Chef du service Recherches et Applications Société TRAILIGAZ
En provoquant une série d’étincelles dans un tube de verre plein d’oxygène, grâce à la « grande machine électrique du musée de Teyler », Van Marum dès 1781 effectua les premières synthèses d’un gaz que l’on appela par la suite ozone.
Son applicabilité au traitement des eaux a pu être démontrée au laboratoire en 1886 par le Français Méritens. Ce n’est que cinq ans plus tard que des essais à l'échelle industrielle ont été entrepris en Allemagne par Fröhlich. En 1898, pendant trois mois, l'usine de Saint-Maur servit de cadre à d'autres essais d’ozonation : 5 000 à 12 000 m³ d'eau de la Marne, ayant subi une filtration lente, furent ozonés chaque jour.
La succession de résultats encourageants favorisa la réalisation de la première usine d’ozonation d’eaux destinées à la consommation publique : c’était à Nice en 1907 où l'usine de Bon Voyage traitait journellement 22 500 m³ d’eau de la rivière Vésubie.
Soixante-dix ans plus tard, 1 039 usines de traitement d’eaux potables utilisaient l’ozone dans le monde ; 29 pays au moins possédaient des installations d’ozonation et la France venait en tête avec le plus grand nombre de réalisations (593 stations).
Empiriques à l’origine, les conditions d’application de l’ozone se sont précisées au fur et à mesure que les propriétés de ce gaz furent connues et que des améliorations technologiques furent apportées.
NATURE DE L’OZONE
En 1897 dans sa première thèse, M. OTTO concluait après une série d’expériences destinées à montrer la nature de l’ozone : « L’hypothèse la plus logique pour expliquer cet ensemble de faits, consiste à admettre que l’ozone est une modification allotropique de l’oxygène ». Depuis, la nature de l'ozone a été confirmée : composé de trois atomes d’oxygène, sa structure moléculaire revêt la forme d'un triangle isocèle avec un angle au sommet de 116° 49’. La molécule d’ozone n’est pas paramagnétique et son moment dipolaire est très faible (0,49 à 0,58 debye). On la représente généralement par la forme hybride de résonance des quatre configurations canoniques suivantes :
O* O+ \ / O O O+ O\– +O O–
Sa formule chimique est donc O₃ et son poids moléculaire égal à 48.
L’ozone est synthétisé à partir d’oxygène selon les réactions réversibles suivantes :
k₁ O₂ + O + M → 2 M + O₃; k₂ + 24,6 Kcal
2 O₂ ⇄ O + O₃, — 93 Kcal
(M représente toutes les substances, y compris l’ozone, présentes dans la phase gazeuse).
La température et la pression critiques de l’ozone sont respectivement de — 12,1 °C et de 54,6 atm. Sa chaleur de formation à partir de l’oxygène est de — 34 Kcal/mole et sa masse volumique dans les conditions normales de température et de pression est de 2,154 g/l.
L’ozone se rencontre donc habituellement sous forme gazeuse, mélangé au gaz vecteur qui lui a donné naissance. Particulièrement instable, il se décompose spontanément pour redonner de l’oxygène ; sa vitesse de dissociation, lorsqu’il est dilué dans l’oxygène, peut s’exprimer comme suit :
—d(O₃) / dt = 2 k₁ · k₄ · (O₃)² / k₄ · (O₂)
L’ozone est plus soluble dans l’eau que l’oxygène, mais sa dissolution suit cependant la loi de Henry. La figure 2 montre l’influence de quelques paramètres sur la valeur du résiduel d’ozone dissous ; en règle générale, plus sa concentration est élevée, plus la température de l’eau est basse et plus le pH est basique, plus la solubilité de ce gaz est grande.
En solution dans l’eau, il est aussi relativement instable, et se décompose en donnant, selon les conditions du milieu, plusieurs espèces radicalaires et de l’oxygène. Une loi de décomposition approchée est la suivante :
Ln (R₀ / R) = a (T — T₀)
R et R₀ étant les résiduels d’ozone dissous dans l’eau aux temps T et T₀, et a le coefficient de décomposition spécifique des conditions du milieu.
Ainsi, de nombreux paramètres interviennent : la présence de matières oxydables, un pH alcalin et une température élevée sont favorables à la disparition de l’ozone résiduel dans l’eau. À titre indicatif, on estime que la décomposition de l’ozone dans l’eau distillée est quasiment instantanée au-dessus de 70 °C.
