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ANITA Mox : le procédé de traitement de l'azote adapté aux retours de digestion

21 juin 2016 Paru dans le N°392 à la page 78 ( mots)
Rédigé par : Romain LEMAIRE, Anthony POTTIER, Samuel DIZY et 1 autres personnes

ANITA?Mox est un procédé innovant, développé par Veolia, pour traiter les flux d'azote importants issus des retours de digesteurs et limiter ainsi leurs impacts sur les filières de traitement. Basé sur la technologie MBBR, ce procédé a été mis en oeuvre, de par le monde, sur de nombreuses stations d'épuration disposant d'une digestion mésophile des boues. Si les procédés d'hydrolyse thermique (Biothélys' et Exelys') en amont des digesteurs permettent d'augmenter la production de biogaz et de réduire davantage les quantités de boues, ils génèrent des retours encore plus chargés en azote et conduisent aussi à la production, en faible quantité, de molécules complexes inhibitrices de la nitrification. Pour s'affranchir des effets de ces molécules sur les performances du procédé ANITA?Mox, il y a lieu de prévoir une dilution préalable des retours. Cet article présente les résultats obtenus sur un pilote ANITA?Mox, alimenté par les retours d'hydrolyse thermique des boues de la station d'épuration de Tergnier. Il évalue, au regard du taux de dilution appliqué, l'abattement des charges en ammonium, par le procédé.

Si les procédés d’hydrolyse thermique (Biothélys™ et Exelys™) en amont des digesteurs permettent d’augmenter la production de biogaz et de réduire davantage les quantités de boues, ils génèrent des retours encore plus chargés en azote et conduisent aussi à la production, en faible quantité, de molécules complexes inhibitrices de la nitrification. Pour s’affranchir des effets de ces molécules sur les performances du procédé ANITA™ Mox, il y a lieu de prévoir une dilution préalable des retours.

Cet article présente les résultats obtenus sur un pilote ANITA™ Mox, alimenté par les retours d’hydrolyse thermique des boues de la station d’épuration de Tergnier. Il évalue, au regard du taux de dilution appliqué, l'abattement des charges en ammonium, par le procédé.

La lutte contre le réchauffement climatique constitue un des enjeux majeurs du 21ᵉ siècle et chacun ne pourra que se féliciter de l'accord signé, à cet effet, par 195 nations lors de la 21ᵉ Conférence sur le Climat organisée à Paris en décembre 2015 (COP 21).

Les intentions formulées au cours de cette conférence ont conduit les États à aller plus loin dans leurs engagements en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre.

Le respect de ces engagements repose notamment sur la mise en œuvre d'une véritable transition énergétique basée sur une production d’énergie propre et décentralisée à partir de ressources renouvelables.

La mise en place de traitement par digestion anaérobie des boues au sein des stations d’épuration s'inscrit pleinement dans cette démarche et les progrès considérables réalisés depuis quelques années en matière de production et de valorisation du biogaz laissent entrevoir un bel avenir à ce type de traitement. La tendance actuelle est d’ailleurs de « booster » la production de biogaz soit en dopant les digesteurs avec des apports externes (boues, graisses, …), soit en poussant au maximum le processus de digestion.

Pour autant, il convient de bien évaluer l’incidence de ces choix sur le fonctionnement global de la station d’épuration, notamment l’impact des retours en tête de station des filtrats de digesteurs fortement concentrés en azote, et de mettre en œuvre les solutions qui permettront de pérenniser cette filière.

Mots-clés : digestion, hydrolyse thermique, nitrification, dénitrification, valorisation, réduction consommation énergétique, réduction consommation réactif, centrats, ANITA™ Mox

Vers l’atteinte d'un double objectif : la réduction des volumes de boues des stations d’épuration et la production de biogaz

Un procédé bien connu : la digestion des boues

La réduction de la quantité des déchets produite par les stations d’épuration, principalement des boues organiques, répond à un double objectif :

  • Diminuer les coûts liés à leur traitement et leur évacuation.
  • Réduire l'impact environnemental global de la station d’épuration.

Les progrès réalisés en matière de valorisation du biogaz ont conduit à redonner ses lettres de noblesse à un procédé efficace en matière de réduction de volume de boue et pourtant très éprouvé par le passé : la digestion des boues.

