Apprécier l'impact des émissions odorantes d'un site présente plusieurs difficultés. Le nombre de sources, leur agencement, la composition et la cinétique de leurs émissions sont autant de facteurs délicats à maîtriser et dont la combinatoire est des plus incertaine. Or, en dehors des démarches opérationnelles sur les équipements visant à développer des actions correctives qui peuvent se faire source par source, il est indispensable de pouvoir faire un bilan émissif d'un site dans sa globalité et de connaître les risques de pollutions osmiques qu'il peut faire courir à son environnement. Un tel projet suppose, après un inventaire très précis de tous les points de rejets atmosphériques, de pouvoir accéder à une connaissance des émissions de chaque source sous une forme homogène à toutes les sources, pourtant de nature très variée. Il convient ensuite de rechercher un protocole d'assemblage sensé, même s'il doit rester approximatif dans un premier temps. Le présent article propose une procédure en ce sens mais soumet, aussi, plusieurs programmes de recherche destinés à lui apporter une certaine légitimité.
,Université du Havre et IAP-Sentic
Apprécier l’impact des émissions odorantes d’un site présente plusieurs difficultés. Le nombre de sources, leur agencement, la composition et la cinétique de leurs émissions sont autant de facteurs délicats à maîtriser et dont la combinatoire est des plus incertaines. Or, en dehors des démarches opérationnelles sur les équipements visant à développer des actions correctives qui peuvent se faire source par source, il est indispensable de pouvoir faire un bilan émissif d’un site dans sa globalité et de connaître les risques de pollutions osmiques qu’il peut faire courir à son environnement.
Un tel projet suppose, après un inventaire très précis de tous les points de rejets atmosphériques, de pouvoir accéder à une connaissance des émissions de chaque source sous une forme homogène à toutes les sources, pourtant de nature très variée. Il convient ensuite de rechercher un protocole d’assemblage sensé, même s’il doit rester approximatif dans un premier temps.
Le présent article propose une procédure en ce sens mais soumet, aussi, plusieurs programmes de recherche destinés à lui apporter une certaine légitimité.
Mesurer les émissions odorantes à la source est bien entendu la manière la plus logique et la plus pertinente d’apprécier les risques, d’en rechercher les causes et de suivre les niveaux de contamination de l’air. [1] Mais un site, qu’il soit industriel, agricole ou collectif, est généralement la conjugai-
Mots clés : réglementation, compostage, odeur, nuisance, rejet atmosphérique, profil olfactif, olfactométrie.
Son plus ou moins complexe de différentes sources. Si l’on cherche à connaître son importance par rapport à d’autres sites, estimer son impact ou encadrer réglementairement le niveau de ses émissions, il convient de prendre en considération la synergie des différentes sources présentes sur ce site. Est-il pertinent de traiter isolément chaque source ou devons-nous en rechercher une résultante ? Dans ce dernier cas, comment l’obtenir et la suivre ? [2] Quels paramètres interviennent sur les pollutions osmiques et comment les réglementations peuvent-elles les prendre en charge ?
Pour traiter de ce sujet, la signature de l’arrêté du 22 avril 2008 (publié au JO du 17 mai 2008) fixant les règles techniques auxquelles doivent satisfaire les installations de compostage ou de stabilisation biologique aérobie soumises à autorisation en application du titre premier du livre V du code de l’environnement, nous a motivé à prendre pour exemple une plate-forme de compostage qui rassemble, en effet, un bon échantillonnage des difficultés qu’il est possible de rencontrer. Mais les réflexions peuvent s’appliquer à bien d’autres unités.
Le compostage fait partie des procédés reconnus comme de bons pourvoyeurs d’odorants [3]. Ces composés sont le fruit naturel de l’action de micro-organismes sur la masse biologique qui leur est confiée. C’est pourquoi le choix de l’implantation d’une plate-forme doit être minutieux pour que ses émissions ne puissent atteindre le voisinage et, à l’inverse, son espace d’impact ne doit pas se laisser grignoter par l’arrivée d’habitations, même en implorant les bonnes volontés de la météorologie.
« Le compostage est un procédé biologique aérobie contrôlé avec montée en température, qui permet l’hygiénisation et la stabilisation par dégradation/réorganisation de la matière organique et conduit à l’obtention d’un compost utilisable comme amendement ou engrais organique ».
Le compostage, proprement dit, se fait donc par voie aérobie, mais il se développe des techniques de méthanisation par voie anaérobie, nécessairement réalisées dans des espaces tout à fait confinés.
Selon les cas, il traite différentes matières organiques parmi lesquelles nous pouvons citer :
- - les déchets verts comprenant principalement les tontes de gazon, les tailles de haies ou d’arbres et des végétaux divers ;
- - la partie fermentescible sélectionnée des ordures ménagères et denrées non consommables ;
- - des boues de station d’épuration ;
- - des déchets organiques industriels ;
- - des rejets agricoles.
Chaque site a mis au point des procédures adaptées à la nature et l’importance de la charge traitée, aux conditions climatiques et aux investissements effectués. Ceci donne un certain nombre de variantes que les opérateurs doivent, en plus, adapter ponctuellement à chaque évolution de la matière première ou de la météorologie. Cependant, nous retrouvons généralement les étapes suivantes :
- - la préparation des andains (ou autre format) : broyage, mélange, disposition après d’éventuelles phases de stockage ;
L’article 2 de l’arrêté du 22 avril 2008 fixant les règles techniques auxquelles doivent satisfaire les installations de compostage ou de stabilisation biologique aérobie soumises à autorisation en application du titre premier du livre V du code de l’environnement.
- - une fermentation primaire demandant une bonne aération pour les procédés aérobie. L’aération est soit « naturelle » en faisant appel à des retournements, soit forcée en aspirant ou en insufflant de l’air au travers de la masse. Elle peut durer de deux à quatre semaines selon les procédures et les conditions ;
- - une phase de maturation. Elle dure, en moyenne, de trois à dix semaines ;
- - la finalisation comprenant le criblage, le stockage et l’expédition.
Enfin, il convient de noter qu’il existe deux conceptions de sites de compostage :
- - ceux qui sont entièrement confinés, sur lesquels les observations se limiteront à la cheminée d’aération du bâtiment, généralement après le passage des effluents gazeux dans un dispositif de désodorisation, ceci bien entendu dans la mesure où d’autres sources ne sont pas identifiées, comme des ouvertures des portes du bâtiment, l’évacuation des lixiviats et autres phénomènes hors confinement ;
- - ceux qui sont totalement ou partiellement à l’air libre, présentant des sources multiples et complexes et sur lesquels portera surtout notre attention dans le présent article.
Les principales sources d’odorants
L’odorité d’une plate-forme de compostage est la résultante complexe de différents points d’émission. Nous allons suivre la production d’un compost en constatant qu’elle offre à notre regard presque tous les types possibles de sources d’odorants [4]. Pour l’estimer, il convient donc tout d’abord de rechercher ces sources et d’en apprécier, pour chacune, le potentiel d’émission et les évolutions dans le temps. L’article 26 de l’arrêté du 22 avril 2008 demande d’ailleurs très justement qu’un tel inventaire soit réalisé pour la préparation de l’étude d’impact. Ce travail doit être systématique, réalisé sur le terrain (ou sur un site équivalent pour un projet), durant une période suffisante pour capter toutes les phases du cycle de compostage. Mais il doit intégrer également :
- - une connaissance du cycle annuel, également indispensable car la nature et les quantités d’intrants évoluent en cours d’année.
Le protocole d’« audit olfactif » développé par l’AP-Sentic correspond bien à la première partie de cette démarche.
née ainsi que les conditions météorologiques.
- un historique, pour ne pas omettre des épisodes particuliers même s’ils sont occasionnels.
Des observations préalables doivent permettre d’apprécier une contribution relative de chaque source à l’odorité globale du site afin de guider par la suite les analyses plus fines.
Le flow-sheet des matières en compostage est relativement simple même s’il admet différentes variantes. Il convient de bien le connaître et de lui superposer le diagramme de l’organisation des différentes séquences et leur durée.
L’arrivage et le stockage avant traitement
Les véhicules, apportant la matière organique, empruntent des voies qui peuvent être bordées d’habitations ou d’autres espaces accessibles au public. Si cette matière émet elle-même des odorants, le transport va très largement augmenter la « zone d’impact apparente » de la plate-forme. La plate-forme n’est pas directement responsable de telles situations mais elle peut exiger des précautions sur les procédures de transport (logistique, bennes…) et surtout sur l’état de la marchandise, sachant que sa fermentation peut commencer très vite après la production et dès la collecte. Les ambiances chaudes et humides aggravent le phénomène.
À l’arrivée sur le site, toute manipulation accroissant ou renouvelant la surface d’échange avec l’air ne pourra que favoriser la libération de composés volatils.
Ainsi le « bennage » puis le déplacement au moyen de godets vont faciliter le départ d’odorants, renouvelé à chaque reprise de la matière.
