Les conséquences d'une opération de dépollution mal conçue ou mal dimensionnée sont aussi nombreuses que coûteuses pour le maître d'ouvrage comme pour l'entreprise chargée des opérations de dépollution. L?approche « coûts-avantages » requise par l'article 34-3. ? 1 du décret du 21 septembre 1977 modifié, fournit un cadre à l'exploitant pour lui permettre de justifier les solutions retenues dans son plan de gestion. Elle doit définir le meilleur compromis sur la base de considérations environnementales, sanitaires, techniques et économiques tout en fournissant des éléments factuels de comparaison de chacune des solutions pertinentes.
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La réhabilitation d’un site potentiellement pollué est une opération longue et délicate qui comprend plusieurs étapes successives qui aboutissent à la mise en œuvre d’une ou plusieurs techniques de traitement. Des techniques de traitement, hors excavation et mise en décharge qui sont généralement classées en quatre grandes catégories : les procédés
physico-chimiques, thermiques et biologiques ainsi que les techniques de confinement in situ. Elles se distinguent les unes des autres par une mise en œuvre très différente selon qu’elle aura lieu ex situ (hors site et sur site) ou in situ. Une palette de technologies très diversifiée, capable de répondre à la plupart des configurations. Mais quels types de traitement choisir, sur quels critères baser ce choix et comment évaluer l’efficacité de la ou des techniques retenues ?
Tout commence par une phase de diagnostic initiée soit par une demande administrative (DREAL par exemple), soit lors de la cessation d’activités d’une I.C.P.E., soit dans le cadre d’une démarche volontaire de l’exploitant ou du propriétaire. Les outils méthodologiques définis par les textes de février 2007 proposent deux démarches de gestion des risques : l’Interprétation de l’État des Milieux (I.E.M.) et le Plan de Gestion (PG).
L’Interprétation de l’état des milieux permet d’identifier, lorsque les usages sont déjà fixés, l’ensemble des risques et de caractériser l’état de pollution éventuel par le biais d’une campagne d’investigations et de mesures sur site, après la réalisation d’une étude historico-documentaire et d’une visite préalable afin d’en optimiser la réalisation. Les résultats sont ensuite comparés avec les caractéristiques de l’environnement du site, avec les fonds géochimiques régionaux et locaux et avec les valeurs de gestion réglementaires lorsqu’elles existent. Si l’état du milieu s’avère dégradé par rapport à son état initial, une évaluation quantitative des risques sanitaires (EQRS) est réalisée. Selon les impacts constatés et les risques encourus en fonction de l’usage effectif des médias concernés, des actions adaptées de gestion du site seront engagées pour remédier à cette dégradation.
Lorsque la situation permet d’agir aussi bien sur l’état du site que sur ses usages, la démarche du plan de gestion sera privilégiée. Dans ce cadre, l’exploitant cherchera à traiter la source de pollution (excavation et évacuation en filières adaptées, traitement in situ, sur site ou hors site, confinement, …). À l’issue de ces opérations, les éventuelles pollutions résiduelles devront être quantifiées par le biais de prélèvements et d’analyses adaptées, et elles devront être acceptables pour la population et l’environnement ; dans ce cadre, une analyse des risques résiduels (ARR) après traitement et dépollution sera réalisée. Pour rappel, l’EQRS, réalisée en préalable dans le cadre du plan de gestion, permet de valider l’adéquation du processus de dépollution prédéfini ou préconisé au regard des usages choisis ou constatés.
Dans tous les cas de figure, la démarche de sélection d’une technique de traitement doit s’intégrer dans le plan de gestion du site pour bénéficier de l’ensemble des caractérisations menées sur le terrain (nature, superficie et volume des pollutions reconnues, concentration des polluants pour les médias concernés, géologie, hydrogéologie, …), ainsi que de la description des éventuelles contraintes techniques rencontrées sur site et hors site, de la vulnérabilité des milieux concernés, du contexte du site et des objectifs de traitement.
