« Assainissement non collectif » : il suffit souvent de prononcer cette formule pour voir les esprits s'échauffer. Il est vrai qu'à l'heure du Grenelle de l'environnement, l'assainissement tient une place prépondérante avec des politiques qui tendent à responsabiliser au mieux les usagers. Car si les rejets domestiques des citadins sont globalement pris en charge par les réseaux d'assainissement publics, il faut rappeler que plus de quinze millions de Français n?y sont pas raccordés. Or aujourd'hui, entre les évolutions de réglementation et les systèmes toujours plus ?performants', ?économiques' ou ?verts' proposés aux particuliers, il est parfois difficile de s'y retrouver. Quelques éclaircissements s'imposent.
Quelques éclaircissements s'imposent.
Ces derniers mois ont vu plusieurs évolutions de la réglementation sur l'assainissement.
En décembre 2006, après plusieurs années de débats, les parlementaires sont parvenus à voter la loi sur l'eau et les milieux aquatiques (LEMA). En mars 2007, il s'agissait de la révision du Document technique unifié (DTU) 64.1, guide des bonnes pratiques pour l'installation d'un système d'as-
En présence d’une nappe phréatique à faible profondeur, il faut envisager la construction d’un tertre d’infiltration. Un matériau sableux assure l’épuration et la dispersion des eaux usées domestiques se fait par le sol en place.
L’assainissement non collectif (ANC). Ensuite, ce fut la publication de l’arrêté interministériel du 22 juin 2007 (qui a été suivi le 15 février 2008 d'une circulaire détaillant les instructions relatives à son application). Enfin, trois nouveaux arrêtés, initialement annoncés pour le printemps 2008, devraient finalement sortir d'ici la fin de l'année... « Il apparaît évident que nous vivons en ce moment une période charnière pour l'ANC, admet Jean-Marc Vauthier de l’Agence de l’eau Rhin-Meuse. Il est facile de comprendre que les professionnels et les particuliers se sentent un peu perdus devant le nombre de textes relatifs à l'ANC ». Perdus et agacés, voilà ce qui ressort des discussions sur le terrain ou des blogs. La nécessaire refonte de la réglementation fait craindre avant toute chose des réhabilitations ou des mises aux normes coûteuses de systèmes parfois déficients, souvent vétustes, ou simplement mal posés à l’origine.
C'est pourquoi, dans le cadre des réhabilitations, les SPANC doivent faire preuve, en collaboration avec les bureaux d’études, de la plus grande souplesse, afin de permettre l'adaptation la moins contraignante pour l’usager en fonction des spécificités de sa parcelle. Ce n’est malheureusement pas toujours le cas avec des SPANC qui n'imaginent pas possible la moindre adaptation, pourtant presque toujours indispensable, pour que la réhabilitation de son ANC soit bien vécue par l'usager. « Il est beaucoup plus important d'améliorer la situation sanitaire et environnementale d’une parcelle grâce aux évolutions techniques validées par un retour d’expérience, tant in situ que sur plateformes d’études, plutôt que d’exiger une rigueur réglementaire excessive bloquante », estime Christine Bérard, responsable du bureau d’études CB Conseil.
Des généralités qui font consensus
Aujourd’hui et sans doute pour quelques mois encore, l’assainissement non collectif est régi par l’arrêté du 6 mai 1996. Il est défini comme « tout système d’assainissement effectuant la collecte, le prétraitement, l'épuration, l'infiltration ou le rejet des eaux usées domestiques des immeubles non raccordés au réseau public d’assainissement ». Un “système” qui obéit donc à de nombreuses obligations, à commencer par celles régissant son emplacement sur la parcelle de terrain. Le dispositif de traitement doit être éloigné d’au moins :
- 5 mètres de l'habitation
- 3 mètres des limites de la propriété
- 3 mètres de toute plantation
- 35 mètres d'un puits ou d'un point de captage.