Parfois la matière organique est amenée à stationner quelque temps. Ce laps de temps supplémentaire va, lui aussi, favoriser des fermentations en conditions de mauvaise aération, générant des émissions supplémentaires lors de la reprise du stock.
Le broyage, le mélange et la préparation des andains
Toute manipulation de la matière organique provoque un afflux de composés odorants dans l’air. Le broyage ajoute la création de nouvelles surfaces, de forts échauffements (certes très ponctuels) et la libération de matières fermentescibles, celles-ci ne pouvant qu’accroître dans un temps limité le développement des phénomènes de fermentation. Si le contact avec l’air favorise l’action de germes aérobies fournisseurs de composés généralement moins odorants, il favorise aussi le départ des composés volatils préalablement formés, en conditions anaérobies. Par exemple, des tontes de gazons peuvent avoir été stockées quelques jours en sacs plastiques par un particulier avant la remise à la collecte. Celle-ci peut le garder encore quelques jours avant de l’apporter, encore tassé, à la plate-forme de compostage. Nous pouvons ainsi nous retrouver avec de la matière en fermentation anaérobie depuis une semaine et donc riche en composés odorants puissants. Toutes les manipulations ultérieures iront dans le même sens, créant alors des pointes d’émission d’odorants, enrichissant pour quelques heures l’air passant au-dessus du site.
La ventilation des bâtiments ou des tunnels de confinement
Sur certaines installations, une fois l’andain (ou autre forme) constitué, le premier stade de fermentation est réalisé dans des ambiances confinées, généralement conjuguées à une ventilation forcée. Le confinement est obtenu soit à l’intérieur d’un bâtiment soit dans un tunnel de matériau souple soit encore au moyen de bâches adaptées.
Dans ces cas, l’air ayant traversé la masse biologique, dans un sens ou l’autre, est fortement chargé de composés volatils dont des composés odorants en principe peu « soufrés réduits » si l’aération est de bonne qualité. Cette veine d’air est généralement canalisée et donc assez bien maîtrisable pour pouvoir lui appliquer un traitement de désodorisation au moyen d’un biofiltre par exemple ou, mieux, par la combinaison de plusieurs traitements en faisant précéder le biofiltre d’une tour de lavage acide. L’équipement de traitement de l’air devient alors l’émetteur de composés odorants, soit qu’il laisse passer une partie de ce qu’il a reçu, soit qu’il fournisse ses propres composés (normalement en quantité bien moindre et de nature différente).
Il existe aussi quelques sites où l’entiereté du compostage est effectuée dans des locaux fermés, ce qui simplifie la gestion des masses d’air odorant.
Les surfaces des andains
Les andains fournissent de grandes surfaces d’échange entre la matière en fermentation et l’air extérieur ; ceci est d’ailleurs la raison de leur constitution. Sans aller jusqu’au monde des fractals, cette surface est très difficile à apprécier.
Sur la forme la plus fréquente d’un prisme couché nous pouvons considérer plusieurs types de surfaces :
- l’emprise au sol : de l’ordre de 4 à 6 m de large sur plusieurs dizaines de mètres de long (50 m² par 10 m de long) ;
- les surfaces latérales : sur une hauteur maximale de trois mètres (éventuellement 5 m), la base ci-dessus définit deux rampants de 40 m² par tranche de 10 m soit 80 m² si l’on garde une section triangulaire.
Andain a une section trapézoïdale ou autre ? Toute l’étendue des surfaces et toutes les surfaces ont-elles indifféremment le même pouvoir émissif ?
- les surfaces libres de chaque particule : cette surface est fonction de la taille des particules et du foisonnement de l’andain ; elle évolue avec les phénomènes de tassement inéluctables avec le temps (annulés par un retournement quand il a lieu) et a des rendements différents en fonction de la richesse en eau. Son étendue atteint des valeurs très largement plus grandes mais tout à fait inaccessibles ;
Les productions d’odorants de ces surfaces sont elles-mêmes différentes selon :
- la facilité de migration des odorants dans la masse solide ou liquide et la vitesse de circulation des gaz entre les particules. L’importance d’une phase aqueuse va peser sur les échanges et, en particulier, ralentir l’oxygénation de la masse ;
- la nature et l’activité de la flore : la fermentation primaire, dans ses différentes phases et avec ses différentes flores, produit plus que la maturation ou les simples stockages ;
- la différence de concentration en composés odorants entre les phases liquides ou solides et la phase air. Ce Δ atteindra son apogée à chaque renouvellement de l’interface ; ainsi les opérations de retournement peuvent, sur quelques heures, libérer beaucoup plus d’odorants que le restant d’une semaine d’activité.
Bien entendu, le choix de la procédure de compostage va conditionner les capacités odorantes des andains et des différents produits [5].
Les lixiviats et les eaux de ruissellement
Le compostage a aussi pour fonction la déshydratation de la masse et une partie de l’eau est évaporée lors du processus. Mais, parfois très riche en eau, un andain peut rejeter un « jus » chargé en matière organique et, le plus souvent pour les andains à ciel ouvert, l’eau de pluie le traverse en effectuant un véritable lavage. La solution riche, ainsi produite, est elle-même fortement fermentescible et capable d’odoriser l’air soit avec des produits d’aérobiose, soit avec des produits d’anaérobiose selon que les bassins de collecte sont aérés ou non. Généralement les bassins de collecte reçoivent, en plus, les eaux de ruissellement ou de lavage, elles-mêmes plus ou moins chargées.
Le volume aqueux ainsi recueilli est parfois utilisé pour réhydrater les andains qui auraient séché trop rapidement et ainsi réactiver la flore. Généralement, cette procédure de régularisation de l’humidité entraîne ponctuellement d’abondantes émissions odorantes : la pulvérisation de gouttes constitue une rapide augmentation de surface d’échange liquide/air.
Le criblage
En fin d’opération, le criblage permet de rassembler un produit homogène et débarrassé de morceaux plus gros réutilisable comme structurant des futurs andains.
Les phénomènes sont du même type que ceux du broyage bien qu’en milieu plus sec ; cette opération est, en plus, génératrice de poussières. La masse est toutefois, à ce stade, et lorsque les opérations de compostage ont été menées à leur terme, sensiblement moins odorante. Cependant, nous avons pu noter quelquefois que, pour des raisons techniques ou économiques, cette opération était appliquée à des andains d’âge très variable et donc plus ou moins riches en composés odorants, au point de faire parfois de cette opération un point important dans les rejets odorants dans l’air de la plate-forme.
Dans certains cas, le criblage est suivi d’opérations de formulation conduisant à mélanger des composts différents pour obtenir une composition particulière ou standardisée (préparation de terreaux à applications spécifiques).
Le stockage, la manipulation et l’expédition du compost
Comme toute manipulation, ces opérations vont accélérer la libération de composés odorants dans l’atmosphère. Toutefois ces mécanismes sont moins handicapants en fin de traitement car les composés ont maintenant normalement des notes « humiques » (type géosmine ou iso butyl quinoléine [6]) moins mal ressenties et moins puissantes dans la mesure où toute la matière est bien arrivée à son terme.
Des résidus épars et des épandages du compost à proximité du site
Un soin de plus en plus grand est apporté à la propreté des sites de compostage. Néanmoins, il arrive que subsistent, ça et là, des petites quantités de matière organique ou quelques flaques chargées contribuant un peu aux émissions du site. Ces pollutions secondaires se rencontrent aussi parfois à l’extérieur du site sur des zones de transfert du compost et, très rarement, par des pertes des véhicules au cours des transports.
Nous sommes aussi parfois confrontés à des problèmes de nuisances odorantes dont le site de compostage n’est pas directement responsable, lorsque le compost est utilisé en épandage dans les champs proches. Cela peut aussi accroître sérieusement la « zone d’impact apparente » de la plate-forme faisant suite aux effets du transport sur les itinéraires empruntés par les véhicules.
Ce qui est ailleurs demandé dans l’article 6 de l’arrêté du 22 avril 2008.
La complexité des émissions odorantes d'une unité de compostage rendra délicate l'appréciation de ses émissions. Leur nature varie, bien entendu, selon la nature de la matière à composter mais aussi selon la conduite de l'opération. Les composés odorants présents sont multiples : ammoniac et amines, H₂S, sulfures et mercaptans, acides gras, terpènes, scatol, cétones et aldéhydes... Les sources ne sont simples à appréhender que lorsqu’elles sont canalisées, ce qui n’est ni le cas de tous les sites, ni l’entièreté des sites. Les sources sont souvent surfaciques avec des surfaces complexes à saisir ou encore diffuses. Les émissions sont très fluctuantes dans le temps, atteignant des niveaux importants dans des périodes courtes. De plus, la connaissance des phénomènes combinatoires de plusieurs sources simultanées, voire successives, demanderait des études approfondies sachant que ce sont des pics d'émissions qui, généralement, posent problème au voisinage.