En effet, les procédés de digestion des boues sont capables de faire baisser la quantité de boues produites de l’ordre de 30 à 40 % tout en produisant de l’énergie verte : le biogaz. Les boues ne sont plus alors considérées comme un déchet mais comme une ressource inépuisable et renouvelable. Le biogaz produit peut être utilisé pour les besoins propres de la station mais il peut également être valorisé en énergie électrique ou réinjecté en tant que bio-méthane dans le réseau de gaz de ville après épuration supplémentaire.

L’hydrolyse des boues (Biothélys™/Exelys™)

Depuis une quinzaine d’années, les procédés d’hydrolyse thermique, développés sous les noms de Biothelys™ et Exelys™ par Veolia, connaissent un développement certain, lié aux avantages de cette technologie : l’hydrolyse thermique en amont d’un procédé de digestion permet de réduire davantage la quantité de boues produites et d’augmenter la production de biogaz.

Le principe est simple : les boues sont chauffées à 160 °C et sous une pression de 8 bars pendant 30 minutes via une injection de vapeur. Cette dernière est fournie par une chaudière alimentée en biogaz produit in situ par le digesteur de la station. Ainsi l’énergie dépensée pour chauffer et mettre sous pression les réacteurs met en jeu de l’énergie verte produite sur la station.

Lors de cette hydrolyse, les parois cellulaires des bactéries qui composent les boues sont détruites et les molécules organiques sont solubilisées et fractionnées. Ces procédés permettent de réduire le volume de boues digérées de 25 à 35 %, de produire 20 à 30 % de biogaz par rapport à une digestion « classique » et d’hygiéniser les boues grâce au traitement thermique.

Les retours de déshydratation

Les normes de sortie des stations d’épuration répondent à des standards européens. Ces derniers, basés sur la qualité du milieu récepteur, imposent le plus souvent de traiter l'azote¹ en complément de la matière organique (DCO et DBO) et des matières particulaires (MES).

L’azote ammoniacal (NH₄⁺) est le composé azoté majoritaire contenu dans l'eau d’entrée de station et doit être traité sur la file eau.

Avec le procédé de digestion et qui plus est, avec la combinaison « hydrolyse thermique + digestion », les effluents générés lors de l’étape de déshydratation des boues digérées qui sont renvoyés en tête de station sont fortement chargés en azote ammoniacal mais très peu chargés en carbone organique (transformé en méthane dans le digesteur).

Bien que ne représentant que 1 à 2 % du débit d’entrée de la station, ces retours en tête peuvent contenir 15 à 30 % de la charge azotée entrante sur la station. Le tableau ci-contre illustre l’impact des retours en tête de déshydratation en fonction de la filière de traitement.

Filière de traitement des boues Concentration N-NH₄⁺ (mg/l) Charge azotée apportée par les retours en tête
Digestion seule 500 – 1500 ≈ 10-15 %
Digestion avec hydrolyse thermique 2000 – 4000 ≈ 25-30 %

Cette surcharge azotée a pour conséquence d’augmenter fortement le coût de traitement biologique sur la file eau en générant :

  • un surcoût énergétique lié aux besoins accrus en oxygène pour le traitement des surcharges en azote durant la phase de nitrification ;
  • un surcoût de réactifs lié aux éventuels besoins en substrat carboné (méthanol) durant la phase de dénitrification ;
  • un risque de non-conformité sur le paramètre azote lorsque l’importance et la variabilité des charges des retours n’ont pas été correctement prises en compte pour le dimensionnement initial de la file eau.

Ainsi, le traitement séparé des retours de digestion en amont de la file eau s’imposera d’autant plus que l’on souhaitera s’affranchir des conséquences liées à la mise en œuvre de digesteurs boostés (apports externes, hydrolyse thermique préalable des boues…).

Pour ce faire Veolia, via sa filiale AnoxKaldnes, a développé le procédé ANITA™Mox.

ANITA™Mox : la solution de traitement des retours de déshydratation

Sur la station d’épuration, le procédé ANITA™Mox vise à traiter les retours de déshydratation des boues digérées comme l’illustre le schéma ci-dessous.

Les avantages du procédé ANITA™Mox pour traiter l’azote contenu dans les retours de digestion sont :

  • Baisse des besoins en oxygène de 60 % et …
[Photo : Procédé ANITA™Mox pour traiter l’azote contenu dans les retours de digestion.]