En outre, il faut veiller à ce que le dispositif ne soit pas situé sous des zones de circulation ou de stationnement de véhicule. Son accès doit par ailleurs rester totalement libre. Le prétraitement recouvre à la fois l’éventuel bac dégraisseur (qui doit être situé à moins de 2 mètres de l'habitation), le préfiltre (qui est d’ailleurs généralement intégré dans les fosses septiques), la fosse septique toutes eaux (placée à 10 mètres maximum de l'habitation), ou le « dispositif aérobie », c’est-à-dire la microstation d’épuration. En effet, si ce dispositif est accepté par la réglementation, il ne l’est pour le moment que comme prétraitement. Il faut donc lui adjoindre, pour suivre la réglementation à la lettre, comme pour la fosse septique, un système épuratoire complémentaire.
Ce système épuratoire dépend de nombreux facteurs, à commencer par la nature et l’inclinaison du sol, ainsi que de la surface disponible pour l’implantation du dispositif. Une étude pédologique est donc dans bien des cas le préalable indispensable au choix de la bonne filière de traitement. « La nouvelle loi sur l’Eau et les Milieux Aquatiques permet aux collectivités de rendre cette étude obligatoire »
Hubert Willig, Président de l'IFAA*: « La France sera bientôt dotée d’un parc exemplaire en Europe et dans le monde »
L'eau, L'industrie, Les Nuisances : le secteur de l'assainissement non collectif vit depuis plusieurs mois dans l'attente de la refonte de l'arrêté du 6 mai 1996. Initialement prévue pour la fin 2007, elle n’est attendue qu’actuellement fin 2008. Qu’en est-il exactement?
Hubert Willig : En matière de réglementation, il faut, en France, savoir être patient. Nous pouvons sans grande difficulté continuer à vivre avec les dispositions en vigueur. En effet, l’assainissement non collectif est une profession déjà bien encadrée, tant au niveau réglementaire qu’au niveau normatif. Elle bénéficie depuis une bonne décennie de tous les textes qui lui sont indispensables pour exister. Certes, la LEMA du 30 décembre 2006 nécessite une adaptation des textes en vigueur, et les trois textes en préparation qui devront abroger l'arrêté du 6 mai 1996 apporteront ces réponses. Il faut se souvenir que nous avons attendu treize ans pour modifier et adapter l'arrêté de mars 1982 et que la rédaction imparfaite de l'arrêté du 6 mai 1996 a pris près de quatre ans. Il n'y a donc pas de quoi s’alarmer. Ce sont surtout les candidats potentiels à une prise de parts de marché qui s’inquiètent. Ils y voient un blocage, mais ce n’est que le respect de la procédure qui retarde l'échéance de la publication. Pour aller plus vite, il suffisait de conserver l'arrêté du 6 mai 1996 et de modifier l'article 12. De plus, les nouveaux textes doivent impérativement répondre au mandat de la LEMA, d’où un travail important des ministères concernés pour trouver un compromis acceptable par tous. Sachons être patients et le marché s'adaptera aux nouvelles exigences. L'IFAA œuvre dans le domaine réglementaire pour y apporter son expertise et ainsi contribuer à maintenir un ANC de qualité.
E.L.N. : Que faut-il attendre de cette évolution réglementaire?
H.W. : Cette nouvelle réglementation, ou plutôt ces trois nouveaux arrêtés devront clarifier les données de l'ANC. Mais attention, il ne faut pas voir dans ces textes l’ouverture à du « tout et n’importe quoi ». En effet, le marché s’adaptera aux nouvelles techniques dès lors que celles-ci auront été testées et approuvées par un protocole d’évaluation. Il faut également reconnaître que des textes réglementaires ne pourront jamais répondre à tous les cas de figure qui se poseront en ANC. Il faut rester conscient que certaines attentes ne pourront être satisfaites. Il existera toujours des cas qui devront faire l'objet d’une étude spécifique et donc dérogatoire aux textes en vigueur. Le marché évoluera, mais va également se clarifier et s’auto-épurer des produits fantaisistes qui n’ont pas leur place en ANC et qui nuisent à son image de marque. La France ne pourra accepter n’importe quelle filière sous prétexte que ce marché est important. Il faut éviter de retomber dans les travers du début des années 1990 où les micro-stations de qualité avaient souffert du manque de sérieux de certains fabricants arrivant sur le marché.