Dans son Mémoire sur l’Électricité, Van Marum avait noté des changements lorsque l’oxygène était soumis à des étincelles électriques : « il avait pris une odeur très forte qui me parut être clairement l’odeur de la matière électrique ». En fait, l’ozone a une odeur pénétrante, qui se détecte à des concentrations aussi faibles que 0,02 ppm.
D’ailleurs le nom « ozone » a été conféré à ce gaz par Schönbein en 1840, qui se réfèrait au grec ozein signifiant sentir.
Si l’on trace le spectre d’absorption, on note un maximum à 2 537 Å. Pratiquement, l’ozone est incolore aux concentrations usuelles. Il présente cependant une teinte bleutée qu’il confère à l’eau lorsqu’il est vu sous forte épaisseur.
PROPRIÉTÉS DE L’OZONE
Oxydation et désinfection sont les deux principales propriétés reconnues pour l’ozonation.
1. Les oxydations
Avec un potentiel d’oxydo-réduction de 2,07 volts en milieu acide, l’ozone est un agent oxydant plus puissant que le chlore ou le brome. On lui reconnaît volontiers quatre voies principales de réaction :
— l’oxydation directe : par fixation d’un de ses atomes d’oxygène sur la molécule attaquée ; — la catalyse : en abaissant l’énergie d’activation, l’ozone favorise les cinétiques d’oxydation par l’oxygène ; — l’ozonolyse : selon le mécanisme de Criegee, l’ozone se fixe entièrement sur une double ou triple liaison atomique. L’ozonide formé, instable en milieu aqueux, se décompose rapidement par scission ; — l’oxydation radicalaire : selon les conditions du milieu, il y a décomposition de l’ozone en radicaux hydroxyles et hydropéroxyles qui vont à leur tour jouer le rôle d’oxydants.
La variété des réactions susceptibles de se produire explique l’étendue du champ d’action de l’ozone. On peut distinguer arbitrairement deux types d’actions : les oxydations directes et les oxydations combinées.
+ Les oxydations directes
Elles touchent à la fois aux éléments minéraux et aux corps organiques.
Lorsqu’il s’agit de minéraux, les réactions sont en général rapides ; tel est le cas du soufre, du fer et du manganèse. Après ozonation, le fer précipite sous forme d’hydroxydes tandis que le manganèse est transformé, selon le degré d’oxydation, en bioxydes ou en permanganate que l’on
peut retenir par filtration. Lorsque les métaux sont sous forme complexée, l'ozone doit d’abord libérer ces minéraux avant de les oxyder, ce qui nécessite parfois des conditions d’ozonation plus drastiques.
L’étude des réactions organiques avec l’ozone a été abordée par Bailey. Sans qu'il soit possible de définir des règles générales, on peut néanmoins conclure que les corps suivants sont susceptibles d’être oxydés : molécules aromatiques, composés ayant des liaisons insaturées, molécules nucléophiles, corps ayant des liaisons carbone-métal, carbone-silice voire carbone-hydrogène comme dans le cas des alcools et des hydrocarbures.
En général, les matières organiques dans l'eau sont mesurées globalement. L’ozonation permet de diminuer légèrement leur quantité, mais surtout les transforme en d’autres composés de poids moléculaire plus faible. L’ozone contribue aussi à la destruction de micropolluants : phénols, certains détergents et pesticides (aldrine, ...), 3-4 benzopyrène, etc. Il faut cependant noter que l’ozonation doit parfois être effectuée pendant un temps suffisamment long, de façon à s'affranchir de composés intermédiaires indésirables : tel est le cas du parathion qui est oxydé en paraoxon (composé toxique), avant d’être dégradé lui-même en sous-produits inoffensifs.
+ Les oxydations combinées
Elles ont pour but d’améliorer un traitement qui leur fait suite, qu'il s’agisse de floculation, d’adsorption ou de traitement biologique. Dans tous les cas l'ozone modifie la structure initiale des composés présents dans l’eau ; par modification du potentiel zêta, la floculation se produit spontanément ou avec un minimum d’agent floculant ; par scission de composés à haut poids moléculaire, l’adsorption est facilitée ; par décomposition des matières organiques en éléments plus biodégradables, et par oxygénation de l'eau, un traitement biologique est amélioré, qu'il s’agisse de storage ou de filtration.
