La France est un pays rural. Sur les 34 609 communes recensées en 1990, nombreuses sont celles qui ont moins de 2 000 EH. D'ici 2005, ces villages doivent s'équiper de moyens d'assainissement pour répondre à la loi sur l'eau du 3 janvier 1992. Le choix de la filière d'assainissement, des procédés, mais aussi de l'obligation de résultat relèvent de la responsabilité du maire. Cependant, ces prescriptions doivent rester compatibles avec le réalisme qui s'impose aux collectivités de petites taille.
Depuis cinq ans, de nombreuses collectivités rurales se sont lancées dans un plan d'assainissement collectif au prix d’un endettement parfois insupportable. Le résultat n'est pas toujours probant. Certaines stations collectives ont une capacité trop faible pour maintenir un bon rendement épuratoire. De plus, faute d'entretien, leur fonctionnement est parfois aléatoire.
Bilan : ces stations rurales accentuent la pollution, en rejetant dans le milieu naturel une surcharge polluante que les rivières ne peuvent disperser faute d'un débit suffisant. Les cours d'eau continuent à s'eutrophiser. Le résultat escompté n'est pas là.
Quel assainissement pour les collectivités rurales de moins de 2000 EH
Pourquoi cet échec ? Les maires des petites agglomérations sont souvent bien seuls, face à une législation floue qui les tient tout de même responsables des dysfonctionnements et nuisances de tout ordre que peuvent entraîner un mauvais choix.
Depuis deux ans, les textes, décrets, circulaires de tout type se multiplient pour apporter des précisions sur la mise en place des procédures et des filières d’assainissement des petites agglomérations. Après le tout collectif prôné dès l'adoption de la loi sur l’eau de 1992, l’assainissement autonome fait un retour en force. Bien encadré, il est tout aussi efficace (si ce n'est plus) que l’assainissement collectif. Il est aussi moins coûteux dans le temps et offre une solution économiquement acceptable à bon nombre de collectivités rurales à l’habitat dispersé.
La loi sur l’eau impose au maire une obligation de résultats. Il lui incombe donc de choisir les moyens adaptés permettant de les respecter. Et c'est très difficile. Il est aussi responsable auprès de ses administrés de l'efficacité des sommes investies pour res-
Tableau 1 : Structure générale des différentes étapes
(source guide pratique de recommandations pour l’application du décret du 3 juin 1994 et des arrêtés du 22 décembre 1994)
ATTRIBUTION DE LA COMMUNE OU DU GROUPEMENT DE COMMUNES
Délimitation après enquête publique de zones d’assainissement collectif et de zones d’assainissement non collectif (loi sur l’eau – article 35 du 3 juin – articles 2 & 4) objectif : définir de manière prospective et cohérente les grandes filières de traitement sur la commune
Délimitation après enquête publique de zones dans lesquelles des mesures doivent le cas échéant être prises pour limiter l’imperméabilité des sols (loi sur l’eau – article 35) objectif : prévenir les effets de l’urbanisation et du ruissellement des eaux pluviales sur les milieux récepteurs et les systèmes d’assainissement
Étude diagnostic objectif : connaître le fonctionnement des ouvrages d’assainissement de façon à mieux appréhender leurs défauts et les améliorations à apporter
Cette étude diagnostic fait partie du : programme d’assainissement (décret du 3 juin – articles 16 et 17) objectif : choisir les moyens mis en œuvre pour respecter les objectifs de réduction de matières polluantes définis par le préfet, et programmer la réalisation des ouvrages selon le calendrier prévu par le décret ; définir la pluviosité sur laquelle seront dimensionnés les ouvrages
