Les succès d'un Onyx ou d'un Triselec ne sont pas dus au hasard, mais s'expliquent non seulement par la volonté d'entreprendre mais aussi par la qualité des matériaux triés liée à leur écoulement dans des débouchés régionaux. Les masters du déchet : Federec (31,4 MdF), Ecobois (6,5 MdF), Fnade (6 MdF), FEP (26,5 MdF), et les groupes Compagnie Générale des Eaux (8,5 MdF), Lyonnaise des Eaux-Dumez (3,8 MdF), Bouygues, EMC-Tredi et Waste Management (42 MdF) se taillent brillamment la part du lion. Le marché français du déchet industriel actuel comporte plusieurs approches pour être chiffrable : par les investissements en fin de cycle (0,37 MdF), additionnés de ceux de technologies propres (1,8 MdF), avec la part des activités éco-industrielles (6,9 MdF) et du nettoyage en milieu industriel (5,9 MdF), soit un total plus crédible de dépenses de 15 MdF réalisées pendant l'exercice 1991.
Struggle for life
Le marché de l'environnement, et en particulier celui des déchets, associe de plus en plus les différents acteurs : collectivités locales, instances administratives, entreprises, population et leurs associations. Allons-nous enfin croire en
* La première partie de cet article, intitulée "Le marché des activités liées aux déchets", est parue dans notre numéro de novembre 1993.
nos chances de renouveau ? « Les responsables, publics et privés, n'ont d'autre alternative que de privilégier la transparence et le dialogue, à partir d'un travail sérieux d'étude, d'analyse et de mesures, et d'une information anticipée et partagée. Il faut faire en sorte que l'opinion, avec l'aide des associations écologistes, des médias et du système éducatif, comprenne mieux la nécessité des choix, les notions de risque statistique ou de système, et les incertitudes du vivant » (B. Collomb, PdG de Lafarge Coppée, « L'environnement et la nouvelle responsabilité des entreprises », colloque Le Blanc de Nicolay, avril 1994).
Il faut absolument établir une communication entre les scientifiques et la société. Il convient d'élever le public. Les gens sont beaucoup plus informables qu'on ne le croit. Les tabous, les interdits tombent. « Mais les journaux, la télévision, avec des titres à sensation, cultivent le marché de la peur. On est en train d'angoisser les gens pour les accrocher … parce qu'on retient mieux ce qui effraie. Résultat : on finit par se dire que, fondamentalement, l'homme est mauvais, qu'il ne faut pas avoir confiance en lui … Une société qui n'évolue pas meurt ! » (D. Cohen, CEPH – Labo Généthon, revue L'Express, 28 octobre 1993). Comme si les douceurs du protectionnisme corporatif et de la couverture individuelle par « acquis sociaux » dénaturaient l'aventure des activités humaines qui se refuseraient à admettre la part du risque. Or, le propre de l'entrepreneur est d'être entreprenant. Cette capacité de l'entrepreneur à justement prendre des risques lui a valu la considération dont il jouit et son rôle moteur dans la société.
Toutefois, ces risques doivent être calculés, car les marchés sont fragiles. Il y a beaucoup d'échecs et certains affairistes, attirés par la spéculation du déchet, ne réalisent pas les investissements adéquats à l'adaptation de l'entreprise et, n'anticipant pas sur leur nécessité, déposent leur bilan (Y.-M. Le Doré, Onyx-Compagnie Générale des Eaux, revue « Recyclage-Récupération » du 18 décembre 1992).
L'Eco-Industriel
Les difficultés éprouvées par l'entreprise du déchet sont imputables tantôt à des raisons techniques, procédés de traitement ou chute des cours des matériaux.