2. Les désinfections
Dès 1891, le Dr Ohlmiller montrait que les bactéries de la typhoïde et du choléra étaient détruites par ozonation lors d’essais en station industrielle. En 1899, Calmette et Roux écrivaient : « toutes les bactéries pathogènes que l'on rencontre dans les eaux de rivières sont détruites par le passage de l’eau dans une colonne ozonatrice. La destruction du plus grand nombre de germes survient pendant le passage dans la colonne et ceux qui y échappent succombent après quelques minutes dans les réservoirs ».
En fait, il faut reconnaître à l'ozone plusieurs avantages sur ses principaux concurrents :
- — rapidité d'action : l'inactivation des bactéries par l’ozone serait 300 fois plus rapide que celle du chlore ; à faible taux résiduel constant, 5 secondes suffisent pour l’ozone alors que 4 heures sont nécessaires pour le chlore (Stettler),
- — large spectre d’action : l'ozone détruit aussi bien les bactéries que les virus, les champignons que les protozoaires. Il attaque également les micro-organismes qui se trouvent sous forme sporulée ou enkystée. Ainsi, à 12 °C en milieu tamponné à pH 7, et pour une concentration initiale d'Escherichia coli variant de 2 à 4 × 10⁷ par 100 ml, une destruction de 99,99 % est atteinte en moins d’une minute avec une concentration aussi faible que 9 µg O₃/l (Wuhrmann et Meyrath). Par contre, une teneur en ozone résiduel dissous de 0,33 mg O₃/l doit être maintenue pendant quatre minutes pour que 10⁷ spores de Bacillus subtilis par ml soient complètement détruits (Bringmann). À titre indicatif la figure 4 donne un aperçu de la sensibilité de plusieurs espèces bactériennes vis-à-vis de l’ozonation,
- — invariance d'action selon les conditions du milieu ; l'efficacité désinfectante de l'ozone ne varie quasiment pas pour des pH allant de 5,6 à 9,8 et des températures de 0 à 37 °C, à condition de maintenir un même résiduel d’ozone dissous constant.
Cette notion d’ozone résiduel dissous dans l'eau a été reprise dans les travaux de Coin, Gomella et Hannoun ; en 1964, ces auteurs ont montré qu'il existait une concentration seuil en ozone résiduel dissous dans l'eau et un temps de contact minimum (en l’occurrence 0,3 mg O₃/l pendant 4 minutes) permettant d’assurer 99,99 % d’inac-
L’inactivation du virus de la poliomyélite (souche Mahoney du type I). Après avoir reconfirmé ces résultats sur d’autres souches virales (types II et III du virus de la poliomyélite), ces mêmes auteurs ont effectué des essais en dynamique. Leur conclusion a été la suivante : « lorsque la valeur de la concentration dépasse 0,4 mg/l, l’inactivation du virus est tout d’abord très rapide, puis totale en un peu plus de trois minutes ».
De nombreux autres résultats expérimentaux sont venus conforter cette conclusion ; ceci a contribué à définir les conditions bactéricides et virulicides de l’ozonation (appelée aussi « ozonation vraie ») à savoir le maintien d’une concentration résiduelle en ozone dissous de 0,4 mg/l pendant un temps de 4 minutes au minimum.
Sur le plan pratique, la stricte application de ces conditions lors d’ozonation en traitement final permet l’obtention d’une eau de qualité parfaite sans qu’il soit indispensable d’ajouter un autre désinfectant. Cependant, il est nécessaire de protéger l’eau dans le réseau afin d’éviter tout phénomène de développement bactérien dans les cas suivants : eau de surface ayant une forte teneur en matières carbonées, température élevée de l’eau, temps de séjour important de l’eau dans les canalisations, réseau de distribution ancien ou en mauvais état, mélange d’eaux d’origines variées ou traitées différemment. Ceci peut être réalisé par l’adjonction d’un désinfectant d’une rémanence plus longue que celle de l’ozone, après s’être assuré qu’il n’y avait pratiquement plus d’ozone résiduel dissous dans l’eau.
SYNTHESE DE L’OZONE
Comme nous l’avons vu dans le premier chapitre, l’ozone se présente habituellement sous la forme d’un gaz, mélangé à celui qui lui a donné naissance dans un générateur appelé ozoneur.