Demande d’autorisation (document d’incidences ou étude d’impact) (décrets « procédures » – article 2 – et « nomenclature » du 29 mars 1993 et arrêté prescriptions techniques du 22 décembre 1994 – articles 2, 3, 5 et 13) objectif : justifier la situation du projet vis-à-vis du programme d’assainissement et de l’arrêté d’objectifs du préfet et évaluer l’impact du projet vis-à-vis du milieu récepteur étude de fiabilité du système de traitement objectif : justifier la fiabilité de fonctionnement du système et prévoir les mesures nécessaires en cas de panne ou de maintenance et en cas d’épandage des boues un rapport sur l’élimination des boues objectif : justifier que le problème de l’élimination des boues a bien été pris en compte dans le projet
Réception des ouvrages de collecte (arrêtés « prescriptions techniques » du 22 décembre 1994 – article 25) objectif : assurer la qualité de réalisation des ouvrages
Manuel et rapport annuel d’autosurveillance ; registre de fonctionnement du système d’assainissement réalisés en principe par l’exploitant (arrêtés « surveillance » du 22 décembre 1994 – articles 6 et 8) objectif : justifier la bonne marche de l’installation, sa fiabilité, et le respect des obligations de résultat
ATTRIBUTIONS DU PRÉFET
Délimitation des agglomérations (décret du 3 juin – article 5) objectif : identifier la zone pertinente de collecte-épuration pour élaborer les arrêtés d’objectifs
Fixation après avis du C.H.T. des objectifs de réduction de substances polluantes pour l’agglomération (décret du 3 juin – articles 14 et 15) objectif : fixer, au vu du milieu récepteur et de l’état d’assainissement de l’agglomération, les efforts à accomplir à moyen terme
Fixation des prescriptions au système d’assainissement (décret « procédures » et « nomenclature » du 29 mars 1993) objectif : traduire en obligations de résultats les textes réglementaires et les arrêtés d’objectifs tout en les adaptant au contexte local
Validation de l’autosurveillance et contrôles inopinés (décret « surveillance » du 22 décembre 1994 – articles 8 et 9) objectif : s’assurer de la qualité du dispositif mis en place par l’exploitant et du respect des prescriptions imposées par le préfet
Restaurer la qualité des eaux. De ses réflexions, il devra sortir le choix de la bonne filière.
Assainissement collectif ou autonome ?
L’assainissement collectif regroupe les eaux usées des différentes habitations. Celles-ci sont conduites, via le réseau de collecte, vers une unité de traitement. Dans cette approche, la commune prend en charge les dépenses de construction et de fonctionnement relatives aux réseaux et à la station d'épuration collective. Elle se charge aussi du devenir des boues de traitement.
La mise en place d’un réseau de collecte entraîne un coût de mise en œuvre et d’entretien beaucoup plus important que celui de l'unité de traitement. « On estime que l’investissement se répartit à 80 % pour le réseau et 20 % pour la station », explique Vincent Jannin qui travaille à la Direction de l’eau au Ministère de l'Environnement. Quant à l’assainissement autonome, il se définit comme un système d’assainissement effectuant la collecte, le prétraitement, l’épuration, l’infiltration ou le rejet des eaux usées domestiques des immeubles non raccordés au réseau public. Ici, l'investissement et l'entretien du système d’épuration sont à la charge du propriétaire, sous le contrôle du maire dans les zones où l'assainissement collectif n’est pas assuré. La circulaire du 22 mai 1997 sur l’assainissement non collectif « renforce le système de préférences entre différentes filières issues de l'arrêté du 3 mars 1992 » et précise les modalités de l’entretien périodique des installations.
Longtemps négligé, l’assainissement autonome (ou non collectif) permet de disposer, pour l’habitat dispersé, de solutions mieux adaptées et plus économiques que les solutions collectives. Le recours à l’assainissement autonome doit toutefois susciter une grande rigueur dans le choix de la filière. Plus ou moins performants, leur efficacité est aussi liée à leur mise en œuvre qui doit être réalisée dans les règles de l'art. Pour y voir plus clair, le CSTB (Centre Scientifique et Technique du Bâtiment) a rédigé la DTU 64-1 sur la mise en œuvre des dispositifs d’assainissement autonome.
