Le Syndicat des Communes de la Banlieue de Paris pour les Eaux qui alimente en eau potable 4 000 000 d'habitants de la région parisienne est confronté à des problèmes dont l'envergure est hors du commun.
La présente revue s'est fait l’écho des préoccupations particulières du Syndicat relatives à la sécurité de la distribution (cf. article sur les réservoirs de grande capacité à Montreuil, n° 28 d’octobre 1978) et à l'amélioration des filières de traitement de l’eau (préozonation de l'eau brute, n° 29 de novembre 1978).
La matière première qu’est l'eau des rivières a besoin d’être surveillée de façon permanente, toute variation de sa qualité entraînant une adaptation de traitement. En particulier, les détériorations qui constituent les pollutions doivent pouvoir être analysées, enregistrées et faire l'objet de décisions graduées. L’article qui vous est présenté ci-après sur ce sujet est le fruit d'une collaboration étroite entre le Syndicat et la Compagnie Générale des Eaux, son régisseur. Cet exposé évoque les principes retenus pour la conception d'une station automatique de surveillance et décrit la première réalisation (en cours d'essais à la date de parution) qui sera implantée à GOURNAY sur la rivière MARNE.
A.-M. VINCENT,Président du Syndicatdes Communes de la Banlieuede Paris pour les Eaux.
Conférence présentée, dans le cadre de l'exposition « Contrôle et Traitement de la Pollution de l'Environnement » – MOSCOU 28 février/12 mars 1979.
I. — POURQUOI SURVEILLER LA QUALITE DES EAUX DE SURFACE ?
À notre avis, il y a au moins deux finalités qui, à elles seules, justifient l'ensemble des recherches et des travaux.
La première est assez générale et peut se définir comme le souci de préserver l’harmonie des diverses activités qui se côtoient dans (ou sur) un cours d'eau.
En effet, si par exemple la navigation commerciale est quasiment insensible au degré de pollution des voies d'eau, par contre, la plupart des autres activités telles que voile, pêche, baignade, promenade ou activités industrielles diverses sont très directement tributaires de la qualité des rivières.
Comme le cours d'eau est le point de convergence obligatoire de nécessités contradictoires, c'est dans une intelligente planification des droits et devoirs des différents intéressés que l'on peut trouver le moyen terme permettant de maintenir l'équilibre souhaitable.
Ce point de vue a été développé en France par les Agences Financières de Bassin qui ont ainsi défini, tronçon de cours d'eau par tronçon de cours d'eau, des « objectifs de qualité », dont la réalisation doit orienter toute l’urbanisation riveraine.
Le succès d'une telle politique nécessite que l'on puisse, d’une part, contrôler la nature et la
quantité des divers rejets pour s’assurer qu'ils sont conformes à ce qui a été admis, et d'autre part, vérifier que le comportement global de la rivière corresponde bien à ce qui avait été prévu par les études théoriques.
La seconde finalité est plus particulière et concerne la protection des prises d’eau situées en aval, que ces prises soient destinées à la production d'eau potable ou à tout autre utilisation essentielle. En effet, alors que pour le contrôle des objectifs de qualité une connaissance en temps différé des phénomènes est suffisante (les décisions à prendre n'étant pas immédiates), en revanche dans le cas de la protection des prises d'eau il est très important de pouvoir réagir immédiatement, soit pour modifier l'approvisionnement, soit pour adapter les filières de traitement ; ceci n'est possible qu’avec une station de surveillance prélevant, analysant et transmettant les résultats en temps réel et travaillant sur une eau représentative de celle utilisée au niveau de la prise en rivière.
Jusqu'ici l'approche que nous venons de décrire a probablement, quoique en termes différents, pu être faite à différentes époques ; n’oublions pas qu’il y a deux mille ans existait à Rome « un curateur des eaux » dont un des rôles essentiels était de surveiller la qualité des eaux du Tibre sur lesquelles la grande cité devait compter pour son approvisionnement, ceci avant la construction des célèbres aqueducs.
Par contre, au niveau de la définition précise de ce que devront être aujourd’hui les moyens de surveillance, il est indispensable de faire appel aux connaissances les plus récentes et de tenir compte des possibilités actuelles de l'électronique et de l'informatique.
