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Autocontrôle par ATPmétrie sur des circuits de refroidissement

30 novembre 2007 Paru dans le N°306 à la page 79 ( mots)
Rédigé par : Carine MAGDO

La maîtrise du risque légionelles dans les tours aéroréfrigérantes nécessite la mise en place d'un plan de suivi basé sur différents indicateurs physicochimiques et microbiologiques. Dans ce cadre, les exploitants ont besoin d'outils d'autosurveillance à la fois fiables, pertinents, rapides et abordables. Dans cette démarche, l'usine d'Altis Semiconductor a réalisé sur ses 14 circuits de refroidissement une phase de qualification de kits de seconde génération de suivi de la biomasse active par ATPmétrie. Les résultats de cette campagne de mesure furent concluants puisque des corrélations ont pu être établies avec d'autres indicateurs microbiologiques ainsi qu'avec les actions d'exploitation. L?intérêt principal de cette technique pour les industriels est la réactivité qu'elle apporte pour anticiper les dérives du process mais aussi la possibilité de vérifier l'efficacité des traitements biocide choc ou continu sur tous les micro-organismes, aussi bien cultivables que non cultivables.

Dans ce cadre, les exploitants ont besoin d’outils d’autosurveillance à la fois fiables, pertinents, rapides et abordables. Dans cette démarche, l’usine d’Altis Semiconductor a réalisé sur ses 14 circuits de refroidissement une phase de qualification de kits de seconde génération de suivi de la biomasse active par ATPmétrie. Les résultats de cette campagne de mesure furent concluants puisque des corrélations ont pu être établies avec d’autres indicateurs microbiologiques ainsi qu’avec les actions d’exploitation.

L’intérêt principal de cette technique pour les industriels est la réactivité qu’elle apporte pour anticiper les dérives du process mais aussi la possibilité de vérifier l’efficacité des traitements biocide choc ou continu sur tous les micro-organismes, aussi bien cultivables que non cultivables.

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Altis Semiconductor

La fabrication de semi-conducteurs nécessite un environnement de production extrêmement stable en température et hygrométrie.

Afin de produire l’eau glacée nécessaire au maintien des conditions de climatisation des salles blanches, ainsi que la climatisation générale des bâtiments, l’usine d’Altis Semiconductor possède 19 tours aéroréfrigérantes (TAR) d’une capacité de 115 MW froid, toutes soumises à autorisation et réparties en 14 circuits situés sur 3 pôles géographiques du site de 55 ha.

Suite à l’arrêté du 13 décembre 2004, relatif aux installations de refroidissement par dispersion d’eau dans un flux d’air soumises à autorisation au titre de la rubrique n° 2921, de nombreuses restrictions ont conduit à un renforcement du contrôle des installations. Au-delà du problème de santé publique, un arrêt des TAR, chez Altis, aurait également des conséquences dramatiques pour la production.

De nombreuses actions ont été menées à la fois pour maîtriser le risque légionelles mais aussi pour réduire significativement les consommations d’eau, de produits chimiques ainsi que l’impact environnemental des traitements dans le cadre du processus ISO 14001.

Ainsi en 2005 a été mis en place un programme de recyclage d’eaux ultrapures qui constituent la majorité de l’appoint des TAR, accompagné d’un traitement centralisé et d’un monitoring soutenu. Des procédures de traitement adaptées à chaque situation et bonnes pratiques d’exploitation et de maintenance permettent de maîtriser des installations vieillissantes.

Les opérations menées ont abouti à une économie de plusieurs tonnes de produits chimiques et de 190 000 m³ d’eau par an (10 % de la consommation du site) dont un quart n’est plus prélevé dans le milieu naturel. Les nouveaux outils de monitoring mis en place (PCR, ATP) ont permis en tant qu’autocontrôle de maîtriser un process dérivant.

Les dépassements culture légionelle (entre 10² et 10⁴ UFC/l) sont ainsi passés de 19,2 % en 2005 à 2,8 % en 2006 et 1,3 % à ce jour en 2007.

Parmi les méthodes utilisées pour le suivi microbiologique des TAR, une nouvelle technologie est récemment apparue sur le marché : des kits destinés au contrôle micro-

Mots clés : légionelle, ATP, tour aéroréfrigérante, brome, eau oxydée

[Photo : Site d’Altis, Localisation des installations.]

biologique de tous les réseaux d'eau, et basés sur une technique de seconde génération de mesure de l’ATP (Adénosine Triphosphate) en tant qu'indicateur de mesure des microorganismes actifs.

Dans un souci d’optimisation du monitoring et dans le cadre de la recherche permanente d’outils de contrôle du process, cette nouvelle technique d’ATPmétrie a été testée sur le site d’Altis durant 1 mois en tant que nouvel outil de suivi microbiologique des circuits TAR.