Dans la plupart des cas, le choix entre l'une des deux approches est réalisé sur un plan strictement économique à court terme. La circulaire du 22 mai 1997 précise à l’annexe II : « l'expérience montre que l’assainissement collectif ne se justifie plus pour des considérations financières dès lors où la distance moyenne entre les habitations atteint 20-25 mètres, cette distance devant bien entendu être relativisée en fonction de l’étude des milieux physiques. Des solutions groupées ou individuelles doivent être étudiées. Au-dessus de 30 mètres, la densité est telle que l'assainissement non collectif est compétitif ». Mais le choix n’est pas si simple. Il est des cas où le collectif ne peut être pris en compte. Par exemple, lorsque le rejet des eaux usées est situé du côté opposé à la rue. On peut alors être obligé de choisir une solution non collective, même si le collectif est souhaité.
Cependant certains chiffres doivent être connus. Le projet risque d’être retourné pour révision par la plupart des Agences de l'eau si l'investissement global dépasse 15 000 F/EH. « C’est un coût plafond au-delà duquel des solutions moins onéreuses peuvent être envisagées » explique Jean-Loup Mahieu de l'Agence Rhin-Meuse. À l’Agence Seine-Normandie, on estime (à titre indicatif) qu'un investissement de 1 500 F/EH pour la station et 10 000 F/EH pour le réseau est de l’ordre du normal. « Dans tous les cas », précise Yannick Robin de la Direction secteur Île de France Seine Amont, « si l'investissement est supérieur à 20 000 F/EH, nous cherchons à savoir si une autre solution ne serait pas plus économique ».
En milieu rural une approche mixte est souvent nécessaire pour ne pas grever les coûts d’investissement. La délimitation sur le territoire communal des zones relevant de l’assainissement collectif et celles relevant de l’assainissement non collectif fait partie des tâches réservées aux communes. C’est le zonage.
Le zonage, une étape incontournable
Le zonage est rendu obligatoire, quelle que soit la taille de l'agglomération, par l'article L 2224-10 du Code des Collectivités Territoriales (issu de l'article 35 de la loi sur l'eau du 3 janvier 1992). Les communes (ou leurs groupements) délimitent après enquête publique les zones :
- d’assainissement collectif, - relevant de l’assainissement non collectif,
- - où les mesures doivent être prises pour limiter l'imperméabilisation des sols,
- - où il est nécessaire de prévoir des installations de collecte des pluviales.
Le décret du 3 juin 1994 pris en application de la loi sur l'eau précise : « peuvent être placées en zones d’assainissement non collectif les parties du territoire d'une commune dans lesquelles l'installation d'un réseau de collecte ne se justifie pas, soit parce qu’elle ne présente pas d’intérêt pour l'environnement, soit parce que son coût serait excessif ». Les objectifs des études de zonage d’assainissement, la démarche générale à suivre, les critères de choix à prendre en compte pour la délimitation des différentes zones sont précisés dans la circulaire ministérielle du 12 mai 1995, prise en application du même décret et des arrêtés du 22 décembre 1994. « C’est une étude prospective à cinq ans », rappelle Nathalie Chartier-Touzé de la Direction de l’eau au Ministère de l'Environnement.
Dans la pratique, on constate une certaine confusion sur les motifs et objectifs des études engagées. Cette confusion est illustrée par les diverses appellations données aux études : étude du schéma directeur d’assainissement, étude préalable au schéma directeur d’assainissement, étude de faisabilité d’assainissement communal... Toutes ces études reprennent sous différentes formes les objectifs du zonage d’assainissement, en les complétant par des aspects opérationnels (diagnostic, programmation des travaux...).
En fait, le zonage d’assainissement incite les collectivités à un débat utile et ouvert sur l’utilisation la plus rationnelle possible des techniques d’assainissement des eaux usées et pluviales. C'est l'occasion pour la collectivité d’assurer une meilleure maîtrise des coûts d’assainissement, profitable à la fois à la commune et aux usagers. Il s'intègre dans le domaine de l'aménagement et de l'urbanisme, pour une mise en œuvre opérationnelle. Les dispositions du zonage sont intégrées dans les POS (Plan d’Occupation des Sols).