E.L.N. : L'IFAA a joué un rôle très actif dans la révision de la norme XP DTU 64-1 et encore dans le marquage CE obligatoire des fosses et des micro-stations. Quel bilan en tirez-vous aujourd'hui?
H.W. : L'IFAA a joué un rôle très actif dans la première rédaction de la norme initiale de janvier 1992, mais a aussi été le déclencheur des deux révisions de cette norme. En effet, la norme XP DTU 64-1 a été révisée deux fois afin de l’adapter à l’évolution de l'ANC. Il en est de même pour la normalisation européenne en ANC ; l'IFAA y joue un rôle majeur et assure depuis le démarrage des travaux européens de normalisation, il y a près de vingt ans, un rôle important et soutient l’animation française du groupe de travail WG41. La norme expérimentale XP DTU 64-1 est un document de référence et le marquage CE des fosses depuis avril 2006, puis en 2009 celui des micro-stations est une avancée majeure. Nous rencontrons encore des difficultés par rapport à des pays voisins dont sont originaires la plupart des intervenants potentiels sur le marché français. Certains pays n’exigent pas encore le marquage CE des fosses septiques. Quant au marquage CE des micro-stations, les essais obligatoires exigés par la norme EN 12566-3 ne sont pas – ou n’ont pas été – effectués avec une donnée d'entrée des eaux usées domestiques brutes trop basse, à savoir inférieure à 300 mg/L de DBO5. Il faudra exiger pour l'installateur ou l'utilisateur les rapports d’essai de ces micro-stations pour pouvoir déterminer leur capacité épuratoire en présence d’eaux usées domestiques brutes équivalentes. L'IFAA œuvre pour que soient reconnus les produits marqués CE et ayant passé avec succès les tests exigés par les normes en vigueur.
E.L.N. : Nombre d’élus estiment qu'il leur sera difficile de tenir l'échéance 2012 sur l’obligation de contrôle des installations. Qu’en pensez-vous?
H.W. : Nous reconnaissons tous que l’échéance de 2012 est trop proche pour satisfaire à toutes les exigences en matière d’ANC. Toutefois, nous pensons que l'ANC poursuit depuis de nombreuses années une révolution et que cette révolution est en marche et que nul ne pourra interrompre cette marche vers le progrès et une image de marque de l'ANC français. Il est certain que les réhabilitations auront lieu, mais nous manquons cruellement de main-d’œuvre qualifiée pour atteindre les objectifs de 2012. Le renouveau de l'ANC est programmé, il suffira de respecter toutes les échéances selon nos capacités annuelles. Nous avons pris du retard dans la création des SPANC avant fin 2005, le retard semble se réduire et il y a lieu de croire que l’ensemble des collectivités seront bientôt pourvues de SPANC. Toute la profession est convaincue que, malgré le dépassement de l'échéance fixée, la France sera bientôt dotée d’un parc d'ANC exemplaire en Europe et dans le monde. La France est souvent citée en exemple et a déjà démontré qu'elle avait un rôle important à tenir en matière d’ANC. Nous n'avons pas de leçon à recevoir dans ce domaine.
E.L.N. : On assiste à un développement important du marché de l'ANC en France. Qu’en pensez-vous?
H.W. : C'est un signe que le marché de l'ANC français est important à leurs yeux et qu’ils y retrouvent leurs intérêts. L'IFAA a beaucoup œuvré au développement de l'ANC en France et cela attire forcément des convoitises. C’est à l'IFAA de faire respecter les règles en vigueur sur le territoire et de signaler tous les dérapages possibles ou constatés. La concurrence fait progresser une profession si elle est loyale et saine. Cela stimule les entreprises innovantes et les incite à trouver de nouvelles solutions adaptées à l’ANC et aux exigences de développement durable en matière de protection de l'environnement. Il n'y a de place que pour les produits et les entreprises respectant la règle déontologique fixée par la profession.