Utilisation des kits Quench Gone Aqueous (QGA™) et Total Control Microbiology (TCM™)

L’Adénosine Tri-Phosphate est une molécule essentielle à la vie cellulaire car c’est la forme d’énergie immédiatement utilisable pour les besoins de la cellule, la source d’énergie la plus utilisée étant le glucose car c’est la plus facilement mobilisable et répandue pour les organismes autotrophes et hétérotrophes.

L’A.T.P est donc une molécule que l’on retrouve dans toutes les substances animales et végétales.

On distingue :

- ATP intracellulaire (cATP) = organismes vivants ;

- ATP extracellulaire (dATP) = organismes morts ou mort programmée des bactéries ;

- ATP total (tATP) = cATP + dATP.

Cette étude s’effectue sur un système de seconde génération de mesure de l'ATP. Ce système utilise la même réaction chimique qui, dans la nature, permet à la luciole de produire de la lumière. Le principe de la mesure repose sur le comptage de photons produits par l'action d’une enzyme, la luciférase, qui émet des photons en hydrolysant les molécules d’ATP : c'est la bioluminescence. L’intensité lumineuse est ensuite mesurée grâce à un luminomètre.

Le volume d'eau analysé pour les TAR est de 50 ml.

L’ATP intracellulaire est obtenu en filtrant l’échantillon (élimination du dATP) et en procédant à une lyse des bactéries retenues sur le filtre pour libérer leur ATP.

La qualification de la mesure sur les circuits TAR a été réalisée de la manière suivante :

- suivi de l’ATP intracellulaire sur 10 circuits avec 3 traitements en continu différents en biocide oxydant ;

- évaluation du Biomass Stress Index lors du changement de traitement continu ;

- suivi de l’ATP intracellulaire sur un circuit traité par des chocs de biocide oxydant ;

- évaluation de l’efficacité de différents chocs biocides dans les circuits ;

- parallèle entre l’ATP intracellulaire et la PCR Lspp ;

- cartographie du process TAR des eaux d'appoint aux circuits ;

- évaluation en laboratoire de l’abattement en biomasse par différents biocides selon les concentrations et temps de contact.

300 analyses ont ainsi été effectuées pendant un mois. Toutes les mesures d’ATP sont réalisées dans les 2 heures qui suivent le prélèvement. Des analyses sur plusieurs échantillons neutralisés et non neutralisés ont permis de vérifier qu'il n’y avait pas d’interférence avec les résiduels en biocides.

Résultats

Trois stratégies de traitement continu en biocide oxydant ont été comparées :

- acide hypobromeux, traitement initial démarré en 2005 ;

- eau oxygénée stabilisée aux ions argent, testée pendant 3 mois pour des raisons environnementales ;

- solution comportant 90 % d’acide hypochloreux et 10 % de dioxyde de chlore, générée par électrolyse, testée sur 4 circuits puis généralisée sur toutes les TAR.

La qualité physico-chimique et microbiologique de l'eau d’appoint avant traitement était strictement identique dans les 3 cas.

La figure 1 montre une teneur en biomasse active comprise entre 10⁰ et 10¹ équivalent microbien/ml lors du traitement à l'eau oxygénée stabilisée aux ions argent, pour des concentrations en H₂O₂ résiduel comprises entre 1 et 200 mg/l.

Un début de chute de la biomasse active est

observé lors de la phase de purge effectuée avant le changement de traitement.

Après quelques jours de traitement à l'acide hypobromeux, les teneurs en biomasse active mesurées vont de 10^4 à 10^1 équivalent microbien/ml pour des concentrations comprises entre 0,5 et 10 mg/l.

Le kit TCM™ nous a permis d’évaluer le stress de la biomasse à l'aide des valeurs obtenues, à savoir le ratio du dATP (dATP = extracellulaire) sur tATP (tATP = ATP total présent dans l’échantillon).

La figure 2 montre que l'indice de stress de la biomasse en fonction des circuits était entre 20 % et 40 % avec H₂O₂/Ag, démontrant ainsi un indice de stress faible. Le stress normal des microorganismes en dehors de tout traitement biocide est évalué à 25 %. Lors de l’étape de purge des circuits, l’indice est bien constaté lors du désamorçage des pompes doseuses biocides. Il a ensuite chuté lors de la remise en service de celles-ci.

Pour l'un des circuits pour lequel les facteurs de risque sont plus importants, une consigne de 700 mV a été fixée à partir des résultats obtenus par ATPmétrie.

Les résultats cATP et PCR Lspp sur les circuits TAR d’Altis ont montré une efficacité biocide limitée de H₂O₂/Ag en comparaison au HOBr, malgré des concentrations résiduelles dix fois supérieures. La cartographie du process (figure 4) a mis en évidence que, déjà à la base, l'eau d’appoint traitée avec 100 ppm d’H₂O₂/Ag était plus chargée en biomasse active ; cette eau d’appoint traitée distribuée dans les TAR était donc une source de contamination.