¹ Azote total = Azote Kjeldahl + nitrate + nitrite.

  • donc baisse des besoins en énergie associés par rapport à traitement sur la file eau principale ;
  • Diminution voire suppression des ajouts de substrat carboné nécessaire à la dénitrification ;
  • Production de boues plus faible, liée à la diminution des charges traitées sur la file eau ;
  • Diminution de l’empreinte carbone du site.

Principe

Traitement de l’azote « conventionnel »

L’azote est traditionnellement éliminé par le procédé de nitrification/dénitrification dit « conventionnel ». Dans ce procédé l’ammonium (NH₄⁺) est transformé, en présence d’oxygène, en nitrates (NO₃⁻). Cette réaction de nitrification se décompose en réalité en deux sous-réactions :

  • conversion de l’ammonium (NH₄⁺) en nitrites (NO₂⁻) par des bactéries nitritantes aussi appelées AOB (Ammonia Oxidizing Bacteria). Il s’agit de la réaction de nitritation ;
  • conversion des nitrites (NO₂⁻) en nitrates (NO₃⁻) par des bactéries nitratantes aussi appelées NOB (Nitrite Oxidizing Bacteria). Il s’agit de la réaction de nitratation.

Les nitrates formés sont ensuite réduits en nitrites puis en diazote gazeux (N₂) par des bactéries hétérotrophiques en conditions anoxies (absence d’oxygène, présence de NO₃⁻) et en présence de carbone organique : c’est la dénitrification.

[Photo : Elimination conventionnelle de l’Azote par le procédé de nitrification/dénitrification]

Traitement de l’azote via ANITA™Mox

Le procédé ANITA™Mox (Lemaire et al., 2013) est un procédé en deux étapes illustrées par le schéma réactionnel ci-contre. La première étape est une étape de nitritation partielle.

Elle est réalisée par les mêmes bactéries nitritantes (AOB) que celles participant à la réaction de nitritation lors de l’étape de nitrification du procédé conventionnel. Cependant, seuls 50 % des ions ammoniums (NH₄⁺) sont convertis, et la réaction se limite à la formation des nitrites intermédiaires (NO₂⁻) sans aller jusqu’à la formation de nitrates (NO₃⁻).

Cela permet de réduire la consommation d’oxygène de 60 % par rapport à l’étape de nitrification classique.

La seconde étape est opérée par des bactéries Anammox spécifiques au procédé ANITA™Mox. Elles utilisent les nitrites (NO₂⁻) produits lors de la nitritation pour éliminer les ions ammoniums (NH₄⁺) restants. Les produits finaux de cette réaction sont du diazote gazeux (N₂) à 90 % et des nitrates (NO₃⁻) à 10 % (Vlaeminck et al. 2012).

Les bactéries Anammox sont des bactéries autotrophes ne consommant pas de carbone organique pour se développer, ce qui rend ce procédé tout à fait adapté au traitement des retours de digestion qui sont chargés en ammonium et pauvres en carbone organique. Le développement de ce type de bactéries est optimal à une température avoisinant les 30 °C.

Mise en œuvre

[Photo : Schéma du procédé ANITA™Mox avec son réacteur MBBR et son biofilm fixé sur supports mobiles, ici de type K5]

Les bactéries Anammox avec leur couleur rouge caractéristique ne sont pas si faciles à apprivoiser car leur vitesse de croissance très lente les désavantage face à des congénères plus rapides à se développer. Il existe alors un réel intérêt de les mettre en œuvre au sein d’un biofilm. Elles sont alors mieux retenues dans le réacteur que si elles étaient en culture libre et elles peuvent se multiplier plus facilement pour atteindre des performances d’abattement de l’azote élevées.

Pour ce faire, Veolia a utilisé la technologie MBBR (Moving-Bed Biofilm Reactor) développée dans les années 90 qui s’appuie sur la mise en mouvement permanente de supports plastiques dans un réacteur aéré. D’une grande surface spécifique (500 à 1200 m²/m³), ces supports sont spécialement dimensionnés pour permettre le développement dans le réacteur d’un biofilm d’épaisseur optimale permettant aux bactéries nitritantes (AOB) et Anammox de se développer simultanément.

Plus récemment, une évolution du procédé ANITA™Mox a consisté en la mise en synergie de ce type de biofilm constitué principalement de bactéries Anammox, avec de la biomasse libre (boues activées classiques) au sein du réacteur MBBR. Cette configuration nécessite la mise en œuvre d’un clarificateur.

