Autrefois tolérées, les odeurs sont de plus en plus perçues comme une agression. Elles représentent un réel problème pour l'industriel propriétaire d'installations d'où émanent des effluves malodorantes. Prévenir leur formation et leur émanation est une priorité pour ceux qui désirent améliorer leur image de marque et leurs relations avec le voisinage. BetzDearborn (Division du Groupe HERCULES) propose une technologie basée sur la mise en ?uvre de capteurs chimiques ou d'enzymes pour contrôler cette nuisance.
Prévenir leur formation et leur émanation est une priorité pour ceux qui désirent améliorer leur image de marque et leurs relations avec le voisinage.
Cet article propose une technologie basée sur la mise en œuvre de capteurs chimiques ou d’enzymes pour contrôler cette nuisance.
L’industrie est de plus en plus confrontée à des problèmes de nuisances olfactives. Parfois toxiques, ces émanations sont également à l’origine de contentieux tant au sein de l’entreprise que de son voisinage. Les installations industrielles, conçues pour la plupart il y a quelques années, voire quelques décennies, ne sont plus « conformes » à l’image que devrait donner une industrie moderne soucieuse de l’environnement.
À une époque, l’émanation d’odeurs pouvait être même considérée comme un symbole de vitalité de l’activité d’une entreprise. Notre sensibilité vis-à-vis de l’environnement s’est considérablement modifiée, ce qui était symbole de puissance s’est transformé en nuisance et agression.
Malheureusement, les unités de production ne peuvent pas évoluer aussi vite que notre sensibilité ou que la réglementation. Modifier des équipements est parfois trop coûteux, des solutions nécessitant peu d’investissement peuvent être mises en place dans certains cas.
Législation
Si l’on s’en réfère à l’arrêté du 2 juin 1998, le législateur suggère : « … les odeurs sont dans la mesure du possible captées à la source et canalisées … ».
« … les dispositions nécessaires sont prises pour limiter les odeurs provenant du traitement des effluents … ».
Une suggestion n’étant pas une obligation, la motivation de chacun à traiter le problème des odeurs sera influencée par des critères très différents, l’aspect financier étant pré-
Toutefois difficile à évaluer, l'utilisation de la notion de retour sur investissement laisse souvent la place à la nécessité de satisfaire des besoins subjectifs en relation avec le voisinage ou les conditions de travail.
Perception des odeurs et mesures
La perception des odeurs est variable d'un individu à l’autre. Selon la sensibilité, elle est agréable ou incommodante.
Une odeur agréable, hors de son contexte, peut être désagréable (une dégustation de vin est perturbée par la perception simultanée d'un parfum, l’odeur de vase, agréable en bord de mer, est plus difficilement supportable dans un salon de thé). La nuisance olfactive est donc très difficilement mesurable, tant qualitativement que quantitativement.
Différentes méthodes sont applicables comme la mesure de nuisance à l'aide d'un jury de populations.
Indice de Nuisance Odorante (INO)
INO = 0 N₁ + N₂ + 25 N₃ + 50 N₄ + 75 N₅ + 100 N₆ N_total
- N₁ : nombre de personnes ayant répondu « pas d’odeur »
- N₂ : nombre de personnes ayant répondu « non gênés »
- N₃ : nombre de personnes ayant répondu « un peu gênés »
- N₄ : nombre de personnes ayant répondu « gênés »
- N₅ : nombre de personnes ayant répondu « très gênés »
- N₆ : nombre de personnes ayant répondu « entièrement gênés »
D’autres mesures peuvent être réalisées notamment en faisant intervenir une corrélation entre une nuisance olfactive et un nombre de plaintes déposées.
Comme on le voit, cette évaluation est loin d’être totalement rigoureuse et fiable. L’absence de plainte du voisinage restant la mesure la plus parlante pour l’industriel mis en cause.
Origine des odeurs
Agréables ou désagréables, les odeurs sont d’origine naturelle ou industrielle. On notera que, le plus souvent, l'industrie produit des odeurs incommodantes.
En milieu industriel, l’origine peut être :
- chimique : émanation d’H₂S, mercaptans (industrie du raffinage, pétrochimie, papeterie, …)
- biologique : dégagement gazeux provenant des stations d’épuration, de lagunage, de stockage de boue, … où les germes anaérobies produisent des gaz type H₂S, mercaptans à partir de composés soufrés.
La figure n° 1 présente le cycle de formation et d’évolution des composés soufrés dans la nature. Dans ce cas, c’est la consommation de l’oxygène présent dans les ions sulfate par les bactéries sulfato-réductrices anaérobies qui provoque l'apparition d'ions sulfure ou de la forme acide H₂S suivant les conditions du milieu.
Composés responsables d’odeurs
Ces composés sont nombreux. Les principaux responsables des nuisances olfactives sont présentés ci-dessous.
