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Dépollution des effluents du traitement de surfaces par le peroxyde d'hydrogène

30 novembre 1995 Paru dans le N°186 à la page 38 ( mots)
Rédigé par : Nicolas-de ROFFIGNAC et David SLATER

Le peroxyde d'hydrogène, de plus en plus utilisé pour traiter les effluents liquides, trouve également de nouvelles applications dans la réduction de la pollution atmosphérique. Confrontée à des contraintes de plus en plus strictes, l'industrie cherche des solutions dans la voie des produits peroxydés. La polyvalence du peroxyde d'hydrogène permet de résoudre les pollutions atmosphériques, et notamment celles issues du traitement des surfaces, de deux manières : en absorbant les polluants gazeux dans les installations de lavage de gaz utilisant le peroxyde d'hydrogène, ou en modifiant les procédés afin d'éviter la formation des substances polluantes, en intégrant le peroxyde d'hydrogène dans le procédé lui-même.

L’industrie utilise de plus en plus largement le peroxyde d’hydrogène (H₂O₂), en tant que réactif propre, sûr et écologique pour la destruction de polluants tels que les phénols, les cyanures, les effluents colorés, les composés soufrés et certains halogénés. Bien d’autres composés peuvent être traités par le peroxyde d’hydrogène directement, ou grâce à une activation particulière. Certaines applications de dépollution ont ainsi été brevetées. Une utilisation moins connue du peroxyde d’hydrogène consiste aussi en la destruction de ces mêmes polluants et de quelques autres, en phase gazeuse. Dans ce contexte, le peroxyde d’hydrogène présente un double avantage : il accroît le taux d’absorption du polluant dans la phase liquide en l’oxydant en un composé plus soluble, et il produit des effluents pouvant être, selon les cas, réutilisés ou rejetés sans risques.

Le principal polluant atmosphérique rencontré en traitement de surfaces est constitué des oxydes d’azote, issus de l’utilisation de l’acide nitrique dans les bains de décapage.

La destruction des oxydes d’azote

Les oxydes d’azote, NOₓ, sont constitués principalement du dioxyde et du monoxyde d’azote. Celui-ci s’oxyde lentement en dioxyde grâce à l’oxygène de l’air, et produit ces fumées bien connues. Les NOₓ contribuent à la fois aux pluies acides et au brouillard photochimique. Les émissions de NOₓ sont strictement réglementées ; elles dépendent essentiellement des différents procédés industriels, et varient de quelques ppm à quelques pourcents ; leur composition est également variable, depuis le monoxyde d’azote pur jusqu’au dioxyde d’azote pur. Tout cela rend leur destruction très difficile et complique beaucoup les traitements.

Beaucoup de méthodes ont été développées, mais aucune d’entre elles n’est assez universelle pour convenir aux différents cas de figure. En outre, les résidus de ces méthodes sont souvent difficiles à éliminer, du fait d’autres réglementations.

Le plus simple de tous les systèmes d’absorption, l’eau, est la base d’un procédé très efficace permettant de supprimer à la fois le monoxyde et le dioxyde d’azote pour en faire une solution réutilisable (et parfois même vendable) d’acide nitrique. L’absorption du monoxyde d’azote dans l’eau ne se produit que dans la limite de sa solubilité, et la dissolution du dioxyde d’azote donne de l’acide nitreux (HNO₂) et de l’acide nitrique (HNO₃). L’acide nitreux se décompose alors en acide nitrique et en monoxyde d’azote gazeux, rejeté à l’atmosphère, qui se transforme à son tour en dioxyde d’azote au contact de l’air...