* Industriels Français de l’assainissement autonome
afin d’apporter au pétitionnaire toutes les garanties, compétences et assurances qu’en tant que consommateur, il est en droit d’attendre. Cette étude doit être réalisée par des bureaux d’études spécialisés et indépendants respectant à minima le cahier des charges de l’annexe C du DTU 64-1 ou celui de notre syndicat », souligne Franck Wanert, Président du Syndicat National des Bureau d’Études en Assainissement (SYNABA).
Si le sol est très perméable (mais pas trop), un ouvrage fait de tranchées d’épandage est en général conseillé : il s’agit de canalisations de dispersion placées dans des tranchées ; il y a alors infiltration lente des effluents dans le sol, dont les micro-organismes assurent l’épuration.
Avec un sol sableux, il peut être difficile de creuser des tranchées. Elles sont alors remplacées par un lit d’épandage constitué de graviers.
Dans le cas d’un sol peu perméable avec un sous-sol perméable, il est recommandé d’installer un filtre à sable non drainé qui peut être totalement ou partiellement encastré en fonction des caractéristiques du sol. L’épuration se fait ainsi par le sable et les micro-organismes qu’il contient. Il faut ensuite trouver un exutoire pour évacuer l’effluent (le rejet en milieu superficiel est par exemple soumis à autorisation préfectorale).
Lorsque le sous-sol est imperméable, le filtre à sable installé doit être drainé. Il assure toujours l’épuration mais l’évacuation de l’effluent se fait vers un exutoire dans le milieu hydraulique superficiel.
Enfin, avec un sol difficilement exploitable, en présence d’une nappe phréatique à faible profondeur par exemple, il faut envisager la construction d’un tertre d’infiltration. Un matériau sableux assure l’épuration, et la dispersion de l’effluent traité se fait par le sol en place. Si cette solution peut paraître disgracieuse, elle n’en est pas moins délicate à mettre en œuvre, et nécessite une étude sérieuse de la parcelle, tant dans ses dimensions que dans son inclinaison.
Tous ces ouvrages sont au fond très classiques, et c’est bien ce qui fait leur succès encore aujourd’hui auprès des services publics d’assainissement non collectif. « Il faut
Comparaison des 8 filières du CSTB (Étude Veolia Eau)
Filtre à sable vertical DTU 64-1 | Filtre à sable roseaux Autoépur SINT | Filtre à sable Septodiffuseur Sebico | Filtre à zéolithe Eparco | Filtre à coco Ecomix Premier Tech | Filtre textile Ecoflex Premier Tech | Culture fixe Oxyfix | Culture libre Eloy | Filtre outre Bioralit | |
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Difficulté de réalisation | Très complexe >2 | Très complexe >2 | Très complexe >2 | Complexe 2 | Facile 1 | Moyenne 1 | Très facile <1 | Très facile <1 | Très facile <1 |
Durée (j) | 50 | 55 | 23 | 27 | 20 | 23 | 9 | 10 | 10 |
Surface (m²) | 250 | 200 | 150 | 60 | 60 | 60 | 30 | 30 | |
Emprise au sol (m²) | 50 | 50 | 23 | 23 | 20 | 25 | 9 | 10 | 5 |
Rendement MES (mg/l) : 95 | 98 % | 97 % | 95 % | 95 % | 98 % | 96 % | 95 % | 87 % | 96 % |
DBO totale (mg/l) : 35 | 94 % | 94 % | 89 % | 88 % | 92 % | 92 % | 88 % | 72 % | 92 % |
DBO₅ (mgO) : 25 | 98 % | 98 % | 96 % | 96 % | 98 % | 98 % | 98 % | 96 % | 98 % |
Concentration moyenne MES (mg/l) | 7 ± 6 | 9 ± 9 | 15 ± 10 | 14 ± 9 | 7 ± 3 | 13 ± 11 | 16 ± 12 | 40 ± 30 | 14 ± 9 |
DBO totale (mgO/l) | 6 ± 4 | 4 ± 3 | 12 ± 5 | 11 ± 5 | 5 ± 3 | 8 ± 3 | 19 ± 9 | 45 ± 33 | 7 ± 3 |
(1) Limite fixée par l’arrêté : MES (mg/l) : 35 ; DBO totale (mgO/l) : 125 ; DBO₅ (mgO/l) : 25