Sélectionner la technique de traitement dans le cadre du Plan de Gestion
En pratique, le choix des techniques de traitement mises en œuvre s’effectue au cas par cas en fonction de plusieurs paramètres. Il convient en premier lieu d’analyser la nature et le comportement du ou des polluants à traiter : selon qu’ils soient organiques et/ou minéraux, associés ou…
Ou avec d'autres molécules, selon les profondeurs de sols à traiter, leur état de saturation (zone non saturée, frange capillaire, zone de battement de nappe, zone saturée/nappe), selon le comportement des substances polluantes dans les milieux impactés et selon leurs principales caractéristiques physico-chimiques (densité par rapport à l'eau, présence de métabolites, présence de phase libre et/ou sorbée ou piégée dans la matrice solide poreuse du milieu récepteur ou réservoir, mobilité et hydrophobicité, volatilité, solubilité, toxicité et écotoxicité, inflammabilité, limite inférieure d’explosivité, ...), on écartera d’emblée certaines familles de techniques de traitement pour s’orienter vers d'autres.
Second critère à prendre en compte, la nature des sols de la zone à traiter ainsi que les impacts constatés. Une définition précise des contours de la zone polluée en surface et en profondeur, des niveaux de concentration en substances polluantes atteints dans la zone à traiter, de son état de saturation, vont permettre d’orienter les choix vers les modes de mise en œuvre de technique de traitement adaptée, in situ, sur site ou hors site. Chacune des techniques de traitement existantes actuellement a ses avantages et ses inconvénients. Bien plus onéreux mais aussi plus rapide, le traitement hors site, qui consiste à excaver les terres pour les stocker en installations de stockage de déchets adaptés, ou, lorsque possible (cf. cela ne concerne que les pollutions organiques biodégradables en règle générale, donc en dehors des sols impactés par des pollutions métalliques importantes et également par des PCB...), les faire traiter en biocentre, permet de ne pas ralentir les travaux de remise en état du site concerné : un argument auquel les promoteurs, par exemple, sont sensibles. Il présente également l’avantage d'impliquer un transfert de responsabilité des terres polluées excavées vers la société chargée du traitement ; ce transfert de responsabilité est parfois assorti de garanties et est défini à prix fixe. Plusieurs prestataires exploitent des centres de traitement spécialisés, parmi lesquels Biogénie, 3L Normandie, Extract-Ecoterres, GRS Valtech, Ikos Sol Meix, Sita ou Séché Environnement. Plusieurs techniques de traitement sont susceptibles d’être mises en œuvre sur une large variété de terres polluées, et une large palette de polluants, avec des teneurs en éléments totaux allant de quelques milligrammes jusqu’à plusieurs grammes par kilo. À Écharcon (91), par exemple, la capacité annuelle de traitement du Biocentre de Biogénie avoisine les 300 000 tonnes de terres. Parmi les polluants traités, existe un grand nombre de polluants organiques : des hydrocarbures pétroliers, BTEX, HAP, PCP, créosote, phénols et solvants organo-halogénés. Sita gère de son côté 5 centres de classe 1, dont trois (Villeparisis (77), Jeandelaincourt (54) et Bellegarde (30)) sont des plateformes multimodales habilitées à traiter les terres polluées en Biocentre, ou par désorption thermique, ou par lavage aux solvants et lavage à l'eau. 3L Ingénierie et Finance exploite quant à elle un centre de regroupement et de traitement par désorption thermique à Sotteville-lès-Rouen, d'une capacité de 150 000 tonnes/an.
La situation du tenement, les conditions d’accès à la zone à traiter, l’occupation des sols au moment de l’intervention et la présence de bâtiments, l’activité d'un site accueillant du personnel ou la proximité d'espaces publics, sont des paramètres à prendre en compte qui permettent également d’adapter et d’orienter le choix entre
Un mode de mise en œuvre de traitement in situ, sur site ou hors site.
Reste que dans le cadre d'un plan de gestion équilibré, le choix de la stratégie doit également s’appuyer sur une approche coûts-avantages préalable, prenant en compte à la fois les meilleures techniques de dépollution disponibles et envisageables, le devenir des terres une fois excavées, les coûts correspondants à la fois aux traitements in situ ou sur site, et à l’évacuation hors site des terres excavées, même traitées en préalable, ainsi que le bilan environnemental global de l’opération, comprenant bien entendu un bilan carbone.
