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Des adaptations de techniques pour plus de fiabilité

30 mai 2002 Paru dans le N°252 à la page 32 ( mots)
Rédigé par : Bernadette LACAZE

Prévisibles, les modifications introduites par le décret du 20 décembre 2001 ne provoquent pas de bouleversement technologique dans les méthodes d'analyse. C?est un changement de conception des méthodes qui voit le jour.

« Les exigences fixées par le nouveau décret sur l'eau potable ne vont pas entraîner des changements notoires des méthodes d’analyse, mais une évolution philosophique du travail du laboratoire », explique Sylvie Rauzy, ingénieur en chef au Crecep (Centre de recherche et de contrôle des eaux de Paris).

Aujourd’hui, les laboratoires sont tenus d’utiliser des méthodes de références normalisées. Celles-ci subsistent lorsque la méthode influe sur le résultat : dans le cas de la mesure des paramètres biologiques ou des paramètres indicateurs globaux comme la turbidité. Pour les autres paramètres physico-chimiques, le laboratoire pourra choisir sa méthode à condition de prouver ses performances au regard d’un cahier des charges imposant justesse, fidélité, limites de détection et de quantification. Exigences de moyens et de résultats sont attendus. Le laboratoire devra prouver sa compétence technique et sa maîtrise de la méthode envisagée. L’ensemble est sous-tendu par un contrôle de qualité tant interne qu’externe. Des conditions indispensables pour obtenir l’accréditation pour telle ou telle prestation d’essais.

Choisir sa méthode

« Les laboratoires vont pouvoir développer des techniques, plus performantes, plus rapides, plus économiques », remarque Claude Hennequin, directeur du laboratoire Wolf-Environnement et par ailleurs président de la commission essais des eaux à l’Afnor.

Parallèlement, les constructeurs et fabricants ont proposé ces dernières années des appareils avec des sensibilités et fiabilités améliorées, notamment pour les faibles teneurs. Pour contrôler l'eau potable, on retrouve les

[Photo : Le Stamosens CNM750/CNS70 de Endress + Hauser est un analyseur de nitrates en continu qui présente la particularité de fonctionner selon un principe optique.]

grandes techniques de l’analyse chimique : chromatographie gazeuse, chromatographie liquide haute performance, spectrométrie d’émission (plasma ICP), spectrométrie d’absorption (four graphite), spectrométrie de masse (SM) et aussi les couplages de méthodes : chromatographie gazeuse et spectrométrie de masse (CG-SM) ou spectrométrie d’émission plasma et spectrométrie de masse (ICP-SM). Ce ne sont pas des appareils dédiés ; ces techniques et ces appareils sont relativement adaptables pour le contrôle de l'eau potable. Ainsi, les solvants chlorés (trihalométhanes, tri et tétrachlorométhanes), déjà demandés en pratique, sont contrôlés par chromatographie gazeuse. Quelques laboratoires, dont le Crecep, pratiquent l'analyse des radio-éléments dans l'eau soit par chromatographie soit par séparation à sec.

Pour les bromates, un des sous-produits de la désinfection, une méthode basée sur la chromatographie ionique (chromatographie liquide haute performance) est normalisée. Reste à affiner la préparation de l’échantillon et la préconcentration pour détecter les seuils abaissés.

Acrylamide, épichlorhydrine, chlorure de vinyle, issus des matériaux plastiques servant à contenir ou véhiculer l'eau potable, sont également à rechercher mais pour l’instant une ambiguïté demeure : seront-ils à rechercher dans l'eau ou dans les matériaux ?

[Photo : Awa Datalink propose également une gamme d’appareils d’analyse de l’eau en continu : l’analyseur de chrome VI qui utilise la méthode de spectroscopie UV.]

Quoi qu’il en soit, le Crecep a initié dès 1998 une thèse sur le sujet et a développé une méthode interne valable pour rechercher ces éléments dans l’air ou dans l’eau.

10 ml seulement de produit suffisent, il n’est pas nécessaire d’utiliser des solvants, la phase d’extraction automatisée s’effectue en ligne. Il s’agit d’une SPME (micro-extraction en phase solide) par adsorption sur un polymère déposé sur une fibre de silice rétractable. On chauffe pour faciliter la volatilisation. Cette phase d’extraction doit être réalisée dans un délai très court car les éléments recherchés, et plus particulièrement l’épichlorhydrine, sont très instables dans l’eau. L’analyse est faite par chromatographie gazeuse et spectrométrie de masse. La microsystine-LR est à rechercher en cas de prolifération algale dans les eaux brutes.

Cette substance produite par des algues est violemment toxique. Le Crecep est en train de mettre au point une méthode, un travail qui est également en cours au niveau international ; une norme ISO est en préparation.

