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Calcul du volume utile d'une bâche de pompage

30 avril 1991 Paru dans le N°145 à la page 28 ( mots)
Rédigé par : Alain DERVILLE

Parmi les problèmes que doit résoudre l’ingénieur, se pose celui du dimensionnement correct des stations de pompage d'assainissement EU et EP.

Nous présentons ici le premier volet d'un travail original qui se concentre sur la détermination des volumes utiles des bâches. Un second volet qui sera édité dans un prochain numéro précisera l'influence du cycle opérationnel en fonctionnement multipompes*.

Le dimensionnement d'une bâche de pompage doit satisfaire à plusieurs conditions indépendantes, parmi lesquelles le projeteur devra faire un choix optimum. Il s’agit en fait de rendre compatibles : un calcul de volume utile de stockage, déterminé de manière à limiter la fréquence de démarrage des groupes de pompage, et un volume de bâche lié à des considérations hydrauliques nécessaires à une bonne alimentation des pompes.

À cela peuvent s’ajouter des critères d’exploitation qui conduisent, par exemple, à imposer un cycle particulier de fonctionnement des groupes électropompes.

Nous n'aborderons ici que les méthodes de calcul du volume utile de stockage en pompage tout ou rien.

Les paramètres

Plusieurs paramètres sont liés au calcul du volume utile de stockage. Si le nombre maximum de démarrages horaires est une donnée spécifique au constructeur, d'autres paramètres comme, par exemple, l’existence de zones de battement, résultent des caractéristiques relatives du réseau, des groupes de pompage et du cycle opérationnel retenus.

Fréquence de démarrage

Le volume de stockage dans la bâche de pompage est déterminé de manière à limiter la fréquence de démarrage des pompes à une valeur qui ne conduise pas à une détérioration prématurée des contacteurs d’armoire de puissance et des moteurs électriques. Il n’y a pas de normes précises en la matière, mais seulement des recommandations guidées par l’expérience ; par exemple, pour le dimensionnement des stations de pompage en réseaux d’assainissement d’eaux usées, les standards ATV* recommandent les valeurs suivantes :

Puissance nominale du moteur : < 7,5 kW < 50 kW > 50 kW
Fréquence maximum autorisée : < 15 < 12 < 10

On notera que nous sommes loin des fatidiques 6 démarrages à l’heure généralement admis par la profession, en tenant compte de toute la marge de sécurité liée à l’utilisation de moteurs installés en fosse sèche. Ceci est d’autant moins justifié, que l’hypothèse de fréquence maximum est rarement réalisée, tout simplement parce que le débit d’apport à la station est très variable, au cours de la journée par rapport au débit critique.

Un autre critère, cette fois-ci suivi

Zone de battement

[Photo : Figure 1.]

* German association for water pollution control.

* Cet article est extrait d’un ouvrage de référence sur les stations de pompage qui sera présenté par la société FLYGT au début de 1992.

…conduit à réduire le temps de séjour hydraulique des effluents dans le puisard, dans le cadre d’une lutte préventive contre la formation de l'H2S ; d’une manière plus générale, il n’y a aucun intérêt à surdimensionner les puisards.

Existence de « zones de battement »

En pompage « tout ou rien », il existe au minimum une plage de débit pour laquelle le fonctionnement d’un groupe électropompe sera intermittent. Ceci est illustré par la figure 1, où, pour une meilleure compréhension du problème, nous avons « renversé » (du haut en bas) la bâche de stockage et amplifié l’influence de la hauteur de marnage sur l’évolution du débit assuré par la pompe (imaginons par exemple un relèvement basse pression réalisé par une pompe à caractéristique très plate).

Ainsi entre le niveau de démarrage (N₁) et le niveau d’arrêt (N₂), c’est-à-dire en phase de vidange du volume de stockage, le débit assuré par le groupe électropompe diminuera de Q₁ à Q₂. Si le débit d’apport (q) évolue dans les limites Q₂ < q < Q₁, la pompe fonctionnera en permanence ; pour un débit supérieur à Q₁, une pompe supplémentaire sera nécessaire, alors qu’à l’inverse, tant que le débit d’apport demeure inférieur à Q₂, la pompe s’arrêtera le temps du remplissage du volume de stockage.