S’appuyer sur une démarche coûts-avantages
Le plan de gestion retenu doit correspondre au bilan coûts-avantages le plus favorable, tant au plan sanitaire et social qu’au plan économique et environnemental, en veillant à privilégier les options qui permettent d’éliminer en priorité la ou les source(s) de pollution (interventions en urgence à réaliser lorsque nécessaire avant tout traitement, puis traitement de spots, ou points chauds, de pollutions concentrées à traiter en premier lieu, par exemple), et de désactiver les voies de transfert. Reste à identifier le meilleur moyen pour y parvenir en fonction des contraintes du maître d’ouvrage et des conséquences environnementales de ce choix, notamment du bilan carbone prédictif de l'option choisie.
Certains prestataires comme Enoveo développent une expertise particulière permettant de valider sur pilotes l’efficacité d'une technique de dépollution envisagée. Enoveo est donc sollicitée à la fois par les bureaux d’études lors des étapes du bilan coûts-avantages pour valider une technique de dépollution mais aussi par des sociétés de dépollution lorsque les procédés de dépollution mis en œuvre ne fonctionnent pas correctement ou pas comme prévu.
Au plan financier, d'une technique à une autre, les coûts de dépollution peuvent facilement être multipliés par un facteur 10, voire 100. Certaines techniques réputées économiques et à faible impact environnemental, comme la phytoremédiation, la phytostabilisation ou la phytoextraction, ont fait leurs preuves dans des cas et pour des contextes bien précis, tout comme, par exemple, l’atténuation naturelle contrôlée ou renforcée pour le traitement in situ de nappes d'eau souterraines. Ces techniques douces, entièrement naturelles et conformes aux principes du développement durable, ne génèrent pas ou très peu de pollutions annexes ou de métabolites problématiques, et elles sont en général efficaces pour les cas où elles ont été mises en œuvre. Seul problème, et de taille pour un promoteur..., elles nécessitent pratiquement toujours de l’espace pour la mise en œuvre et surtout du temps... Et également, les profondeurs de traitement in situ sont limitées intrinsèquement par la zone d’influence des plantes utilisées ou utilisables pour ces techniques bien spécifiques. Leur apparente simplicité ne doit donc pas faire illusion.
Ces technologies suscitent d’ailleurs certaines réserves. Pour Hubert Bonin, Hub Environnement, « leur mise en œuvre reste rare et fait encore l’objet de nombreux programmes de recherche. Le fait que l’on utilise des plantes ne signifie pas que la technique soit la moins polluante, la moins chère... Les risques avec la phytoremédiation, sont loin d’être négligeables : il y a le risque de mobilisation de certains polluants, et surtout de les rendre plus accessibles et de les introduire dans une chaîne alimentaire de manière accidentelle. La durée importante des projets augmente d’autant plus ce risque. Les résultats, par ailleurs, ne sont jamais garantis. Or, en matière de risque sanitaire, les technologies doivent être particulièrement fiables et maîtrisées. Ce n’est pas le cas pour cette technique, même si ces technologies sont intéressantes, pour la gestion de grands ».
espaces pollués, dépassant l'ordre du km² comme le site de Salsigne dans l'Aude ou l’ancien site Metaleurop de Noyelles-Godault dans le Nord.
Comme les autres techniques de dépollution, elles nécessitent de recourir, avant leur mise en œuvre, à une expertise poussée, qui comprendra ensuite un suivi et un contrôle dans le temps adaptés, ce qui justifie le recours à des bureaux d'études d’expérience et spécialisés qui exercent une activité d’études et d'ingénierie distincte de la partie travaux, comme Sogreah, Cabinet Blondel, Tauw France ou Burgeap. Le recours aux phytotechnologies est inscrit dans la loi Grenelle 1 et tend à se développer. Amiens a ainsi réussi à réhabiliter une ancienne décharge en base de loisirs. Besançon a annoncé qu’elle allait utiliser ces technologies pour reconquérir une friche de 25 hectares polluée aux métaux lourds et aux hydrocarbures. En Seine-et-Marne, Phytorestore a récemment ouvert le premier centre de traitement hors site par les plantes. Les pôles de compétences se multiplient, comme à Lyon, Lille et Nancy au sein desquels des synergies sont établies avec des entreprises du secteur de la dépollution, comme Brezillon, Sita, TVD ou Microhumus, pour faire avancer les applications concrètes.