Avant tout être pragmatique, affirme Jean-Marc Vauthier. L’installation d’une fosse suivie de ce genre de traitements est parfaitement maîtrisée par un grand nombre de professionnels. L'entretien est également plus simple. C'est donc ce système qu’il faut préconiser dès que c'est possible, soit dans 80 % des cas. Cependant, il se refuse à tout dogmatisme : « bien sûr, il ne faut pas se limiter par principe. Certains sols empêchent la pose d’une fosse classique. La solution se trouve alors souvent dans des filières plus innovantes ».
Si l’on ne dispose pas des 200 m² de surface que nécessite en moyenne l’implantation d'une filière traditionnelle, si la nature des sols, ou encore la pente ne le permettent pas, il est possible d’opter pour les solutions dites compactes d'une efficacité au moins équivalente à ces filières qui ont été développées ces dernières années : Eparco Assainissement avec sa filière compacte Eparco, Simop avec Zeomop, Premier Tech Water et sa gamme de filtres à tourbe, Sebico avec le Septodiffuseur, Assainissement Autonome/Biotys avec ses filières Biocompact et Biopack, Stoc Environnement avec Zéofiltre ou encore Ouest Environnement avec son Compacto-diffuseur.
Une autre solution consiste à opter pour d'autres filières qui n’attendent qu'une évolution de la réglementation pour arriver sur le marché.
Les nouvelles filières : en attente d’une évolution de la réglementation
En effet, comment faire lorsqu’on appartient à la catégorie des 20 % « à problème » ? Difficile d’exproprier le voisin ou de déplacer un puits réservé à l'alimentation en eau potable... Qui plus est, ces fameuses filières innovantes sont parfois bien plus « vertes » que les filières classiques.
Le cas des microstations d’épuration est assez révélateur. Qu’elles soient à boues activées ou à culture fixée, elles sont conçues pour épurer l’eau grâce à des bactéries aérobies. L’ajout d'une filière de traitement en aval semble superflu, bien qu'il soit obligatoire puisque la réglementation classe encore, en France, les microstations parmi les dispositifs de prétraitement.
Est Environnement commercialise une microstation de type boues activées actuellement en phase de certification (marquage CE selon la norme 12566-3) au CERIB. « Comme toutes les microstations présentes sur le marché, elle est considérée comme un dispositif de prétraitement au même titre que les fosses toutes eaux et il faut donc lui adjoindre un lit filtrant pour le traitement, explique-t-on chez Est Environnement. C'est paradoxal, car la qualité de rejet est de très loin supérieure. Nous espérons, sans trop y croire, que dans un avenir proche il sera possible de s'affranchir du lit filtrant, diminuant ainsi le coût global de l’installation dont le surcoût est occasionné par le lit d’épandage. Il existe déjà dans les textes, de manière dérogatoire, la possibilité de s'affranchir du lit d’épandage mais uniquement lorsque la surface du terrain ne le permet pas ».
Yannick Mercier, de l'Agence de l'eau Loire-Bretagne, explique ainsi ce paradoxe : « les microstations sont vraiment intéressantes, nous assistons à un foisonnement d’innovations. Mais cette filière est encore récente. Nous manquons à la fois d'expertise et de recul pour évaluer son pouvoir épurateur. Nous ne pouvons que poursuivre les recherches, en attendant des résultats sûrs ». L’enjeu pour le particulier est de savoir si l'investissement dans un autre dispositif de traitement est vraiment nécessaire : sans celui-ci, la microstation revient moins cher que la filière fosse + traitement ; avec, elle revient beaucoup plus cher...