1. Le générateur élémentaire
La synthèse de l’ozone peut être résumée par la formule suivante :
3 O₂ ⇌ 2 O₃ — 68 kcal
Il est donc nécessaire de fournir une énergie spécifique de 0,82 Wh pour fabriquer 1 g d’ozone. La principale voie de synthèse industrielle consiste à soumettre à une décharge électrique un courant d’air ou d’oxygène ; un champ électrique est créé et, en dépassant la rigidité diélectrique du gaz utilisé, il produit une ionisation des molécules de ce gaz, avec recombinaison d’une partie des atomes d’oxygène en ozone.
Un générateur élémentaire se compose donc d’un condensateur qui est alimenté par une source de courant alternatif à haute tension. Entre les deux électrodes se trouve un diélectrique constitué par un intervalle gazeux (air ou oxygène) et par une substance isolante. Selon la forme de cette dernière, on distingue les ozoneurs à plaques et les ozoneurs tubulaires.
2. Les ozoneurs industriels
Un ozoneur de type industriel est constitué d’un assemblage de générateurs élémentaires (plusieurs centaines pour les plus importants). Son rendement de production d’ozone (R) reste cependant très faible puisqu’il ne dépasse guère 4 à 5 % :
\[ R = \frac{1}{1 + \frac{P_a + P_d}{0{,}82 \times Q}} \] avec Pa = puissance dissipée dans les effluves Pd = puissance dissipée dans le diélectrique Q = production d’ozone
La majeure partie de l’énergie est transformée en chaleur, qu’il faut évacuer, ne serait-ce que pour éviter la destruction de l’ozone formé. Ceci est réalisé en général par circulation d’eau dans l’enceinte de l’ozoneur.
Toujours dans le souci d’améliorer le rendement et la durée de vie du matériel d’ozonation, les gaz d’alimentation doivent être exempts de poussières, d’huiles et d’humidité (point de rosée inférieur à –50 °C). Dans le cas d’utilisation d’air, le prétraitement avant effluvage comporte les éléments suivants : filtre à air, compresseur, filtre à huile, réfrigérant à eau, parfois réfrigérant au fréon, dessiccateurs. Ces derniers se composent de deux colonnes montées en parallèle et remplies de billes d’alumine ; la désorption de l’humidité s’effectue automatiquement par chauffage et insufflation d’air dans une colonne pendant que l’autre est en service.
L’expression de la puissance d’un ozoneur est donnée par la formule de Manley :
\[ W = 4 F \cdot C_d \cdot E_o \left( \frac{U_m - E_o}{C_d} \right) \]
avec :
F = fréquence du courant appliqué Cd = capacité du diélectrique solide Ce = capacité du diélectrique gazeux Eo = tension électrique d’amorçage Um = valeur crête de la tension appliquée
De l’examen de cette formule se déduisent les améliorations apportées afin d’augmenter la puissance des générateurs d’ozone :
- — optimisation de l'intervalle gazeux (3 mm de largeur environ),
- — amélioration du diélectrique solide (emploi de verres électroniques de faible épaisseur (1,4 à 1,8 mm) mis en forme avec précision),
- — augmentation de la fréquence du courant électrique (le passage de 50 à 600 Hz permet au minimum de doubler la production d’ozone).
D’autres améliorations continuent d’être étudiées ; il faut cependant mentionner deux autres voies permettant d’atteindre des productions unitaires plus importantes :
- — accroissement du nombre de tubes diélectriques par générateur industriel d’ozone (836 tubes pour des ozonateurs produisant 16 kg O₃/h),
- — utilisation d’air enrichi en oxygène, de mélanges gazeux contenant de l’oxygène. La production d’ozone est alors multipliée par un facteur de 2 à 2,5.
La plus grosse installation d’ozonation d’eaux potables au monde peut produire 200 kg O₃/h grâce à 24 ozonateurs ; elle est installée à l’usine de l'Est à Moscou et elle permet de traiter 1 200 000 m³ d’eau chaque jour par pré-ozonation et postozonation.
MODES D’APPLICATION
Quel que soit le but de l’ozonation, son principe reste le même : assurer le meilleur transfert possible de l’ozone dans l'eau à traiter. Ceci est réalisé par différentes méthodes qui dépendent à la fois de la qualité de l'eau mais aussi des conditions d’application de l’ozonation.