Mais lorsque l’espace ou le temps font défaut, il faut se tourner vers des techniques plus sophistiquées. Les traitements biologiques, en raison de leur faible coût de mise en œuvre, ont incontestablement le vent en poupe.
Les techniques biologiques ont le vent en poupe
Les traitements biologiques utilisent la capacité de certains micro-organismes à dégrader des polluants organiques, en particulier les hydrocarbures légers. Ils s'en nourrissent, les minéralisent et les transforment au final en eau et en dioxyde de carbone. Ils sont écologiques, relativement peu coûteux et très efficaces sur les hydrocarbures légers biodégradables. Leurs limites concernent essentiellement certains polluants, comme les biocides (organochlorés, goudrons de houille), et concernent également des niveaux de dépollution qui peuvent s'avérer insuffisants quand l’objectif de traitement est, par exemple, défini en préalable comme devant être inférieur à 50 ppm. Ces techniques sont proposées par de nombreux prestataires généralistes comme Apinor, Arcadis, ATI Services, Brezillon, Cap Environnement, Colas Environnement, Naturam Technologies, Soleo Services, etc. Certains d’entre eux sont spécialisés dans ce type de traitement, ou présentent des spécificités particulières. Valorhiz développe par exemple des solutions biologiques basées sur l'utilisation des champignons, pour la dégradation des polluants organiques (mycoremédiation) et/ou la stabilisation des polluants métalliques dans les sols (mycostabilisation). TVD a développé conjointement avec l'INRA et l’INPL (brevet commun), le procédé de construction de sol. Cette écotechnologie a pour objectif d’assurer la réhabilitation de sites dégradés (lagune, centre de stockage de déchets, friche industrielle...) en restituant au sol ses propriétés agronomiques, afin d’en permettre une revégétalisation et une utilisation agricole ou para-agricole. Ce procédé combine une exigence de développement durable à des coûts de requalification modérés. Par exemple, TVD a réhabi-
Réhabiliter un hectare de l’ancienne cokerie d’Homécourt (54) en Lorraine, laissé infertile après l'excavation et le traitement par désorption thermique des terres polluées aux HAPs. La construction de sol par ajout de sous-produits papetiers et de compost lui a redonné fertilité.
Biobasic Environnement avec son procédé « Écorem », HTS Bio, spécialisées dans le domaine de la bioremédiation in situ, développent quant à eux une approche spécifique basée sur la sélection de souches de microorganismes endogènes, préalablement sélectionnés car réputés efficaces en termes de dépollution, et sur leur réintroduction dans le sol à traiter dans des conditions optimales.
Biogénie, GRS Valtech, GRC-Kallo et GRC-Brugge ou Sita Remediation exploitent les techniques biologiques en combinant les avantages des traitements in situ et également ex situ. Ikos Environnement, via sa filiale Ikos Sol Meix, exploite trois plates-formes de traitement en France (Seine-Maritime, Eure, Marne), ainsi qu'un centre d’enfouissement technique de la classe II (Seine-Maritime). Ikos met également en œuvre ce type de traitement sur site. Par exemple, suite à un stockage sauvage de fûts de solvants, l’entreprise a récemment traité une parcelle de 300 m² sur une profondeur de 4 m en mettant en œuvre une ventilation sur site en bioterre, afin de traiter des terres polluées par des solvants, à des teneurs initiales de 60 mg/kg MS en trichloroéthylène, de 5 mg/kg MS en perchloroéthylène, de 60 mg/kg MS en toluène et de 140 mg/kg MS en diméthylformamide. Les objectifs de dépollution (10 mg/kg MS en TCE, 1 mg/kg MS en PCE, 6 mg/kg MS en toluène et 6 mg/kg en DMF) ont été atteints en 6 mois.