Procédures de mesures envisageables
Les mesures étudiées dans cet article sont celles qui sont relatives à l’odorité des émissions. Les autres investigations ne sont pas prises en considération ici, à savoir :
- en amont de l’émission, l’observation des paramètres qui conduisent l'installation à émettre des composés odorants bien que nous trouvions dans cette approche les moyens de prévention ou des éléments pour optimiser la conduite des opérations ;
- en aval de l’émission, l’appréciation de la gêne ou du niveau d’intolérance des riverains. Cette information plus que globale et éventuellement parasitée par n'importe quelle autre source, relève d’une toute autre logique et prend en compte de nombreux facteurs non directement liés au site [7].
La mesure de l’émission demande :
- d'établir des règles d’échantillonnage visant à connaître la représentativité des mesures ;
- de décider de protocoles, tant pour les mesures que pour les prélèvements (ce qui est plus délicat) permettant d’accéder à des valeurs interprétables et significatives.
Si toute l'installation se trouve enfermée dans un bâtiment (cas coûteux et encore rare), les problèmes se limitent à la sortie de l’air vicié de la ventilation de cet ouvrage et à la circulation des véhicules apportant les matières à composter. À l’inverse, lorsque toutes les sources se trouvent en extérieur (situation la mieux partagée), la complexité est maximale, chaque source ayant ses propres caractéristiques. Le nombre de variables s’accroissant très rapidement à mesure que l’on s’éloigne du point d’émission, c’est bien à la source même qu’il est sage de s'intéresser pour avoir la lecture la plus pertinente possible [1].
Le choix des paramètres de mesure
Ce choix est extrêmement délicat tant dans l’espace que dans le temps et, dans l’état des choses, il restera toujours très difficile de s’assurer de la représentativité des mesures effectuées par rapport au réel paysage odorant du site.
Les variables supplémentaires
Dans le monde des odeurs, au « simple » problème d’échantillonnage, s’ajoutent d'autres paramètres à considérer :
- effet « points-crêtes » : les émissions ne sont jamais constantes. Elles sont notamment fonctions de l’activité des micro-organismes, de l’aération, des opérations effectuées sur les matières odorantes, de la nature ou de l'état de la masse et des surfaces d’échange, des effets d’entraînement des composés odorants. Aucun de ces paramètres n’est une constante. Il apparaît ainsi des phases plus ou moins longues où les émissions sont franchement plus importantes. Par exemple, un andain en retournement, après huit jours d'une fermentation mal aérée, sera bien plus odorant qu'un andain statique en fin de maturation. Nous rappelons que ce sont justement ces points-crêtes qui posent des problèmes au voisinage. Les observations devront à la fois les connaître et en apprécier leur portée tout en pondérant leur influence selon leur intensité et leur durée.
- la durée d'une émission : certaines opérations sont brèves comme le déchargement d'une benne, d’autres peuvent être beaucoup plus longues comme la constitution ou le retournement d’un andain. À intensité et débits égaux, les quantités d’odorants rejetés dans l’atmosphère sont, bien entendu, totalement différentes ; en corollaire il en sera de même pour les nuisances. Ce paramètre ne doit pas être omis. Difficile à connaître avec précision, il pourrait être rapproché du simple tonnage de matière traitée. À ce propos, nous pensons qu'une valeur que nous nommons « volume d’odeur » pourrait traduire relativement bien le phénomène odorant : le « volume d’odeur annuel » (voa) est obtenu en faisant la somme des produits des débits d’odeur de chaque source par sa durée annuelle d’activité. Un voj (j pour journalier) pourrait traduire le phénomène pour une journée.
- la conjugaison d’événements : différentes opérations sont effectuées sur une plate-forme de compostage au cours d’une journée, des synergies étant susceptibles d’exister entre elles. Est-il judicieux de considérer que tous les retournements se conjuguent avec le criblage et un arrosage avec des lixiviats même s’ils n’ont pas lieu en même temps ? Que peut-on additionner et, en revanche, des émissions simultanées peuvent-elles avoir des effets antagonistes ? Le programme précis de travail du site doit apporter des informations nécessaires à un embryon de réponse sur ce point. Cependant, il reste délicat de prédire les conjugaisons extrêmes sur un site, ni connaître cette situation sur une plate-forme future dans le cadre d’une étude d’impact.
5 Par analogie aux « unités d'odeur » et au « débit d'odeur » et bien que le mot « odeur » ne soit pas utilisé à bon escient dans les trois cas.
- la durée des effets de l’émission : les durées d’émission restent souvent bien inférieures à la durée d’action des odorants sur l’environnement pour plusieurs raisons :
- l’étirement du panache lors de son déplacement ;
- la dispersion du segment de trace de panache : selon la nature des composés odorants et les conditions météorologiques, l’abattement de l’odorité dans les espaces de vie peut être plus ou moins long pour une émission identique d’odorants ;
- le circuit exact du panache au gré des directions très changeantes du vent en quelques secondes, sa vitesse et ses probabilités de rencontre de nez ;
- les transformations de la composition du mélange odorant sous l’effet de réactions chimiques ;
- les capacités des odorants à s’adsorber sur différentes surfaces : certaines molécules se fixent volontiers sur des substrats tels que la kératine, des matières plastiques…, et s’en libèrent progressivement pour prolonger d’autant la nuisance odorante.
Ces décalages introduisent une difficulté supplémentaire si l’on souhaite établir une relation entre l’émission et la gêne ressentie par les populations.
Choix des points de mesure
Chaque mètre carré de la surface du site ne pouvant faire l’objet d’analyses, il convient de rechercher les points les plus significatifs et les plus représentatifs des sources du site. La stratégie d’échantillonnage demande à être soigneusement élaborée [8].
Les observations peuvent se faire :
- directement sur le site : ces observations faites dans l’air ambiant présentent les inconvénients repris ci-dessous avec les prélèvements. Il faut y ajouter la difficulté pour le sujet d’être confronté le plus souvent à une fugacité de l’information lui demandant une vigilance extrême et une capacité d’analyse parfaitement rodée. Il faut noter que les mesures instrumentales effectuées dans le même contexte rencontrent les mêmes difficultés. Mais, pour ces analyses, nous pouvons y pallier, en bonne partie, en utilisant l’accumulation du signal (piège). Ces observations sont cependant très utiles pour repérer rapidement des points et des circonstances d’émissions qui pourront être approfondies par la suite [9]. Cette démarche peut demander à être précédée par une étude des procédures et des programmes du site et répétée pour éviter que trop d’informations ne lui échappe.
- par l’intermédiaire de prélèvements : bien qu’il ne puisse être réalisé dans des ambiances que dans des cas limités [7], le prélèvement pourra, en fait, traduire plus fidèlement le rejet d’une source précise s’il est pris directement sur elle. Malgré tout, il convient de garder à l’esprit les réserves que nous faisons sur la stabilité de l’échantillon dans le temps *. Pour s’assurer que l’échantillon prélevé restitue réellement la source, il faut bien connaître cette dernière dans sa structure et son mode de fonctionnement 9, ce qui doit permettre de définir un ou des points représentatifs. Du choix du point dépendront les conclusions que nous serons fondés à tirer des résultats des mesures effectuées.
Plusieurs prélèvements peuvent être faits sur une source donnée ; le problème sera de traiter ces différentes informations : les additionner, faire la moyenne simple ou pondérée, la médiane ou encore retenir la valeur maximale ? Notre regard nous conduit à retenir les approches suivantes :
- si les prélèvements sont faits en différents points d’une même source, si possible avec une bonne simultanéité, la moyenne pondérée peut traduire les émissions de la source ;
- si les prélèvements sont faits successivement en un même point, il serait sage de retenir la valeur maximale trouvée pour ne pas passer à côté d’un risque.
Choix des moments
Si nous ne rencontrons pratiquement pas de phénomène fugace sur les unités de compostage, les émissions temporaires et variables sont la norme. Il convient donc de choisir la phase adéquate à notre objectif. Chaque émission se définit par sa durée et sa fréquence en plus de son intensité (non constante) et de ses qualités (pouvant aussi évoluer). Il convient donc de définir les paramètres qui permettront d’accéder à la réponse la plus sensée. En ce cas, l’appui de méthodes analytiques peut être utile.
Le suivi en (semi) continu des rejets de COV [10] (dont la relation avec l’odorité est à établir) montre qu’il est impossible de maîtriser la connaissance des niveaux d’intensité, celle des durées et encore moins celle des deux à la fois, pour toutes les sources dont nous ne pouvons nous assurer de la
[Figure : Correspondance entre un suivi de COV sur une source et les points de prélèvement pour olfactométrie ou « analyse olfactive » (graphe théorique reconstitué)][6] Voir procédure de « visite olfactive » développée par IAP-Sentic.