Auparavant, la prestation de collecte des résidus urbains représentait jusqu'à 90 % du coût total d'élimination. Aujourd'hui, celle-ci est réduite à 30 %, et la charge du traitement constitue 70 % du prix, ce qui affecte profondément le métier. Le tarif de
Le traitement d'une tonne de déchets ménagers est ainsi passé de 350 à 350 F en l'espace de cinq ans, et atteindra bientôt 450 F. Quant à la simple mise en décharge de boues d’hydroxides, qui était réglée à 120 F/t en 1985, elle réclame 800 F/t aujourd'hui et passera dès 1995 à 2 000 F/t. Par contrecoup, les petits ateliers de traitement de surface sont directement frappés : en région Rhône-Alpes, sur les 238 recensées, 123 entreprises ne sont pas en conformité avec les règles de dépollution (J. Goellner, DRIRE Rhône-Alpes, enquête 1992). La nouvelle gestion du déchet est bâtie sur le concept de non-dépense, de non-destruction. L'opération n'est plus rentable, en effet, si les déchets, collectés au prix de 200 F/t, par exemple, nécessitent la même somme à investir pour les recycler, alors que le prix de revente des matières récupérées est insignifiant (figure 1). Par contre, le recyclage permet de réduire les volumes à éliminer et fait baisser finalement les coûts de mise en décharge. Ainsi est né le centre de transfert de Romainville, le plus important (avec une charge annuelle de 400 kt/an) et le plus moderne d'Europe. Dans cette unité-pilote, réalisée par Ipodec-Onyx, du Groupe Générale des Eaux, pour le compte du Syctom, papier-carton, verre, ferrailles et plastique sont triés mécaniquement et manuellement, la fraction non valorisable étant incinérée, réussite qui a permis l'exportation de ce savoir-faire : « En trois ans, le chiffre d'affaires réalisé par Onyx à l'étranger est passé de 200 millions de francs à 2,5 MdF » (Y. Le Doré, CGEA-Onyx, octobre 1993).
Si l'on désire que la politique de recyclage soit viable, il importe que les matériaux collectés et triés restent utilisables par les industriels producteurs au même titre que la matière première traditionnelle ; cette condition entraîne des exigences de qualité pour le trieur ainsi que des exigences de débouchés pour la région. Ainsi, pour Dunkerque, la Région Nord-Pas-de-Calais dispose d'un tissu industriel capable d’absorber le recyclage des matériaux récupérés par le centre Triselec (figure 2) :
- pour le verre, les sociétés Prover et BSN (verre cassé ou groisil) à Wingles (62) et Nord-Bouteilles (bouteilles de réemploi) à Carvin (62 également),
- pour le PVC, la société VDP à Bois-Grenier (59),
- et pour les papiers-cartons, le groupe Soulier-Onyx à Lille (59),
- pour le métal, le Syndicat des Industries et Commerces de la Récupération de Marq-en-Baroeul (59) (A. Gabet, P. Patte, Triselec « Le tri sélectif à la source », JIE 90 septembre 1990).
Le flop des DIB
Dans le dispositif français, le problème des vieux papiers est plus complexe. Eco-Emballages (1) ne doit traiter que des papiers et cartons d'emballages ; la plus grosse partie, journaux, magazines, tracts, mailings, ne reçoit pas aujourd'hui de financement, Eco-Emballages s'appliquant à développer l'usage de ces matériaux secondaires dans les marchés publics et privés (E. Guillon, Eco-Emballages, revue « Décision Environnement », octobre 1993).
Or, le succès de l'opération « vieux papiers » n'est pas seulement conditionné par les débouchés commerciaux dans l’hexagone, mais en ces temps-ci par la concurrence de l'importation. Le système français n'étant pas subventionné, les collecteurs sont contraints de réaliser un tri rigoureux afin de vendre aux usines papetières des lots homogènes pour justifier la fabrication de papier recyclé de grande qualité. Aujourd’hui, le prix de la matière valorisée est tellement bas que les clients doivent payer le prix de l'enlèvement. À l'origine de cet effondrement des prix, l'envahissement du marché français par le papier fabriqué Outre-Rhin, là où la collecte se trouve fortement subventionnée par les municipalités et les Länder : les collecteurs allemands ayant tout intérêt à ramasser de grandes quantités de papiers mêlés qu'ils livrent ensuite en l'état brut aux usines papetières françaises. Ainsi, la tonne de carton n'est plus payée aujourd'hui que de 60 à 70 F contre 320 à 350 F en 1990 (Casquet, CGEA, octobre 1993). Le prix de revente du papier recyclé a baissé de 60 à 80 %. Actuellement, les coûts de son recyclage étant supérieurs à ceux de sa destruction, il paraît plus économique de brûler les papiers avec les déchets ménagers que de tenter de les valoriser (2).