[Photo : Schéma du procédé ANITA™Mox en configuration IFAS avec son clarificateur]
[Photo : Elimination de l’Azote par le procédé ANITA™Mox]
Lieu Pays Capacité Type d’effluent Mise en route
Spilunda (Malmö) Suède 200 kg N/j Retours digestion Municipal 2010
Sundets (Växjö) Suède 430 kg N/j Retours digestion Municipal 2012
Holbæk Danemark 120 kg N/j Retours digestion Municipal 2012
Grindsted Danemark 110 kg N/j Retours digestion Municipal 2013
James River (Newport News) VA, USA 250 kg N/j Retours digestion Municipal 2013
Arla Foods UK 240 kg N/j Industrie agroalimentaire 2016
Locarno Suisse 300 kg N/j Retours digestion Municipal 2015
South Durham (Durham) NC, USA 330 kg N/j Retours digestion Municipal 2015
Egan (Chicago) IL, USA 940 kg N/j Retours digestion Municipal 2016
Viikinmäki (Helsinki) Finlande 320 kg N/j Retours digestion Municipal 2016
Sobacken (Borås) Suède 800 kg N/j Retours digestion Municipal 2017

L’unificateur en aval du réacteur MBBR permet de recirculer les boues activées dans le réacteur (Veuillet et al., 2013).

Cette configuration porte le nom d’IFAS (Integrated Fixed-Film Activated Sludge). Cette différence d’organisation spatiale des bactéries permet au procédé ANITA™ Mox en configuration IFAS d’être 2 à 3 fois plus compact que la configuration MBBR malgré l’ajout d’un équipement avec le clarificateur.

Actuellement, 11 unités du procédé ANITA™ Mox ont été mises en place à travers le monde et de nombreux projets sont à l’étude. L’essentiel des références ANITA™ Mox traite des retours de digestion de stations d’épuration municipales en configuration MBBR.

Traiter les retours d’hydrolyse thermique avec le procédé ANITA™ Mox

Ces dernières années, l’essor des procédés d’hydrolyse thermique (Biothélys™ et Exelys™) en amont de l’étape de digestion anaérobie des boues a eu pour conséquence de modifier les caractéristiques de ces retours. En effet, durant l’étape d’hydrolyse thermique, des molécules organiques complexes non biodégradables sont produites en faible quantité mais peuvent s’avérer inhibitrices pour les bactéries nitrifiantes et Anammox (Fidgore et al., 2011 ; Higgins et al., 2011). Afin de réduire l’effet inhibiteur de ces composés sur les mécanismes biologiques, il est donc nécessaire de diluer ces retours, ce qui permettra de les rendre compatibles avec un traitement par les bactéries Anammox.

La dilution des retours d’hydrolyse thermique s’effectue avec de l’eau traitée de la station préalablement chauffée à 30 °C grâce à un échangeur thermique situé en sortie d’hydrolyse thermique. En effet, l’activité biologique, et tout particulièrement celle des bactéries Anammox, est optimale à température élevée (25-35 °C).

Il est alors essentiel de déterminer la dilution optimale des retours d’hydrolyse thermique afin de trouver le bon compromis entre la réduction de l’effet inhibiteur de ces retours et la quantité d’eau de dilution à chauffer.

Étude pilote : traitement des retours de Biothélys™ par le procédé ANITA™ Mox

Une étude portant sur le traitement des retours issus de filières avec hydrolyse thermique a été réalisée à l’échelle pilote sur le site de la station d’épuration de Tergnier dans l’Aisne.

Description de la station de traitement de Tergnier

Située dans l’Aisne (02), la station d’épuration de Tergnier est exploitée par Veolia Eau pour le compte du SIVOM de Chauny-Tergnier-La Fère. La station a une capacité de traitement de 32 000 EqH pour sa file eau avec une capacité hydraulique nominale de 730 m³/h. Cette station a la particularité de recevoir les boues d’une station d’épuration voisine de taille équivalente, doublant ainsi la capacité de traitement de sa file boue à 64 000 EqH.