[7] Même si l’opérateur se trouve là, au bon moment, les prélèvements d’ambiance donnent rarement une réponse utilisable : il est bien délicat de s’assurer de la réalité de l’échantillon gazeux prélevé du fait de l’impossibilité à maîtriser ses mouvements et l’évolution de sa composition.
* L’idéal est d’effectuer la mesure dans l’heure suivant le prélèvement même si la norme EN 13725 autorise un délai de 30 heures. Nous avons pu constater qu’une part non négligeable de composés avait disparu au bout de cinq heures dans un sac.
9 Par exemple, les condensats formés dans les sacs, suite à un excès d’humidité et une température plus élevée dans l’andain, peuvent affaiblir les réponses des mesures ultérieures. Dans certains cas, il faut prévoir une prédilution.
[10] L’observation faite au moyen de « nez électroniques » ne permet pas, non plus, de régler ce problème. Leurs réponses correspondent à des mélanges indéterminés, au flux desquels s’ajoutent les aléas du parcours du volume gazeux.
Stabilité
Il est donc indispensable de bien connaître le fonctionnement de chaque source concernée.
Plusieurs options de recherche sont possibles :
Le maximum d'émission
Chacune des sources citées ci-dessus a, individuellement, son maximum d’émission notamment au début d'une étape d’accroissement des échanges avec l’air : déchargement d'une benne, broyage, retournement d'un andain, criblage... La saisie de ce stade n'est pas toujours tout à fait aisée (surfaces en mouvement, mouvements incertains de l'air).
Le maximum peut être aussi observé par des effets combinatoires des sources. Nous verrons plus loin que ce problème n’est pas facile à traiter sur le terrain. Il est encore compliqué par la méconnaissance du laps de temps maximum séparant les deux émissions, qui permet aux effets de se conjuguer. Des études seraient nécessaires pour permettre de traiter ces points.
Une somme ou une moyenne d’émission
Les émissions de chaque source sont alors pondérées par leur durée (voir indiqué plus haut). Cela demande une étude longue qui permette de connaître les caractéristiques des émissions de chaque source dans chacune de ses phases et la durée de celles-ci. Il est alors possible de reconstruire une image grossière de la qualité odorante du « mélange » de tout l'air qui serait passé sur le site durant une année, par exemple. Si cette approche donne une indication sur le « potentiel d’émission » du site sur une année et permet de suivre l’évolution du site, elle peut être loin de la durée de contamination du voisinage et de la gêne ressentie par les riverains. Une valeur moyenne par jour d’activité du site peut en être déduite.
Un instantané de l’émission
Pour des raisons pratiques évidentes et des coûts réduits nous pouvons nous contenter de faire des observations à un moment donné. Généralement présente sur le site une journée convenue à l’avance, une équipe spécialisée effectue toutes les observations et les prélèvements sur toutes les sources reconnues dans l'état où elles se trouvent à ce moment-là. Cette approche est assez fréquente mais quelle chance a-t-elle de représenter réellement le système... à moins d’être renouvelée n fois (ce qui annule l’avantage économique) pour avoir une bonne probabilité de traduire toute la vie du site et ne pas omettre des conjonctures particulièrement odorantes ?
Les méthodes de prélèvement
Les procédures de prélèvements ne sont pas toujours aisées pour des problèmes d’accessibilité et des problèmes de représentativité. Des adaptations sont souvent à faire au coup par coup.
Les différentes démarches de piquage
D’une manière générale, il existe deux types de prélèvements en vue de l’olfaction :
- soit de simples piquages directs pour des mesures sur le terrain : l'analyse est effectuée par une personne grâce à un olfactomètre portatif ou encore, plus rarement, dans une cabine mobile d’olfactométrie. Mais ceci exige que la source reste stable sur la durée de la mesure, ce qui n’est, en principe, pas le cas ; - soit en différé en remplissant des contenants ou des pièges qui seront utilisés ultérieurement en laboratoire d’analyse.
Le choix de la durée du prélèvement n'est pas particulièrement simple non plus :
• longue (plus de 10 mn), elle moyenne les concentrations ce qui pourrait masquer des pics ; • brève, elle peut passer à côté du pic et l’aspiration importante peut dépasser le volume du « filet odorant » disponible (risque aussi de dilution) ; • multipliée, elle doit permettre de s’assurer de la validité de la mesure mais grève les budgets.
Dans cette démarche, nous pouvons aussi citer les reconstitutions d’émission (caissons présentés par la norme NF X 43-104 ou méthode du « facteur d’odeur »). Ceci est à compléter par les prélèvements pour analyse physico-chimique qui peuvent être effectués :
- soit par piquage direct conduisant à un équipement de mesure (CPG, doseurs divers, nez électronique...) avec toutes les précautions que cela peut parfois demander ; - soit comme précédemment au moyen de contenants adressés au laboratoire d’analyse ; - soit au moyen d’adsorbants, de barboteurs ou pièges passifs ou, plus souvent, actifs qui seront utilisés en discontinu par désorption thermique rapide (DT) ou ultérieurement au laboratoire.
Nous pourrions envisager d’utiliser ce type de piège pour des analyses CPG-sniffing. Rappelons que les prélèvements effectués pour l’analyse instrumentale présentent l’immense avantage.
l’avantage d’être cumulatifs, ce que nous ne savons pas faire, à ce jour, pour les odorants où le prolongement de l’opération a, au contraire, une action de dilution.
Malgré les travaux déjà réalisés sur le sujet [10], des recherches complémentaires demandent à être conduites pour savoir ce que représente tel ou tel prélèvement ponctuel dans l'ensemble des émissions du site ou même de l'une de ses sources et selon quelles règles une mesure peut-être extrapolée à toute une entité.
Prélèvements sur des flux concrets
Le cas le plus commode reste celui d’un rejet dans l’air matérialisé par un flux bien identifié.
Sur des conduits existants
La sonde de prélèvement est introduite dans la canalisation (cheminée) et le prélèvement peut se faire au moyen d'un caisson-poumon avec toutes les précautions habituelles concernant l’aéraulique et les risques de condensation ou de températures élevées (pré-dilution). S'il n’est pas clairement établi, la mesure du débit d’air doit compléter nécessairement ce prélèvement. La norme EN 13725 dans son annexe J4 présente cette approche.
Sur des conduits reconstitués
Des équipements étendus, mais faisant l'objet d'une circulation maîtrisée d’air, peuvent être ramenés au cas précédent en disposant, sur les surfaces, une cheminée appliquée sur une hotte rassemblant les effluves d'une surface donnée (0,5 ou 1 m²) avec toutes les précautions nécessaires pour ne pas perturber l’écoulement du flux gazeux. Le protocole est le même que ci-dessus, mais il est indispensable de déplacer la hotte en différents points de la surface pour avoir une lecture d’ensemble des émissions du système (EN 13725 annexe J6). Sur un andain nous pouvons choisir d’aménager une petite plate-forme à un tiers de sa hauteur et de disposer le bord extérieur de la hotte à 50 cm du rampant. Dans ces deux cas, il sera possible d’accéder, après mesure du débit d’air, à un débit d’odeur.
415 Des essais ponctuels nous conduisent à penser que cette approche pourrait être adaptée et développée pour des observations olfactives.
16 Des règles d’échantillonnage devraient permettre, après expérimentation, de définir le nombre et la localisation des points de prélèvements pour un coût minimum. Nous avons établi un tel protocole sur des sites.
Prélèvements sur des flux réalisés
Lorsque le flux n’est pas réellement présent, on cherche à en constituer un par des artifices dont la validité est délicate à assurer. La technique fait appel à des « chambres de flux ». Le problème est complexe et rien de définitif n’existe, un développement particulier à chaque cas est à prévoir comme le précise la norme EN 13725 en annexe J5.
Sur des surfaces constituées
Nous dénommons ainsi une surface lisse clairement identifiable et relativement étanche à l’air (c’est-à-dire conservant les débits) comme un bassin sans agitation. Il est alors possible de guider sur cette surface un courant d’air que l’on peut paramétrer dans un tunnel (ou une chambre de flux). L’avantage est de pouvoir fixer des conditions expérimentales même si elles ne traduisent pas exactement la réalité (les vitesses de partage de phase peuvent ne pas correspondre à l’enrichissement de l’air circulant et le gradient des concentrations dans l’air est nécessairement différent). Le prélèvement peut alors être effectué dans la veine artificielle créée. Le résultat est extrapolé à l'ensemble de la surface.
Sur des milieux poreux
Nous considérons dans ce cas les surfaces d’andains ou de stocks divers (bien entendu, ici, non ventilés). Si l'on applique dans ce cas les mêmes démarches que ci-dessus, nous ajoutons une bonne part d’incertitude sur la surface réelle concernée (aucune étanchéité ne peut être attendue à la base de la chambre de flux) et sur la circulation effective de la veine d’air et donc sur sa composition. D’autres artifices ont pu être envisagés avec des prélèvements en chambre statique (cloche disposée sur l’andain) ou par simple sonde que l’on peut introduire plus ou moins profondément dans la masse.