Cercle vicieux ? Non, car l’ajout de peroxyde d’hydrogène dans la solution de lavage permet d’oxyder instantanément l’acide nitreux en acide nitrique, ce qui casse cette boucle infernale :

HNO₂ + H₂O₂ → HNO₃ + H₂O

et qui correspond à une consommation globale de peroxyde d’hydrogène donnée par l’équation :

2 NO₂ + H₂O₂ → 2 HNO₃

Par ailleurs, l’utilisation de peroxyde d’hydrogène permet d’augmenter la quantité de monoxyde d’azote absorbée, en l’oxydant par une série de réactions complexes se résumant à l’équation :

2 NO + 3 H₂O₂ → 2 HNO₃ + 2 H₂O

L’acide nitrique étant impliqué dans l’absorption du monoxyde d’azote, il est d’usage d’utiliser un mélange acide nitrique/peroxyde d’hydrogène lors-

que l’acide nitrique est présent dans la solution. Quand le gaz contient un mélange de monoxyde et de dioxyde d’azote, ce qui est fréquent, la réaction globale est la suivante :

NO + NO₂ + 2 H₂O → 2 HNO₃ + H₂O

Il est donc possible, en utilisant un mélange acide nitrique/peroxyde d’hydrogène, d’absorber les NOₓ, indépendamment de leur composition, pour ne donner comme résultat que de l’acide nitrique. De nombreuses unités exploitant ce procédé fonctionnent dans le monde. Le peroxyde d’hydrogène alcalin absorbe aussi les oxydes d’azote efficacement, mais l’effluent qui en résulte contient des nitrates alcalins dont on ne peut pas se débarrasser facilement. Il est donc moins attractif que le peroxyde d’hydrogène acide, sauf cas particuliers.

Des programmes informatiques permettent de modéliser le comportement des installations de lavage de gaz. L’efficacité augmente considérablement si la proportion en dioxyde d’azote augmente, et marginalement lorsque la concentration en acide nitrique augmente jusqu’à 40 %. De nombreuses références dans le monde démontrent l’efficacité de ce type de lavage de gaz, à travers de multiples secteurs d’activités et dans de nombreux pays, même dans le cas de ratios monoxyde/dioxyde très différents.

Modification des procédés : traitement préventif ou curatif ?

Le peroxyde d’hydrogène permet de traiter les problèmes d’effluents contenant des oxydes d’azote. Il permet aussi d’éviter que ceux-ci ne se forment au cours du décapage.

Nous avons vu précédemment l'emploi du peroxyde d’hydrogène pour éliminer les oxydes d’azote. Cependant, l’addition de peroxyde d’hydrogène dans les bains de décapage permet de réduire les émissions des NOₓ. Les traitements de surface, notamment le décapage de l’acier inoxydable, en représentent une source importante. C’est en effet la réaction entre l’acide nitrique contenu dans les bains et les métaux de transition qui engendre les NOₓ.

Le lavage de gaz ou la réduction catalytique par l’ammoniac sont deux approches requérant des investissements lourds. L’addition de peroxyde d’hydrogène dans le bain de décapage ne demande pas d’investissements, minimise les émissions de NOₓ et n’a pas de conséquences néfastes sur le procédé.

La chimie du phénomène est la même que celle de l’élimination, décrite précédemment, mais elle a lieu directement dans le bain : le peroxyde d’hydrogène oxyde rapidement l’acide nitreux en acide nitrique, plus stable, ce qui réduit d’autant les émissions d’oxydes d’azote et permet de diminuer la consommation d’acide nitrique.

Conclusion

Comme tous les produits chimiques, le peroxyde d’hydrogène doit être stocké et manipulé dans le plus strict respect des recommandations des producteurs. Dans ces conditions, son utilisation donnera des résultats performants et en toute sécurité. Il représente une alternative attractive aux différentes méthodes de traitement des polluants gazeux. Lorsqu’on peut l’utiliser, le peroxyde d’hydrogène permet des économies substantielles, notamment parce que les procédés sont propres, et que les effluents sont souvent réutilisables ou rejetables dans la nature sans dommage.

Il serait donc logique d’étudier systématiquement les possibilités de l’utiliser lorsque l’on est confronté à un problème d’effluent gazeux. Bien qu’il n’améliore pas toujours l’absorption des composés à éliminer, il favorise dans tous les cas leur oxydation propre, ce qui est toujours un avantage significatif.

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