Concepteurs « à l'heure actuelle », explique Olivier Bénézech de la société I.Novatis qui commercialise la microstation Epurtis, « c'est de convaincre que telle station épure mieux que l'autre, pour la vendre avec l'argument qu'elle ne nécessite aucun traitement supplémentaire. Mais soyons clairs : chaque installation doit faire l'objet d'un diagnostic du site d'implantation, et même une microstation peut avoir besoin d’une infiltration par le sol du type filière classique. Le vrai problème est le type d’exutoire et la bonne taille, en fonction de critères techniques. Malheureusement, il existe trop peu de professionnels qui ont ces connaissances, et quand ils essaient de les faire valoir, la loi ne les y autorise pas. Ne serait-ce que parce que cette qualité dépend aussi du comportement des utilisateurs : les produits ménagers, les médicaments qui finissent au fond du lavabo, tout cela influe forcément sur les résultats, et nous ne pouvons encore les quantifier quelle que soit la filière, classique ou alternative. Un avantage aux filières alternatives : on peut contrôler facilement l'effluent traité qu’elles rejettent dans le milieu naturel ».
Veolia Eau s'y essaie pourtant, à Nantes avec le CSTB, en testant en parallèle huit filières de traitement, dont six innovantes, dans des conditions expérimentales dites « sollicitantes ». Objectif : connaître et comparer les performances mais aussi acquérir un savoir-faire sur leur installation et sur les tâches à effectuer pour leur bon fonctionnement. En effet, garantir les performances d'un dispositif suppose de pouvoir garantir qu'il ait bien été installé et entretenu. Or, trop souvent, le constat de terrain montre que ce n’est pas le cas et qu'une professionnalisation de ces tâches est nécessaire.
Huit filières ont été testées dans un espace-temps commun, sur le même site avec les mêmes charges organiques et hydrauliques. Le suivi journalier de l'exploitation de chaque filière a été assuré par la même équipe durant 40 semaines. La plupart des unités testées ont satisfait en phase 1 les critères fixés. Toutefois, certaines performances sont moins satisfaisantes que d'autres et la poursuite des essais devrait donner des perspectives d’évolution qui permettront d’étayer la pérennité des performances.
Depuis l’automne 2007 et en partenariat avec l’Agence de l’Eau Adour Garonne, Veolia Eau teste également treize dispositifs d’assainissement individuel dans 55 sites dans le Tarn, au titre de la réhabilitation ou d'une construction neuve. Le fonctionnement de ces dispositifs ainsi que la qualité de l'eau traitée seront suivis pendant cinq ans. Complétant ainsi les résultats obtenus au CSTB de Nantes sur de nouveaux procédés, ces expérimentations « in situ » permettront de mieux évaluer la pérennité.
des filières dans des conditions réelles d'utilisation et de pouvoir, au final, mieux guider le choix des filières en fonction des paramètres les plus pertinents,
L'offre en matière de microstations est abondante. Aquia Environnement, Eau-clin, Eloy, EOG Technology, I Novatis, ISEA SpA, Sebico, Franceaux, Neve Environnement, Obio Environnement, Saint Dizier Environnement, Simop, Stoc Environnement, Sotralentz et VB Equipement proposent déjà une vaste gamme de microstations fonctionnant sans nuisance et affichant des performances honorables : DCO < 90 mg/l, DBO₅ < 25 mg/l, MES < 15 mg/l.