Le point du prélèvement est aussi à définir :
– pour un andain (ou autre tas) stable, une règle peut être imposée et plusieurs prélèvements effectués ;
– pour un volume en agitation (andain en retournement), la valeur, plus proche de la crête, retenue est obtenue selon nos procédures avec le même dispositif que ci-dessus mais implanté au milieu de l'andain juste après le passage du « retourneur » (avec deux implantations symétriques quand cela est possible).
T7 Selon les auteurs, les vitesses de balayage de la surface active peuvent aller de 0,25 à 2 m/s. Toutefois, la vitesse de balayage de 1 m/s n'est pas la moins intéressante car nous avons pu souvent observer qu’à cette vitesse le vent était le meilleur distributeur des odorants autour d'une source. Cet équipement permet de déterminer le SOER (Surface Odor Emission Rate) donnant dans ces conditions le débit d’odeur par m² de surface utilisée.
L’accès à un débit d’odeur (SOER = Surface Odor Emission Rate) devient bien délicat même si l’on prend comme débit d’air celui qui est imposé dans la chambre de flux et que l'on extrapole la valeur à l'ensemble de la surface incriminée. Des options, sur les bases des données de la recherche, doivent alors être faites pour atteindre une valeur significative.
Prélèvements sans débit directement accessible
Ce cas se rencontre tant sur des surfaces émettrices passives qu’avec des rejets diffus dont l’activité (débit de rejet) est inaccessible.
Dans le cas de surfaces définies, des prélèvements très simples peuvent être effectués aux moyens d'une « cheminée paravent statique » avec piquage réalisé à 30 cm au-dessus du milieu d’émission.
Lorsque la source est difficile à matérialiser comme, par exemple, des fuites sur des raccords ou des opérations se faisant à l’air libre avec des mouvements importants : comment apprécier ce qui se dégage au-dessus d’un broyeur ou d’un équipement de criblage ou de retournement (bien que nous ayons retenu de traiter ce dernier point au niveau de l’andain lui-même) ? Nous sommes contraints de nous tourner vers des techniques faisant l'impasse sur l’enfermement de l’émission dans un volume défini dans lequel l’air neutre circule à un débit donné. Il reste alors à se tourner à nouveau vers un piquage direct de l'ambiance-source au moyen de la « cheminée paravent statique ». En vue d’une généralisation (sans doute au-delà de cette simple application) et dans le souci de définir des mesures absolues, la simplicité de cette procédure demande qu'un petit programme de recherche permette de préciser ce que représente exactement cet échantillonnage.
18 Pour chaque prélèvement, nous aménageons une petite plate-forme en retrait de 50 cm du rampant et située à un tiers de la hauteur de l'andain sur laquelle nous disposons la chambre de flux.
tillon par rapport au mètre-cube d’air environnant. Un débit doit alors être trouvé pour obtenir des grandeurs homogènes aux précédentes. Dans une approximation grossière, nous pouvons considérer le cas où la masse d’air se déplace à une vitesse mesurée à l’anémomètre au-dessus de la section étudiée et prendre le volume ainsi engendré se déplaçant à la vitesse indiquée quand elle est mesurable (supérieure à 1 m/s, sinon la valeur est ramenée d’office à 1 m/s).
Les principes de mesure
Observations olfactives
Application de la norme EN 13725 [11]
Nous renvoyons le lecteur à ce document. Nous soulignons que, contrairement à ce que laisse supposer la dénomination de leur « unité » (uo), les mesures olfactométriques traduisent de fait une concentration (dilution) de la totalité des molécules présentes, dont celles qui peuvent être odorantes, par une approche un peu contournée. Il ne faut pas confondre ces valeurs avec l’intensité de la perception.
Les analyses sont généralement effectuées en laboratoire par un jury de 4 à 6 sujets. L’information globale obtenue n’est peut-être pas homogène pour tous les membres du jury, mais traduit, avec le débit de l’air dans lequel se trouvent les molécules, une indication sur une « masse » globale d’odorants en jeu.
Des olfactomètres portatifs existent aussi pour effectuer des mesures directement sur le terrain mais ils sont individuels, leur échelle de dilution est très réduite et, en opérant à l’extérieur, ils ne peuvent absolument pas être assurés d’une quelconque stabilité du signal.
Autres considérations
a. Les « facteurs d’odeur » (fo) et « réserve d’odeur » (ro)
Nous avons développé une approche qui apporte un regard nouveau et intéressant sur les émissions des substances au travers de la tension de vapeur qu’elles émettent (« espace de tête »). Le principe de la mesure du « facteur d’odeur » est de déterminer le volume d’air que pourrait odoriser 1 g d’une substance étudiée. À partir de cette valeur nous pouvons définir une « réserve d’odeur » (ro) comme le produit du fo par la masse globale de cette matière mise en jeu sur une période donnée.
Le fo peut être mesuré sur des matériaux en différents états : en retournement, en maturation, en stockage de compost… Dans le cas du compostage, le problème de l’assurance de la représentativité de l’échantillon reste en bonne partie tant dans sa nature que dans la rapidité de son évolution. Les masses retenues correspondent alors à chaque situation. Des sommes peuvent être faites pour une « journée caractéristique » intégrant les épisodes odorants retenus (ceux qui émettent le plus mais sans doute pas tous en même temps).
b. Analyse olfactive
Avons-nous une image réaliste du mélange de tous les odorants à travers la mesure qui est faite de l’odorité globale, par olfactométrie, de l’air au-dessus de chaque source ?
S’il était possible de contrôler sur le terrain que la valeur de 5 uo demandée est bien exacte (sur la durée imposée) et qu’elle provient bien du site, ne convient-il pas de pouvoir trier les différentes composantes odorantes et rechercher celles qui reviennent au site ?
Lorsque l’entreprise utilise des « neutralisants d’odeur » eux-mêmes porteurs d’une certaine odorité, doit-elle être prise en charge dans les analyses des prélèvements les contenant et venir alourdir le débit d’odeur global du site ? [7]
Nous pensons, pour notre part, qu’il convient de trier les notes odorantes pour avoir une lecture plus claire des émissions d’une installation. C’est dans cette démarche que nous avions développé l’« analyse olfactive » [12].
c. Application à l’établissement de « points d’olfaction »
Lors de nos procédures de « profil olfactif » [13], nous établissons sur le site des « points d’olfaction » à chaque fois que le nez des experts rencontre un odorant lors d’un double circuit complet et rigoureux effectué sur le site. Ces points d’olfaction renseignent sur la nature et l’intensité des odorités et permettent de localiser, d’identifier et de caractériser des sources. Complétés par les prélèvements, cette démarche permet de dresser une « carte olfactive » du site.
Mesures physico-chimiques
Les mesures instrumentales de composés odorants apportent nombre d’informations précises et utiles. Elles sont même exigées par un certain nombre de textes réglementaires : ainsi l’article 25 de l’arrêté du 22 avril 2008, comme des arrêtés antérieurs, mentionne des dosages maxima (H2S et NH3) sur des émissaires canalisés. Mais le plus souvent, ce type d’impératif est plus exigé dans un souci toxicologique qu’olfactif.
Ces mesures peuvent être globales (COV) ou par dosage de composés isolés et identifiés :
– les observations globales donnent en général une information rapide qui peut suffire dans la mesure où la composition est peu changeante : FID, PID, IR et FTIR, masse directe, MOS ou polymères des nez électroniques…
– les identifications d’odorants ou plus simplement de fonctions chimiques et leur dosage apportent, bien entendu, des informations précises et objectives et peuvent être d’un excellent appui pour les approches olfactives : des électrodes spécifiques, des dispositifs de dosages chimiques ou de simples détections chimiques (exemple : tubes de Dräger) ou des équipements instrumentaux d’analyse avec identification et dosage (CG-MS, CPG-sniffing).
De nombreux efforts sont effectués pour relier, généralement par apprentissage empirique, les observations (quand elles sont globales : cas des « nez électroniques » [14]) ou les mesures physico-chimiques avec des aspects « odeur ». Cette relation est malaisée et peut conduire à des distorsions flagrantes dès lors que la composition du mélange n’est pas fixe, ce qui est fréquent et la relation composé par composé (relation structure/activité) fait l’impasse sur leur manque d’exhaustivité, les variations interindividuelles et les effets combinatoires.
Les nombreux outils disponibles ne sont pas d’une équivalente commodité d’emploi.
20 La substance désorbe dans des conditions définies dans un volume défini. L’espace gazeux obtenu est alors dilué par olfactométrie dynamique pour connaître le volume total odorisable (protocole LAPS-Centic).
21 Deuxième paragraphe du I de l’article 26 de l’arrêté du 22 avril 2008.
sur un site de compostage. Cependant il peut être intéressant d’en utiliser plusieurs en parallèle.