La faible performance biocide de H₂O₂/Ag peut être en partie due à la capacité de certains micro-organismes à catalyser la dismutation du peroxyde d’hydrogène en dioxygène et eau grâce à la catalase. Cette enzyme existe chez tous les organismes aérobies chez lesquels elle participe, comme la peroxydase, à la défense contre les dérivés toxiques de l’oxygène. Elle agit pour des

[Photo : Figure 1 : Suivi de l’ATP intracellulaire sur 10 circuits de refroidissement traités successivement à H₂O₂/Ag puis au HOBr.]
[Photo : Figure 2 : Suivi du BSI lors du changement de traitement biocide.]
[Photo : Figure 3 : Suivi de l'ATP intracellulaire sur un circuit traité en continu successivement à H₂O₂/Ag, au HOBr et par un mélange HOCl/ClO₂.]
[Photo : Figure 4 : cartographie du process TAR du site d’Altis par ATP intracellulaire.]

Concentrations plus élevées en peroxyde que la peroxydase. Les micro-organismes possédant ces enzymes (catalase et peroxydase), y compris la légionelle, pourraient alors être résistants à un traitement continu à base d’H₂O₂.

La cartographie par ATPmétrie a également mis en évidence des résultats similaires entre le traitement au HOBr et celui au mélange HOCl/ClO₂ généré par électrolyse. Le second présente plus d’avantages en termes de coût, d’exploitation (pas de dépotage) et du point de vue environnemental (suppression des bromates).

Les mesures en parallèle PCR L.spp et cATP (figure 5) ont montré une tendance identique entre les deux méthodes.

L’évolution des courbes lors des changements de traitement est identique pour les dix circuits de refroidissement de l’étude.

Interprétation

La campagne de mesure sur les TAR a montré que l’ATPmétrie était un outil fiable et rapide. Les résultats obtenus sont en concordance avec les constats de terrain, d’exploitation ainsi que la connaissance qu’avait Altis de ses réseaux. Ils sont également concordants avec le mode d’action et l’efficacité connue des différents biocides. Pour cet indicateur, des valeurs guides et seuils d’action ont donc été définis : leur interprétation journalière en complément aux autres analyses physico-chimiques permet de définir les actions à mener.

L’objectif pour les TAR est un résultat inférieur à 10¹ équivalent microbien/ml (10 pg ATP/ml), témoin d’une population microbienne sous contrôle et d’un traitement efficace.

Un seuil d’alarme à 10² équivalent microbien/ml (100 pg ATP/ml) a été instauré comme signe d’une dérive du process présentant un risque de dépassement en culture légionelle.

Suite à la mise en place d’un suivi par ATPmétrie, en complément à la PCR L.spp, les analyses de flore aérobie revivifiable (lame gélosée) ont été stoppées.

Conclusion

La mesure d’ATP présente plusieurs avantages pour un site industriel. Tout d’abord, c’est un indicateur instantané du taux de microorganismes qui peut donc être utilisé comme outil de suivi régulier process. La quantification de la biomasse par ATPmétrie est le seul et vrai indicateur de suivi de la flore totale puisque nous quantifions aussi bien les bactéries viables cultivables que les bactéries viables non cultivables dans nos installations. Ensuite, la mesure est réalisable en laboratoire sur le site et ne prend que 10 minutes par échantillon. Enfin, le coût de cette mesure est faible en regard des autres techniques analytiques disponibles.

Les objectifs de ce suivi sont nombreux :

  • • Autocontrôle ;
  • • Réactivité : résultats en 10 minutes (vs 10 j culture et 48 h PCR) ;
  • • Anticipation des dérives ;
  • • Vérifier l’efficacité des biocides sur les micro-organismes viables cultivables et viables non cultivables, en complément de la PCR L.spp pour cibler la légionelle ;
  • • Améliorer l’efficacité des traitements ;
  • • Optimiser la concentration de biocide ;
  • • Valider l’efficacité des désinfections ;
  • • Identifier les pollutions, les foyers bactériens ;
  • • Gain économique, optimiser le budget analyses en utilisant les indicateurs les plus pertinents pour réduire le budget produits chimiques.

L’ATPmétrie a permis sur le site d’Altis Semiconductor la qualification d’un nouveau traitement (génération d’HOCl et ClO₂ par électrolyse) sur un groupe de TAR. Celui-ci va ensuite être généralisé sur l’ensemble du site conduisant ainsi à d’importantes économies de produits chimiques (6 t/an) et une amélioration de l’impact environnemental des rejets en supprimant les bromates.

Les mesures d’ATP intracellulaire ont par ailleurs validé les concentrations en biocide et temps de contact utilisés pour les désinfections chocs ; ainsi que conforté Altis dans la décision de supprimer certains biocides (isothiazolone, H₂O₂/Ag). L’ATPmétrie répond aujourd’hui aux exigences du mode industriel : fiabilité, réactivité, faible coût. Dans un but permanent d’augmentation de la productivité, la possibilité de réaliser une mesure d’ATP en ligne constitue également un axe d’optimisation indispensable pour répondre aux exigences de ce mode industriel.

[Photo : Figure 5 : suivi de l'ATPintracellulaire et de la PCR L.spp sur le circuit de refroidissement GF12.]
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