Ces stations qui sont proposées en polyester, polypropylène ou encore en béton ont fait leur preuve. Elles fonctionnent sur le principe des boues activées ou des cultures fixées. Ainsi, l'Oxyfix C90® d’Eloy, distribuée en France par la société Loira, met en œuvre le principe de la culture fixée immergée aérée. Dans le premier compartiment, appelé décanteur primaire, toutes les eaux usées sont récoltées. Les boues primaires décantent dans la partie inférieure et sont prétraitées par des bactéries anaérobies. Un chapeau se forme à la surface du compartiment, faisant également office de séparateur de graisses. Les influents sont conduits directement sous ce chapeau grâce à un coude plongeant et ventilé. Les eaux prétraitées arrivent ensuite gravitairement au fond du deuxième compartiment, le réacteur biologique. La pollution résiduaire qu'elle contient est dégradée par des bactéries aérobies, alimentées en oxygène par un surpresseur d’air. Celui-ci est raccordé à des diffuseurs d’air fines bulles incolmatables positionnés dans la partie inférieure du compartiment. Les bactéries se fixent sur un support immergé en polypropylène recyclé. Dans le troisième compartiment, le clarificateur, les boues secondaires se concentrent dans le cône de décantation en partie inférieure du compartiment. Un système d’air-lift recircule les boues dans le décanteur primaire. L'eau épurée quitte alors gravitairement la station par une sortie haute. Selon la quantité d'influent à traiter, de 5 à 300 EH, les trois compartiments de l’Oxyfix C90® se répartissent dans une, deux ou trois cuves de 4 500 à 20 000 litres, ou dans une grande cave en béton compartimentée en trois parties.
Epur développe de son côté sur le marché français un programme de stations d’épuration baptisé Biofrance et spécialement adapté aux normes de rejet prescrites. Ces microstations sont disponibles en cuves béton (Biofrance) ou en cuves plastique (Biofrance Plast).
Toutes sont de type « culture fixée immergée aérobie » avec supports de 100 m²/m³.
La station est composée de trois chambres : une chambre de prétraitement assurant les fonctions d'une fosse toutes eaux ; une chambre de digestion aérobie équipée des structures de lit fixe immergé incolmatables avec oxygénation optimisée par micro-bullage et une chambre de post-décantation destinée à retenir les parties minéralisées résiduaires.
Ces stations, testées sur plate-forme accréditée selon norme NF EN 12566-3, se caractérisent par des performances épuratoires satisfaisantes, une simplicité de fonctionnement (simple remplissage d’eau claire et mise en service du surpresseur), une simplicité d’équipements (pas de pompe, pas de recirculation, pas de régulation), aucun appareil électrique embarqué dans la station (juste un surpresseur placé en cave, buanderie ou garage) et une simplicité de mise en œuvre (station mono-cuve placée…)
en moins d'une journée).
ISEA (Société italienne implantée en France) propose également des microstations utilisant la technologie des boues activées faible charge avec aération par diffuseurs d’air incolmatables. Actuellement en expérimentation au CERIB à Épernon (28), ISEA a particulièrement mis l’accent sur la simplicité et la fiabilité de fonctionnement, condition essentielle à des installations destinées à des particuliers, ainsi que sur la nécessité d’installer un piège à boues (ou filtre anticolmatant) en aval de la microstation. Cet ouvrage d’affinage constitué d’éléments en polypropylène permet d’améliorer les qualités de rejet en évitant les départs de boues vers l’exutoire occasionnés par des pointes de débit très importantes sur ces petites unités. Ce piège à boues permet également le stockage des boues entre deux opérations de vidange de l'installation.
Pour fonctionner convenablement, ces microstations doivent faire l’objet d’une installation irréprochable et surtout d’un entretien suivi tout au long de leur exploitation. « Ces dispositifs nécessitent impérativement, contrairement aux filières classiques, un entretien suivi. Il faut être conscient de cette contrainte » souligne Germain Pavie, directeur de Pavie Assainissement, une entreprise implantée dans l’Eure spécialisée dans la mise en œuvre et la rénovation de systèmes d’assainissement non-collectif.