Les nombreux moyens d’investigations disponibles ne sont pas toujours aisés à mettre en place et demandent à être bien plus encadrés pour éviter trop de divergences. Il ne faut pas attendre trop de précisions des moyens de mesures, surtout ceux qui font appel à des approches sensorielles. Mais la plus grande difficulté, la plus grande incertitude revient encore au plan de l’échantillonnage qui peut aboutir à des variations dans les résultats de plusieurs facteurs dix. Faute de définir de manière très précise les échantillons à retenir, toute valeur chiffrée donnée doit être considérée de manière très circonstancielle et non comme un verdict définitif.
Utilisation des résultats obtenus
L’utilisation des résultats dépend des attentes que l’on a, nous pouvons souhaiter :
- remonter aux causes pour gérer les rejets, approche qui restera toujours plus pertinente et plus accessible et qui permet des contrôles se rapprochant d’une certaine objectivité ;
- connaître, pour elle-même et pour caractériser le site, les émissions en volume et concentration en « odeur » et différents composés. Ces valeurs peuvent être aussi utilisées pour en apprécier leur projection dans l’espace alentour (directement ou par l’utilisation de modèles de dispersion atmosphérique) ;
- apprécier les effets au travers des valeurs de nuisance acceptable par la population, approche qui intègre un très grand nombre de variables dont beaucoup d’aléatoires et de subjectives » [1].
Pour répondre à la question posée en introduction, c’est le deuxième item qui nous intéresse ici et pour lequel il convient de trouver comment constituer une image globale simple du site avec ses émissions disparates et, qui plus est, séquentielles.
Traitement des sources indépendamment
Il est tout à fait possible de considérer que les effluents des sources ne se mélangent pas vraiment même si elles envahissent un même espace géographique. Les textes réglementaires semblaient plutôt privilégier cette approche jusqu’à présent [22].
Ce regard permet d’imposer des règles à chaque source avec une pertinence satisfaisante. Elle traduit de manière correcte l’aspect des rejets odorants dans l’atmosphère. En revanche, elle reste plus incertaine quant à son aptitude à représenter ce qui se passe réellement dans le voisinage et elle n’évoque pas la notion de durée de l’émission.
À partir de ces valeurs, il reste possible d’obtenir une valeur globale : ce que nous avons nommé plus haut le « volume d’odeur » (la somme totale sur tout le site traduisant, en « quantité réelle », les émissions). Mais il faut garder à l’esprit que, si cette valeur a une relative relation avec les quantités de substances rejetées dans l’atmosphère, elle peut difficilement rendre compte des périodes de nuisance odorante qui n’apparaissent qu’à partir de certains seuils « intensités » et de durée minimale (sans considérer la qualité). Peut-être pourrions-nous définir une valeur de ce seuil au-dessus de laquelle nous considérerions la durée annuelle de dépassement de cette valeur.
La modélisation de la dispersion atmosphérique du nuage émis
Depuis quelques années les physiciens ont cherché à comprendre le devenir des volumes gazeux lors de leurs déplacements et ont su, avec les mathématiciens, développer des algorithmes qui permettent de définir leurs évolutions en fonction d’un certain nombre de paramètres essentiellement météorologiques et topographiques. D’abord appliqués à des particules puis à des molécules, ces modèles ont cherché à cerner les odorités en les assimilant à des molécules et en utilisant leur concentration globale sous la forme de « l’unité d’odeur européenne ».
Ces modèles, de plus en plus sophistiqués [15], fournissent une précision d’un niveau de plus en plus élevé sur l’évolution des masses d’air. Cette précision peut d’ailleurs paraître tout à fait excessive en regard de celle que peuvent donner les mesures olfactométriques ou les analyses olfactives et les choix des configurations météorologiques et leur stabilité*.
Ne considérant que l’aval de l’émission, ils sont établis pour prendre en compte l’émission de chaque source isolée et tenter d’en apprécier les effets combinatoires sur les espaces impactés en utilisant des paramètres météorologiques stables. Les règles utilisées pour l’addition, intégrant les superpositions des séquences d’émission de chaque source exprimées en simple « débit d’odeur », restent cependant à approfondir. Les cartes d’impact obtenues [23] peuvent différer sensiblement selon le modèle mathématique utilisé pour appréhender la dispersion, au niveau de la portée maximale mais aussi sur le dessin des espaces (tracé des courbes d’isoconcentration) surtout dans les zones proches ou moyennement éloignées des sources. Naturellement, elles restent tributaires de la pertinence des données d’entrée qui sont utilisées [16]. Or l’une des difficultés avec cette démarche est justement de définir les données d’entrée à confier au logiciel, les évolutions dans le temps et dans l’espace des émissions et de la nature et des proportions des composés des mélanges odorants et leurs effets combinatoires. Ces points font justement l’objet de nos réflexions (voir plus haut).
Les simples cumuls théoriques réalisés semblent, a priori, très intéressants et peuvent correspondre à quelques applications mais ils sont extrêmement délicats à valider dans le domaine des odorités. Des programmes approfondis de recherche devront être entrepris pour que des injonctions telles que celle de l’article 26 (point I) ou de l’article 28 de l’arrêté du 12 février 2003 ne restent pas que théoriques et qu’il soit possible de caler effectivement ces modèles. En effet, pour l’instant, il reste impossible de vérifier les prédictions tant…
25 La norme EN 19725 considère comme acceptables des réponses des jurés dans une marge de 500 % par rapport à la valeur retenue. Il convient naturellement d’ajouter à cette incertitude celle du prélèvement (voir plus haut) qui est très certainement très conséquente. Par ailleurs nous avons pu observer que, pour des vents de vitesse supérieure à 1 m/s, les directions pouvaient, dans 25 % des cas, changer d’au moins 22,5° une heure à la suivante dans les intégrations de l’heure. Ce chiffre reste encore à 16 % d’une minute à l’autre, pour des intégrations de la minute. La considération de ces divers points doit conduire à regarder les résultats avec une certaine souplesse.
À noter que si une certaine prévision sur les mouvements des masses d’air peut être intéressante au niveau des sources, le flot présent dans l’espace « odeur » et les nécessités prêchent plutôt pour une « vue d’ensemble » dès que l’on s’éloigne un peu des sources (quelques centaines de mètres justifient un regard très approximatif). Des caricatures très simplistes peuvent même suffire dans bien des cas.
25 Les logiciels de modélisation de dispersion atmosphérique se proposent de tracer les courbes d’« isoconcentration » d’un polluant identifié et, par extension, de l’odorité, sur les espaces impactés et de n’indiquer les données, à partir des débits d’odeur des sources, des données météorologiques et topographiques. Les modèles disponibles appartiennent à plusieurs approches mathématiques différentes : Gaussien et biGaussien, par bouées, Lagrangien et Eulérien.
sur le plan quantitatif ou géographique (les chances d’être là au bon moment pour effectuer un prélèvement sont minimes et les prélèvements en ambiance extérieure, le plus généralement très dilués, gardent une très faible probabilité de représentativité) que sur le plan des durées (il est impossible d’effectuer ce type de mesure en continu sur une année, ni de connaître a priori le régime d’émission et sa conjugaison avec la météorologie).
La modélisation de la dispersion atmosphérique des émissions, malgré les défauts qu'elle présente, apporte un éclairage intéressant, en particulier, lorsque l’on cherche à comparer différentes situations d'un même système :
- une situation présente par rapport à une future modifiée à l’émission (modification d'un process)
- le changement de paramètres météorologiques dans la mesure où une information globale ne suffit pas : une certaine anticipation à partir de prévisions météorologiques peut permettre de choisir des conditions d’intervention sur les équipements, de hâter des procédures correctives reconnues par ailleurs ou, du moins, de préparer la communication avec des interlocuteurs concernés.
Les comparatifs offrent ainsi une certaine forme de diagnostic.
La modélisation est souvent utilisée pour permettre d’ajuster les exigences vis-à-vis de l’émission à une visualisation de l’impact géographique et temporel.
Le cumul direct des sources
En revanche, le cumul qui reviendrait à considérer que l’on a une seule source beaucoup plus importante, impacterait un espace plus grand. Ce regard que nous pensons être retenu dans l’étude d’impact et pour la valeur limite indiquée de 20.10°uo/h demande que l'on s’y arrête. Il est d’un enjeu important pour le voisinage et demande à être traité avec précision, de la manière la plus objective possible et accessible à des moyens de contrôle, qu'il conviendrait de préciser dans les règlements imposés aux sites émetteurs. Il serait sage de pouvoir définir la configuration du site à retenir : son état à un moment donné, ses capacités maximales de compostage, le nombre d’andains présents et leur temps de séjour, sa capacité annuelle, les activités simultanées pouvant se produire...