L'âpreté du marché a aussi une répercussion néfaste sur les circuits agréés d'élimination des DIB (3). D'après les estimations actuelles, ce sont 10 Mt de DIB qui rejoignent directement et annuellement les décharges : en période de crise, les petits fabricants s'adressent à des petits transporteurs, qui emportent leurs déchets dans les décharges sauvages de province. Pour 1993, TIRU accuse une perte de 30 % de DIB à traiter (P. Maerten, président-directeur général de TIRU, revue « Décision Environnement », octobre 1993) (4).
(1) Le Décret du 3 avril 1992 stipule que toute société qui commercialise dans l'hexagone des produits emballés destinés à la consommation des ménages doit contribuer ou pourvoir à la valorisation de ses déchets d'emballage. Pour convenir à cette obligation, l'entreprise concernée peut adhérer à une société agréée par l'État : Eco-Emballages pour le papier-carton, Valorplast pour les plastiques, Adelphe pour la filière verre. Il s'agit du lancement d'une nouvelle activité économique face au modèle allemand Dual. En particulier, Eco-Emballages SA propose aux entreprises productrices, distributrices ou importatrices, un contrat d'adhésion aux termes duquel celles-ci versent une contribution financière à Eco-Emballages, qui leur accorde l'apposition du logo « Point vert » sur les emballages. Il est prévu qu'une partie des fonds collectés soit affectée aux collectivités locales pratiquant la collecte sélective et le tri des emballages ménagers usagés, et que leur soit consentie une garantie de reprise par les filières de matériaux. Les ambitions de la SA Eco-Emballages sont de récupérer d'ici à dix ans 75 % des emballages qui s’amoncellent encore dans nos 6 700 décharges d'ordures ménagères (« Eco-Emballages et Collectivités locales », mai 1993).
(2) De même, les tarifs français anormalement bas de mise en décharge des résidus urbains demeurent attractifs pour les pays limitrophes. Chaque année, la Lorraine écope de 400 kt de déchets allemands, soit 40 % de la production régionale. Selon le rapport d'activité 1991 du Service des technologies propres et des déchets (Ministère de l'Environnement), la Lorraine prend la première place des régions de France à subir l'importation de déchets dangereux (185 kt en 1990, soit 40,2 % du tonnage total importé de 460 kt).
(3) Les DIB (déchets industriels banals) se composent de matériaux non toxiques : papier, carton, bois (palettes), plastique, caoutchouc (bidons, joints), composites (plastique et carton), verre, métaux (fûts), matières organiques (déchets de cantines, denrées périssables invendues, tontes d'espaces verts), produits divers (loupés et chutes de fabrication, déchets d'entretien des locaux) (« L'affaire DIB », Ademe, 9 février 1993).
(4) Tant qu'un système de rémunération de la prestation de services, identique à celui de l'Allemagne, ne sera pas adopté en France, le résultat sera contraire au but de suppression des DIB.
Les Masters du déchet
En France, l'activité de la récupération des matières premières secondaires est de loin la première fonction éco-industrielle du créneau « déchet » :
- - la Federec (Fédération française de la récupération pour la gestion industrielle de l'environnement et du recyclage), avec un flux annuel de 20 Mt de matières premières récupérées, est la première mine de l'industrie française, avec un rapport de 30 % à l'industrie nationale (pour l'exercice 1992, un chiffre d'affaires de 31,4 MdF, un taux de croissance de 8 à 10 %/an, 2 740 entreprises, 26 000 emplois directs), regroupant 90 % des opérateurs de la profession,
- - Eco-Bois réunit les organismes et les entreprises concernées par la fabrication, la location, le transport, la gestion, la récupération, la réparation des emballages industriels en bois, en particulier des palettes (60 millions d'unités par an, soit 730 kt par an produites en France, et 18 % du débouché des scieries nationales) et regroupe aussi l'essentiel des opérateurs (pour l'exercice 1991 : chiffre d'affaires de 6,5 MdF, 900 entreprises, 15 000 salariés),
- - la FNADE : Fédération nationale des activités du déchet et de l’environnement (pour l'exercice 1992, chiffre d'affaires de 6 MdF, taux de croissance de 5 à 12 % par an et 15 000 personnes environ) représente environ la moitié de l'ingénierie de l'environnement, dont le chiffre d'affaires est estimé à 12 MdF.