La file eau est constituée d’une unité de dégrillage en amont du poste de relèvement, puis d’une étape de dessablage/dés-huilage. Les eaux sont ensuite traitées dans 3 bassins biologiques fonctionnant en mode SBR (Sequencing Batch Reactor) puis passées au travers de micro-filtres rotatifs avec une maille de 10 µm (Hydrotech®).

La file boue est assez atypique pour une station de cette taille : les boues issues du traitement biologique de l’usine de Tergnier sont épaissies sur un combiné table d’égouttage/filtre à bande puis mélangées aux boues provenant de la station d’épuration voisine de Chauny.

[Photo : La station d’épuration de Tergnier (exploitée par Veolia Eau pour le compte du SIVOM Chauny Tergnier La Fère) a une capacité de traitement de 32 000 EqH pour sa file eau avec une capacité hydraulique nominale de 730 m³/h et une capacité de 64 000 EqH pour sa file boue.]
[Photo : Schéma de la filière de traitement (dessableur/dégrilleur, SBR, micro-filtres, épaississeur, digesteur, chaudière, etc.).]

Ce mélange de boues est ensuite envoyé dans l'unité BioThélys™ afin d'être hydrolysé. Les boues hydrolysées sont digérées puis déshydratées sur filtre-presse. Les boues déshydratées sont évacuées en épandage et les filtrats de déshydratation sont retournés dans les réacteurs biologiques SBR. Le biogaz produit est utilisé comme combustible pour faire fonctionner la chaudière alimentant le BioThélys™ en vapeur.

Description du pilote ANITA™Mox

  • - une cuve de réception des retours de déshydratation après hydrolyse thermique et digestion ;
  • - le réacteur IFAS d'un volume de 1,5 m³ contenant les supports et un clarificateur de diamètre 0,6 m.

Les supports utilisés sont les supports AnoxKaldnes « K5 ».

Un surpresseur d'air permet de maintenir une concentration en oxygène dans le réacteur entre 0,3 et 1 mgO₂/L en fonction des besoins du procédé. Le réacteur est équipé de sondes permettant de suivre en ligne les concentrations en NH₄⁺, NO₃⁻, O₂ dissous, ainsi que le pH et la température qui est maintenue à 30 °C. Les concentrations en NH₄⁺ et NO₃⁻ de l'effluent à traiter sont également mesurées en continu.

[Photo : Graphique 1 : Évolution des concentrations NH₄, en entrée et sortie du réacteur et NO₃ en sortie.]
[Photo : Graphique 2 : Évolution des abattements en NH₄ et en azote total ainsi que la concentration en MES.]
[Photo : Photos du pilote ANITA™Mox sur la STEP de Tergnier.]

Les caractéristiques des retours d'hydrolyse thermique avant dilution figurent ci-dessous :

Paramètres | Unité | Concentration
NH₄⁺ | mgN/L | 3600
DCO soluble | mg/L | 6600
DCO soluble dur | mg/L | 3400
pH || 8,5

Au regard de ces caractéristiques, une dilution de départ d'un ratio de 1:4 a été établie pour cette étude, soit 1 volume de retours pour 4 volumes d'eau traitée.

Résultats et discussions

Le graphique 1 montre la concentration en ammonium (NH₄⁺) en entrée et sortie de l'ANITA™Mox ainsi que les nitrates en sortie. Ces concentrations tiennent compte de la dilution des retours. De ce fait, la concentration en NH₄⁺ en entrée du réacteur augmente logiquement lorsque le taux de dilution diminue :

  • - lorsque le taux de dilution est 1:4 la concentration moyenne en NH₄⁺ en entrée est de 700 mgN/L ;
  • - lorsque le taux de dilution est 1:1 la concentration moyenne en NH₄⁺ en entrée est de 1600 mgN/L.

Malgré l'augmentation de la concentration en NH₄⁺ en entrée, la concentration moyenne en NH₄⁺ en sortie de l'ANITA™Mox reste faible (inférieure à 250 mgN/L). Celle-ci n'augmente que très peu avec la diminution de la dilution.

Sur une partie de l'étude à dilution 1:4, ainsi qu'à dilution 1:3, les concentrations en nitrates ont significativement augmenté en raison d'un dysfonctionnement du pilote ayant entraîné un développement de bactéries nitratantes. Toutefois, les résultats aux dilutions 1:4, 1:2 et 1:1 montrent que des concentrations moyennes de l'ordre de 40 à 60 mgN en nitrates peuvent être maintenues.