Critères à prendre en compte et exigences à satisfaire
Il faut bien entendu faire appel le plus possible à l'automatisme qui seul peut garantir la rapidité, la cohérence et la fidélité des différentes mesures en éliminant les multiples sources d’erreurs imputables aux interventions humaines.
Il est également nécessaire de tenir compte de l'ensemble des études qui ont permis de mieux cerner la liste des produits indésirables pour les diverses utilisations de l'eau avec (et ceci est essentiel) les concentrations maximales admissibles pour chaque produit ; les normes en cours de publication par le Conseil des Communautés Européennes en sont un bon exemple.
Enfin, il est impératif de donner aux stations qui vont être la clé de voûte du réseau de surveillance le maximum d’autonomie de fonctionnement hors de toute intervention humaine et d'essayer d’optimiser leur emplacement.
Cela nous amène à décrire deux principaux types de stations : d'une part, les stations travaillant directement sur les effluents, d’autre part, les stations au fil de l’eau.
II. — LES STATIONS TRAVAILLANT DIRECTEMENT SUR LES REJETS
S'il est difficilement envisageable d’équiper tous les émissaires industriels ou urbains de dispositifs de contrôle très complets, il est par contre intéressant d’assurer, à la source, une surveillance continue des rejets principaux.
La caractéristique essentielle des stations de ce type est de pouvoir mesurer des concentrations importantes, sur un nombre limité de paramètres qui définissent le « spectre » potentiel de pollution du rejet.
De plus, pour avoir une idée de la charge polluante risquant de dégrader la qualité des eaux en aval, il est souvent nécessaire de connaître, même approximativement, le débit du rejet.
Les fabricants ont étudié ce problème et quelques-uns ont abouti à des résultats intéressants. Parmi les français, on peut citer les travaux des laboratoires du Centre d'Informations et de Recherches sur les Nuisances (C.I.R.N.), de la Société Nationale ELF Aquitaine (S.N.E.A.), d'ELF (rejets pétroliers), du Centre de Recherche de l'Omnium d'Assainissement (C.R.O.D.A.), (stations d’épuration industrielles et urbaines), ainsi que ceux, conjoints, de la Société ULTRAFUX, de la COMPAGNIE GÉNÉRALE des EAUX et de la COMPAGNIE GÉNÉRALE de TRAVAUX d’HYDRAULIQUE — SADE (mesure des débits de rejets en conduites circulaires et en canaux ouverts).
Jusqu’à présent la plupart des opérations de surveillance étaient effectuées par des sondages périodiques dans les rejets les plus importants et seulement avec des dispositifs semi-automatiques ou automatiques de prélèvement.
L'analyse sur le terrain avec transmission instantanée des résultats à un centre de décision situé à distance devrait être bientôt possible.
Il faut noter toutefois que si pour les stations au fil de l'eau on peut dégager une certaine approche méthodologique générale, par contre, pour les stations travaillant directement sur les rejets, si l’on veut aller au-delà de la mesure de quelques paramètres globaux (pH, DCO, etc.) sans grande signification pratique, il est nécessaire d’étudier précisément chaque problème, au cas par cas, afin d’optimiser le choix des matériels.
On peut citer par exemple le cas des métaux lourds dont certains interfèrent entre eux : ainsi pour la mesure de l'arsenic seul, un équipement peut être très fiable, alors qu’en présence de plomb...
Le même équipement peut donner des résultats aberrants. Dans un tel cas, un suivi analytique du rejet pendant une période significative aurait permis d'éviter un investissement inadéquat.
Un autre point important est le choix de la source d'énergie : en effet, ces stations de dimensions réduites doivent pouvoir être installées à des emplacements éloignés de toute source d'énergie permanente, tout en ayant une autonomie de fonctionnement suffisante. Or, une quantité d’énergie non négligeable est indispensable, tant pour les opérations automatiques de prélèvement et d’analyse que pour la transmission des données ainsi recueillies. Suivant les emplacements, diverses possibilités peuvent être envisagées, dont l'utilisation de piles solaires.
De telles stations travaillant directement sur les rejets jouent principalement un rôle d'alarme. Par contre, elles sont peu utilisables comme aides à la conduite des usines de production d'eau potable situées en aval.
