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Canalisations d'eau potable : les choix du S.I.P.G.

30 mars 1990 Paru dans le N°135 à la page 59 ( mots)
Rédigé par : André PLOTON

À l'occasion de la mise en service d'une conduite de bouclage de 1 500 mètres de diamètre 1 200 en fonte ductile, entre le Carrefour de la Boule à Nanterre et la Place de Belgique à La Garenne-Colombes, conduite qui, en l'état actuel des besoins, termine le réseau de distribution, le Président du Syndicat Intercommunal de la Presqu’île de Gennevilliers, André Ploton, explique les choix que le Comité d'Administration a été amené à effectuer en matière d’investissements relatifs au transport et à la distribution de l'eau potable dans le territoire du Syndicat. Il rappelle que ces choix ont été pratiqués dans la continuité de ceux de ses prédécesseurs et en complète harmonie avec la Compagnie des Eaux de la Banlieue de Paris, chargée de l'exploitation, dans l’objectif constant de privilégier la sécurité.

Dès 1867, la Compagnie des Eaux de la Banlieue avait passé des contrats avec neuf communes de la Presqu’île de Gennevilliers pour la fourniture d'eau en provenance de la Seine. Il s’agissait alors d'eau brute, et le réseau primitif de distribution, très restreint, avait été réalisé avec des tuyaux en fonte grise qui avaient déjà fait leurs preuves.

Ce n’est qu’à la suite de l’épidémie de choléra de 1892 que les premières installations de filtration furent construites et l'eau déclarée potable. Après la première guerre mondiale, le développement de la population et des industries généra un accroissement des besoins tel que la C.E.B. se retrouva dans l'incapacité de faire face à la demande. En 1929, devant cette situation qui devenait catastrophique, les communes se regroupèrent afin de trouver des ressources en eau suffisantes et le financement nécessaire à l'établissement d'un réseau répondant aux besoins toujours grandissants. Ce n’est qu’en 1932 qu'un accord intervint avec la Lyonnaise des Eaux qui fournit alors l'eau en provenance d'une nappe qu'elle exploitait à Croissy et permit la construction de 80 km de canalisations supplémentaires. Après la création en 1933 du Syndicat regroupant les communes d’Asnières, Bois-Colombes, Courbevoie, La Garenne-Colombes, Gennevilliers, Nanterre, Suresnes et Villeneuve-la-Garenne, la concession et la distribution furent de nouveau confiées à la C.E.B., le Syndicat ayant pour mission, de son côté, de contrôler l'activité de celle-ci, d’arrêter les programmes de travaux, de rechercher de nouvelles ressources en eau et de fixer les tarifs de vente.

Actuellement, la Presqu’île compte plus d’un demi-million d'habitants. Le réseau comporte plus de 1 000 kilomètres de canalisations de 60 à 1 600 mm de diamètre, et 50 000 branchements sont utilisés pour livrer l’eau aux utilisateurs. Au Mont-Valérien, des réservoirs d'une capacité de 50 000 m³ permettent de régulariser les fournitures, les besoins pouvant varier de 2 500 à 15 000 m³ à l'heure. En tout point, la pression est maintenue suffisante, les débits calculés en fonction des impératifs de consommation, afin de satisfaire aux exigences de sécurité et d'hygiène publique. L'objectif reste toujours le même : desservir les 55 000 abonnés en quantité et en qualité, dans l’exigence sans cesse renouvelée d'une sécurité maximum.

Le choix de la sécurité

Le réseau primitif était construit en fonte ; par la suite, le choix s'est porté de manière quasi systématique sur le même matériau : sa solidité était une garantie de fiabilité. La mise en place progressive de systèmes de joints adaptés aux divers besoins a donné à cette solution un avantage au plan de la mise en œuvre, rendue plus facile, plus rapide et moins coûteuse.

La supériorité de la fonte au niveau de l'assemblage existe encore aujourd’hui et l'emploi de plus en plus répandu du joint automatique, dans lequel l'étanchéité est obtenue lors de l'emboîtement par compression radiale d’un élastomère, permet des cadences de pose élevées. Le joint mécanique, qui ne nécessite pas d'effort d'emboîtement (l'étanchéité étant assurée au moyen d’une contre-bride par serrage de boulons), convient particulièrement au montage des raccords. Un système a plus spécialement retenu l'attention du Syndicat, qui est essentiellement urbain : c'est le verrouillage, dispositif qui, tout en conservant la simplicité de montage des systèmes précédents (lesquels ne [...]

[Photo : Pose d’une conduite Ø 1 200, en fonte ductile, à Nanterre.]

nécessitent pas l'emploi d'une main-d'œuvre spécialisée), permet de s'affranchir des massifs de butées. Dans les sous-sols encombrés, que l'on rencontre le plus souvent dans la Presqu'île, l'avantage apporté par le joint verrouillé par rapport aux systèmes classiques est en effet capital. Le Syndicat en particulier, et l'un des Directeurs Généraux de la C.E.B., M. Salva, ont été les précurseurs de cette technique, en participant à la mise au point d'un prototype du joint, développé par la suite par la société Pont-à-Mousson.