L'ozone est un gaz peu soluble dans l'eau ; la concentration maximale résiduelle en ozone dissous peut être calculée selon la loi de Henry :
\[ R_{M_{O_3}} = R \cdot C \cdot \frac{P}{P_a} \]
Avec :
\[ R_{M_{O_3}} \] = concentration maximale résiduelle en ozone dissous R = coefficient de répartition (eau/air) C = concentration initiale du gaz en ozone P = pression d’application du gaz ozoné Pa = pression atmosphérique
De cette équation se déduisent les conditions pour atteindre une concentration maximale en ozone dissous élevée : concentration initiale du gaz en ozone élevée, pression d’application importante, et coefficient de répartition élevé.
R s’accroît lorsque la température diminue, lorsque le pH augmente et lorsque la quantité de matières oxydables s’élève.
La quantité d’ozone transféré par unité de temps q peut s’écrire :
\[ q = k_l \cdot a \cdot V \, (R_{M_{O_3}} - R_{O_3}) \]
Avec :
kl = coefficient de transfert de film, côté eau a = surface d’échange spécifique V = volume du liquide
D’autre part a dépend à la fois du diamètre des bulles \((d_b)\) et de leur rétention dans l'eau (h) :
\[ a = \frac{6}{d_b} \cdot \frac{h}{1 + h} \]
Il est nécessaire de considérer l'ensemble de ces formulations théoriques afin de mieux comprendre les différents systèmes de diffusion utilisés. Néanmoins, il faut se rappeler que l’ozone dissous dans l’eau n’est pas stable et que d’autre part il n’est pas toujours indispensable d’atteindre des valeurs élevées en ozone résiduel dissous.
On distingue trois types principaux de diffuseurs couramment utilisés :
- — les diffuseurs poreux : plans ou tubulaires, ils sont constitués en céramique et disposés sur le radier des chambres de contact. Ils permettent d’assurer une diffusion étagée de l'ozone et conviennent pour des eaux préalablement traitées ou ne contenant pratiquement pas de matières en suspension ou précipitables. Le diamètre des bulles avoisine 3 à 5 mm ce qui, avec une hauteur d’eau supérieure à 4 m, autorise un transfert optimal de l’ozone : 90 à 95 % dans le cas d’application des conditions de l’ozonation vraie.
L’ozone étant fourni sous pression, ce système de diffusion statique ne consomme pas d’énergie. Il est particulièrement bien adapté aux cas de désinfection de l’eau.
— les injecteurs : on peut distinguer les injections partielles et les injections totales selon qu'une partie ou la totalité de l’eau passe dans l'injecteur et dans son appendice de dissolution. Ils permettent d’avoir une importante interface ce qui favorise le transfert de l’ozone dans le cas d’oxydations, tout particulièrement lorsque les cinétiques en sont rapides. De tels systèmes ne consomment pas par eux-mêmes d’énergie, mais ils occasionnent des pertes de charge dans l'eau à traiter. Ils présentent l’inconvénient d’être mal adaptés aux variations importantes de débit, mais par contre ils assurent une utilisation optimale de l’ozone à des fins d’oxydations.
— des turbines immergées : elles sont de deux types : les turbines aspirantes et les non aspirantes qui sont utilisées selon la valeur de la pression du gaz ozoné. Elles permettent de diffuser l’ozone en de très nombreuses fines bulles tout en assurant un brassage énergique de l’eau. Elles sont particulièrement bien adaptées aux eaux chargées en matières en suspension ou précipitables, lorsque les oxydations sont le but de l’ozonation. Elles présentent cependant l’inconvénient d’être consommatrices d’énergie (35 à 75 Wh/Nm³ air ozoné).
Quel que soit le mode de diffusion de l’ozone, il est nécessaire de tenir compte du circuit hydraulique de l’eau dans les colonnes de contact et d’autre part de s’assurer que toute la masse liquide a été ozonée.
MAÎTRISE DE L’OZONATION
Le développement croissant des études sur l’ozone, et le nombre important des stations de traitement d’eaux potables réalisées avec ozonation, sont autant d’éléments qui ont contribué à accroître la connaissance de cette technique et par-là même à en assurer sa maîtrise.
Afin d’améliorer l’ozonation, les conditions visant à augmenter son efficacité et sa sécurité ont fait l'objet d'importants développements.
— Efficacité :
la possibilité d’expérimentation au préalable et de contrôle de l’ozonation dans les stations de traitement contribue à adapter à chaque type d'eau les meilleures conditions économiques assurant le but requis.
