Your browser does not support JavaScript!

ANC : conditions a réunir pour réussir l'ouvrage de traitement des eaux usées domestiques d'une maison individuelle.

28 decembre 2015 Paru dans le N°387 à la page 93 ( mots)
Rédigé par : Christian VIGNOLES

L?Assainissement Non Collectif reste « la » solution de traitement des eaux usées domestiques issues d'une maison individuelle isolée. Regrouper les eaux usées de plusieurs maisons est une alternative pertinente, permettant tout à la fois une plus grande sécurité de fonctionnement et un allégement du coût global pour les propriétaires, tant en installation qu'en exploitation. Toutefois, dans ce dernier cas, les difficultés d'accords de voisinage avivées par les précautions juridico administratives, rendent ces excellentes solutions très délicates à mettre en ?uvre sur le terrain. Réussir l'ouvrage de traitement des eaux usées domestiques en ANC est d'autant plus un investissement majeur pour le Cycle de l'Eau qu'à court terme, les Villes seront dans l'obligation de recourir à cette solution pour leur assainissement des eaux usées domestiques. En effet, face à la croissance des Villes - tant en extension de surface des zones habitées qu'en remplacement des maisons par des immeubles de deux à quatre étages - les systèmes collectifs d'assainissement des eaux usées domestiques, non extensibles en capacité, vont devoir « être assistés » par des unités de traitement des eaux usées. Celles-ci seraient reliées à l'immeuble qui rejettera les eaux usées traitées, sans doute désinfectées, dans les réseaux d'assainissement des eaux pluviales. L?ANC à la Ville, voilà bien une perspective innovante pour une technique considérée il y a peu comme une façon d'attendre le réseau collectif d'assainissement. Cette solution, tout à la fois techniquement viable et économiquement intéressante pour les Finances publiques, implique la maîtrise de l'outil ANC, ce dont les professionnels de la filière ont aujourd'hui la capacité, sous réserve de réunir quelques conditions que cet article vous présente.

Réussir l’ouvrage de traitement des eaux usées domestiques en ANC est d’autant plus un investissement majeur pour le cycle de l’eau qu’à court terme, les villes seront dans l’obligation de recourir à cette solution pour leur assainissement des eaux usées domestiques.

En effet, face à la croissance des villes – tant en extension de surface des zones habitées qu’en remplacement des maisons par des immeubles de deux à quatre étages – les systèmes collectifs d’assainissement des eaux usées domestiques, non extensibles en capacité, vont devoir « être assistés » par des unités de traitement des eaux usées. Celles-ci seraient reliées à l’immeuble qui rejettera les eaux usées traitées, sans doute désinfectées, dans les réseaux d’assainissement des eaux pluviales.

L’ANC à la ville, voilà bien une perspective innovante pour une technique considérée il y a peu comme une façon d’attendre le réseau collectif d’assainissement.

Cette solution, tout à la fois techniquement viable et économiquement intéressante pour les finances publiques, implique la maîtrise de l’outil ANC, ce dont les professionnels de la filière ont aujourd’hui la capacité, sous réserve de réunir quelques conditions que cet article vous présente.

Chaque citoyen est conscient du caractère polluant de ses déjections et de ses eaux usées. L’assainissement est pour tous une nécessité absolue mais, dans la conscience collective, le moyen d’arriver à l’assainissement réussi n’est pas concrétisé. Pire, depuis plus d’un siècle persiste l’idée que l’unique solution en guise d’assainissement (des eaux usées domestiques) est le réseau de collecte et de transport, aboutissant à une unité de traitement dimensionnée pour le village, le bourg ou la ville.

Traiter ses eaux usées à l’échelon familial reste une solution d’attente de l’équipement collectif. Abordez le sujet de l’ANC et

[Photo : Assainir dans le respect de l'environnement, c’est l'ANC simplement réalisé professionnellement.]

On vous répondra en termes de nuisances olfactives, sonores, visuelles. L'assainissement non collectif n’est-il donc qu'un « pis-aller », qu'une solution retenue par les réglementations nationales pour faire patienter les utilisateurs, qu'un « ersatz » de dépollution, qu'une illusoire protection de l'environnement ?

La récente « Étude in situ du Tarn » conduite en collaboration par Veolia Eau et l'Agence de l'eau Adour Garonne présente des constats et des mesures objectifs et précis de ce qui se passe au plus près des 66 ouvrages étudiés depuis près de 6 ans. Ces travaux apportent un éclairage nouveau sur la nature des sujets à surveiller pour réunir les conditions indispensables à la réussite d'un ouvrage ANC.

Un ouvrage d’Assainissement Non Collectif est en fait l'aboutissement de quatre conditions indissociables, devant être réalisées de façon professionnelle :

  • • Une étude, pour concevoir et dimensionner en adéquation avec le site ;
  • • Un produit de traitement des eaux usées, issues de l'immeuble à desservir ;
  • • Une mise en œuvre de l’ouvrage, depuis le point de collecte général des eaux usées brutes de la maison jusqu’au rejet final dans l'environnement ;
  • • Une exploitation, adaptée à l'ouvrage installé et à son utilisation.