Si la mise en œuvre est un facteur déterminant dans le choix d'une canalisation, la résistance à l'épreuve du temps en demeure le point fondamental. Mais si le premier facteur est quantifiable, l'appréhension du second n'est fondée, au moment de la décision, que sur des hypothèses. Ce n'est qu'au bout de plusieurs dizaines d'années, au regard de la fréquence des incidents, des coûts d'exploitation et du taux de renouvellement, que l'on peut mesurer le bien-fondé des choix antérieurs... Le Syndicat, qui dispose du recul suffisant pour apprécier le comportement des canalisations en fonte grise posées il y a plus de 120 ans, constate que les choix du passé se sont révélés extrêmement satisfaisants, à tel point que les fonds affectés au renouvellement des conduites ne débouchent sur aucun remplacement systématique de conduites anciennes ! Il s'agit, en effet, dans la très grande majorité des cas, de renforcement du diamètre des conduites, effectué lors de travaux de voirie communaux, afin de profiter de l’ouverture d'une tranchée pour effectuer plusieurs opérations par la même occasion et gêner le moins possible la circulation.

Fiabilité de mise en œuvre, fiabilité à l'épreuve du temps, la fonte grise avait réuni les suffrages du Syndicat. Elle présentait cependant un talon d'Achille : la fragilité ; de ce fait, les fabricants, ne voulant en aucun cas porter atteinte à la sécurité, étaient obligés de prévoir des épaisseurs de métal largement supérieures à celles qu'imposait la pression des réseaux. Il en résultait que les tuyaux de fonte étaient lourds et onéreux. La découverte de la fonte ductile, après la seconde guerre mondiale, apporta la solution puisque tout en conservant les qualités de son aînée — la fonte grise — cette fonte des temps modernes n'en possédait pas les défauts. Résistant à la traction, aux chocs, bénéficiant d'une haute limite élastique et d'un allongement important, elle permit aux fabricants de diminuer l'épaisseur des tuyaux qui gagnèrent ainsi en compétitivité. Le Syndicat, en décida l'utilisation, et n'eut qu'à s'en féliciter.

[Photo : Assemblage d'un tuyau de fonte.]

Des revêtements adaptés

Mais surgit un nouveau problème : la corrosion des tuyaux. Dans le cas de la fonte grise, l'épaisseur des tuyaux suffisait à limiter le phénomène. Différentes campagnes menées sur le thème de la corrosion trouvèrent un écho parmi les délégués communaux du Syndicat, mais surtout chez l'exploitant : la C.E.B. Heureusement, ce problème était bien maîtrisé par les fabricants de tuyaux qui s'étaient posé la question de savoir si dans le cas de la fonte ductile, la diminution de l'épaisseur de métal, tout en améliorant les qualités mécaniques des tuyaux, n'affaiblirait pas la résistance chimique de ceux-ci. Des prélèvements furent effectués, des études furent entreprises et le phénomène de la corrosion put être cerné, en fonction de l'agressivité des sols. La fonte ductile en effet, contrairement à d'autres métaux, ne se trouve attaquée que par certains milieux particulièrement corrosifs, comme c'est d'ailleurs le cas dans quelques terrains de la Presqu'île. Le mal identifié, il restait à trouver le remède : les études menées par les ingénieurs du Centre de Recherche de Pont-à-Mousson aboutirent à la mise au point d'un revêtement à base de zinc, lequel, pulvérisé sur les tuyaux, entraîne, en milieu corrosif, la création d'une couche de sels insolubles qui font écran aux attaques chimiques et qui permettent même la cicatrisation des blessures par effet galvanique. Les essais effectués par la C.E.B. et le Syndicat furent concluants et ce revêtement (dont l'efficacité a été sanctionnée par une norme française homologuée) a progressivement été généralisé à l'ensemble de la production de tuyaux de fonte. En milieux particulièrement corrosifs, il peut être complété par une manche en polyéthylène gainant la conduite. Le Syndicat et la C.E.B. choisissent ainsi le revêtement adapté à la configuration de chaque terrain, qu'il s'agisse de la pose d'une canalisation nouvelle ou d'un renouvellement.

À la recherche de l'excellence

Par l'attention qu'ils portent à leur réseau, le Syndicat et la C.E.B. visent un objectif : l'excellence.

Les communes ont d'autres soucis que celui d'ouvrir sans cesse des tranchées au milieu des voies publiques, afin de vérifier, d'entretenir, de remettre en état, voire de rénover ou de remplacer des canalisations défectueuses... l'heure est à la sécurité, à la fiabilité.

Un exemple : les canalisations sont soumises, lors de leur mise en œuvre, mais surtout au cours du temps, à de multiples sollicitations. Le problème de la déstabilisation des lits de pose, bien connu, en est une : les tranchées étant drainantes, les particules fines constituant le lit de pose (généralement du sable) ont tendance à migrer dans le terrain avoisinant. Les conduites se trouvent alors en contact avec le sol, ce qui peut les amener à supporter des efforts et des contraintes qui n'avaient pas été prévus au départ. Or, tous les matériaux n'ont pas le même comportement dans des terrains instables. Et là encore, d'après des études très poussées, il apparaît que le taux de dommages par kilomètre est de 0,04 pour les tuyaux en fonte ductile contre 4 à 30 fois plus pour les autres conduites.

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Ce sont toutes ces considérations qui ont guidé le choix du Syndicat dans l'emploi de la fonte dans la quasi-totalité du réseau. Il ne s'agit d'ailleurs pas d'une foi aveugle, le Syndicat restant attentif à toute amélioration technique ou à toute difficulté nouvelle : en bons managers que doivent être les élus de notre époque, leur décision est prise en fonction de la rentabilité des opérations et jusqu'à présent, l'expérience n'a pas démenti leur choix.

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