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Considérations sur l'échantillonnage automatique de l'eau

28 mai 1976 Paru dans le N°7 à la page 25 ( mots)
Rédigé par : D. VELY

Le résultat que l’on peut obtenir en appliquant la meilleure méthode analytique ne correspondra à la qualité d’un liquide ou d’un gaz donné que seulement si cette analyse est faite sur un échantillon vraiment représentatif de ce liquide ou de ce gaz. Il n’est pas facile d’extraire et de collecter un échantillon réellement représentatif d’un écoulement ouvert d’eau. Pour y parvenir il est indispensable de considérer certains paramètres physiques et mécaniques. Le problème de prélever correctement un échantillon se complique de plus par le fait que les valeurs de ces paramètres peuvent être très différentes d’un point d’échantillonnage à un autre. Cela revêt une grande importance quand il faut prélever un échantillon d’un fluide aussi chimiquement que physiquement hétérogène qu’est une eau de rivière, de canal, d’égout, de bassins, de lac ou de mer. Ces eaux peuvent être très fortement chargées de solides en suspension qui boucheront assez rapidement un tube de prélèvement d’un diamètre habituel.

Par conséquent, désirant résoudre ce problème complexe de l’échantillonnage, nous avons essayé de développer un outil d’échantillonnage et de collection qui aurait les avantages suivants :

1. D’être d’une construction modulaire et par conséquent facile à adapter à la majorité des différentes conditions hydrodynamiques d’échantillonnage existant dans les rivières, les canaux, les bassins de traitement, etc…

2. De permettre le prélèvement d’un volume d’échantillon suffisant, aussi bien à partir d’un point que de plusieurs simultanément ; ce dernier critère est spécialement important lorsque l’écoulement est trop peu turbulent pour conduire à un échantillon moyen mélangé proportionnellement et de composition aussi proche que possible de la moyenne statistique de distribution dans l’écoulement complet.

3. De prélever un échantillon dans des conditions aussi isocinétiques que possible, ceci en considérant spécialement la distribution des solides en suspension de taille inférieure à 2-3 mm.

4. Que ce soit un outil autant que possible incolmatable.

5. Que ce soit un outil automatique permettant la collection des échantillons sans intervention humaine aussi bien dans des récipients récepteurs séparés que dans un unique récipient et ce, en considérant aussi bien le temps que le lieu d’échantillonnage.

6. De permettre de conserver les échantillons pendant une période raisonnable de temps, par exemple en les maintenant à basse température, sans altérer leur composition chimique et biologique.

7. De permettre des programmes entièrement automatiques d’extraction et également de collection d’échantillons, en fonction du temps aussi bien qu’en fonction du débit.

8. D’être simple et robuste, facile à utiliser, à installer, et ne nécessiter qu’une maintenance minimale et facile.

9. D’être d’un prix de revient et par conséquent de vente raisonnable, de manière à rendre son acquisition possible par la majorité des personnes et organismes intéressés par les problèmes de contrôle de la pollution de l’eau.

I) PARAMÈTRES DE L’ÉCHANTILLONNAGE

Pour un prélèvement valable, il est nécessaire de considérer :

a) L’extraction isocinétique de l’échantillon.

Quand un fluide physiquement hétérogène est en motion et ses phases en équilibre hydrostatique instable (Dₗ/Dₛ ≠ 1 où Dₗ et Dₛ correspondent respectivement aux densités moyennes des phases liquides et solides) les échantillons doivent être prélevés isocinétiquement.

Vu que le multiple de la masse totale et de la vitesse linéaire moyenne des particules en suspension est constant

m₁ V₁ = m₂ V₂ = constant

si on veut extraire un échantillon, sans en modifier la teneur de la matière en suspension, il faudra l’extraire à une vitesse linéaire identique à celle du fluide aux lieu et instant où ce prélèvement est effectué

pour que m₁ = m₂ il faut que V₁ = V₂

Par contre si, dans un fluide hétérogène, les phases physiques présentes sont en équilibre hydrostatique (Dₗ/Dₛ approximativement égal à 1), un prélèvement isocinétique ne s’impose pas.

b) La représentativité statistique et turbulence

Plus une certaine masse de liquide est mécaniquement brassée, plus cette quantité de liquide présente une distribution mécanique homogène. Quand on désire installer une sonde d’échantillonnage, il faut le faire à l'endroit où la turbulence est la plus intense, mais il peut être difficile de trouver ou de créer une turbulence suffisante dans la masse de liquide qui se présente. Ceci impose alors de prélever des échantillons en plusieurs points et de les mélanger ensuite proportionnellement en vue d'obtenir un échantillon moyen d'une représentativité acceptable de la masse totale du liquide (fig. 1, 2 et 3).