La zone Q₁Q₂ est appelée « zone de battement ».

Le raisonnement est identique avec un système multipompes, mais l’on distinguera les « zones de battement » et les zones où il y a « recouvrement des caractéristiques » assurées par les groupes électropompes. La figure 2 représente une configuration du type « simple relèvement » (ou réseau faiblement dissipatif) dans laquelle on distingue autant de zones de battement que de pompes en parallèle ; c’est le cas général.

[Photo : Figure 2]

Le deuxième schéma (figure 3), plus exceptionnel, montre comment, sur un réseau dissipatif, le recouvrement des caractéristiques des pompes peut conduire à ne considérer qu’une seule zone de battement ; au-delà d'un débit d’apport supérieur à Qₘᵢ, les pompes assurent en quelque sorte un « débit variable ». Ainsi, dans certains cas, par un choix judicieux des caractéristiques des pompes et en jouant sur les niveaux de remplissage, on peut limiter le volume utile de stockage et assurer un débit « pseudo variable », en continu.

[Photo : Figure 3]

Débits moyens

Entre deux niveaux de régulation (démarrage/arrêt) se pose le problème du débit moyen assuré compte tenu de la caractéristique Q/H de la pompe. On envisagera deux cas, ainsi que le montre la figure 4.

[Photo : Figure 4]

Séquences fonctionnelles

Le type de séquence fonctionnelle conditionne la méthode de calcul du volume de stockage (Vu) nécessaire. Selon la position relative des régulateurs de niveau, nous distinguerons trois cycles fonctionnels distincts (figure 5) (bien que le deuxième ne soit en fait qu’une variante du premier cas).

En outre, pour chaque séquence on peut utiliser ou non une permutation circulaire automatique des pompes, soit en définitive six propositions différentes.

Mais au-delà du calcul du volume de rétention… quelle séquence choisir, en termes d’exploitation ?

Dans le cas de la séquence opérationnelle N° III (figure 6), les pompes démarrent puis s’arrêtent à un niveau commun, bas, c’est-à-dire qu’à chaque cycle nous obtenons une vidange optimum du puisard et un brassage efficace des effluents.

Dans le cas des séquences opérationnelles I et II, les pompes démarrent en cascade puis s’arrêtent en sens inverse. En jouant sur la hauteur de décalage (ΔH) des niveaux, on déplace le volume utile de marnage, ce qui permet d’obtenir un débit plus régulier en sortie de poste de pompage.

D’autres critères de choix peuvent être imposés par les caractéristiques de la pompe et ses limites d’utilisation (cavitation, vibration ou surcharge du moteur). Par ailleurs, une mise en charge du puisard réduit la hauteur de relèvement, augmente le débit et diminue généralement* la puissance absorbée.

Pour conclure, la séquence opérationnelle N° III est à recommander pour les petits postes d’assainissement d’eaux usées, car elle favorise l’auto-nettoyage du puisard.

Si le dégagement d’H2S est à craindre (1), à la station on limitera l’aération des effluents en immergeant la conduite d’alimentation ; de même on limitera les risques de coup de bélier en utilisant une temporisation sur l’ordre d’arrêt des groupes électropompes. La séquence opérationnelle N° I est la plus couramment utilisée car plus connue et beaucoup plus facile à calculer, comme nous le verrons par la suite. Elle permet en particulier d’obtenir une réduction optimum du volume utile de stockage et assure un écoulement plus stable dans le puisard.

* À vérifier selon le type de pompe et l’évolution du point de fonctionnement.

(1) A. Dervillé, Lutte contre la formation d'H2S dans les réseaux d’assainissement (bulletin FSI)

Séquences

Séquence III

a) Séquence I

b) Séquence II

[Photo : Figure 8.]
[Photo : Figure 9.]

c) Séquence III

[Photo : Figure 5.]
[Photo : Figure 10.]
[Photo : Figure 1 rappel.]
[Photo : Figure 12.]
[Photo : Figure 6.]
[Photo : Figure 7.]
[Photo : Figure 11.]

sonde

[Photo : Figure 13.]