La maturité de l'ANC sur un territoire se lit au constat de la réalisation concomitante de ces quatre conditions.

L'avenir de l’ANC, tant sur son marché traditionnel d’installations neuves et de réhabilitations rurales que sur celui de l’urbain et du périurbain – que l’explosion de la taille de nos agglomérations va faire émerger – passe par l’excellence que l'ensemble des acteurs professionnels saura être capable de mettre sur les quatre étoiles de la constellation ANC : l'étude, le produit, l'installation et l’exploitation.

C'est ainsi que sera finalement « agréée » cette technique à part entière, dont nous allons voir qu'elle possède les qualités nécessaires pour être un outil essentiel, en tout lieu, au respect de l'environnement.

L’étude in situ de 66 dispositifs dans le département du Tarn

Bien évidemment, il est impensable de résumer ce travail de plus de 5 années en quelques lignes et je vous invite à lire l'étude pour y retrouver l'ensemble des détails que vous pouvez souhaiter connaître. Cependant, l’avant-propos (retranscrit ci-après) est essentiel :

[Encart : Ces travaux ne peuvent et ne doivent pas être utilisés pour comparer des produits différents puisque les performances épuratoires constatées et les performances d’exploitation enregistrées ne peuvent être à aucun moment reliées aux caractéristiques des pollutions rejetées par les habitants des maisons desservies. De plus, le nombre de PIA (Petites Installations d’Assainissement) étudiées issues d'un même constructeur reste insuffisant pour constituer un échantillon statistiquement représentatif d’une généralité. Ceci n’enlève rien à la réalité des constats et des mesures faits et permet d’accroître notre connaissance et notre compréhension du travail à accomplir pour ces ouvrages et du fonctionnement de l'ANC dans la vraie vie.]

En quelques rapides mots, je vous propose quelques constats et résultats fondamentaux.

Un ouvrage in situ n’est pas synonyme d’un produit agréé

Depuis 2009, la France a instauré l’agrément des produits d’ANC, sur la base du marquage CE décrit dans la norme européenne EN 12566-3 + A2. Cette disposition concerne le produit, ce dispositif de traitement des eaux usées doté d'une entrée et d'une sortie, l’entrée étant raccordée aux canalisations issues de la maison desservie et la sortie étant reliée à « l'outil » de retour des eaux usées traitées dans l'environnement. Lorsqu’on parle d’assainissement non collectif pour un site donné, ce n’est pas du produit agréé dont on parle, mais bien de l’ouvrage dans son ensemble, soit des canalisations, des boîtes d'inspection, d’équipements comme souvent un poste de relèvement, un dispositif de rejet et le produit de traitement des eaux usées.

Durant la durée de l’étude, laquelle concernait des produits antérieurs à l’existence de l’agrément – mais tout à fait semblables à ceux qui ont bénéficié de l’agrément quelques mois plus tard – un tiers des ouvrages a fonctionné pendant 5 ans sans nécessiter aucune intervention humaine durant les visites trimestrielles ou sur déclenchement d’alerte.

Pour les ouvrages ayant eu des soucis de fonctionnement :

  • • des dysfonctionnements liés aux réseaux ont concerné un tiers des constats ;
  • • un poste de relèvement sur deux, installé hors du produit de traitement des eaux usées, a montré des ennuis bloquant le bon fonctionnement de toute la filière ;
  • • un produit sur trois a été la cause du dysfonctionnement de l’ouvrage en place.

Attention donc lors de toute analyse sur site, l'étude initiale doit permettre le meilleur choix de produit pour l’ouvrage final, la mise en œuvre de l’ouvrage incluant le produit doit être professionnelle et une

[Publicité : Cabinet-Conseil Blondel]

réception par un tiers indépendant est indispensable. Trop souvent le produit, par son nom, supporte tous les maux de l'ouvrage ; c’est faux : dans plus de 75 % des situations rencontrées, le « reste de l’ouvrage » est la cause des dysfonctionnements constatés.

La première performance d’un ouvrage est son aptitude à fonctionner en autonomie

Juger un ouvrage, c'est d'abord connaître son aptitude à fonctionner « tout seul ». J'aime comparer l'ANC à l'automobile, dont la fonction est de vous conduire d'un point à un autre ; faire appel à la dépanneuse n'est envisagé qu'en dernier recours. Une fois ce point établi, on peut examiner le temps de parcours, la consommation de carburant et d'huile, l'usure des pneumatiques…

à assurer une protection très satisfaisante de l'environnement avec pourtant des process utilisés représentatifs de la variété des qualités mises sur le marché.

Deux courbes, reprenant l'ensemble des mesures réalisées sur l'ensemble des process mesurés, montrent ces résultats :

• MES (échantillons 24 heures) :

[Photo : graphique « MES »]

• DCO (concentration « objectif » 125 mg/L, échantillons 24 heures) : la cible a été atteinte dans 72 % des cas.

En résumé, obtenir des performances recherchées sur la dépollution des eaux usées domestiques, sous réserve que le fonctionnement de l’ouvrage soit assuré par une exploitation adaptée, est très prévisible. Les process des produits intègrent correctement notamment les besoins en oxygène et les recirculations nécessaires. L’étude du Tarn a permis de valider in situ ces performances attendues.