Tableau 2 : Composés responsables d’odeurs
H₂S : Hydrogène sulfuré — Odeur pourrie — Seuil 0,1 µg/m³ |
CH₃SH : Méthylmercaptan — Choux pourri — Seuil 0,3 µg/m³ |
C₂H₅SH : Éthylmercaptan — Choux pourri — Seuil 0,5 µg/m³ |
(CH₃)₂S : Sulfure de diméthyle — Mouffette — Seuil 0,1 µg/m³ |
C₇H₈S : Thioanisole — Putride — Seuil 0,1 µg/m³ |
C₈H₁₈O : Octanol — Rance — Seuil 5 µg/m³ |
C₆H₆OCHOH : Acide valérique — Sucré — Seuil 0,5 µg/m³ |
À noter que le seuil de perception olfactif des composés soufrés est particulièrement bas.
Tableau 3 : Effets de H₂S sur la santé humaine
Concentration dans l’air (ppm) | |
---|---|
≤ 0,1 | Seuil de perception olfactif |
5 | Odeur modérée facilement détectable |
10 | Début d’irritation oculaire |
25 | Odeur fortement désagréable |
100 | Toux, irritations oculaires, perte de l’odorat après 2 à 5 minutes |
200 - 500 | Convulsions, irritation importante des voies respiratoires |
500 - 700 | Perte de conscience, mort possible par asphyxie après 30-60 minutes |
> 700 | Perte de la conscience rapide, mort |
repris dans le tableau 2.
Impact environnemental
Les nuisances dues aux odeurs sont multiples :
- formation de gaz :
- toxiques (H₂S)
- corrosifs (H₂S très réactif avec les alliages cuivre = accélère les corrosions des installations électriques - agresse les structures béton)
- conditions de travail dégradées
- contentieux avec le voisinage
- mauvaise image de marque
Un aspect particulièrement pernicieux des composés soufrés (H₂S en particulier) est qu’à partir du seuil de saturation des capteurs olfactifs, le risque devient d’autant plus grand que la perception de l’odeur devient très faible ou inexistante.
Le tableau 3 indique l’évolution des effets de H₂S en fonction de sa concentration dans l’air.
Traitement contre les mauvaises odeurs
Les investissements pour mettre en place des matériels de captage et de destruction des odeurs sont lourds, ce qui rend souvent cette solution irréaliste dans le contexte actuel...
La mise en œuvre de programmes de traitement chimiques et/ou biochimiques peut se substituer à la mise en place d’équipements onéreux. Les possibilités sont nombreuses :
- Chaux, soude : par augmentation du pH. On diminue l’émanation d’H₂S en déplaçant l’équilibre de la réaction comme l’indique la figure 2 vers la formation d’un composé non volatil.
- Sel de fer : formation d’un précipité insoluble de sulfure de fer. Peut nécessiter la mise en place d’une régulation pH. Production de boues toxiques (sulfure de fer). Il faut noter dans ce cas que l’utilisation de sulfate ferrique ou ferreux aggrave le risque de formation de H₂S en présence de bactéries sulfato-réductrices.
- Oxydants : dosage non stœchiométrique, résultats liés au pH. Il faut des quantités importantes d’oxydant. Cette quantité est fortement liée à la consommation amenée par la présence de matières organiques dans le milieu à traiter.
- Agents masquants : substances produisant des odeurs agréables inhibant la perception de l’odeur nauséabonde. Elles n’éliminent pas la substance incriminée et peuvent dans le cas de l’H₂S, créer des risques supplémentaires d’intoxication. Il devient impossible de déceler la présence de ce gaz. Par ailleurs, cela crée une accoutumance et il peut devenir nécessaire de traiter même en l’absence de mauvaises odeurs. Cela devient suspect si la “bonne odeur” disparaît.
- Nitrates : en ajoutant des nitrates, on cherche à “leurrer” les bactéries anaérobies responsables de la formation de certaines mauvaises odeurs. Elles vont assimiler l’oxygène des nitrates présents en excès au lieu d’utiliser les sulfates comme source d’oxygène.
L’inconvénient de cette technique est qu’il faut rajouter des formes azotées dans l’eau ou le milieu alors que leur présence est déjà un problème majeur pour l’environnement en raison du risque d’eutrophisation que cela représente.
L’intérêt économique de ce secteur nouveau a suscité un nombre croissant de sociétés qui proposent différents types de services : d’une part, des équipements de captation et de traitement (généralement lavage) des gaz et émissions odorantes ; d’autre part, la mise au point et la fourniture de produits “capteurs” de nature chimique ou biochimique. C’est cette dernière orientation qu’a choisie BetzDearborn.
Programme BetzDearborn contre les odeurs
Constatant que les odeurs peuvent avoir une origine purement chimique ou biologique (ou les deux à la fois), la société a développé une gamme étendue de programmes de traitement :
- de “capteurs” chimiques ⇒ Pour les odeurs d’origine chimique
- d’enzymes ⇒ Pour les odeurs d’origine biologique
- de formulations combinées capteur et enzyme ⇒ Pour les odeurs d’origine mixte
Les odeurs d’origine chimique
Les “capteurs” chimiques sont des molécules organiques très réactives avec les sulfures et les mercaptans.