Mais le rôle du zonage ne s’arrête pas là. Il combat certaines pratiques, dont les effets pervers sont aujourd'hui reconnus :
- - absence de prise en compte des caractéristiques des sols et les contraintes environnementales dans le choix de mode d’assainissement des eaux usées,
- - extension des réseaux de collecte d’eaux usées trop coûteuse pour la collectivité,
- - collecte systématique des eaux pluviales, aggravant les pollutions par temps de pluie,
- - absence de maîtrise des phénomènes d'imperméabilisation des sols et des conditions de ruissellement,
- - insuffisance de prise en compte des données d’assainissement dans les documents d’urbanisme.
Financée à hauteur de 60 % par les Agences de l'eau, l'étude de zonage est entreprise par la commune ou le groupement de communes. Elle peut être déclenchée par :
- - l’engagement ou la révision de POS,
- - la protection des ressources en eaux,
- - la programmation de travaux d’assainissement,
- - une demande de transparence du service par les usagers,
- - la maîtrise des eaux pluviales.
Aucune recommandation particulière n'est donnée par les textes sur le choix des structures de pilotage des études de zonage. La collectivité dispose d’un large pouvoir d’appréciation pour associer les services compétents qu'elle souhaite. À noter toutefois l'intérêt d’un travail préparatoire à la rédaction d'un cahier des charges. Il évite de laisser l’initiative aux bureaux d'études pour fixer la densité, la localisation et le type de sondage à réaliser.
Tableau 3 : Domaine d'application préférentiel des principales techniques en matière d’assainissement des communes rurales (source circulaire du 17 février 1997)
Pollution équivalente : 0 50 100 200 300 400 500 1 000 2 000 |
---|
Techniques |
Épandage souterrain |
Lits à macrophytes |
Lagunage naturel |
Lagunage aéré |
Disques biologiques (avec lagunes) |
Lit bactérien |
Boues activées en aération prolongée |
L’approbation de l’étude de zonage relative aux eaux usées est soumise aux modalités d'enquête publique. Quel que soit le choix retenu, les usagers sont ainsi informés de leurs droits et obligations ainsi que des répercussions financières des choix de la commune. La prise en compte des observations faites par le public ou par le commissaire enquêteur peut amener la collectivité à ajuster le projet de zonage soumis à l’enquête. Ces ajustements portent néanmoins sur des remarques mineures, ne remettant pas en cause le contenu ni la portée du dossier soumis au public. Une fois l'étude de zonage terminée, elle est traduite dans les documents d'urbanisme pour les communes qui en disposent. Une étude diagnostic peut alors être entreprise. Elle vise à connaître le fonctionnement des ouvrages d’assainissement existants pour mieux appréhender leurs défauts et les améliorations à apporter.
L’étude diagnostic
Si l'étude diagnostic n’est pas obligatoire pour les agglomérations de moins de 2 000 EH, elle est riche d’enseignement, puisqu’elle permet de détecter tous les dysfonctionnements et les insuffisances du système en place.
Pour les agglomérations déjà équipées d'un dispositif collectif et souhaitant le mettre en conformité, l'étude diagnostic est le moyen concret de comprendre le fonctionnement du couple réseau d’assainissement-station d'épuration. Cette étude ne peut se réduire à une investigation physique : inspection caméra, relevés topographiques, campagne de mesure... Elle doit refléter une démarche concentrée sur les problèmes de la collectivité. Pour la partie réseau, elle prend en compte le fonctionnement par temps sec et aussi par temps de pluie. Elle permet :
- - de décrire l'ensemble des secteurs de collecte et quantifier les charges véhiculées ;
- - de mesurer les débits, localiser les arrivées d'eaux claires parasites de différentes origines (eaux de ruissellement, sources, drainages...) et évaluer les taux de dilution qu'elles engendrent ; évaluer les mauvais raccordements, les quantités de sous-produits de curage à évacuer ;
- - de quantifier le taux de collecte de la pollution domestique et de la pollution industrielle, artisanale ou agricole raccordées au réseau ;
- - de localiser les principaux rejets directs et les ouvrages de décharge (déversoirs d'orage, trop-pleins, dérivation de station...), évaluer les flux polluants déversés dans le milieu naturel et prévoir l’évolution de ces rejets ;
- - d'inventorier les réhabilitations nécessaires et de les classer en fonction de leur impact sur le milieu récepteur.