Pour une masse déterminée de liquide, la quantité de points d'échantillonnage à considérer peut être définie de deux manières : mesurer le taux de turbulence à travers la masse complète (calculer le nombre de Reynolds) ou, empiriquement, prélever des échantillons.

[Photo : Fig. 1 : Installation fixe d'une seule sonde.]
[Photo : Fig. 2 : Installation mobile à sondes multiples.]
[Photo : Fig. 3 : Système pour la collection d’échantillon de moyenne qualité.]
[Photo : Fig. 4 : Échantillonnage proportionnel au débit. Schéma de principe des programmateurs Mod. D-10 et DA-10.]
[Photo : Fig. 5 : Programmateur proportionnel au débit.]

…échantillons en un nombre suffisant de lieux différents et les comparer pour se rendre compte de la variation de la qualité à travers la masse complète.

En d’autres mots, meilleure sera la turbulence, plus faible sera le nombre de points d’échantillonnage nécessaire. Seules des mesures préliminaires peuvent indiquer avec certitude le nombre exact de points de prélèvement à considérer. Un bon système d’échantillonnage doit facilement permettre des extractions à partir d’autant de points différents que cela s’avère nécessaire pour obtenir une qualité moyenne d’échantillon d’une représentativité statistique présélectionnée.

c) Le prélèvement d’échantillon en fonction du débit ou en fonction du temps et en collection.

Lorsque, simultanément, le débit et la qualité d’une eau varient rapidement et d’une manière importante, il est indispensable de prévoir une programmation de la fréquence de l’échantillonnage en fonction du débit (fig. 4 et 5). Dans ces cas-là, il est généralement suffisant de collecter l’échantillon ainsi prélevé dans un unique récipient. On prévoira toutefois un récipient par sonde de prélèvement et, dans ce cas, la quantité totale d’échantillon recueillie de chaque sonde sera proportionnelle au débit total de l’effluent. On procède ainsi quand on veut prélever un échantillon d’un effluent d’une usine ou d’une agglomération ou dans les installations/usines où on les traite.

Dans tous les autres cas, il est généralement acceptable de réaliser une programmation de la cadence de l’échantillonnage en fonction du temps (fig. 6). Dans ces cas, l’utilisation d’un collecteur synchrone peut présenter un intérêt notable, car elle permet de collecter dans des bouteilles différentes des échantillons prélevés aussi bien par une que par plusieurs sondes et ce, pendant une période de temps donnée. Ainsi, on peut automatiquement collecter dans chaque flacon soit des échantillons mélangés moyens provenant de diverses sondes, soit des échantillons provenant de mêmes sondes. On mélangera en quantités proportionnelles les échantillons provenant de diverses sondes dans un même flacon à chaque fois que l’effluent n’aura pas un taux de turbulence suffisant (fig. 7 et 8).

[Photo : Mod. P-21. Programmateur proportionnel au temps.]
[Photo : Collecteur Mod. C-11 (flacons de 250 cc).]
[Photo : Collecteur Mod. C-21 (flacons de 2 l).]

En conclusion, un bon système d’échantillonnage doit être compatible avec les deux principes de programmation et pouvoir comporter autant de sondes de prélèvement que cela s’avère nécessaire.

d) La conservation des échantillons.

Quand les échantillons recueillis sont destinés uniquement à une analyse chimique ou à une sédimentométrie, ils peuvent être sans aucune difficulté conservés à une température ambiante se situant entre 0 ° et 40 °C. Il y aurait lieu toutefois de réduire leur température si on doit faire une détermination chimique de corps volatils.

Quand les échantillons sont destinés à des analyses biochimiques ou biologiques (demande biologique en oxygène, comptage bactérien, etc.), il est nécessaire de les conserver à une température de + 4 °C. On doit alors pouvoir disposer de systèmes réfrigérants permettant la conservation des échantillons recueillis ainsi que leur transport en les maintenant à cette température (fig. 9).

Cela, bien entendu, n’a pas la prétention de résoudre tous les problèmes de conservation, mais il est évident que beaucoup d’autres techniques habituelles peuvent être aussi appliquées, telles que celles de conservation par addition de stabilisants chimiques, etc.