Il n'est effectivement pas raisonnable de combiner les « concentrations » observées au travers des uo, sans prendre en considération l’importance de la source. Le débit d’odeur (do) est donc bien le moins mauvais facteur à utiliser à condition de s'assurer d'une telle grandeur sur chaque source pour effectuer des additions à partir :
- des débits d’odeur de sources canalisées ou canalisables, ce qui se conçoit aisément ;
- des débits d’odeur reconstitués à partir des SOER mesurés et multipliés par la surface « adéquate » ;
- des débits d’odeur estimés sur des sources plus difficiles à cerner.
Il est tout à fait judicieux de se demander quels effets, a sur le terrain, un groupe de sources. Cette question reste très délicate à résoudre et un programme de recherche semble indispensable à prévoir sur le sujet. Il devra prendre en considérations divers facteurs :
a. la réalité du mélange des effluents des différentes sources. Pour qu'il en soit ainsi il faudrait :
- que les sources ne soient pas trop distantes (ou, du moins, que leurs distances soient relativement plus faibles que celle des points impactés) ;
- que le vent souffle, à peu près, dans l’alignement des différentes sources (l’importance de ce point varie avec la distance entre les sources et celle avec les points impactés qui nous intéressent) ce qui risque, de toute manière, de ne pas être une constante ;
- que les veines gazeuses puissent se rencontrer (faible différence d’altitude) ;
- que les densités des masses d’air rejetées soient les mêmes et que le brassage soit assuré.
b. la nature de la résultante obtenue. Habitués de la formulation, nous savons que dans le domaine des odorités, les simples additions sont rares et tous les cas de figure existent : un seul composé l’emporte, une synergie ou, à l'inverse, une inhibition partielle (rarement totale) se manifeste, un nouveau caractère odorant apparaît. Si les deux volumes se mélangent la concentration de chaque odorant correspondra à leur moyenne pondérée de ses concentrations dans chaque volume gazeux, conduisant à des dilutions sensibles pour les constituants les moins partagés.
c. l’évolution des composés sur le parcours et dans le temps : réactions entre les composés des différentes émissions, réaction avec des composés rencontrés, activation énergétique, adsorption, dissolution...
d. la manière dont les effets se manifesteront sur la population. L'augmentation du volume odorant d’une source par l'autre se traduit-elle par une augmentation de la durée de la pollution osmique et, en ce cas, de combien (durée certainement variable selon les paramètres météorologiques) et/ou, plutôt, au travers des caractéristiques odorantes perçues ?
Approche globale
Dans cette démarche, nous supposons que les sources sont connues par leur valeur globale exprimée en « débit d’odeur », quelles que soient les critiques qui s’appliquent à une telle grandeur. Nous pouvons alors choisir de faire une somme simple des débits d'odeur.
Cette approche a l'avantage d’être la plus simple et semble cohérente dans la mesure où toutes les sources fonctionnent en permanence et en régime stable et ont des rejets semblables. Ce n'est malheureusement pas souvent le cas et, en particulier, sur un site de compostage.
Aussi, en application d’une certaine forme du « principe de précaution » nous pourrions alors retenir de sommer toutes les valeurs maximales de toutes les sources sous réserve que celles-ci aient été valablement répertoriées. Nous pécherions alors très largement par excès, toutes les sources n’étant pas en pleine activité en même temps et continuellement. Il convient donc de définir :
- la durée de référence que l'on entend retenir : les mesures instantanées sur toutes les sources ne sont ni réalisables ni représentatives des capacités d’odorisation du site. Il convient donc de rechercher une durée significative. Une journée d’activité (24 h) peut être un laps commode et significatif ;
- la combinatoire de l’émission des sources représentant l’activité normale du site.
126 Article 26 de l’arrêté du 22 avril 2008 tant pour les nouvelles installations (I) que pour les installations anciennes (II)
que l’on va devoir cumuler sur cette journée doit aussi être défini :
- en premier lieu, toute opération continue et stable (ce dont il convient de s’assurer) : ventilation des espaces couverts, rejets de biofiltre, andains en maturation, stocks divers...
- un échantillonnage, pondéré par l’ensemble des volumes mis en jeu, des opérations ponctuelles : andains en retournement, opération de broyage, de constitution d’andain, de criblage, de chargement ou de déchargement... chacune de ces opérations étant multipliée en proportion du nombre qui peut être réalisé en une même journée sur le site.
Nous disposerions ainsi d’un certain nombre de valeurs qu’il peut être convenu d’additionner, même si cette procédure reste critiquable.
Recherche de la source unique équivalente
Il est aussi possible de chercher à reconstituer une source unique reproduisant au mieux l’ensemble des sources. Sur le terrain, cette option n’est raisonnable que dans la mesure où les distances entre les différentes sources restent inférieures à la distance entre les points récepteurs et le site étudié.
Mais une source unique équivalente (SUE) permettrait d’apprécier aussi une valeur maximale d’émission sur une durée qui devrait dépasser l’heure (celle qui est donnée dans les textes est un débit horaire : 20.10⁶ uo/h dans l’arrêté du 22 avril 2008 ou 100 000 uo/h dans celui du 12 février 2003). Il faut en effet conjuguer plusieurs opérations : celles qui pourraient s’étaler sur une journée semblent donner une certaine cohérence.
À titre d’exemple, regardons comment pourrait être constituée une SUE. Il convient d’effectuer les démarches suivantes :
- effectuer un inventaire pertinent des sources directes et indirectes(27) sur la base d’une fiche modèle, en précisant leur mode de fonctionnement dans le temps et en identifiant leurs points-crêtes d’émission ;
- mesurer chacune des émissions de ces sources selon l’un des protocoles à retenir sur ceux qui ont été présentés. Ces mesures devraient toutes aboutir à un même mode d’expression : dans l’état actuel des pratiques, les « débits d’odeur » peuvent être employés en attendant mieux ;
- définir un protocole de définition de la combinatoire des sources sur la base de tout ce qui peut advenir en une « journée caractéristique » pour permettre de cumuler les débits maxima de chaque source d’odorants retenue. Ce protocole est à définir avec l’exploitant pour le cas où certaines opérations en excluraient automatiquement d’autres (exemple : le site ne peut pas décharger plusieurs bennes en même temps). La combinatoire à retenir doit rester celle qui contient les opérations les plus odorantes compatibles.
Exemple :
Nombre | Nature de la source | Précision | Valeur |
---|---|---|---|
3 | Déchargement de bennes | Déchets verts | SOER × S |
1 | Déchargement de bennes | Autres déchets | SOER × S |
1 | Stock | Déchets verts | SOER × S |
1 | Cheminée d’aération d’un local | Avec boues | do directement |
1 | Broyage | Tout déchet | SOER × S |
1 | Andain en retournement | 50 m | SOER × S |
1 | Arrosage d’un andain (lixiviat) | 50 m | SOER × S |
1 | Andains en fermentation | 50 m | SOER × S |
2 | Andains en maturation | 50 m | SOER × S |
1 | Criblage | 120 m | SOER × S |
2 | Chargement de compost | SOER × S | |
1 | Stock de compost | SOER × S |
SOER = surface odor emission rate ; S = surface ; do = débit d’odeur.
Nous obtenons ainsi une « capacité d’émission coordonnées » (CEC) qui pourrait être positionnée sur une échelle de « capacité d’émission » à définir soit dans l’absolu soit en relation avec l’isolement du site. Et le nombre de jours annuels pouvant dépasser une valeur limite serait à définir. Les fourchettes pourraient être ajustées au cours des ans en fonction d’observations faites à la réception ou des remarques du voisinage (au travers de l’évolution d’un « indice de gêne » par exemple)(29).
Cette valeur, si elle peut donner une idée sur le bon fonctionnement du site en la rapportant notamment au tonnage traité(30), ne résout pas tous les problèmes. Elle peut rester plus ou moins éloignée des niveaux de nuisances réellement perçues par les populations : ceux-ci sont plus souvent liés aux seuls niveaux crêtes (à partir de valeurs qui restent à déterminer et sur des temps à définir).
Une approche légèrement différente pourrait être faite en prenant comme base de calcul le suivi d’une tonne de matières représentatives entrant sur le site jusqu’à sa sortie sous forme de compost. Un « volume d’odeur » par tonne (VOT) correspondrait à la somme des VO de chacune des étapes, appréciés à partir des concentrations d’odeur mesurées sur les masses solides. Cette somme devra être complétée, au prorata, de la mesure effectuée sur effluents liquides et autres sources communes. L’extrapolation pourrait alors être faite au tonnage annuel s’il a été possible de s’assurer de l’homogénéité des émissions des différents lots. Sous cette réserve, et pour éviter que l’étude ne dure plus de six mois, des analyses pourraient être faites sur d’autres lots à différents stades. Des règles pourraient alors être appliquées aux valeurs globales obtenues.
Prise en compte des notes odorantes
Les démarches intégrant une qualification des notes odorantes permettent avec des risques moindres d’effectuer des cumuls note par note pour un certain nombre de caractères pour lesquels la relation structure/activité a du sens. La connaissance des interactions (positives ou négatives) permettrait aussi de relativiser ces cumuls.