Pour la station, son fonctionnement ne peut se dissocier du réseau. L’analyse est réalisée à partir des informations disponibles qui seront complétées, si nécessaire, par des campagnes de mesures explicitant la réaction de la station à différents régimes hydrauliques. Toutes ces données permettent de réaliser une analyse critique des performances et des limites de chaque ouvrage. Pour les communes non équipées d’un système collectif, le diagnostic porte sur l’analyse des points noirs : eau stagnante, contrôle des systèmes d'assainissement autonome...
Le diagnostic s’intègre au programme d’assainissement.
Le programme d’assainissement
Là encore, le programme d’assainissement n'est pas obligatoire pour les petites agglomérations de moins de 2 000 EH. Cependant, entamer cette réflexion permet de clarifier bien des idées.
Bien mené, il examine plusieurs hypothèses.
Tableau 4 : Analyse les événements prévisibles susceptibles d'affecter le rendement de la station
Ouvrage : Dispense de déclaration | Capacité : moins de 12 kg DBO, par jour (moins de 200 EH) | Type d’assainissement : assainissement non collectif | Texte : Arrêté du 6 mai 1996 |
Ouvrage : Dispense de déclaration | Capacité : moins de 12 kg DBO, par jour (moins de 200 EH) | Type d’assainissement : assainissement collectif | Texte : Arrêté du 21 juin 1996 |
Ouvrage : Soumis à déclaration | Capacité : comprise entre 12 et 120 kg DBO, par jour (entre 200 et 2000 EH)* | Type d’assainissement : assainissement collectif | Texte : Arrêté du 21 juin 1996 |
Ouvrage : Soumis à autorisation | Capacité : supérieure à 120 kg de DBO, par jour (plus de 2000 EH) | Type d’assainissement : assainissement collectif | Texte : Arrêtés du 22 décembre 1994 |
* Sous réserve que ces ouvrages échappent aux seuils d’autorisation ou de déclaration définis par les autres rubriques de la nomenclature annexée au décret n° 93-743 du 29 mars 1993, notamment la rubrique 2.2.0 et sous réserve des dispositions spécifiques mentionnées à l’article 2 du décret 93-743 du 29 mars 1993 pour certaines zones de protection spéciale.
tout en tenant compte de la charge polluante en jeu. Celles-ci intègrent :
- - les perspectives de développement de la collectivité à l’échéance de 15 ans,
- - les rendements minimum à atteindre, pour respecter les objectifs fixés par l’arrêté préfectoral,
- - la prise en compte de l’insuffisance des structures existantes,
- - l’importance et la nature des travaux à réaliser et leurs incidences financières.
Le programme d’assainissement prévoit l’évolution des structures d’assainissement à court et moyen terme (réserve foncière nécessaire pour mener à bien les étapes successives). Il fournit un programme pluriannuel des investissements pour mener à bien cette tâche. Il permet de raisonner sur l’ensemble du système d’assainissement du branchement du particulier jusqu’à la station d’épuration. La programmation des investissements tient compte du rapport coût/efficacité.
Le tableau 1 analyse les événements prévisibles susceptibles d’affecter le rendement de la station telles que les variations journalières ou saisonnières, les événements climatiques, la pluviométrie…
Le dimensionnement du traitement des boues est traité en tenant compte des variations de charge et des débouchés prévisibles de l’élimination. Si les boues sont destinées à une valorisation agricole, il est conseillé de conduire la procédure d’autorisation de la station et de l’épandage des boues en parallèle.