Elles se combinent avec ceux-ci, créant un composé non volatil. Les substances odorantes restent ainsi piégées dans le milieu où elles se sont développées.
L’action des produits utilisés par BetzDearborn est peu dépendante du pH. Ces “capteurs” sont destinés avant tout au traitement d’effluents liquides dont le pH, proche de la neutralité, n’a aucune influence sur la réaction.
Les composés formés sont, par contre, stables à tous pH.
Ces produits ne forment pas de résidus insolubles, n’augmentant pas ainsi le volume des boues formées.
Des études de toxicité effectuées sur ce type de produits (produit A) ont révélé qu’ils ne perturbaient pas la biomasse anaérobie des installations d’épuration (cf. tableau 5 ci-après) aux dosages d’utilisation habituels.
* Protocole du test de toxicité (résumé) Le Biothane Toxicity Test est conduit en utilisant un respiromètre anaérobie, une solution standard de référence contenant des acides : acide propionique, butyrique, acétique. Le pH est ajusté, des macro et micro nutriments sont ajoutés. Les cellules de mesure sont maintenues à 35 °C pendant 24 heures. La quantité de gaz libéré est mesurée après cette période. Les tableaux résument les résultats obtenus avec les produits décrits plus avant.
Tableau 5 : Résultats avec le produit A (capteurs chimiques)
Teneur produit A (mg/l) | Volume gaz libéré (ml) |
---|---|
Cellules témoins 0 | 573-640 |
Cellule 1 2,5 | 648-645 |
Cellule 2 5 | 651-661 |
Cellule 3 10 | 621-633 |
Cellule 4 25 | 651-637 |
Les odeurs d’origine biologique
Dans le cas d’odeurs dont l’origine est biologique, on utilise des enzymes. Les enzymes utilisées sont d’origine végétale.
Elles agissent sur le métabolisme bactérien en inhibant la production de gaz malodorants.
Le produit B a été conçu spécialement pour inhiber la formation d’H₂S et mercaptans issue de cette activité microbiologique.
Les tests de toxicité ont démontré également son innocuité vis-à-vis de la flore anaérobie épuratrice (tableau 6).
La production de gaz qui est indicative de l’activité de la biomasse n’a pas été perturbée par l’addition soit du “capteur” soit de l’enzyme.
Tableau 6 : Résultats avec le produit B (enzyme)
Teneur produit B (mg/l) | Volume gaz libéré (ml) |
---|---|
Cellules témoins 0 | 624-716 |
Cellule 1 2 | 701-714 |
Cellule 2 10 | 730-785 |
Cellule 3 20 | 706-691 |
Cellule 4 100 | 752-756 |
Les odeurs d’origine non soufrée
De nouveaux produits ont été mis au point pour contrôler la formation de composés odorants autres que les sulfures en agissant également sur le métabolisme bactérien. Ainsi la production de composés malodorants de la famille des acides gras volatils, aldéhydes et alcools est contrôlée.
Mise en œuvre
La mise en œuvre de ces produits de traitement des odeurs ne nécessite que de faibles investissements : pompe doseuse, rampe de pulvérisation.
Les produits qui se présentent sous forme liquide sont injectés tel quel à l’aide d’une pompe doseuse, proportionnellement au débit à traiter si nécessaire, lorsqu’il s’agit de traiter un liquide.
Pour les résidus solides, dépôts d’ordures ou boues déshydratées de station d’épuration par exemple, il est nécessaire d’assurer une bonne répartition du produit dans la masse à traiter.
Il existe deux techniques : la pulvérisation ou l’application sous forme de mousse.
Du fait qu’il est pratiquement impossible de réaliser en laboratoire la production d’odeurs (surtout celle d’origine biologique), le choix du produit, le dosage ainsi que le mode d’injection sont à définir expérimentalement sur site et sont fonction de la nature du problème à traiter.
Domaines d’application
Les domaines d’application sont nombreux et concernent principalement le traitement :
- d’effluents aqueux
- des boues de station d’épuration
- des aires de compostage
- des stockages de déchets tels que carcasses animales, résidus de graisse
- et l’amélioration des performances des laveurs de gaz
Conclusion
De jour en jour, les industriels et les collectivités prennent conscience que le fait de contrôler les émanations nauséabondes est valorisant et nécessaire à la satisfaction de besoins tant de santé des populations que de respect de l’environnement. Les coûts des mesures destinées à lutter contre les odeurs ne peuvent être que difficilement amortis par un retour sur investissement, surtout lorsqu’il s’agit de mettre en place des équipements lourds.
La mise en œuvre d’un traitement chimique ou biochimique ne nécessitant pas ces lourds investissements est une solution pouvant répondre rapidement, à moindre frais, à un besoin urgent.
Référence bibliographique
Éditions TEC ET DOC – Lavoisier – 1994 “Odeurs et désodorisation dans l’environnement” – Coordonnateurs G. Martin / P. Laffort