Les eaux usées domestiques issues d’une maison individuelle ont des flux polluants rapidement variables dans le temps et en quantités tout en respectant les charges organiques moyennes de 60 g DBO₅ par habitant de la Directive Européenne E.R.U de 1991.

Sur ce point essentiel à la protection de l'environnement, il a été constaté durant l’étude quinquennale que seul un tiers des ouvrages avait donné satisfaction – qu’il s'agisse d’ailleurs de filières agréées ou traditionnelles – car les problèmes d’ouvrages sont indépendants des agréments.

L’autonomie de fonctionnement inclut, bien évidemment, les opérations d’exploitation requises pour le produit par le professionnel industriel. Très certainement aussi, les conditions de mise en œuvre du produit influencent le fonctionnement autonome de l’ouvrage. N’a-t-on pas d’ailleurs constaté que ¾ des cuves installées, tous types de filières confondus, ne sont plus planes après 5 ans de fonctionnement ? Voilà matière à réflexion sur l'assise nécessaire à ces parties d’ouvrages !

L’obtention de qualités de rejets réglementairement corrects est une performance courante dès lors que l’ouvrage fonctionne.

Au risque d'avoir troublé quelques croyances dans cette « religion qu’est souvent l’ANC », les ouvrages annuellement exploités et trimestriellement surveillés ont montré des résultats les eaux usées traitées tout à fait de nature.

On constate que la cible courante de concentration de 30 mg/L, pour le paramètre MES d’un rejet dans le milieu naturel, est respectée dans 83 % des cas.

On notera d’ailleurs que les filières traditionnelles ont une quote-part dans les 17 % des résultats de concentrations de rejets supérieures à 30 mg/L, bien supérieure à leur représentation dans l’échantillon des 66 filières testées.

• DBO₅ (échantillons 24 heures) :

[Photo : graphique « DBO5 »]

Le numéro 384 de la présente revue détaille en pages 65 et 66 ce sujet. Je retiendrais simplement que cette immense variabilité des eaux usées domestiques brutes constitue une difficulté supplémentaire pour les process des produits d’épuration des eaux usées, un paramètre majeur les différenciant des unités de traitement installées à l'aval de quelques maisons regroupées. Sur ce sujet des eaux usées domestiques brutes, il convient aussi de noter l’évolution des pollutions très liée aux produits d'hygiène et de nettoyage récemment arrivés sur le marché.

Nous avons pu démontrer que dans certains sites expertisés plus de 50 % de la charge organique à traiter était issue de ces « liquides nettoyants » (E.I.N n° 384, page 67).

On constate que la cible courante de concentration de 35 mg/L, pour le paramètre DBO₅, d’un rejet dans le milieu naturel, est respectée dans 91 % des cas.

Réunir les conditions pour réussir l'ouvrage ANC

Nous avons ci-dessus énoncé les quatre conditions obligatoires à la réussite d’un

[Photo : Dans un ouvrage d’ANC, l’excellence d’intégration et l’excellence d’exploitation font bon ménage dès lors qu’étude, choix du produit et mise en place ont été réussis.]

... ouvrage ANC sur un site donné. Je vous propose de les examiner successivement.

Une étude pour concevoir et dimensionner en adéquation avec le site

Pour bien comprendre la nécessité d’une étude de conception et de dimensionnement, il est utile de bien identifier les limites de l’ouvrage que l’on va mettre en place. Très souvent, l’ouvrage n’est pas envisagé dans sa globalité mais réduit au produit « agréé » qu’il contient.

L’élément déterminant de choix du produit agréé pour l’ouvrage à construire se situe dans la cote altimétrique d’arrivée des eaux usées de la maison à desservir. Autant cette cote est assez simple à déterminer en cas de construction neuve (même si l’on est parfois amené à jouer avec les pentes des canalisations pour rattraper quelques centimètres de décalage) ce sujet reste essentiel lors de réhabilitations. En effet, les évacuations d’eaux usées de maisons anciennes ont été ajoutées lors de l’arrivée de machines à laver, de salles de bains, de toilettes intérieures, etc., autant d’équipements et d’installations de confort mis en place en fonction de zones disponibles dans la maison hors d’une réflexion coordonnée intégrant l’assainissement des eaux usées. Ainsi, ramener les eaux usées, issues parfois de différents points aux quatre coins d’une maison réhabilitée conduit à un travail minutieux et coûteux, souvent mal pris en compte par une étude trop superficielle.

Le choix du produit de traitement des eaux usées doit aussi être justifié et cette conception est la faiblesse majeure des réalisations, c’est-à-dire pour environ une installation sur six. L’analyse rapide sur le terrain conduit à identifier des zones d’influence de bureaux d’études, spécialistes d’un produit et non du produit existant et agréé le mieux adapté. Théoriquement parlant, chaque produit agréé doit pouvoir répondre à toute situation. Comme pour le choix d’un véhicule, si l’on veut faire du tout terrain, un coupé sportif surbaissé risque de vous décevoir. Il est prudent de choisir son ANC en fonction de l’usage que l’on souhaite en faire, voire de son adaptation à votre terrain.