Le programme d’assainissement conduit tout naturellement au choix de la filière collective d’épuration, qui est, pour les agglomérations comprises entre 200 et 2000 EH, soumise à déclaration.
Choisir la filière d’épuration collective
Rusticité, fiabilité et simplicité d’exploitation, telles sont les qualités qui guident le choix de la filière de traitement des petites collectivités en milieu rural. Différentes filières d’épuration sont aujourd’hui à la disposition des collectivités rurales : les traitements classiques (boues activées), le lagunage, les techniques d’assainissement autonome complétées par une étape d’épuration par le sol… Les premières filières sont répertoriées dans l’étude interagence n° 27. Quant aux dernières, plus rustiques, elles font actuellement l’objet d’une évaluation par les Agences de l’eau.
Le traitement classique, essentiellement par boues activées (il est aussi appelé épuration biologique par aération prolongée), est dérivé de l’assainissement collectif des agglomérations plus importantes. « C’est le seul procédé capable d’éliminer conjointement le carbone, l’azote et le phosphore », explique F. Nauleau qui travaille chez Saur, « mais ce système est complexe et mal adapté pour les très petites collectivités ». Ces arguments sont repris dans l’annexe II, les commentaires de l’arrêté du 21 juin.
1996, qui précise : « Ces techniques ne constituent pas toujours la meilleure solution pour les petites capacités en raison notamment des contraintes d’exploitation et des coûts de fonctionnement ». De plus, cette filière produit beaucoup de boues. Elles doivent être éliminées des bassins toutes les semaines.
Pour résoudre ce problème, Saur propose une filière simple et automatisable. Il s'agit d’un lit planté de roseaux appelé « Rhizophyte ».
Outre le problème des boues, une attention toute particulière doit être portée sur la fiabilité des équipements électromécaniques et sur le bon dimensionnement des clarificateurs. Malgré cela, certaines perturbations du fonctionnement peuvent apparaître. Elles sont entraînées par des surcharges concentrées accidentelles qui font décroître le rendement épuratoire pendant une longue période. De plus, le risque d’entraînement de biomasse active en cas de forte charge hydraulique ne doit pas être négligé. Elle demande pour fonctionner le raccordement au réseau électrique.
René Gardon d’ISD Environnement commercialise cette technologie. Il explique : « L'investissement d’une unité de 0 à 100 EH s’élève à 2000 F/EH. Il peut descendre à 900 F/EH pour le traitement de 250 à 500 EH. Le coût de fonctionnement annuel s'établit entre 130 et 250 F/EH selon la taille de la station ».
Autre alternative, l'infiltration percolation. C'est un système à encombrement moyen, composé d'un prétraitement par décantation, d'un digesteur ou d'une lagune de décantation, et de lits d’infiltration fonctionnant en alternance. Pour F. Nauleau, « Ce système donne de bons résultats si l'épandage de prétraitement est bien conçu, c’est-
C’est-à-dire s'il n'y a pas de départ de MES (Matières En Suspension).
Le lagunage, simple et rustique, présente une autre approche.
Le lagunage
En France, 20 % des stations rurales utilisent le lagunage naturel. C’est une bonne méthode pour traiter les effluents peu concentrés des communes de moins de 1 000 EH, dès lors que l'on se contente de traiter les pollutions carbonées et les matières en suspension (MES). Dans le cas où une phase de nitrification est demandée pour éliminer l'azote, il faut disposer en aval des bassins une installation à lits bactériens. L'injection de floculants précipitants (sels de fer ou d’aluminium, parfois chaux) répond à l'élimination des phosphates. En règle générale, le lagunage accepte un effluent ne présentant pas de caractère septique (effluent souillé ou porteur de germe), dont la DBO5 est inférieure à 300 mg/l.