TVD étudie en collaboration avec l’INPL, la faisabilité d’une filière complète de traitement de terres polluées par des hydrocarbures pétroliers. Cette filière a débuté par la mise en œuvre d’un traitement de terres par biopile classique (hors site) permettant un abattement de 70 % de la pollution. Un couvert végétal adapté, sélectionné sur la base d’essais en conditions contrôlées, a ensuite été installé sur les terres traitées en conditions climatiques réelles. Dans l’optique de leur réintroduction dans le milieu naturel, le risque de transfert de la pollution résiduelle des terres traitées est aujourd’hui en cours d’évaluation.
Biobasic Environnement exploite les procédés ex situ de type bioterres dans le cadre de son procédé Écotertre®. « Notre vocation consiste en effet à apporter une solution de gestion sur site des sols pollués que ce soit in situ ou ex situ avec pour objectif l’optimisation du couple coût/impact environnemental de la solution à mettre en œuvre », explique Julien Troquet, Biobasic Environnement. « Nous avons ainsi plusieurs traitements en cours ; nous venons par exemple de conduire un traitement en bioterre de 1 000 m² de terres polluées par des hydrocarbures (huiles) issues d’un ancien garage automobile avec des teneurs en HCT initiales de l’ordre de 7 500 mg/kg MS dont la durée a été de 12 mois pour atteindre l’objectif de dépollution fixé à 250 mg/kg MS ».
Serpol propose des systèmes de traitement biologiques in situ sur des pollutions pétrolières contenant notamment des hydrocarbures légers et des additifs de type MTBE et ETBE. Sur le site d’une ancienne station-service, l’entreprise, en collaboration avec les ingénieurs de l’IFP, optimise les capacités de biodégradation des microorganismes autochtones pour traiter une nappe polluée avec des teneurs
initiales de 200 mg/l en ETBE et 40 mg/l en BTEX.
Sur ce type de pollutions hydrocarbures, la société Algavi basée à Quimper, en partenariat avec la société ROEX Pollution-Intervention située à Pluneret dans le Morbihan, intervient pour la réhabilitation de sites sur des pollutions accidentelles ou chroniques. Développés en collaboration avec les services de l'armée dès les années 1990, les traitements biologiques mis en place – in situ – sont réalisés après une étude précise de l’endroit. Une formulation adaptée et
spécifique des souches microbiologiques est alors produite. Cette approche « au cas par cas » liée à un suivi au fil du temps, permet d’obtenir une caractérisation de l’évolution des polluants et de leur dégradation. Ces données sont utilisées pour les réactivations des flores épuratrices et pour quantifier les apports de nutriments nécessaires à l’activité des microorganismes. Aujourd’hui, Algavi intervient sur un spectre assez large de sites allant de la cuve défaillante d’un particulier aux collectivités en proie à une pollution industrielle sérieuse.
TVD a développé en partenariat industriel (brevet commun) un procédé biologique original de traitement de nappe polluée par des composés aromatiques dissous (BTEX). Le procédé met en œuvre une BioBarrière Perméable Réactive (ou BBPR) dont la réactivité repose sur la biodégradation aérobie des polluants par la microflore endogène. Cette technologie vise à traiter in situ les panaches de pollution constitués de substances dissoutes, sans pompage de l'eau, avec un apport d’oxygène par diffusion.
PLM Equipements est le distributeur exclusif en France du procédé iSOC, qui permet de traiter in situ la pollution des nappes phréatiques en saturant la nappe d’oxygène dissous, favorisant ainsi le développement des bactéries et la biodégradation des polluants. Ce système, encore peu connu en France, va prochainement être appliqué à grande échelle (20 iSOC) sur un site où la nappe phréatique est polluée aux BTEX et hydrocarbures, dans le cadre d’une barrière biologique. « Cette technologie a été retenue car c'est une des solutions les plus économiques et facile à mettre en œuvre, qui ne nécessite pas de pompage ni d’alimentation électrique, et ne génère aucune pollution sonore », souligne Marine Piolat, PLM Equipements. Cette technique a été mise en œuvre sur de nombreux sites aux États-Unis, permettant de traiter efficacement de faibles concentrations en polluants chlorés, MTBE, BTEX ou hydrocarbures.