J’ajoute que d’autres critères, le positionnement vis-à-vis des vents dominants par exemple, doivent être pris en compte avant installation.

Ces retours d’expériences, cette faculté d’anticipation – même en cas d’événements dits exceptionnels – font partie de la compétence clairvoyante attendue d’une étude lorsqu’elle est réalisée par un professionnel.

Le débat est donc fort éloigné du comptage de pièces de la maison déterminant la taille de l’équipement à installer. S’il ne s’agissait que de cela, à quoi servirait-il de solliciter l’assistance d’un professionnel ?

Enfin et même si cela est souvent le cas sur le terrain, il est anormal que l’agent du Service Public d’Assainissement Non Collectif (SPANC) conseille de façon si directive. Il en résulte pour le particulier l’impression qu’il est mieux pour lui de faire ce qu’on lui dit. Le particulier, Maître d’Ouvrage de son équipement, pense en toute bonne foi, en écoutant et en suivant les « conseils » de l’agent du SPANC, respecter les prescriptions obligatoires sans autre choix possible.

Clarifier cette situation des limites, des objectifs et des conclusions fournies par une vraie étude par un professionnel dont c’est le métier, permettrait d’apporter de l’excellence à ce sujet, par exemple, au moyen d’un référentiel accessible à l’ensemble des acteurs professionnels et consommateurs.

Un produit de traitement des eaux usées issues de l’immeuble à desservir

Parmi plusieurs centaines de produits agréés par la réglementation française – donc tous aptes à être installés chez vous – comment trouver celui qui va convenir à votre situation ?

Les professionnels industriels manufacturiers de ces dispositifs de traitement des eaux usées feraient bien de s’interroger sur ce qu’est leur produit. Respecte-t-il la réglementation en obtenant l’agrément et rien de plus ? Présente-t-il des qualités différenciantes vis-à-vis de l’agrément, qui mériteraient d’être portées à la connaissance du propriétaire acquéreur et/ou utilisateur ? Par exemple, les vidanges de boues des cuves d’un process font l’objet, dans le cadre du document d’exploitation, d’exigences de fréquences de vidanges non fondées sur la réalité des performances des ouvrages ciblées. Ainsi, pour obtenir son process de cultures libres ou fixées agréé, l’industriel doit-il écrire obligatoirement sa préconisation de vidange dès que la hauteur des boues atteint 30 % de la cuve. La conséquence immédiate est la multiplication par trois du nombre de vidanges, soit une vidange annuelle sur dix ans et un surcoût sur cette période, selon les régions, de 1 500 à 2 000 €.

De même, au plan mécanique, toutes les cuves agréées ne présentent pas les mêmes résistances aux effets extérieurs de remblais, ne réagissent pas de la même façon lors des vidanges, ne peuvent tolérer d’erreurs de matériaux de remblaiement, toutes situations qui peuvent intervenir en réalité. Certains matériaux constitutifs des cuves autorisent des contraintes très supé-

rieures à celles contrôlées par les essais de la norme EN 12566-3 + A2, d'autres manifestement pas. Hormis quelques spécialistes, nul ne le sait puisque l’Agrément ne peut en parler, appuyé sur une norme qui fait foi.

Exprimer ce que l'on propose en plus du minimum exigé par la réglementation, c’est informer l’acheteur d’une Renault Dacia qu’il n’a pas acquis le confort et la puissance tranquille d'une Rolls Royce. Quand bien même il pourra se déplacer indifféremment avec l'une ou l'autre, 12 heures de route lui permettront sans doute de mieux apprécier la différence.

Tous les procédés utilisés par les produits proposés ne bénéficient pas des mêmes retours d’expériences même s’ils évoluent. Cet aspect n’est nullement pris en compte par les Agréments et constitue pourtant la conséquence directe du développement du produit, développement sans lequel toute fiabilité et toute pérennité de fonctionnement de produit mis en œuvre est illusoire. Pour rester dans notre comparaison automobile, pourquoi les constructeurs des voitures du grand public font-ils de la compétition (Rallyes, Formule 1 et autres) ? Sans aucun doute pour l'image de marque, mais surtout pour tester des solutions techniques innovantes dans des conditions limites de mise au point, pour acquérir de la fiabilité et les installer ensuite sur nos véhicules. Cela s’appelle le développement et le marché propose encore aujourd'hui quantité de produits agréés pour avoir fait leurs 8 mois de tests, mais insuffisamment développés pour apporter à l'utilisateur la satisfaction de fonctionnement escomptée sur une carrière de 30 ans dans leur jardin. Pour donner un exemple, pourquoi un produit, testé selon la norme EN 12566-3 + A2, peut-il être vidangé durant les tests autant de fois que son constructeur l’indique et pourquoi cette information n’est-elle pas publique ? Qui peut aujourd’hui, en expert de l’ANC, dire qu’un tel produit, même agréé, est satisfaisant pour celui qui l’achète ? Ce type d’incohérence, ici en substance une norme sous influence d'un lobbying médiocre, existe depuis des années et mettra encore des mois à disparaître.

