemblage des tubes par raccords électro-soudables en polyéthylène.

Le tube PE, réalisé en grande longueur, permet une pose rapide tant en site rural qu’en milieu urbain. Diverses techniques sont employées à cet effet : déroulage en continu avec touret mobile, tirage au treuil, tubage d’anciennes canalisations. L'utilisation des moyens modernes de terrassement associés au déroulage simultané accroît les performances de pose.

Quelques produits importants de la pétrochimie

PRODUITS ABRÉV. USAGES PRINCIPAUX
Polypropylène PP Plastiques moulés, fibres, films...
Acrylonitrile-styrène-polybutadiène ABS Électroménager, électronique, automobile...
Oxyde d’éthylène EO Antigels, tensio-actifs, polyuréthannes...
Alcool isopropylique IPA Acétone, solvants, cosmétiques...
Polyéthylène basse densité PEBD Feuilles, films, fils, tuyaux, moulage par injection...
Polyéthylène haute densité PEHD Moulage par injection, extrusion-soufflage, tubes, tuyaux...
Polyéthylène basse densité linéaire (dite aussi « densité moyenne ») PEBDL Tuyaux, bouteilles, feuilles, films, isolation électrique, revêtements de sol, jouets...
Polychlorure de vinyle PVC Tuyaux, bouteilles, feuilles, films, isolation électrique, revêtements de sol, jouets...
Élastomère butadiène styrène SBR Caoutchouc d’usage général, pneus, peintures...
[Photo : Tuyaux en polyéthylène prêts à l'emploi.]
[Photo : Soudure d’un manchon.]

À l'origine, le procédé a été développé en utilisant des tubes PE de 20 à 125 mm ; plus récemment, l’extension de cette technique à des diamètres plus élevés (160 et 200 mm) a entraîné, dans le domaine du PE, de nouvelles recherches concentrées sur deux points principaux : les mécanismes de soudage et l’analyse de la géométrie du joint.

Il en est résulté une meilleure sélection des matériels et la création de nouveaux outillages d'emploi plus facile sur le terrain, tels les systèmes automatiques de soudage, qui ne requièrent pas le réglage de paramètres électriques et qui correspondent à une méthode opératoire simple et rapide. L’élément de base des raccords électrosoudables est un manchon en PE contenant des enroulements métalliques dont l’échauffement par effet Joule entraîne la soudure avec les tubes par fusion du polyéthylène. Leur pose est effectuée sous contrôle rigoureux, ce qui permet de s’affranchir des vérifications isolées d’étanchéité des assemblages.

L’emploi d’un outillage universel spécialement adapté (positionneur, poste de soudage) garantit la qualité de la mise en œuvre. La bonne exécution des soudures, notamment, est due à l’automatisation des procédés de soudage, d’une utilisation extrêmement simple et qui peuvent être employés quelle que soit l’origine des accessoires électrosoudables (figure 2). L’énergie est fournie par un transformateur alimenté par le réseau, ou par un alternateur entraîné par un moteur thermique (groupes autonomes de chantier) qui délivrent une puissance de 2 à 4 kW pour l’électrosoudage ou 10 kW pour l’électrochauffage (système utilisé pour la réparation des fuites).

[Photo : Machine à souder.]
[Photo : Schéma d’un manchon électrosoudable.]

Les réseaux d’eau potable

Tous les équipements employés pour la réalisation des réseaux de gaz sont utilisés dans la construction des réseaux d'eau potable établis couramment, notamment à Paris, dans des diamètres de 160 mm et sous des pressions de 14 bars. Cette technique commence à être mieux connue en France et à se développer en suivant l’exemple des autres pays d’Europe (figure 3).

On constate cependant une lenteur relative de cette progression, due à plusieurs facteurs :

  • — une certaine résistance au changement permet aux matériaux traditionnels de conserver une position dominante ;
  • — des gammes complètes d’accessoires n’ont pas encore été réalisées par tous les fabricants. De nombreux matériels se développent, les pertes de charge dans la robinetterie et les prises de branchement, acceptables pour la distribution de gaz, ne l’étant pas pour l'eau ;
  • — le tracé des canalisations nécessite une adaptation aux conditions d'emploi du polyéthylène.

Il est certain toutefois que cette nouvelle technique devrait connaître très rapidement un grand succès. Cette promotion sera assurée par le coût peu élevé de cette technologie et par sa fiabilité qui repose sur la sélection rigoureuse des matériels utilisés (résines PE, tubes, raccords etc.), sur le choix du mode de jonction entre tubes (électrosoudage), et sur les règles strictes de mise en œuvre tenant compte des résultats des recherches menées ces dernières années.

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