Il est par conséquent extrêmement important qu’une coopération étroite s’établisse entre le laboratoire et le personnel chargé de l’exploitation de systèmes automatiques de prélèvement d’échantillons, car il n’y a pas de règle absolue ni de recommandation spécifique particulière qui peuvent être faites a priori avec certitude indiscutable.

II. PRINCIPES DE FONCTIONNEMENT DES ÉCHANTILLONNEURS.

Dans les lignes qui suivent, sont d’abord passés en revue — à titre de rappel — les divers systèmes d’échantillonnage existants, puis est décrit en détail le modèle dit « BEC DE CANARD » (système pneumatique à soupapes élastiques) adopté et monté sur les échantillonneurs de notre fabrication.

a) Pompes

Lors d’utilisation de pompes pour prélever les échantillons à partir de liquides chargés, il y a lieu de protéger leur orifice d’entrée par des filtres ou des crépines (fig. 10). Si on ne le fait pas, ces pompes, sauf certains modèles spéciaux et extrêmement onéreux, sont bouchées très rapidement par les solides contenus dans l’effluent. Les filtres et crépines de protection arrêtent ces solides et progressivement se recouvrent d’une couche dont

[Photo : Fig. 9 : Réfrigérateur pour Collecteur de Fractions.]
[Photo : Fig. 10 : Principe de prélèvement par pompes.]
[Photo : Fig. 11 : Échantillonneurs à pompes divers.]

l'épaisseur va croissant. Il s'ensuit une modification de la taille des orifices traversés par l'échantillon, d'où variation de sa vitesse linéaire d'entrée ; l'extraction isocinétique est donc impossible (fig. 11).

b) Aubes, godets, etc.

Les systèmes à roues et chaînes à aubes ou godets et similaires (fig. 12) extraient isocinétiquement les échantillons mais en prédominance de la surface de l’eau — donc faible représentativité du prélèvement vu les différences certaines de la distribution statistique en surface. De plus, ils sont généralement encombrants et se prêtent mal à la réalisation, fréquemment nécessaire, d'installation de prélèvements simultanés en plusieurs points.

[Photo : Fig. 12 : Échantillonneurs divers à godets et coupelles.]

c) Systèmes pneumatiques

Tous comportent des sondes de géométries et volumes divers dont les cavités s'emplissent d'eau soit sous l'effet de la pression hydrostatique (sondes immergées) soit sous l'effet du vide (sondes non immergées).

Les premières sondes sont généralement d'un faible encombrement, facilement exploitables pour l’échantillonnage simultané en plusieurs points et permettent d’extraire des échantillons de fortes profondeurs au besoin.

Les deuxièmes sont plus encombrantes, utilisées normalement pour extraire des échantillons d'un seul point et d'une profondeur maximum de 7 à 8 mètres (fig. 13). Également, elles comportent fréquemment des systèmes de détection du niveau de remplissage, donc plus compliquées et d’entretien important.

[Photo : Fig. 13 : Échantillonneur pneumatique à vide.]
[Photo : Fig. 14 : Échantillonneur pneumatique à cavités.]

Aucune n'assure une extraction isocinétique de l'échantillon mais toutefois les premières ont une vitesse de remplissage qui peut varier assez proportionnellement avec la variation de la vitesse linéaire de l'écoulement de l'eau. Elles présentent de ce fait le plus d'intérêt.

— Sans soupapes anti-retour, à cavités sphériques, ovoïdales ou tubulaires (fig. 14). Si l'orifice de remplissage est petit, il se bouche facilement dans les eaux chargées et s'il est grand, la consommation en air comprimé est inutilement très importante. Donc difficilement exploitables sur des eaux chargées.

— Avec soupapes anti-retour à clapets mobiles.

La fermeture du clapet est assurée soit par la gravité soit par une force extérieure (fig. 15). Présentent des risques importants de fuites au clapet fermé (brindilles ou particules coincées) quand on les exploite sur des eaux chargées. Pendant la phase refoulement/extraction de l'échantillon, sous l'effet de la pression de l'air on a une perte de phase liquide par les fuites et l'échantillon extrait présente une teneur en solides plus importante (effet de filtre). Donc risque certain de dénaturer plus ou moins les échantillons d'eaux chargées.

[Photo : Fig. 15 - Échantillonneurs pneumatiques à soupapes et clapets mobiles.]

— Avec soupapes élastiques - « Bec de canard » (fig. 16)

Ce type de sonde de prélèvement est celui monté sur nos systèmes automatiques d’échantillonnage ; il a fait l'objet de toute une série de brevets : U.S.A., Canada, France et autres pays d'Europe.