Problème des durées d’émission
Ce point est naturellement d’une grande importance car il constitue l’une des composantes de la nuisance odorante d’autant que le plus souvent la durée perçue par le voisinage est bien supérieure à celle de l’émission. Comment intégrer cette com-
Posante dans le jugement sur la pollution osmique dont le site est responsable ? Les enchaînements d’émissions moindres peuvent produire des pollutions de longue durée.
Sur quelle base prédire les 175 heures (ou 44 h) par an de 5 µg/m³ tolérés, certes considérées comme un résultat théorique ? Ce laps de temps dépend de l’occurrence de la direction des vents et d'une pollution « efficace », fruit elle-même de la conjugaison de plusieurs sources à un niveau « suffisant ». Comment le contrôler ? Quelle confiance peut-on faire à la projection de « roses des vents » anciennes sur les années à venir ?
Intégration de tous les signaux
Par l’éloignement
- il n’est pas toujours sûr qu’au point d’observation le mélange ait bien eu lieu et, en tout cas, la distance se traduit par des dilutions rendant l'information de plus en plus malcommode à saisir ;
- les fluctuations des émissions ne peuvent être suivies et l'impossibilité d’une observation permanente n’offre pas la certitude d'avoir une bonne image du site et de ne pas manquer des points-crêtes ;
- de nombreux parasites odorants peuvent interférer en cours de route ;
- le plus délicat reste de capter le passage du panache alors que celui-ci se déplace allégrement dans les trois dimensions avec des changements de direction bien plus nombreux que ne le laissent penser les intégrations des directions de vent.
Par l’implantation d’observateurs
Pour être efficace, cette approche ne peut travailler que sur de grands nombres d’observations et avec des sujets parfaitement formés capables d’une démarche analytique [13]. Les approches plus globales, souvent très ponctuelles dans le temps, traduisent en fait plutôt le ressenti ou une certaine « reconnaissance » de la source ; elles sont plus floues mais permettent d’acquérir des informations en termes de chronologie [18].
Au travers du ressenti des populations
Cette démarche est souvent employée, car elle paraît simple, directe et bien traduire les phénomènes. En effet, si elle est en lecture directe du mal-être de la population – objet final de toutes les inquiétudes du site –, elle rassemble des données très hétéroclites dans une pondération subjective et circonstancielle.
Le ressenti est appréhendé soit auprès de jurys (avec des règles plus ou moins poussées sur leur positionnement par rapport aux sources) ou d’échantillons de riverains pour l’appréciation de la gêne, soit directement auprès de la population pour rassembler les plaintes. Il est souvent traduit en « zone impactée ».
Pour leur donner plus de représentativité, ces approches sont souvent couplées avec d'autres moins malléables, comme la projection d’émissions en utilisant des modèles de dispersion [19] et les observations physico-chimiques (« nez électroniques », analyses).
Sans nier un intérêt aux informations fournies, ces approches gardent un tel bruitage qu'il n'est pas raisonnable de bâtir des règles sur leurs résultats.
Il est donc possible de disposer de résultats de nature très différente selon les approches retenues. Leur exploitation, en vue d’obtenir un regard synthétique du site émetteur, demande une bonne dose de pragmatisme si l'on souhaite approcher une certaine pertinence.
Conclusion
Faire la synthèse des émissions d'un site à sources multiples n’est pas aisé. Les choses se compliquent lorsque ses sources ne sont pas stables dans le temps et même dans l’espace. Une plate-forme de compostage constitue une excellente représentation d'une situation qui se révèle, en fait, assez fréquente. Du point de vue des nuisances odorantes, les facteurs à prendre en considération sont :
- les qualités odorantes appréciées au travers de l'analyse olfactive de chaque source ;
- la puissance des odorités, traduite au travers des intensités odorantes appréciées par analyse olfactive. Une approche indirecte est obtenue par une mesure de concentration d’odorants par olfactométrie. Les mesures sont réalisées :
- source par source, mais qu'il conviendra de combiner, à l'image de ce qui se passe réellement sur le terrain. Cette combinatoire demande à être construite avec pertinence pour tenir compte des différentes sources et des valeurs crêtes qui peuvent effectivement exister et qui posent problème au voisinage ;
- plus globalement sur les espaces de réception, mais avec de nombreuses incertitudes et une difficulté d’exploitation ;
- les séquences des pollutions osmiques, appréciées au travers des durées d’émission. Ces durées seront aussi à définir avec pertinence selon différents seuils au cours d’une année en utilisant également les fréquences d’apparition de chaque émission. Le calendrier des séquences des émissions les plus odorantes est à établir et à prendre en compte dans les limites des pollutions osmiques admissibles.
Tout système complexe demande à être appréhendé par une démarche analytique pour se rapprocher d’éléments simples, ce qui demande un inventaire complet des sources [17] qui seront présentes à un moment ou un autre sur le site. Il convient ensuite de connaître chaque source et notamment sa cinétique d’émission.
Nous confirmons que les observations pertinentes sont à faire auprès de ces sources, mais il reste à définir quelles valeurs les représenteront le mieux. Nous avons constaté que les règles d’échantillonnage restent à écrire pour chaque type de source et que les protocoles de prélèvement ne sont pas encore tous au point. De nombreux programmes de recherche méthodologique doivent donc être envisagés.
Nous avons naturellement écarté les informations recueillies auprès de la population (indice de gêne) qui ne peuvent pas servir d’outil de mesure. Elles restent un signal d’alerte qu'il faut bien interpréter et qui peut permettre d’ajuster les exigences réglementaires sur les mesures faites par ailleurs. Dans une démarche de contrôle, nous restons favorables aux mesures relatives aux rejets et nous avons, en ce sens…
proposé quelques nouveaux paramètres.
Il reste à définir les règles de la combinatoire de sources qui permet de représenter le mieux le site vis-à-vis de la pollution osmique de son environnement. Cette combinatoire doit faire appel à différentes sources dans une situation d’émission donnée : quelles sources ? Quelle est pour chacune la configuration pertinente ? Nous avons proposé de retenir une source à son paroxysme « normal » et de définir une conjugaison des sources selon la simultanéité raisonnable de leurs activités32.
Un plan d’échantillonnage pour fournir les produits à analyser doit donc être préparé avec un soin extrême. Enfin il est raisonnable de prendre en charge les durées d’émission pour pondérer ces émissions dans le temps au cours de l’année34. En un mot, et bien que cela soit très tentant, il ne nous semble pas aisé de résumer les émissions d’un site tel que celui de compostage par un seul chiffre.
Dans l’état actuel des choses, il n'est guère concevable de laisser croire que l’opération de compostage puisse être inodore sans un confinement total et les opérateurs ne doivent pas être tenus de réussir l’impossible. Cependant le sérieux et la qualité du travail et l’importance des investissements peuvent permettre d’améliorer des situations. Il convient en revanche de garder un regard réaliste sur les démarches de contrôle dont les coûts s'accroissent avec le nombre. Il nous semble plus efficace de s’orienter vers la réalisation progressive d’un plan de réduction des émissions odorantes sur chaque point possible avec accompagnements de services techniques (démarche constructive) sur les bases de mesures les plus objectives possibles selon les protocoles qui ont été proposés.
L’appréciation de l’émission globale d’un site est intéressante dans une démarche de simple constat d’une situation. Ce constat peut être utilisé pour se faire une idée de l’impact du site sur l'environnement. Il permet d’échanger avec les riverains avec une bonne idée des nuisances qu’ils subissent. En effet, nous gardons à l’esprit que pour une bonne communication, il est préférable de pouvoir se tourner vers des paramètres de mesure les plus objectifs possibles. Il convient en effet de laisser le minimum de place au passionnel, si gênant dans les échanges entre les responsables d’un site émetteur et son voisinage présent ou futur.
Par contre, si l’on souhaite connaître précisément les rejets atmosphériques, les hiérarchiser et effectuer une surveillance active, c’est-à-dire qui permette d’agir sur les émissions, si possible par anticipation, le travail source par source reste le mieux indiqué.
32 Nous ne pouvons pas prendre en considération des situations exceptionnelles mais une procédure particulière pourrait être envisagée pour le cas où elles adviennent.
33 Il convient de définir quelles activités peuvent se superposer sur le site avec une certaine souplesse sur la durée des opérations sachant que les pollutions ont toujours une durée plus longue que les émissions.
34 Les périodes pendant lesquelles telle maison pourra être concernée seront la résultante des périodes d'émission et des périodes pendant lesquelles elle est sous le vent du site. Les relations entre ces deux valeurs restent difficiles à prévoir. Et même si quelques directives peuvent être données, il est tout aussi difficile d’imposer à l’opérateur de ne réaliser son programme qu’en fonction de la météorologie.
Références bibliographiques
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