Le traitement est réalisé dans trois bassins successifs. Il repose sur le pouvoir auto-épurateur des organismes aquatiques. Ceux-ci digèrent les matières organiques par voie microbienne, c’est la minéralisation. Puis les matières obtenues, l’azote et le phosphore, sont assimilées par des algues.
Une vidange du cône de boues est conseillée tous les ans et un curage tous les 5 à 10 ans de la lagune primaire est nécessaire, « il peut être porté à 15-20 ans par l'utilisation d'un activateur qui limite la formation des boues », explique Stéphane Bavavéas, Directeur Général d’Eparco. En raison de leur conception, les bassins de lagunage sont à considérer comme photo-réacteurs hyperproducteurs en algues.
Une partie des algues s’échappent vers le milieu récepteur avec le rejet, entraînant du même coup une pollution biologique contribuant à l’eutrophisation. « Pour qu’une lagune fonctionne correctement, il faut un bon dimensionnement des ouvrages de séparation, décanteur-digesteur et clarificateur », explique F. Nauleau. Malgré le soin apporté à sa conception, une lagune naturelle peut générer des émanations olfactives, surtout en été. De plus, son fonctionnement (donc son rendement épuratoire) est étroitement lié aux conditions climatiques. La rusticité du système ne signifie en aucun cas que celui-ci fonctionne seul. Une exploitation intelligente et régulière est indispensable, faute de quoi, elle tombe à l'abandon. Le dysfonctionnement se traduit alors par une surcharge de la station qui passe en anaérobiose permanente.
Le lagunage naturel est très gourmand en surface au sol, puisqu’il immobilise de 10 à 15 m² minimum par équivalent habitant. Pour améliorer le rendement des lagunes et réduire leur emprise au sol, le lagunage primaire peut être aéré. « Les eaux usées venant du réseau arrivent sans dégrillage, ni dessableur, ce qui entraîne peu d’entretien », précise-t-on chez Isma. Les sables et les boues lourdes décantent dans la zone d’entrée, tandis que les autres solides se répartissent dans l'ensemble du bassin primaire. L'élimination de ces flottants se fait en ratissant la surface de l’eau. Les substances putrescibles sont dégradées et stabilisées par voie aérobie. Les nuisances olfactives sont neutralisées par l’aération qui apporte de l’oxygène.
Trois conditions doivent toutefois être réunies pour un bon fonctionnement de la lagune aérée. L'apport en oxygène doit être suffisant, la circulation et l'homogénéisation de la masse d’eau efficaces, ceci pour éviter les zones mortes et assurer un échange entre les eaux à traiter et le film biologique du fond du bassin. En pratique, de bons résultats sont atteints en disposant les aérateurs dans la lagune primaire de telle sorte que l'ensemble de l’apport d’oxygène s’effectue dans la zone la plus chargée. En ce qui concerne les méthodes d’aération, leurs différences se situent au niveau du mode d'introduction de l’oxygène et du schéma de circulation. Avec les turbines flottantes, l'eau est projetée en l'air et s’oxygène en contact avec l'air. Ces appareils génèrent des pollutions sonores et olfactives. De plus, en hiver, ils contribuent à refroidir l’effluent et posent des problèmes d’épuration en période de gel. On leur préfère donc l'aération sous pression qui répartit l'air sous forme de fines bulles à travers des coupoles en céramique ou des tubes perforés. De bons résultats sont également atteints par des aérateurs en ligne munis de déflecteur.
Du fait du temps de séjour prolongé, de l’ordre de 10 jours, la lagune aérée accepte les eaux pluviales.
Elles peuvent être traitées en même temps en utilisant les lagunes comme bassin tampon. « L’aération artificielle permet de ramener la surface au sol de 2 à 3 m²/EH, soit 5 à 10 fois de moins qu’un lagunage naturel », explique-t-on chez Isma, « et le curage de la lagune primaire doit être réalisé tous les 6 à 10 ans ». À noter toutefois que le lagunage aéré impose la présence d’électricité pour
alimenter les pompes.