Description :

Par l'orifice central, situé dans l'embase de la sonde, la pression hydrostatique entrouvre les lèvres du « bec de canard » et l'eau, avec seulement les particules de taille allant jusqu’à 1-2 mm, pénètre dans la sonde. Cette catégorie de particules présente le plus d'intérêt analytique vu leurs grandes surfaces spécifiques. L'impulsion d'air comprimé, qui arrive après le remplissage, refoule l'échantillon vers la collection en écrasant simultanément le « bec de canard » ; ceci assure le nettoyage de sa cavité, en refoulant, vers le bas, son contenu. Pas de pièces mobiles et une durée de vie de 4 à 24 mois de la soupape élastique.

L'ancien modèle, comportant à son sommet l’orifice de mise à l'atmosphère/arrivée air comprimé, présente toutefois le même type de fuite que les sondes à soupapes anti-retour à clapets mobiles. Les modèles actuels, où cet orifice a été déplacé sur le côté, n'ont plus cet inconvénient. En effet, le niveau de remplissage de la sonde reste toujours inférieur au sommet du « bec de canard » (ouverture) grâce au coussin d’air qui y reste enfermé.

Le volume d’échantillon capté varie, en fonction de la profondeur d'immersion, entre 100 et 150 cc mais, à profondeur stable, il sera constant à ± 5 à 10 %. L’évacuation se fait par l'orifice latéral de l'embase.

[Photo : Fig. 16 - Sonde pneumatique à soupape élastique type « Bec de canard ».]

III. AVANTAGES DU SYSTÈME RECOMAT

Le type de système automatique d’échantillonnage que nous avons réalisé a atteint d'assez près les objectifs que nous nous étions donnés. Ceci a été prouvé par l'exploitation en conditions industrielles de plus de 60 systèmes en France et depuis deux à trois ans.

Nous ne pensons pas que nos systèmes soient capables de résoudre absolument tous les problèmes possibles d'échantillonnage mais nous sommes certains toutefois qu'ils offrent les avantages très sérieux suivants :

a) Ils sont simples, entièrement automatiques et permettent à tous ceux qui sont concernés par l'analyse de l'eau de contrôler en continu l'évolution de sa qualité en utilisant simplement les méthodes d’analyses chimiques habituelles qui leur sont familières et dont ils ont la maîtrise. Par conséquent, il n'y a pas à investir dans la formation du personnel. Il n'y a que peu de paramètres qui ne peuvent pas être déterminés d'une manière valable en laboratoire à partir des échantillons prélevés par notre système. Ces paramètres sont : la température, l'oxygène dissous et les composants très volatils.

Simultanément, notre système permettra à son utilisateur de contrôler un nombre illimité d'autres paramètres. Ici, il est important de se rappeler qu'il n'est actuellement possible de contrôler en continu, automatiquement et d'une manière fiable à long terme que les paramètres suivants : le pH, l'oxygène dissous, la température, la conductivité, les chlorures, le potentiel d’oxydo-

réduction et la turbidité. Ceci est réalisé par des capteurs ne nécessitant qu'une maintenance très raisonnable à long terme (environ un étalonnage par mois au moins).

b) Nos systèmes sont robustes, conçus pour résister à la corrosion, faciles à programmer, à installer, faciles à transporter et utilisables dans des endroits divers. Si une alimentation électrique 220 V – 50 Hz n'est pas disponible au lieu où les systèmes doivent être exploités, vu que leur consommation est très faible, il sera aisé alors de se munir d'un des petits générateurs portatifs disponibles sur le marché. Ces derniers sont légers, d'un prix raisonnable et ne consomment que peu de carburant.

Nous fabriquons également un échantillonneur 100 % autonome, fonctionnant sur pile et entièrement portatif. Son boîtier est étanche aux intempéries (fig. 17).

c) Nos systèmes peuvent être utilisés pour prélever simultanément des échantillons d’autant de lieux différents que cela s'avère nécessaire,

d) Ils permettent de prélever et collecter des échantillons moyens mélangés proportionnellement en fonction du temps comme en fonction du débit,

e) Ils fonctionneront fiablement et pratiquement sans aucune maintenance aussi bien dans de l'eau claire que dans de l'eau très chargée,

f) Leur construction est complètement modulaire et il est possible d'assembler les modules en autant de systèmes divers que l'on désire sous réserve que l'on dispose, toutefois, des éléments modulaires correspondants.

D. VELY.

[Photo : Échantillonneur portatif Mod. M-10.]
[Publicité : La Tribune du Cebedeau]
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