Utilisation du volume d’accumulation dans le collecteur d’apport

Au poste de pompage, la bonne règle veut que le collecteur d’apport soit constamment dénoyé, ceci pour des raisons évidentes d’exploitation. Toutefois, dans le cas de gros collecteurs, il devient intéressant, voire même nécessaire d'utiliser en appoint le volume d’accumulation disponible dans le collecteur. On veillera cependant à ne pas perturber son écoulement par un positionnement judicieux des différents niveaux de régulation, et, dans ce cas, la séquence opérationnelle n° 11 sera la mieux adaptée. À faible débit (une pompe en fonctionnement) le collecteur doit pouvoir être dénoyé et l'on évitera de le mettre en charge au débit de pointe car le volume tampon ne serait plus assuré.

Le calcul du volume de l’onglet d’accumulation dans le collecteur n’est pas évident à établir, mais il n’est pas non plus nécessaire de le connaître avec précision : une simple méthode graphique en donne une évaluation suffisante et, dans de nombreux projets, ce volume d’accumulation peut être considéré comme une marge de sécurité supplémentaire.

Équation fonctionnelle

Reprenons la figure 1 et désignons par :

  • Q₁, le débit assuré par la pompe en fin de vidange du volume de stockage,
  • Q₂, le débit assuré par la pompe, au démarrage, volume de stockage reconstitué,
  • Q̅, le débit moyen sur cette tranche d’eau pompée,
  • q, le débit d’apport moyen, que nous supposerons constant sur un cycle, bien qu’en toute rigueur ce débit soit variable,
  • Vᵤ, le volume utile de stockage,
  • Hₘ, la hauteur de marnage entre les niveaux de démarrage et d’arrêt,
  • Sᵤ, la section utile de bâche.

Nous avons vu que pour un débit d’apport Q₁ < q < Q₂, la pompe fonctionnait en permanence et que, dès que 0 < q < Q₁, il y avait battement. Le cycle fonctionnel Tcycle d'une séquence de pompage correspond à :

Tcycle = Tfilling + Tpumping

Sachant que :

Tfilling = volume de stockage / débit d’apport moyen
Tpumping = volume de stockage / (débit moyen de pompage – débit moyen d’apport)

Soit aussi, en présentation graphique (figure 11) :

Tcycle = Vᵤ [ 1/q + 1/(Q₂ – q) ]

Cette fonction, qui a pour variable q, passe par un minimum Tcycle = Tmin pour une valeur de q satisfaisant à l’équation dTcycle/dq = 0, correspondant à :

q² = (Q₂ – Q₁)² / 4

Cette valeur particulière est appelée débit critique Qcr, auquel correspond un cycle fonctionnel minimum, c’est-à-dire une fréquence de démarrage maximum (figure 12). Par suite :

Tamax = 4 Vᵤ / Qcr, soit aussi Vᵤ = Qcr Tamax ou Sᵤ = Qcr Tamax / 4 Hₘ,
soit en définitive q = Qcr / 2.

Nota : En toute rigueur, comme nous l'avons déjà précisé, le débit moyen calculé Q̅ pour la pompe ne correspond pas très exactement au débit réel. Il faudrait, pour une plus grande précision, décomposer la courbe caractéristique Q/H en un certain nombre de tronçons élémentaires. Toutefois, l’erreur que l'on peut commettre en utilisant les précédentes formules demeure acceptable face aux autres incertitudes concernant les hypothèses du projet.

Application à l’évaluation du volume transitant au poste de pompage

Cette application est notamment l'une des fonctions du téléautomate MPC du système Mactec* ; le principe en est le suivant :

Une sonde piézorésistive mesure, en continu, le niveau dans la bâche de pompage, sur une échelle de mesure (0 – 100 %) où ont été calibrés les niveaux de démarrage et d’arrêt du groupe électropompe, ainsi qu'une tranche d’eau intermédiaire qui servira de volume de référence (figure 14).