Alors, pourquoi les industriels acceptent-ils de mélanger le bon grain et l’ivraie ? Pourquoi ne valorisent-ils pas leurs qualités propres, dans un marché où le client est démuni faute de compétences minimales ? Pourquoi lui laisse-t-on, à ce client, acquérir un produit médiocre dont il est sûr qu’il sera rapidement insatisfait plutôt que de l’informer des qualités différenciantes des meilleurs produits ? Le marché des produits ne se développera qu’avec de bons produits, dotés d’une exploitation professionnelle au juste coût.

Là encore, référencer les qualités différenciantes des produits ne peut que sécuriser le consommateur, qui peut alors privilégier ce qui lui semble le plus important. Le consommateur doit être informé, au-delà de l’obtention du minimum qu’est l’Agrément. De même, il doit savoir que les filières traditionnelles (hormis le filtre à sable vertical) seraient bien en peine, au plan technique, d’obtenir un quelconque Agrément. À un moment donné, il faut comprendre qu’enfouir la pollution dans le sol n’est pas un mode de traitement durable même s'il y a plusieurs décennies, cette méthode a pu efficacement prévenir les épidémies. Le cycle de l'eau a des exigences non satisfaites par ces « technologies miséreuses ».

Une mise en œuvre de l’ouvrage depuis le point de collecte général des eaux usées brutes de la maison jusqu’au rejet final dans l’environnement

La mise en œuvre de l’ouvrage d’ANC est la conjoncture du terrain et de l’équipement, réunis pour assurer la mission confiée à l’ouvrage. C'est la naissance de la réalité de la protection de l'environnement. Cette étape est donc essentielle et des conditions strictes doivent être respectées :

La spécialisation des entreprises

Rares sont les entreprises de pose issues des Travaux Publics (TP) ou du Bâtiment, voire des Paysages, dont l’activité est intégralement dédiée à l'installation des unités d’assainissement individuelles. Dans le cadre de l'étude d’expérimentation in situ du Tarn, nous avons fait appel à deux entreprises de TP ayant déjà pratiqué la mise en place de Petites Installations d’Assainissement.

Malgré le sérieux professionnel indubitable des deux entreprises choisies, le défaut majeur constaté est leur incapacité à optimiser leur organisation. Malgré le nombre de PIA pouvant être installées en parallèle sur des sites distants de quelques kilomètres, aucune mutualisation des moyens de chantier n’a pu être réalisée, ce qui a entraîné des temps d’attente des sureffectifs, un allongement de la durée des travaux, des immobilisations inutiles de matériels et surtout des dimensionnements de matériels inadaptés aux tailles réelles des chantiers à réaliser.

La visite de chantiers en Flandres belges, de même nature que ceux dans le Tarn, incluant des travaux plus délicats tels que le rabattement de nappes phréatiques notamment, a apporté des enseignements riches et transférables n’importe où. Ainsi en Flandres, les apports et les enlèvements de matériaux par bennes mobiles, avec rotation de véhicules porte-bennes desservaient six chantiers en parallèle, avec deux hommes par chantier et deux chauffeurs. Au final, six PIA mises en place en deux jours maximum par quatorze personnes, déblais de pose évacués, tous matériaux et matériels approvisionnés, chantiers nettoyés et réception réalisée avec la bienveillante attention de propriétaires, ravis à la fois de leur assainissement et de leurs parterres floraux retrouvés.

Culturellement et historiquement, ces travaux sont laissés en France aux entreprises locales. Ces dernières réalisent ainsi un chiffre d'affaires captif, véritable « poire pour la soif » et ne cherchent pas à rationaliser l’organisation des chantiers des PIA. Si l'on ajoute à cela l'effet négatif de subventions souvent calculées et versées sur la base d’un forfait maximal – qui bien qu’étant une moyenne pertinente, tire les coûts des chantiers vers le haut – on arrive ainsi à une « tradition de bricolage » sur le terrain, que l’absence de réception formelle pérennise sans que les structures de SPANC locaux puissent vraiment réagir. Leur activité est limitée à un contrôle réglementaire et non à une véritable réception technique de travaux, incluant des vérifications factuelles qui devraient leur être liées.

La préparation des chantiers de réhabilitation des P.I.A

Ce que nous avons constaté lors des installations des P.I.A, c’est l'absence d’une vraie préparation de chantier. Il existe bien sûr un croquis ou une esquisse rapide de l’installation à réaliser, mais tout le maté-

[Photo : Vous voulez un bon tuyau ? L’efficacité de la ventilation d’un ouvrage d’ANC est inversement proportionnelle à la longueur des canalisations utilisées...]

Le matériel prévu pour l’installation de la PLA est livré sur le chantier dès lors que débute l’implantation superficielle des ouvrages.

Résumons-nous : l’absence d’étude initiale est majoritairement la règle.

Il arrive parfois que le propriétaire change d’avis quant à l’implantation de son installation ; il faut reprendre à zéro les croquis du projet. Tout ceci est compréhensible mais indique surtout que tout chantier d’ANC est préalablement sous-estimé et ne se voit pas accorder la même considération que les travaux de finition, tels que les réaménagements paysagers finaux. L’Assainissement Non Collectif n’est pas une science « noble » et ne fait pas rêver l’usager. Sa complexité mériterait d’être reconnue par un éclairage très positif assurément inhérent à l’élaboration de critères de référence.