Isma qui commercialise des lagunes aérées chiffre entre 1500 et 1700 F/EH le coût de l’investissement pour une station de 1000 à 1500 EH. Quant au coût de fonctionnement (sur la base d’une unité de 1000 EH), il se décompose comme suit : 30 F/jour pour la consommation d’énergie, 3500 F/an pendant les cinq premières années puis 5000 F/an ensuite, pour l’entretien des aérateurs et des surpresseurs, auxquels il faut ajouter 200 heures par an de main-d’œuvre pour le nettoyage du dégrilleur et l’entretien courant. La provision pour le curage de la lagune primaire est estimée à 5000 F/an.
Des solutions issues de l’assainissement autonome
Un certain nombre de filières de traitement provenant de l’assainissement autonome sont tout à fait adaptées au traitement collectif des eaux usées des très petites agglomérations. Il s’agit entre autres des fosses septiques toutes eaux dont le volume peut être adapté pour traiter les effluents jusqu’à 500 EH. Conçues pour l’individuel, adaptées aux petites collectivités, les fosses fabriquées par Eparco, dans l’Yonne, assurent un niveau de rejet conforme à la réglementation pendant 4 ans (sans vidange) ou 10 ans avec l’utilisation d’un activateur biologique proposé par l’entreprise. « Dans les zones sensibles, comme les zones de baignade, un filtre tertiaire est mis en place en aval de la fosse », explique Stéphane Bavavéas, « il favorise la décontamination bactérienne et garantit moins de dix coliformes fécaux par millilitre ». Pour pallier tout accident sur le réseau et protéger la station, un préfiltre avec la pouzzolane peut être mis en place. Pour améliorer le fonctionnement de leur traitement tertiaire, Plastiques Armés Nîmois a développé une chasse d’eau à auget flottant. Il s’agit d’un réservoir placé entre la sortie du système d’épuration et le dispositif d’épandage ou le filtre à sable. Il peut emmagasiner selon les modèles de 400 à 800 l.
Une fois plein, un mécanisme comparable à celui d’une chasse d’eau provoque une vidange rapide. Les effluents sont ainsi mieux répartis et le système de filtration peut se régénérer entre deux lâchers d’eau. Pour Eparco, cette approche a une faible emprise au sol. Il faut en effet compter 3 m²/EH, deux filtres compacts auxquels il faut ajouter 0,6 m²/EH, en cas de mise en place d’un filtre tertiaire. Son coût aussi est intéressant. Eparco estime que l’investissement s’élève à 3000 F/EH pour une installation de 100 EH et qu’il est porté à 2800 F/EH pour 500 EH. À ce prix il faut rajouter 500 F/m² pour le traitement tertiaire (filtre à sable) lorsque celui-ci est mis en place. Quant au coût de fonctionnement, qui regroupe les frais d’entretien et la garantie de 10 ans, il est estimé à 35 F/EH et par an.
D’autres solutions peuvent encore être retenues, comme l’épuration par biomasse fixée, les bio-disques et les écosystèmes en série. Ces derniers sont en cours d’expérimentation en France. Ils représentent une alternative pour le traitement des effluents liquides des collectivités jusqu’à 15000 EH. Il s’agit de reconstituer sous forme de bassins plantés les fonctions épuratoires des écosystèmes aquatiques, semi-aquatiques et terrestres.
La charge polluante traverse successivement les différents milieux biologiques. L’épuration de l’eau est assurée dans chacun des bassins, par des plantes sélectionnées pour leur rôle épuratoire. « Le traitement est plus poussé que le lagunage puisqu’il traite aussi l’azote et le phosphore. L’installation expérimentale de 15000 EH située dans le nord de la France a une emprise au sol sensiblement équivalente à celle du lagunage », précise François Pauchet de Site & Concept, « c’est-à-dire 10 m²/EH ». Son coût d’investissement est compris entre 800 et 1000 F/EH. Les frais annuels de fonctionnement de l’ordre de 65 F/EH.