L’application des formules précédentes permet d’écrire :

q = Vᵤ / Tfilling et Qcr = Vᵤ / Tamax + q, soit aussi :

Q₁ = Vᵤ / Tamax + Vᵤ / Tpumping

Ainsi, le téléautomate peut donc calculer, à chaque cycle complet, le débit réel de la pompe et, à partir d'une valeur moyenne prise sur un échantillonnage, la comparer à une valeur de référence qui, elle, aura été mémorisée. Si l'écart ΔQ devient supérieur à la tolérance ΔQ % programmée, ce téléautomate déclenche une alarme indiquant une chute de débit de la pompe. Par ailleurs, la valeur moyenne du débit de la pompe, constamment réajustée, permet de donner une évaluation du volume d’effluent transitant par le poste, si le même téléautomate comptabilise les temps de pompage.

* Développé par Flygt.

[Photo : Figure 14]
[Photo : Figure 15]
[Photo : Figure 16.]

V_nomé = Σ Qmi × Tpi

Dans le cas d'une station de pompage équipée de deux pompes, pouvant fonctionner en parallèle, le problème est tout aussi abordable (figure 14).

Dans ce cas :

V_nomé = Σ Qmi × Tpi + Σ Qi × Tyi + Σ Qmi2 × Tpi2

Nota : les différents débits peuvent être exprimés en % d’un débit de référence (ex. : q_mi).

Généralisation

La généralisation de la formule de base est immédiate (figure 15).

Débits moyens

Q_m = (Q_1 + Q_2) / 2

Q_a = (Q_a1 + Q_a2) / 2
T_arrêt   = V_u / (q – Q_n-1)

T_pompage = V_u / (Q_n – q)

par suite,

T_cycle = V_u [ 1 / (q – Q_n-1) + 1 / (Q_n – q) ]

Si nous cherchons la valeur minimum de T_cycle,

d/dq T_cycle = 0 conduit à vérifier l’équation :

(q – Q_n-1)^2 = (Q_n – q)^2

ce qui entraîne : q = (Q_n-1 + Q_n) / 2

soit en définitive :

T_min = 4 V_u / (Q_n – Q_n-1) ou V_u = (Q_n – Q_n-1) T_min / 4

et S_u = (Q_n – Q_n-1) T_min / 4 H_i

Nous vérifions que dans le cas d’une seule pompe :

i = 1, Q_n-1 = 0, Q_m = Q_n

Nous retrouvons l'équation de base :

V_u = (Q_m × T_min) / 4

Fréquence de démarrage

Soit T_min = 3600 / Z, où Z est la fréquence maximale de démarrage à l’heure, les équations de base s’écrivent alors :

Dans le cas d'une seule pompe :

V_u = 900 Q_m / Z

Dans le cas de plusieurs pompes :

V_u = 900 Σ (Q_qi – Q_mi-1) / Z

Débits critiques

Nous avons vu que la fréquence maximum de démarrage des pompes est obtenue pour une valeur particulière du débit d’apport, appelée débit critique Q_sc.

La connaissance des débits critiques à la station, compte tenu des pompes installées, est un critère de sélection important, mais, hélas, trop souvent négligé.

L’équation généralisée du débit critique serait :

Q_sc = Q_a(i+1) + (Q_aui – Q_aui-1) / 2

i = 1Q = Q_1Q_aui = Q_sc / 2
i = 2Q = Q_a2Q_aui = Q_a(i+1) + (Q_aui) / 2
i = 3Q = Q_a3Q_aui = Q_a(i+2) + (Q_a(i+2)) / 2

etc...

Diagramme de cycle généralisé

À chaque zone de battement définie par le diagramme de fonctionnement des pompes correspond une courbe de cycle opérationnel. La connaissance de ces courbes permet de suivre très facilement les temps d’arrêt et de pompage relatifs quel que soit le débit d’apport (figure 16).

À suivre dans un prochain numéro, où seront traités les derniers chapitres de cet article :

  • — permutation circulaire automatique
  • — calcul en séquence opérationnelle N° II
  • — diagramme de sélection
  • — application numérique
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