III. — LES STATIONS AU FIL DE L’EAU
Les stations qui, de loin, nous paraissent les plus intéressantes sont les stations au fil de l'eau, essentiellement chargées de la protection des prises d'eau des usines de production d'eau potable. Pour remplir cette mission, leur fonction doit être d'analyser en temps réel les paramètres significatifs pour le traiteur d'eau, de telles analyses devant être effectuées sur une eau représentative de l'eau pompée et traitée.
Nous développerons à titre d'exemple l'étude qui a été réalisée par la Compagnie Générale des Eaux pour le compte du Syndicat des Communes de la Banlieue de Paris pour les Eaux. Cette étude permet actuellement la réalisation à Gournay d'une station d’alerte placée sur la Marne, rivière sur laquelle est située l'usine de production d'eau potable de Neuilly-sur-Marne d'une capacité de 600 000 m³/j, approvisionnant toute la banlieue Est de Paris (fig. 1).
4. — L'usine de production d'eau potable de NEUILLY-sur-MARNE.
A) LE CHOIX DES PARAMÈTRES À ANALYSER
Le spectre de surveillance intéressant le traiteur d'eau doit naturellement couvrir tous les produits présentant un risque au niveau d'une eau utilisable pour l'alimentation humaine.
Notre choix a été guidé par les normes établies par les Commissions des Communautés Européennes, tant pour l'eau traitée que pour l'eau à traiter. Les normes concernant les eaux superficielles (A1, A2, A3) correspondent à des types d’eaux potabilisables en fonction des différentes classes techniques d'usines de production dont peut disposer le traiteur d'eau. Par exemple, une usine moderne de traitement est capable de rendre potable une eau de rivière classée A3.
Le traiteur d'eau ayant des normes quantitatives précises pour un grand nombre de produits toxiques ou gênants, il choisira parmi ces produits d'analyser ceux qui, en fonction des conditions locales, peuvent être amenés à dépasser la concentration admise.
Les produits sont déterminés à partir :
- — des études statistiques de la qualité de l'eau pompée, effectuées sur une longue période (analyses journalières et recensement des pollutions accidentelles déjà subies),
- — d'une analyse, sous forme de recherche opérationnelle, des risques encourus (stockage, unités de production, transports...).
Le tableau 1 rassemble, dans le cas de la station actuellement en cours de montage à Gournay, les paramètres retenus.
TABLEAU 1
Métaux toxiques |
---|
Zinc |
Cuivre |
Cadmium |
Plomb |
Sélénium |
Mercure |
Manganèse |
Nickel |
Arsenic |
Chrome |
Autres produits toxiques ou gênants |
Cyanures |
Sulfo-cyanures |
Ammoniaque |
Nitrates |
Nitrites |
Phosphates |
Sulfures |
Fluorures |
Phénols |
Indicateurs généraux |
Carbone organique total |
Hydrocarbures |
Azote organique |
Ce spectre très large est caractéristique d'une rivière à haut risque, traversant en amont de l'usine de production d'eau potable des zones fortement urbanisées et industrialisées.
Enfin, le programme d'analyse a conduit à concevoir un dispositif de mesure du délai de déplacement hydraulique de la pollution qui permet, quand l'alerte est donnée par la station, de connaître l'heure d'arrivée de la nappe polluante au droit de la prise d'eau de l’usine.
B) PRINCIPES GÉNÉRAUX DE CONCEPTION
[Figure : Schéma de principe d'une station d'alerte de 2ᵉ génération (Fig. 2)]La mission fondamentale d’alerte sera correctement remplie si la station est à même d’effectuer en temps réel l'analyse des paramètres ayant une incidence sur le traitement (soit parce qu'ils nécessitent la modification des taux de traitements chimiques, soit parce qu'ils inhibent les traitements biologiques).
En outre, l'exploitant doit être assuré de la validité des mesures. Pour cela on doit mettre en place :
- — un système de détection des anomalies de fonctionnement,
- — des systèmes de nettoyage des capteurs ou de leurs filtres,
- — une procédure automatisée de réétalonnage,
- — un système de traitement optimisé des données avec émission d’alarme en cas d’arrivée d'une nappe de pollution.
L'ensemble de ces missions est rendu réalisable par l'emploi d'un microprocesseur, véritable centre nerveux de la station.
