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Contribution au traitement des bulkings

30 octobre 1991 Paru dans le N°149 à la page 73 ( mots)
Rédigé par : Christian TSCHOCKE

Parmi les dysfonctionnements fréquemment rencontrés dans des stations d'épuration nous trouvons en bonne place les gonflements anormaux des boues sédimentées dans le clarificateur, ce qui entraîne leur rejet dans le milieu naturel, à l'encontre de toute logique épuratoire. L'ensemble des problèmes en cause est regroupé sous le générique de bulking.

Écologie des bulkings

L'analyse au microscope des boues à bulking montre toujours un important développement de filaments, colonisant l'espace compris entre les flocs, jusqu'à les relier entre eux, empêchant de ce fait leur agglomération dans le clarificateur.

Le filament le plus souvent en cause dans le gonflement des boues est constitué par une bactérie appelée Microthrix parvicella, facilement identifiable grâce à son trichome flexueux d'une longueur allant de 300 µm à 500 µm. Microthrix n'est pas le seul filament en cause et au cours des analyses écologiques que nous effectuons, nous rencontrons souvent Nocardia associé aux problèmes de graisses, Sphaerotilus natans dans les effluents de laiterie et Thiothrix aux granulés de soufre très visibles au microscope.

Une étude de Gray portant sur les espèces de filaments les plus fréquemment rencontrés montre que suivant les pays on observe une distribution différente des souches observées.

Mesures physico-chimiques

Les boues biologiques, lorsqu'elles sont parasitées par des filaments, ne se décantent pratiquement pas. Elles présentent donc une densité apparente proche de celle de leur fluide transporteur, c'est-à-dire l'eau dans le cas de stations d'épuration urbaine. Cet état est mis en valeur par deux mesures qui sont celles de l'indice de boue (ou indice de Kalbskopf) et de l'indice de Mohlman : plus les indices sont élevés et plus les filaments sont actifs.

De nombreux chercheurs ont dirigé leurs travaux sur les relations existant entre la teneur en nutriments des effluents et la prolifération des bactéries filamenteuses.

À cet effet, et pour effectuer leurs calculs de dimensionnement, les traiteurs d'eau ont à leur disposition un nombre d'or représenté par le rapport : 100 C / 5 N / 1 P, permettant, grâce à un apport d'oxygène, d'optimiser la synthèse protoplasmique aboutissant au transfert d'une charge soluble à une boue biologique, comme le montre le bilan chimique suivant :

100 C + 5 N + a H₂O + b O₂ ➔ sC₅H₇O₂N + c CO₂ + H₂O

Par conséquent, et afin que la production de boue soit idéale, le rapport C/N doit être égal à 20.

Les chercheurs, et plus particulièrement ceux du Cemagref, ont démontré que lorsque le rapport C/N était inférieur à 20, la probabilité du développement des filaments devenait très forte.

Nos laboratoires se sont alors interrogés sur les formes carbonées et azotées présentes dans les effluents et sur

[Photo : Occupation de l’espace interfloc par les filaments]
[Photo : Exemple de partage des flocs]
[Photo : Développement de filaments à partir d’un floc]

leur réelle disponibilité en tant que nutriment pour la biomasse présente. En effet, la mesure du carbone organique total (COT) prend également en compte les celluloses, les lignines ou les triglycérides. Or, il est bien connu que les polysaccharides ne deviennent assimilables par les bactéries qu’après une hydrolyse enzymatique plus ou moins poussée ; il en est de même pour les triglycérides qui sont d’un encombrement trop important pour être directement utilisés comme apport carboné.

Nous avons une approche identique de la mesure de l’azote total (NTK), qui ne peut donner qu’une information partielle sur les formes azotées et sur leur disponibilité pour le développement des bactéries. Il se peut fort bien, par exemple, qu’une fraction non négligeable de N soit présente sous la forme de protéines à très haut poids moléculaire, ce qui, hors hydrolyse, rendra l’azote non disponible bien qu’organique.

Aussi convient-il de parler du rapport : carbone assimilable sur azote assimilable, plutôt que d’introduire la notion trop vague du rapport C/N.

Pour compléter cette analyse, il faut ajouter que les graisses représentent une fraction importante des matières carbonées véhiculées par les effluents.

En admettant une production journalière de 15 g de graisse par habitant et une DCO de 2,5 g O₂/g de graisse, nous aurons une charge s’établissant comme suit :

2,5 g O₂ g⁻¹ × 15 g EqH⁻¹ j⁻¹  
= 37,5 g O₂/jour

En considérant qu’un EqH produit 120 g de DCO par jour, les graisses représentent donc :

37,5 g / 120 g = 31,25 % de la charge

Le problème est dû au fait que les graisses des stations d’épuration sont composées d’acides gras libres et de polyglycérides (tri, di ou mono) non assimilés par la biomasse du réacteur biologique.

Notre réponse est donc de rendre assimilables les carbones des matières grasses, de façon à ramener le rapport : carbone assimilable/azote assimilable vers une zone plus propice au développement des bactéries composant les boues biologiques, plutôt qu’à la prolifération des filaments.

Pour ce faire nous avons composé un mélange comprenant :

• des enzymes de démarrage de la réaction

• des bactéries non pathogènes, n’ayant reçu aucune action d’agent mutagène, mais universellement reconnues pour leur capacité lipolytique,

• un médium de fixation.

La production de lipases s’effectue généralement en tête de la station. Elle est généralement assistée mécaniquement pour augmenter le contact enzyme/substrat. Grâce à de nombreuses manipulations sur le terrain nous avons pu modéliser le traitement à appliquer, grâce à des courbes de

Tableau I

AllemagneHollandeU.S.A.Afrique du Sud
M. parvicellaNocardiatype 0092type 021 N
type 021 Ntype 1701type 0041M. parvicella
H. hydrossistype 021 Ntype 0675type 0041
type 0092type 0041NocardiaS. natans
type 0041S. natanstype 1851H. hydrossis
S. natansM. parvicellatype 0914N. limicola
type 0581type 0092type 0803type 1701
type 0803H. hydrossisN. limicolatype 0961
type 0961type 0675type 021 Ntype 0803

régression très simples applicables à tous types de station jusqu'à 500 000 EqH.

En l'absence de conditions défavorables (présence d'inhibiteurs, solvants, etc.), il faut en moyenne cinq jours pour revenir à des conditions normales d'exploitation de la station.

**

En guise de conclusion, on peut souligner que cette méthode, qui résout le problème d'évacuation des graisses, en divisant par un facteur variant de 3 à 9 la fréquence des vidanges, permet de supprimer les bulkings à Microthrix parvicella. De ce fait, on obtient simultanément le même résultat sur les mousses biologiques, parfois présentes à la surface des ouvrages d'épuration.

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