Pour des volumes plus importants, ou pour traiter des polluants plus spécifiques, les techniques physico-chimiques et thermiques offrent un bilan coûts/avantages intéressant, pour peu qu’elles soient adaptées et applicables.
Les techniques physico-chimiques et thermiques : un bilan coûts/avantages intéressant
La désorption thermique, quoique peu économe en énergie et à bilan carbone peu favorable, est la technique la plus répandue. Mais pour certains, c’est la technique des années 80-90. Pour Hubert Bonin, Hub Environnement, elle est condamnée aujourd'hui par les contraintes de développement durable et la maîtrise à la fois des dépenses énergétiques et des rejets en atmosphère. « La technique ne passe plus le stade de l'analyse “bilan coûts-avantages”, et les machines disponibles sur le marché sont trop petites pour répondre aux exigences désormais très strictes de rejets atmosphériques. Il faut une taille critique pour respecter les rejets, taille que les machines de désorption, assez anciennes et semi-mobiles ne peuvent atteindre », estime-t-il.
Elle reste toutefois adaptée aux gros volumes et à certains types de polluants tels que les hydrocarbures lourds (fiouls lourds, goudrons, HAP), les hydrocarbures légers, ainsi que les hydrocarbures organochlorés. Les terres contaminées sont chauffées à une température variant entre 300 et 500 °C, pour volatiliser l'eau et les contaminants organiques. Une température de traitement des sols assez élevée permet de désorber ces derniers jusqu’à une teneur résiduelle en contaminant
Inférieure à 100 mg/kg, sans détruire la structure des terres traitées qui pourront ainsi regagner le milieu naturel. « Les terres traitées par désorption thermique sont par la suite réputées stériles », souligne toutefois Thierry Blondel, Cabinet Blondel. « Toute la microfaune et la microflore de ces terres ainsi traitées est détruite… ». Températures de fonctionnement et temps de séjour dans les fours de désorption sont réglés de façon à ce que les contaminants traités passent en phase gazeuse via des mécanismes combinant évaporation, craquage et combustion incomplète. Les composés volatils sont ensuite extraits des gaz au moyen de filtres d’adsorption ou traités par une chaîne de combustion-filtrage-lavage de fumées. Reste que la désorption thermique génère de gros volumes de CO₂… Sur site, ce procédé est mis en œuvre par le biais d’unités mobiles, que proposent des opérateurs comme 3L Ingénierie, Colas Environnement, GRS Valtech ou Sita Remédiation ou ICF Environnement. Il est également mis en œuvre in situ, c’est-à-dire sans excaver ni déplacer les terres, par DeepGreen avec son procédé Thermopile (Voir EIN n° 325), et GRS Valtech qui exploite un procédé basé sur des pointes chauffantes utilisant la conductivité thermique des sols.
Autre procédé en vogue, l’oxydation in situ (ISCO pour In Situ Chemical Oxidation en anglais) qui consiste à mettre en œuvre, in situ, des produits réactifs oxydants permettant de dégrader chimiquement les polluants (Voir EIN n° 320). Les avantages financiers mais aussi environnementaux de ce procédé sont nombreux : il concerne aussi bien la zone saturée que la zone non saturée du site à traiter. Il peut traiter des surfaces et des volumes importants sans qu’il soit nécessaire d’excaver ni de pomper, et tout ceci sur des durées de traitement relativement brèves. Il peut traiter, en séquences, des polluants de natures différentes ainsi que leurs métabolites de dégradation. Les polluants concernés par ce type de traitement sont, par exemple, les BTEX, les HAP, les PCB, les COHV, les alcools aromatiques et les pesticides organiques. Une fois caractérisés et définis, les oxydants sont introduits dans les sols et/ou les eaux souterraines au moyen de puits d’injection.