Ce calculateur permet en outre, à la demande d'un opérateur situé en usine, de modifier à tout moment le mode de fonctionnement des différents capteurs (en particulier par des réétalonnages exceptionnels en cas de doute sur la validité d'une mesure).
La transmission des alarmes et cette possibilité de dialogue avec le conducteur de la station de traitement exigent un système de transmission permanent et fiable.
C) APPAREIL DE PRÉPARATION DES ÉCHANTILLONS ET DE MESURE DES PARAMÈTRES DE LA QUALITÉ DE L'EAU
À partir du programme analytique et des principes généraux de conception que nous venons d'énoncer, il devient possible de mettre au point les différents composants techniques de la station de mesure. Cette mise au point prend en compte les impératifs d'automaticité (une semaine de fonctionnement sans intervention humaine), de sensibilité (mesures au niveau des normes) et de fiabilité (contrôle automatique) nécessaires à une utilisation réaliste comme instrument de protection d'une usine d'alimentation en eau potable.
1°) Préparation des échantillons
Les expériences acquises avec les stations de première génération ont montré qu'un des problèmes les plus délicats est d'assurer une alimentation en eau des capteurs sans encrassement ; il a donc été nécessaire de mettre au point un système de filtration efficace n'affectant pas les paramètres chimiques fondamentaux de l'eau à analyser.
Le circuit d'eau brute est ainsi équipé :
— d'une crépine grossière (1 mm) ;
TABLEAU II
Éléments analysés | Seuil de détection (µg/l) |
---|---|
Mercure | 1 |
Plomb | 5 |
Cadmium | 5 |
Zinc | 5 |
Cuivre | 5 |
Sélénium | 5 |
Manganèse | 30 |
Arsenic | 30 |
Chrome VI | 30 |
Nickel | 30 |
— d’un débourbeur centrifuge statique (fig. 7) ;
— d’un filtre nettoyé automatiquement par ultrasons et air comprimé (fig. 8).
L’ensemble de ces équipements est pourvu de systèmes assurant le décolmâtage automatique.
2°) Appareils de mesure
— Automate de mesure par polarographie
Cet appareil (fig. 9) est chargé des mesures de teneurs en métaux lourds. La méthode analytique retenue dispose d’une sensibilité suffisante pour permettre une détection efficace au niveau des seuils d’inhibition des traitements biologiques ou des concentrations maximales admissibles pour l’eau potable (tableau II).
TABLEAU III
Corps analysés | Sensibilité |
---|---|
Ammoniaque | 0,05 mg/l |
Nitrates | 0,1 mg/l |
Nitrites | 0,1 mg/l |
Phosphates | 0,1 mg/l |
Cyanures | 0,05 mg/l |
Sulfocyanures | 0,1 mg/l |
Fluorures | 1 mg/l |
Sulfures | 0,05 mg/l |
Les mesures sont effectuées sur échantillons préalablement minéralisés (fig. 10).
— Automate de mesure par électrodes spécifiques
Cet appareil (fig. 11) permet d’effectuer les analyses consignées dans le tableau III.
Les fluorures et les sulfures sont analysés car leur présence (non gênante pour l’usine dans les conditions actuelles) peut fausser les analyses des cyanures et des phosphates.
Dans un premier temps l’analyse des chlorures avait été retenue, mise au point et testée. Ce paramètre, qui ne présentait pas un grand intérêt pour les rivières de la Région Parisienne a été, depuis, remplacé par une mesure des phosphates.
PHÉNOLMÈTRE
— Analyseur de produits phénolés
Un appareil de qualité satisfaisante existait sur le marché français ; il n’a donc pas été utile d’en concevoir un (fig. 12).
Il a toutefois été nécessaire d’effectuer diverses modifications sur cet appareil de façon à permettre son utilisation dans des conditions de précision et de fiabilité comparables aux autres systèmes de mesure mis en œuvre dans notre équipement (nettoyage et réétalonnage automatiques avec contrôle par calculateur).
— Mesure de la vitesse de la rivière
Un dispositif de courantométrie à ultrasons permet de calculer la vitesse de déplacement des nappes de pollution détectées par les capteurs chimiques, ainsi que le débit de la rivière (fig. 13). Ces paramètres sont obtenus à partir des mesures ultrasonores automatiques des vitesses moyennes de l’eau à différentes profondeurs et de la mesure de la hauteur d’eau dans la rivière.