Le graphique 2 représente l'évolution des abattements en NH₄ et en azote total ainsi que la concentration en matières en suspension (MES) de la boue activée du réacteur IFAS.

Pour rappel, les bactéries nitritantes AOB

se trouvent en majorité dans les MES de la boue activée et sont responsables de la conversion partielle du NH₄⁺ en NO₂⁻, fournissant ainsi le substrat nécessaire aux bactéries Anammox. Dans la phase de démarrage du pilote, la quantité de MES et donc de bactéries nitritantes, ainsi que les rendements sur l’azote augmentent progressivement.

Lorsque la quantité de MES atteint une concentration suffisante (3-4 g/L), les bactéries nitritantes produisent davantage de nitrites qui sont consommés par les bactéries Anammox et les performances d’abattement en NH₄⁺ et en azote total du procédé augmentent pour atteindre 80 % et 90 % respectivement.

Impact des phénomènes d’inhibition

En termes de charge en NH₄⁺ abattue, aucune inhibition des bactéries nitritantes-AOB ou Anammox n’a été observée avec une dilution des retours de 1:4. Les charges abattues par le procédé ANITA™Mox, par m³ de réacteur et par jour, ont atteint 1,5 kg N/m³·j.

Lors des essais aux dilutions 1:2 et 1:1, une accumulation de nitrites dans le réacteur, mettant en évidence une inhibition importante des bactéries Anammox, a nécessité une diminution importante de la charge appliquée au réacteur, entraînant une chute graduelle de la charge abattue de 1,5 à 0,5 kg N/m³·j.

Conclusion

L’étude a permis de déterminer l’importance des concentrations en NH₄⁺ des retours d’hydrolyse thermique et l’impact de la dilution des composés inhibiteurs présents sur les performances d’abattement de l’azote du procédé ANITA™Mox en configuration IFAS. Pour les retours très concentrés de la station de Tergnier, il est donc recommandé d’appliquer une dilution comprise entre 1:3 et 1:4 afin de garantir des performances d’abattement de l’azote importantes tout en limitant la quantité d’eau de dilution à utiliser.

Le procédé ANITA™Mox est donc parfaitement adapté au traitement des retours de déshydratation provenant des procédés d’hydrolyse thermique couplés à une digestion, puisqu’il permet un abattement de plus de 85 % de la charge en ammonium des retours.

En économisant 60 % d’oxygène par rapport à une nitrification classique et supprimant la nécessité d’apport de substrat carboné pour la dénitrification, le procédé répond aux attentes énergétiques et environnementales d’aujourd’hui et de demain en permettant :

  • - une baisse de consommations énergétiques via la baisse des consommations d’air nécessaire à la nitrification,
  • - une réduction de l’empreinte carbone via la diminution des consommations énergétiques et la réduction totale de consommation de substrat carboné.

Références bibliographiques

  • + Fidgore B., Bowden G., Stinson B., Wett B., Hell M., Bailey W., Carr J., Der Minassian R. and Murthy S. 2011. Treatment of Dewatering Sidestream from a Thermal Hydrolysis Mesophilic Anaerobic Digestion Process with a Single-Sludge Deammonification Process. 84th WEFTEC, Miami, October 2011.
  • + Higgins M., Wett B., Puempel T., Takacs I., Schafer P., Stinson B., Bailey W. and Murthy S. 2011. Downstream Process Impacts as Criteria for Selection of Thermal Hydrolysis at Large Plants. 11th IWA Large Wastewater Treatment Plant, Budapest, Hungary, September 2011.
  • * Lemaire R., Thesing G., Christensson M., Zhao H. and Liviano I. 2013. Experience from Start-up and Operation of Deammonification MBBR Plants, and Testing of a New Deammonification IFAS Configuration. 86th WEFTEC, Chicago, October 2013.
  • + Veuillet F., Lacroix S., Bausseron A., Gonidec E., Ochoa J., Christensson M. and Lemaire R. 2013. Integrated fixed-film activated sludge ANITA™Mox process – a new perspective for advanced nitrogen removal. Water Sci. Tech., 69(5), 915-922.
  • + Vlaeminck S. E., De Clippeleir H. and Verstraete W. 2012. Microbial resource management of one-stage partial nitritation/anammox. Microbial Biotechnology 5(3), 433-48.
[Publicité : France Environnement]
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