Réaliser des pentes à 2 ou 3 cm par mètre ne peut être le fait du hasard. Réussir cette opération, c’est d'abord disposer d’un plan de masse du projet mis à jour et d’une implantation vérifiée et validée. La résultante de l’irrespect de cette contrainte est simple : les soucis de pente des canalisations sont très nombreux et lourds de conséquences pour l’exploitation. En effet, allonger un parcours entre deux points à seuil fixe équivaut, lorsqu’ils se rejoignent, à diminuer la pente des canalisations et à rencontrer ensuite des ennuis récurrents d’exploitation, pour un tiers des ouvrages objets d’anomalies dans l’étude du Tarn. Préparer un chantier est un vrai métier, qui ne s’improvise pas, quelle que soit la taille du chantier et celle de l’entreprise de pose.

Une attention nécessaire doit y être apportée, selon des conditions à référencer très précisément.

La réalisation des chantiers et le respect des règles de l’art

Réaliser un chantier de Petites Installations d’Assainissement impose de disposer de personnels formés à la tâche demandée, de matériels de chantier adaptés à l’installation projetée et d’une organisation « entraînée » à ce type de travaux.

Un bon chantier ne se conçoit pas sans un vrai chef de chantier.

Dans la mesure où ce marché du petit assainissement se développe de façon très médiocre, avec environ 100 000 installations annuelles pour 25 % des réhabilitations — alors qu'il devrait se situer à 400 000 unités annuelles dont 80 % en réhabilitations — il ne faut pas s’étonner que la qualité des réhabilitations soit un vecteur « avec une forte marge de progression ». Il en sera ainsi tant que des entreprises de TP spécialisées ne se consacreront pas exclusivement à ce métier et à cette noble tâche qu’est l’ANC, nous permettant d’aider à préserver notre environnement.

Respecter les règles de l'art en Assainissement Non Collectif, cela signifie décaisser la fouille exactement à la cote nécessaire, sans avoir à remblayer ensuite pour rattraper le niveau. C’est aussi travailler en respectant les obligations réglementaires de sécurité. C’est remblayer les ouvrages en compactant les terrains, afin que ce compactage n’évolue plus dans le temps et permette de conserver la planéité du sol et des installations. C’est appliquer les règles strictes décrites dans les fascicules nationaux de travaux et applicables à tous les chantiers. On a malheureusement en France pour fâcheuse habitude de ne respecter ces fascicules que lors de la réalisation de gros chantiers, ceux où une vraie surveillance est déjà en place.

Dans les faits, la responsabilité du chantier lors d'une réhabilitation ANC n’est assurément pas le fait de l’agent du SPANC — dont le seul rôle est de rapporter à sa structure politique — mais bien celui du propriétaire de l'installation, qui a commandé les travaux en tant que maître d’ouvrage. Ce maître d’ouvrage ne fait quasiment jamais appel à un maître d’œuvre. Il assume donc, seul, la responsabilité de l’ouvrage installé. L’entrepreneur est donc seul compétent au plan technique et est son propre contrôleur et son propre vérificateur des règles de l'art. Qu’attendre d’une telle organisation, hormis des soucis de terrain qui se manifesteront précisément lors d’un colmatage bloquant l’évacuation des eaux usées ? Le reste du temps, on se satisfera d’un « à peu près » ; tout ceci est bien peu professionnel et inadapté à un investissement de 20 à 30 ans. Il faut que des solutions volontaires soient mises en place par les professionnels eux-mêmes, industriels, installateurs ou bureaux d’études afin de traiter ce sujet et de venir en aide aux propriétaires des Petites Installations d’Assainissement.

Quant à la planéité des équipements, on constate dans l'étude après quatre ans de fonctionnement que deux tiers des équipements ne sont plus à surface horizontale. Cette situation est pour le moins gênante et il convient de lui trouver des solutions : soit la réalisation d’une dalle de pose est indispensable — préconisation aujourd’hui mal aimée des différents acteurs, pour raison officielle d’économie — soit il faut avoir un terrassement initial parfaitement plan (les cales « d’horizontalité » des produits de construction ne résistent pas à l'épreuve du temps !). Ainsi, un auget non installé de façon parfaitement horizontale ne pourra jamais fonctionner correctement. Un appareil présentant quelques centimètres d’écart entre ses deux bords montrera ainsi rapidement des insuffisances hydrauliques.

Mais le point crucial reste le crédit accordé au respect des règles de l’art de la construction.

tion lors de la réalisation des chantiers, c'est une illusion qu'il faut combattre par une vraie réception des ouvrages.

La qualité d’un ouvrage en place n’est jamais le fait du hasard, mais toujours le résultat d'une application qualitative des règles de l'art par des professionnels compétents.