Ce dispositif calcule, en outre, le délai de transmission hydraulique des nappes de pollution entre la station d’alerte et l’usine de traitement.
D) CHOIX DU SITE
Chargées la plupart du temps de la protection d’usines puisant directement en rivière, les stations d’alerte seront situées en amont des usines de production d’eau potable au meilleur emplacement possible : il faut en effet que la qualité de l’eau analysée au niveau de la station soit représentative de celle traitée en usine (aucun rejet important ne doit donc exister entre la station et l’usine de traitement) ; par ailleurs la distance station-usine doit être suffisante pour donner à l’exploitant le temps nécessaire à la mise en œuvre d’une procédure d’intervention (modification du traitement, arrêt de l’usine).
L’emplacement idéal réunissant toutes les qualités requises n’existe pas la plupart du temps. Une étude topographique complète permet toutefois d’accéder à un compromis acceptable.
De façon générale, l’articulation de cette étude doit s’effectuer comme suit :
- 1. Étude des vitesses d’écoulement de la rivière en différentes circonstances climatiques. Ces études sont menées par la mise en œuvre d’opérations de traçage qui permettent de simuler des accidents de pollution et d’en observer le comportement.
2. Étude des rejets principaux à l’amont de l'usine de production d'eau potable.
Un calcul des flux polluants transportés et un traçage de ces rejets permettent de situer avec précision leur impact au niveau de la prise d’eau.
3. Étude des risques d’accidents de pollution liés au stockage ou au transport de produits dangereux.
Ces trois études permettent en général la détermination d'un emplacement « a priori acceptable » pour la station d’alerte.
4. Une étude à long terme de comparaison des qualités moyennes de l'eau au point choisi et de l'eau pompée pour l'usine est alors menée à titre de vérification.
EN MARNE
Sur la carte décrivant succinctement les résultats de l'étude d’implantation en Marne de la station de Gournay (fig. 14), on remarquera en particulier :
- — qu'il n'y a pas de rejet industriel important entre la station d’alerte et l’usine,
- — que la zone comprise entre la station d’alerte et l'usine est une zone à faible risque d'accident (zone résidentielle pavillonnaire),
- — que le trafic routier proche se fait en rive droite de la Marne et risque peu d’affecter la prise d’eau de l'usine située en rive gauche,
- — que la partie amont de la Marne n'est pas navigable (la navigation est assurée par un canal, dont le confluent avec la Marne est situé immédiatement en amont de l'usine mais sur la rive opposée). Ainsi, en cas d’incident de navigation, l'usine sera peu affectée. Il sera, en outre, possible de maintenir l'écluse aval du canal fermée pendant quelques heures en cas d’accident grave,
- — que la distance station-usine est faible (4 km) mais donne un délai d’intervention d'une heure (pendant les crues) et supérieur à 4 heures pendant les périodes de basses eaux où les risques de pollution sont importants.
Dans le cas où des conditions favorables d’implantation ne peuvent être trouvées (en particulier, en raison de l'existence de rejets importants dans l'amont immédiat de la prise d'eau de l'usine), il sera nécessaire d'entreprendre des actions auprès de l'Administration chargée de la police des eaux, pour obtenir une cessation ou une surveillance particulière de ces rejets. D'une façon générale, ce cas est peu fréquent : la plupart des usines de production d'eau potable étant situées dans des zones à peu près protégées.
COMPAGNIE GÉNÉRALE DES EAUX
EXPLOITATION DE LA BANLIEUE DE PARIS
SERVICE PRODUCTION
USINE DE NEUILLY-SUR-MARNE
STATION D’ALERTE DE GOURNAY
Date : 24 mai 1978.Heure : 8 h 11 mn.