Principales difficultés de la technique : le dosage des oxydants, la qualité du contact avec le média à traiter, et la localisation des polluants dans le milieu à traiter, qui conditionneront par la suite le succès de l’opération. Arcadis maîtrise parfaitement cette technique de même que Sita Remediation qui a mis en œuvre ses procédés Oxidis et Bionappe sur de nombreux sites dont l’un avec succès dans les Vosges, sur un ancien site de production d’équipement automobiles pollué par du trichloréthylène. Quarante puits de pompage et d’injection ont permis de traiter en huit mois 5 000 m³ d’eau à l’aide de 600 litres d’oxydants. 130 kg de TCE ont ainsi été récupérés ou détruits.
Une technique complémentaire à l’oxydation in situ se développe actuellement sur le marché français, il s’agit de l’ISCR (acronyme anglais de In Situ Chemical Reduction), particulièrement efficace pour la réhabilitation des sites impactés par des composés chlorés tels que les solvants. Cette technique a été éprouvée depuis plus de vingt ans aux États-Unis et en Europe et permet une action efficace au cœur du problème, dans la zone saturée comme dans la zone non saturée. Elle mixte l’apport, au sein de la source de pollution ou dans le panache lié à cette source, de carbone aisément assimilable par la biomasse dans le but d’appauvrir en oxygène le milieu et de fer à l’état microscopique. Cet atome une fois introduit à l’état natif, ou de valence zéro, s’oxyde et sature le milieu en électrons qui provoquent la rupture de toutes les liaisons carbone-chlore des polluants, évitant ainsi les dégradations séquentielles classiques qui mènent à des intermédiaires souvent plus toxiques que les molécules polluantes initiales. La société Eco-Application est chargée de la commercialisation de cette technique, développée par la société Adventus sur la France.
Brézillon propose de son côté un procédé faisant appel à une oxydation chimique sur site : il s’agit du procédé Oxyterre, développé en partenariat avec Lhoist et l’INPL. Ce procédé est dédié aux huiles lourdes et aux composés organiques peu volatils. Le réactif employé est de la chaux vive (CaO), qui permettrait, selon Brézillon, d’obtenir des taux de dégradation proches de 100 %. La mobilité et la souplesse de ce procédé conviennent à des applications sur site ou en centre fixe, ainsi qu’à des volumes très variés de sols à traiter. Certaines entreprises ont développé des procédés encore plus élaborés avec des réactifs minéraux plus stables dans le temps. Certaines entreprises du BTP s’engagent fortement dans une démarche de développement durable et sont attentives à la qualité des matériaux qu’ils manipulent tous les jours en proposant des techniques de stabilisation performantes basées sur des réactifs minéraux naturels permettant ainsi une valorisation de matériaux autrefois destinés à la décharge.
Le lavage par solvant est une autre technique adaptée aux terres polluées, notamment par des composants organiques non biodégradables. L’extraction liquide/solide est réalisée grâce à la circulation à contre-courant du solvant. Sita Remediation dispose d’une unité mobile utilisant ce système de traitement sur sa plateforme multimodale de Jeandelaincourt (54), mais, d’après Sita Remediation, une mise en œuvre in situ est également envisageable. Reste que la méthode « bilan coûts-avantages » actuellement mise en œuvre reste sommaire avec des critères peu précis et surtout non exhaustifs. Hub-Environnement, comme d’autres opérateurs, met par exemple en œuvre pour ses clients une approche plus élaborée, qui intègre les risques générés par le procédé lui-même, les risques résiduels sur le moyen terme, ainsi qu’une analyse des risques « hygiène et sécurité » pour le personnel de chantier et les riverains.
D’autres problématiques restent encore largement ignorées comme par exemple l’impact de ces techniques sur l’environnement et de leur suivi, essentiellement en milieu sensible. Cap Environnement développe cependant une activité de conseil pour le dimensionnement de systèmes de surveillance dans l’environnement, d’impact chimique (COV), de particules ou encore d’odeurs… La mise en place d’une stratégie de suivi des impacts d’un chantier répond à la volonté de certains maîtres d’ouvrage d’engager les travaux selon une charte de faibles nuisances ou dans le cadre d’une démarche de haute qualité environnementale.