La réception des ouvrages

Il serait opportun que l’acte de réception des ouvrages devienne une obligation réglementaire et soit réalisé par une structure tierce, indépendante de l’entreprise de pose ou du maître d’œuvre. Il n'est pas interdit que cette réception indispensable devienne une démarche volontaire des acteurs professionnels de l'ANC. Cela reste toujours une garantie indispensable pour le propriétaire et maître d’ouvrage de l’équipement installé, qui a dépensé plusieurs milliers d’euros.

La réception des ouvrages doit être définie pas à pas et constituée de vérifications mesurées qui assurent la conformité de la réalisation à celle du projet et qui correspondent aux exigences des fabricants pour la pose de leurs produits. Un référentiel précis doit être établi et les conditions exigées doivent toutes être respectées.

Les SPANC ne peuvent et ne doivent pas donner l'illusion de réaliser cette réception. Le feraient-ils, leur position administrative ne pourrait assurer au propriétaire de l'ouvrage une quelconque garantie puisque la collectivité ne viendra jamais assurer la réparation d’une quelconque malfaçon ou dysfonctionnement. Il faut sortir de cette confusion par laquelle un propriétaire d'une petite installation d’assainissement pense que, si l’agent du SPANC a attesté de la conformité de ses travaux d’assainissement, il est couvert en matière de qualité pour ce qui a été réalisé chez lui. En réalité, l'avis du SPANC ne donne au propriétaire que l’assurance que la P.L.A est installée. L'appréciation du SPANC est donnée sans aucune mesure réelle factuelle et contradictoire. En cas de contentieux, et pour un juge, cet avis n’a aucune valeur au plan juridique.

Il est souhaitable, dans l’intérêt des citoyens disposant d’un ouvrage d’ANC, que leurs intérêts soient mieux protégés. Comme le montrent nos illustrations de cas, qui font la réalité de l’installation d’ouvrages ANC, l'excellence des installations ne sera pas atteinte dans un futur proche sans une énorme mise en ordre professionnelle :

  • * assurant les formations nécessaires,
  • * traitant des problèmes techniques rencontrés, mettant l’organisation au premier plan des actes de pose des ouvrages.

Ces actions sont absolument prioritaires. Les conséquences d’installations déficientes décrédibilisent ce mode d’assainissement et participent à une opinion de médiocrité pour l'ensemble du marché.

Une exploitation adaptée à l’ouvrage installé et à son utilisation

L’ouvrage d’assainissement est un tout non morcelable

L’expérimentation in situ dans le Tarn de 66 Petites Installations d’Assainissement individuelles met très clairement en évidence que le produit vendu par un fabricant et ses nombreuses consignes ne constituent simplement qu’une partie de ce qu’est l’ouvrage de traitement des eaux usées domestiques brutes installé à la sortie d'une habitation pour assurer la protection de l'environnement.

Un ouvrage d’Assainissement Non Collectif est constitué, pour résumer :

  • * de rejets regroupés en un point unique,
  • * de canalisations qui partent de ce point unique pour rejoindre le site où la P.L.A choisie sera mise en place,
  • * d'un équipement de traitement des eaux usées réglementaire, mis en place après réalisation d'un terrassement (cet équipement ayant un ou plusieurs volumes à relier par des connexions hydrauliques),
  • * dans près de la moitié des cas, une installation d’ANC nécessite un poste de relevage des eaux usées à une étape du parcours,
  • * une nouvelle canalisation pour atteindre une zone d'infiltration ou un rejet dans un exutoire naturel.

À chaque étape de la mise en œuvre des P.L.A surviennent des « accidents de parcours ». Environ un tiers des canalisations rencontrent des soucis de fonctionnement, voire dans environ un cas sur deux des planéités non satisfaisantes des ouvrages de traitement. Rares sont les guides de fabricant ou d’installateur qui font mention de ces probabilités d’accidents, qui vont perturber au point de l’interrompre le fonctionnement de l’ouvrage.

Pour réaliser l'étude in situ Tarn, des sommes importantes ont été investies afin de mettre en œuvre les meilleures pratiques sur le terrain, pratiques indispensables à une bonne réalisation des ouvrages.

Pour quelles raisons les P.L.A expérimentées ont-elles tendance à rencontrer des difficultés de bon fonctionnement ?

La raison essentielle est qu’une P.L.A est un ouvrage, non un produit dont la fragilité est sous-estimée. Certes, les essais sont légion avant qu’un produit ne soit admis à circuler en Europe mais la résistance aux essais, la satisfaction à des performances dans des conditions type n’ont jamais égalé la vérification du bon fonctionnement sur le terrain et c’est cela que notre étude a mis en évidence. La robustesse pratique d'un ouvrage est le préalable indispensable à toute excellence de fonctionnement. À ce jour, rares sont les pays du monde qui intègrent ce type de réalité. Le modèle national unique du Johkasou japonais a été conçu, sans doute, dans cet esprit, et il n'est heureusement pas le seul. La saine concurrence est le garant de l’émergence future de dispositifs « améliorés », permettant une meilleure santé pour notre environnement.

Faut-il un suivi continu des ouvrages ?