(suite de la note (4) : décharges que l'on prétend poursuivre : au lieu de favoriser l'initiative de récupération traditionnelle, elle se raréfiera parce que peu rentable, et cette défaillance augmentera d'autant le volume des déchets abandonnés (J.-P. Lehoux, Federec, « Le choix de la valorisation externe », colloque EFE, juin 1992).
Activité de services, auxiliaire de la production et des conditions de travail, le nettoyage industriel regroupe l'entretien des espaces verts, la maintenance des bâtiments et la maintenance industrielle, mais aussi le travail en salles blanches et la décontamination des sites pollués, avec, bien sûr, l'enlèvement des ordures ménagères et des déchets industriels. La FEP (Fédération des entreprises de propreté) a fait connaître les résultats de la dernière enquête INSEE prouvant que ce secteur a été épargné plus que les autres services par le ralentissement de l'activité économique (pour l'exercice 1991 : chiffre d'affaires de 26,5 MdF, taux de croissance de 9,5 % par an, 9 040 entreprises, 229 500 salariés).
Même optimisme chez les grandes sociétés de services du marché de l’environnement : les perspectives d'avenir ne laissent craindre aucun mouvement de repli. « Même si le marché européen enregistrait un certain ralentissement par rapport aux prévisions antérieures, les tendances à la croissance continue de 5 % par an en volume sont durables et résisteront à la morosité de la conjoncture comme aux vicissitudes de la construction européenne » (BIPE, Commission de Bruxelles, 1993). Cette euphorie est partagée par les cinq principaux groupes acteurs du traitement des déchets, qui annoncent d'excellents résultats financiers (J.-P. Meyronneinc, « Environnement : vrai ou faux marché ? », L'Usine nouvelle, spécial Eco-industries, 1993) :
- - Compagnie Générale des Eaux (chiffre d'affaires environnement 1991 : 2,8 MdEcus, déchets : 8,5 MdF), dont Onyx (CA 1992 : 6,5 MdF, effectif : 18 300 salariés), CGEA, Ipodec, USP, Compagnie Générale de Chauffe-Environnement (CA 1992 : 10,7 MdF, 12 000 personnes), Esys-Montenay (CA 1992 : 7,8 MdF, 13 000 personnes), OTV Déchets, Sogea-Environnement, Tunzini, Sarp Industries (CA 1992 : 0,86 MdF, 1 100 personnes),
- - Lyonnaise des Eaux-Dumez (CA environnement 1991 : 1,4 MdEcus, déchets : 3,8 MdF) dont SITA (CA 1992 : 3,3 MdF, 12 000 personnes), France-Déchets, Dectra, Cofreth, Novergie, Teris (avec RP), Scori (avec cimentiers), Geoclean, Labo-Services, Degrémont (CA 1992 : 3,6 MdF),
- - groupe Bouygues avec SAUR (CA global 1991 : 6,8 MdF, CA environnement : 0,4 MdEcus) et Coved,
- - groupe EMC (CA global 1991 : 15,6 MdF, 13 200 personnes, avec PEC-Tredi, Gerep, Mpda Ingénierie),
- - groupe Waste Management (CA 1991 déchets : 42 MdF, 62 000 salariés), avec SAE-Fougerolles, Spat (A. Simond, « L'industrie française de l'environnement : caractéristiques et marchés », DE de la CCIP, août 1993).
Dans le seul secteur « déchets », les hausses du chiffre d'affaires de 1992 ont été de 10 % pour la Cgea-Sarp Industries ; de 18,6 % pour la SITA, filiale de la Lyonnaise des Eaux-Dumez ; de 15 % pour la Coved, filiale propreté de SAUR du groupe Bouygues. Autre signe favorable des temps : des investisseurs étrangers, comme le géant américain Waste Management, commencent à s'intéresser sérieusement au marché français du déchet (rachat en moins d'un an de trois entreprises françaises).