Quant aux lits de roseaux, il s'agit d’un débat prompt à égarer encore un peu plus les usagers. Acceptés comme méthode d’épuration dans l'assainissement collectif, donc validés, ils ne peuvent plus être implantés chez les particuliers. « En fait, rien ne s'oppose techniquement à leur mise en place, admet Jean-Marc Vauthier. Il s'agit plus de questions sanitaires liées à un épandage d’eaux usées à l'air libre. On peut parler des nuisances dues aux moustiques, ou aux odeurs, sans compter les problèmes de sécurité des enfants qui joueraient autour... ».
Reste que ces objections se réfèrent essentiellement aux filtres plantés de roseaux alimentés en eaux usées brutes. Les réticences de l'administration à admettre une filière “eaux brutes” chez les particuliers ont été anticipées par SINT qui a développé la filière des filtres plantés de roseau Autoépure® commercialisée par la société Epurnature et qui ne fonctionne pas en eaux brutes. L’alimentation s’effectue à partir d’une couche de galets couverte par du compost après une décantation dans une fosse toutes eaux. Elle n’est donc pas à l’air libre. Par ailleurs, l’exploitation de filtres plantés de roseaux Autoépure® a été simplifiée par rapport aux stations des filtres plantés de roseaux pour les collectivités : il n’y a pas d’intervention pour faire alterner des lits et le filtre planté Autoépure® est conçu de façon à ce qu'une réserve hydrique dans la zone saturée au fond du filtre permette aux roseaux et à la faune microbiologique de supporter plusieurs semaines d’absence des habitants raccordés, ce qui est un avantage notable par rapport à la plupart des autres filières d’assainissement non-collectif.
Ces nouvelles filières ne satisfaisant pas (encore ?) à la réglementation, faut-il penser que les particuliers qui vivent des situations délicates sont voués au déménagement ? Heureusement non. « Il ne faut
Il ne faut surtout pas hésiter à s’adresser au Service public d’assainissement non collectif dont dépend l’habitation, tempère Jean-Marc Vauthier. Lorsque l’ANC est particulièrement compliqué à mettre en place, le SPANC peut attribuer des dérogations et aider à la demande d’une autorisation préfectorale. Quoi qu’il en soit, il est toujours apte à renseigner les usagers, c’est son rôle. Et il faut partir du principe qu’il y a toujours une solution.
Reste que le travail est énorme et qu’il faudra du temps pour faire de l’assainissement non collectif un assainissement fiable et durable.
Des enjeux considérables
Une enquête réalisée par TNS Sofres à la demande d’Eparco Assainissement révèle que les élus sont globalement conscients de l’importance des enjeux liés à l’assainissement non collectif mais qu’ils sont nombreux à douter de leur capacité à pouvoir y faire face sans aide extérieure. De gros enjeux qui concernent plus directement les professionnels du secteur se profilent.
Le premier concerne la formation et la spécialisation des entreprises de pose. « La réhabilitation des installations d’ANC se fait au rythme de 1 % par an, soit 50 000 réhabilitations par an, souligne Stéphane Bavavéas, directeur général d’Eparco Assainissement. Pour atteindre un rythme de 5 % l’an, soit 250 000 installations réhabilitées chaque année, il faudra intensifier très rapidement la formation de nombreux professionnels. C’est un vrai défi à relever. »
Le second enjeu est celui de la professionnalisation des structures de contrôle.
Une estimation de l’Agence de l’eau Adour-Garonne fait apparaître que de 10 à 15 % des systèmes d’ANC devraient être réhabilités immédiatement et que 80 % du parc serait obsolète. « La montée en puissance des SPANC est donc un enjeu crucial », estime Stéphane Bavavéas.
Autre défi, une meilleure prise en compte des besoins du particulier qui souhaite des systèmes plus performants et plus simples à entretenir.
Deux problématiques montent en puissance : « La place qui se fait plus rare et appelle des systèmes plus compacts et le souhait de valoriser son habitat », indique Stéphane Bavavéas.