À partir d'un échantillon d’eau qui doit être représentatif, le test laboratoire de demande en ozone permet de s’assurer de l’efficacité de l’ozonation, et dans le cas positif d'estimer la quantité d’ozone nécessaire. Une méthode d'approche plus précise consiste en l’expérimentation en station pilote : ainsi il est possible d’ajuster les conditions de l’ozonation aux variations de la qualité de l'eau, ce qui autorise une extrapolation des résultats à l’échelle industrielle.
Enfin, il est possible de contrôler l’efficacité de l’ozonation lors de réalisations ; outre les mesures classiques de débit, les déterminations des concentrations d’ozone dans l’eau et dans le gaz permettent d’effectuer un bilan de traitement. L’ozone peut être mesurée chimiquement par la méthode classique iodométrique ou d’une manière plus pratique par les méthodes à l’acide arsénieux et à la diamine diéthyl-p-phénylène. Sa mesure en continu fait appel à des appareils automatiques utilisant comme principes de base soit la polarographie, soit l’absorption à 2 537 Å.
— Sécurité :
le contrôle en continu de la production de l’ozone et de son application renseigne sur l’efficacité de l'ozonation. L’automatisation permet d’assurer le bon fonctionnement du traitement quelles que soient les variations de qualité et de quantité d’eau. Ainsi les appareils de mesure automatique de divers paramètres (débits, concentrations, …) délivrent des signaux à un calculateur électronique (microprocesseur, ordinateur, …) qui asservit la production et la distribution de l’ozone. Les variations de production sont effectuées sur des bases économiques, en modulant débit gazeux et puissance d’ozonation.
Enfin, diverses possibilités existent quant au contrôle de l’ozone résiduel dans l’air ; en effet, l'ozone peut être nuisible au système pulmonaire de l'homme si des concentrations supérieures à 0,2 mg O₃/m³ sont respirées pendant 8 heures. D’autre part, il faut rappeler que des concentrations aussi faibles que 0,02 à 0,04 mg O₃/m³ sont détectées par l’odorat, et qu'il n’y a pas de phénomènes de désensibilisation. Cependant, il existe de nombreux appareils qui permettent soit de détecter soit de mesurer les concentrations en ozone et de donner une alarme en cas d’excès accidentel particulièrement à l'intérieur des locaux techniques. Quant à l’ozone résiduel présent dans les gaz des évents, on peut en éliminer les effets nocifs de différentes façons : sa dilution et son éjection verticale entraînent une diminution de sa concentration en dessous de la valeur seuil de toxicité ; sa destruction, soit thermique (330 °C environ pendant quelques secondes) avec récupération de chaleur des gaz évacués, soit catalytique.
Conduit à l'élimination totale des nuisances vis-à-vis de l'environnement. Quant aux coûts d’un tel traitement, ils varient de 6 à 12 Wh/Nm³ pour la dilution à 30 Wh/Nm³ pour la destruction thermique. Enfin, dans le cas où l'ozonation doit être utilisée en plusieurs points dans la chaîne de traitement, il peut être intéressant de récupérer l'ozone des évents et de le réinjecter : on atteint ainsi une utilisation maximale de l'ozone — totale dans certains cas — tout en évitant les problèmes de rejets dans l'atmosphère.
CONCLUSIONS
L'ozonation devient une étape de choix dans le traitement des eaux destinées à la consommation publique, au fur et à mesure que les exigences sur la qualité de l'eau distribuée s'accroissent. À l'heure actuelle, il n’a été décelé aucune toxicité particulière dans l'eau traitée par ozonation dans le respect des conditions d'application préalablement définies. Ceci n'est pas le cas de tous les réactifs couramment utilisés. L'ozone, en pré-ozonation, permet de détruire les précurseurs de la formation des haloformes, comme les acides humiques ; en post-ozonation, il permet une désinfection très complète de l'eau. Il peut donc servir à différentes fins au sein d'une même station de traitement d’eau ; cependant, il est toujours préférable d’effectuer plusieurs étapes d’ozonation qu'une seule et unique injection en un point de la chaîne d’épuration, même avec des doses massives d’ozone. En effet, les conditions d’application de ce gaz varient avec le but à atteindre et elles doivent être considérées comme un facteur déterminant dans la réussite du traitement, comme le prouvent les nombreuses réalisations utilisant l’ozonation étagée.
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