Paramètres courantologiques
Mini | Moyen | Maxi |
Vitesse de la rivière (m/s) : 0,700 | 0,800 | 0,910 |
Niveau de la rivière (m) : 9,00 | 9,70 | 10,2 |
Débit rivière (m³/s) : 80,0 | 87,0 | 91,0 |
Délai station-usine (mn) : 74,0 | 77,0 | 93,9 |
Paramètres physico-chimiques
1. Paramètres généraux
Mini | Moyen | Maxi |
pH : 7,02 | 7,08 | 7,20 |
Oxygène dissous (mg/l) : 5,40 | 6,00 | 6,20 |
Température (°C) : 12,0 | 13,4 | 14,2 |
Turbidité (g m⁻¹) : 321 | 349 | 405 |
Conductivité (µS/cm) : 460 | 697 | 780 |
Potentiel Redox (mV) : –220 | –212 | –197 |
2. Métaux
Mini | Moyen | Maxi |
Mercure (ppb) : 0,00 | 0,110 | 1,02 |
Zinc (ppb) : 12,0 | 19,0 | 28,0 |
Cadmium (ppb) : 1,10 | 2,02 | 3,96 |
Plomb (ppb) : 21,0 | 29,8 | 48,5 |
Arsenic (ppb) : 9,00 | 21,4 | 32,4 |
Sélénium (ppb) : 0,00 | 2,90 | 9,50 |
Manganèse (ppb) : 12,0 | 17,8 | 28,0 |
Chrome VI (ppb) : 7,90 | 17,0 | 34,0 |
Nickel (ppb) : 9,00 | 14,0 | 29,9 |
Cuivre (ppb) : 9,00 | 15,6 | 34,1 |
3. Autres toxiques
Mini | Moyen | Maxi |
Phénols (ppb) : 0,00 | 4,98 | 9,08 |
Ammoniaque (ppm) : 0,109 | 0,110 | 0,520 |
Cyanures (ppb) : 5,30 | 8,00 | 21,0 |
Sulfocyanures (ppb) : 8,00 | 12,6 | 32,0 |
Nitrates (ppm) : 1,10 | 3,01 | 3,20 |
Nitrites (ppm) : 0,00 | 0,00 | 0,00 |
Fluorures (ppm) : 10,1 | 11,0 | 12,4 |
Chlorures (ppm) : 9,30 | 12,0 | 13,2 |
Sulfures (ppb) : 0,00 | 0,00 | 0,00 |
**E) PERSPECTIVES D’AVENIR A COURT TERME**
Ce type de station, bien que couvrant une grande partie des besoins, comporte, en particulier sur le plan analytique, un certain nombre de lacunes ; il conviendra de lui adjoindre dans les années à venir :
- — des analyseurs de produits organiques spécifiques,
- — un détecteur de toxicité globale fiable et fidèlement représentatif des risques réellement encourus par les populations humaines.
**F) GENERALISATION DE CE DISPOSITIF**
La station que nous venons de décrire a été conçue avec une protection adaptée à une usine particulière de traitement d’eau. Elle est aussi pour cette usine un système d’aide au traitement en cas de modification d’un paramètre fondamental (fig. 15).
Nous insisterons sur le fait que chaque implantation de station de ce type doit faire l'objet d'une étude spécifique tenant compte des corps que l’on risque de rencontrer et des conditions hydrographiques locales.
**CONCLUSION**
Contrôler la nature et l’ampleur des rejets pour éviter que les cours d’eau ne reçoivent plus qu’ils ne peuvent assimiler et surveiller la qualité des eaux de surface, nécessitent désormais la mise en œuvre de stations performantes et automatiques, adaptées à chaque cas particulier.
On peut attendre de cette stratégie une conservation et même une réhabilitation du milieu aquatique qui nous entoure. Il ne faut toutefois pas oublier que, même très perfectionnées, ces stations ne sont que des moyens et qu’elles perdraient beaucoup de leur intérêt si elles ne s’inscrivaient pas dans un programme général de maintien de la qualité des eaux de surface, programme qui doit être une mosaïque de programmes détaillés concernant chacun, des zones hydrauliques ou géographiques bien définies.
Ces programmes particuliers sont essentiels car c’est à leur niveau qu’une prévention efficace et peu contraignante peut être réalisée. À chaque implantation ou développement d’une activité industrielle quelque peu importante doit correspondre une étude détaillée préalable, prenant en compte tous les paramètres, et dont les conclusions doivent être la base du programme local de maintien de la qualité des eaux de surface.
C’est à ce prix que la bataille de l’environnement sera gagnée...
**J. CHEZE – M. DUTANG – A. GUIRAUD**