Compteur de particules pour organismes pathogènes

Le décret renforce la valeur limite de la turbidité de l'eau (1 NFU pour la limite de qualité des eaux destinées à la consommation humaine et 0,5 NFU en tant que paramètre indicateur de qualité, témoin de fonctionnement des installations de production et de distribution) avec l’objectif de limiter la présence de parasites (cryptosporidium et giardia) dans les eaux. Les eaux superficielles mais aussi les eaux souterraines vulnérables doivent être filtrées.

« Si la turbidité peut rester un indicateur de la présence de pathogènes, avec de telles valeurs limites (0,5 NFU, soit environ 0,3 NTU), elle ne peut rendre compte de la quantité d'éléments pathogènes », remarque Antoine Montiel, responsable de la mission scientifique pour la qualité de l'eau à la Sagep, société qui est en train d'introduire des compteurs de particules en différents points de ses installations afin de détecter les étapes à risque dans le cycle de filtration.

La Sagep teste en ce moment plusieurs appareils fournis par Ecomesure, distributeur de l'américain Arti. Autre matériel : ceux de l’américain PMS distribué par PMT.

Les compteurs de particules sont des systèmes de mesure optiques utilisant l’interaction entre la lumière émise par un laser et les particules à détecter. Le laser envoie un rayon à travers la cellule de mesure.

Quand une particule rentre en contact avec le rayon laser, une petite partie de la lumière est déviée de son parcours. Cette diffusion de lumière est la résultante des effets optiques dépendant de chaque particule (indice de réfraction, absorption, réflexion, la longueur d’onde et la taille des particules).

Les détecteurs sont de deux types selon que la mesure est faite par absorption ou par diffusion.

Dans le cas d'une mesure par absorption

[Photo : Le SIMAA 6100 de Perkin Elmer analyse simultanément 6 éléments dans l'eau.]

(répertorié aussi sous le terme par extinction de lumière), la photodiode est positionnée face au rayon laser, de l'autre côté de la cellule de mesure et reçoit tout le rayonnement. Cette configuration est choisie lorsque l'on veut mesurer des particules dont le diamètre est supérieur à 1 μm. Avec un compteur par diffusion, la photodiode est placée suivant un angle de 60° à 90° par rapport à l'axe du rayon laser. Le rayon laser direct est absorbé par un piège à lumière, la photodiode mesure la lumière diffusée et non la lumière directe. La mesure par diffusion lumineuse est nécessaire quand on souhaite mesurer des particules de diamètre inférieur à 1 μm.

« Avec l'amélioration des systèmes de traitement d'eau, les turbidimètres atteignent leur limite de sensibilité. Les turbidimètres classiques pour l'eau potable ont une sensibilité supérieure à 0,1 NTU. Les compteurs de particules sont 10 000 fois plus sensibles et mesurent la concentration par taille de particules », précise G. Gonnet, responsable produit compteur de particules chez Ecomesure. Ils sont utilisables pour le contrôle en continu des systèmes de filtration dans des gammes de taille qui sont caractéristiques de certains organismes pathogènes.

  • 0,5-1,5 μm — Escherichia coli
  • 4-7 μm — Cryptosporidium
  • 10-15 μm — Giardia

Au robinet du consommateur : contrôler et informer

Autre nouveauté de ce décret : le contrôle de la qualité ne concernera plus seulement le réseau public de distribution d’eau mais également les installations privées.

« Parmi les objectifs du décret se trouvent, d'une part, la nécessité de réduire l'exposition au plomb hydrique de la population et, d'autre part, lorsqu’il y a risque que les seuils de qualité réglementaires ne soient pas respectés, d'assurer l'information des consommateurs sur les éventuelles mesures correctives à prendre », précise Catherine Moutet, responsable développement cycle de l'eau à l'Afnor.

À la demande de la DGS, une commission a été constituée à l’Afnor pour faciliter la mise en œuvre du nouveau décret sur cet aspect. Les objectifs retenus pour un diagnostic du plomb dans les réseaux intérieurs sont :

  • - permettre aux professionnels de faire un état des lieux des canalisations du réseau intérieur d’immeuble desservant les points d'eau où l'eau est consommée,
  • - donner au consommateur une information sur les risques réels auxquels il est exposé en fonction de ses pratiques de consommation, des recommandations de comportement pour limiter le risque et des indications sur les mesures correctives qu'il pourrait prendre et notamment la nature des travaux qui devraient être mis en œuvre,
  • - fournir des éléments pour consolider la stratégie d'échantillonnage afin que les résultats d'analyse puissent être correctement interprétés en fonction du contexte général de l'état du réseau. Ces éléments seront transmis au groupe de travail sur l'échantillonnage des métaux.

Un projet de norme finalisé doit être prêt pour sa mise à l’enquête au début de l'année 2003, de façon à pouvoir le diffuser aux acteurs professionnels, consommateurs, syndics..., au cours du second semestre 2003. Tout sera ainsi prêt pour décembre 2003. ■

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