Les investissements industriels
Une enquête réalisée par le Ministère de l'Industrie auprès de 7 000 établissements révèle que l'industrie française a investi en 1991 un total financier de 6 MdF pour la dépollution :
- • plus de la moitié, soit 57,3 % (3,4 MdF) étaient réservés aux actions spécifiques en fin de cycle, avec 52 % pour la lutte contre la pollution de l'eau (1,77 MdF), 33 % pour celle de l'air (1,12 MdF), 11 % pour celle des déchets (0,37 MdF) et 4 % pour celle du bruit (0,14 MdF) ;
- • près du tiers, soit 30,3 % (1,8 MdF) étaient destinés à la réduction de la pollution à l'émission par technologies propres, renouvellement de l'outil de production, modernisation du procédé de fabrication ;
- • environ 12 % (0,74 MdF) concernaient la prévention immédiate des risques et la limitation des pollutions accidentelles (figure 3). (R. Quiavaux, P. Sabot, « Les investissements de l'industrie protégeant l'environnement », SESSI, Ministère de l'Industrie, n° 19, juin 1993).
Plusieurs remarques à formuler à propos de ce constat d'enquête SESSI :
- • en France, les investissements industriels relatifs à la défense de l'environnement ne représentent que 2,8 % de l'ensemble des investissements consentis, soit deux fois moins qu'en Allemagne, qui, avec 5,9 %, a réussi à investir 24,5 MdF ;
- • les plus « gros pollueurs » sont aussi les plus forts investisseurs, comme les filières chimie (24,8 %), raffineries (15,8 %), sidérurgie non ferreux (14,5 %) et papiers-cartons (11 %) ;
- • l'importance du secteur « déchets » est sous-estimée (11 % des investissements industriels français et allemands) puisque la majorité des frais ne sont pas comptabilisés dans l'étude SESSI, et que le conditionnement et l'élimination sous-traités, confiés à des prestataires de services extérieurs, entrent dans les frais d'exploitation. Aussi, l'association Entreprises pour l'Environnement différentie-t-elle pour la France de 1992 :
- – les investissements industriels (hors ceux de la Compagnie Générale des Eaux et de la Lyonnaise des Eaux-Dumez) évalués à 6 MdF ;
- – les dépenses recherche-développement et frais de fonctionnement, estimés à 8,3 MdF (« Industrie et Techniques », n° 742, octobre 1993).
D'autre part, l'adoption de technologies propres par les entreprises, qui exige 1,8 MdF d'investissement en 1991, est conçue pour réduire le coût de traitement des déchets et polluants générés, investissement à inclure logiquement dans la rubrique « déchets » (soit 0,37 MdF + 1,8 MdF = 2,17 MdF, total plus proche de la réalité).
D'ailleurs, le marché des déchets paraît prêt à suivre en France une expansion considérable : la modernisation des usines d'incinération sous-équipées réclame déjà 6 MdF de mise en conformité, répartis sur six ans (1992-1998), et la seule construction des centres d'enfouissement pour déchets ultimes exigés par la loi de juillet 1992 nécessite 15 MdF d'investissements. Selon Ereco, qui a sondé l'accroissement moyen en volume entre les années 1990 et 2000 des investissements écologiques à réaliser en Union Européenne, c'est le secteur « déchets » qui arrive en tête, avec +10,5 % pour les administrations publiques et +8,7 % pour les entreprises. De son côté, le bureau de recherches Frost & Sullivan International considère que le marché européen des déchets industriels toxiques augmentera, entre 1991 et 1996, de 1,8 à plus de 4 milliards de dollars, avec une nette tendance à l'incinération (figure 4). À noter que les tarifs de traitement pratiqués dans les centres collectifs français ont déjà subi une forte croissance au cours de la dernière décennie (figure 5).
À ces diverses approches d'évaluation du marché « déchets », déjà significatives, il convient d'en ajouter une dernière, celle du marché des activités typiquement éco-industrielles, à savoir, hors « technologies propres », opérations de recyclage (s'en trouvent exclues toutes les éco-industries de services : entreprises de récupération, usines d'incinération, sociétés d'études et d'ingénierie, etc.). Dans cette autre étude SESSI, le marché du traitement des déchets intervient en troisième position, avec 23 % du chiffre d'affaires éco-industriel évalué à 30 milliards de francs, soit 6,9 milliards de francs pour les déchets (figure 6).
Mais si personne, aujourd'hui, ne peut assimiler « l'environnement » à un pactole prodigieux, et prétendre pouvoir aussitôt « faire de bonnes affaires dans les déchets », il s'agit tout de même, pour notre société, d'un passage obligé… avec péage.