En 2015, à quelques exceptions près, le fonctionnement d’une unité de type « microstation » sans surveillance en continu — entre six mois voire un an — revient à accepter sa déficience. Pour un filtre compact, ce délai passe à environ deux ans et demi. Mais attention, nous sommes dans le domaine des probabilités et sans une réelle surveillance continue, on ne peut jamais être certain de ce qui se passe, des produits très bien développés mais plus rares sur le marché assurant une garantie de fonctionnement sans incident plus longue. La facilité du raisonnement pousserait à transférer au propriétaire de la P.L.A le soin de repérer les anomalies. Des constructeurs de microstations mettent même en place des alarmes sonores ou visuelles locales, démarche tout à la fois pragmatique et sympathique certes, mais uniquement efficace si leur déclenchement demeure exceptionnel.

Dans tous les autres cas, on débran-

[Photo : L'excellence dans l'infiltration des eaux usées traitées est indispensable pour la réussite d'un ouvrage ANC. Voici un tunnel expérimenté avec succès au pied d'un chalet pyrénéen.]

chera l’alarme parce que la répétition des pannes annoncées, réelles ou fausses, parfois accompagnées de factures d'intervention, poussera le propriétaire à aller vers sa propre recherche d'un équilibre de fonctionnement. Naissent ainsi ces « by-pass discrets » générateurs de quiétude dès lors que leur fonctionnement s’opère sans nuisance olfactive ou visuelle.

Bien évidemment, raccorder les éléments électriques sensibles d'une PLA à un central de gestion est la bonne solution pour un fonctionnement suivi et assuré de l’unité de traitement des eaux usées domestiques ainsi équipée.

Pour les prochaines années, on nous annonce l'arrivée d’objets domotiques connectés, une « Startup » toulousaine a pour objectif de quadriller le monde de réseaux permettant de véhiculer des informations simples, à des coûts beaucoup plus réduits qu’aujourd’hui, même si ces raccordements d'informations nous ont été facturés en 2010 entre 300 et 400 € HT par unité – ce qui est tout à fait accessible pour garantir le fonctionnement de ces équipements.

Le suivi continu des ouvrages doit constituer une priorité de développement en ce domaine du petit assainissement. Inutile d'investir des millions d’euros dans des ouvrages performants si l’on refuse ces 3 % supplémentaires assurant leur fonctionnement.

Faut-il exploiter les P.L.A ?

En 2015, une chaudière familiale n’est pas utilisée sans contrat d’entretien, et on ne conçoit pas l’entretien de son véhicule ailleurs que dans un garage. Quelle est alors la différence avec l'assainissement ? C’est pourtant si simple, sans chaudière familiale en bon état de fonctionnement, la sanction immédiate est d’avoir froid. Un véhicule non entretenu vous contraint à appeler le dépanneur... Avec un assainissement hors service, les conséquences réelles sont majoritairement peu perceptibles pour le propriétaire ou même les voisins ; tout se passe dans le sol et une discrète pollution n’inquiète jamais vraiment grand monde. Certaines salles de congrès ou colloques dédiés à l’Assainissement Non Collectif résonnent encore de déclarations d’acteurs importants de cette science, soulignant que « les masses d'eau ne risquent pas d’être polluées par ces rejets insignifiants ». Il importerait sans doute de moduler ces affirmations. Les exigences réglementaires françaises pour l’ANC, toujours perfectibles, ont permis à l'environnement depuis environ un siècle d’être mieux protégé.

Alors OUI, il faut exploiter les P.L.A quelle que soit leur type (traditionnel ou agréé) ! Il faut mettre en place des contrats d’entretien, adaptés à la robustesse et à la réalité technologique des produits installés ! Il faut développer une vraie compétence de terrain, pour identifier les points sensibles et proposer des solutions afin que soit assurée la continuité de fonctionnement des ouvrages.

Cette étude in situ Tarn montre clairement :

  • © que tous les produits expérimentés peuvent avoir in situ des performances environnementales acceptables,
  • © que les propriétaires sont incapables d’assurer de façon fiable la remise en fonctionnement de leur équipement,
  • © qu'il est impossible dans une exploitation à coût optimisé de donner des fréquences de passage certaines, car chaque apport de pollution est spécifique à chaque maison autant sur la base du nombre de personnes utilisatrices que sur les modes de vie de ces personnes et les produits utilisés pour nettoyer les choses et les gens dans une maison,
  • © qu'il est obligatoire de mettre en place un contrat d’exploitation, que l’exploitant devra aménager au fur et à mesure que la maison et ses occupants seront mieux connus – il est aussi inutile de vidanger une fosse septique tous les ans « pour être tranquilles » car on nuit ainsi au développement des mécanismes anaérobies et on va engendrer des traitements inutiles en extrayant les boues trop tôt,
  • © qu'une première assistance est une surveillance à distance qui constitue le premier pas intelligent et moderne du contrat d’exploitation obligatoire.

Quel type d’exploitation est adapté aux ouvrages?

Cette question doit être posée. En effet, une vision sommaire de ces petites installations d’assainissement pourrait laisser à penser que les qualifications nécessaires pour les exploiter restent très rustiques, même si certains dispositifs traditionnels ne nécessitent que peu d’actions.

Mais en réalité, sur le terrain, rien ne ressemble moins à une P.L.A qu’une P.I.A. Comparons notre P.L.A à une voiture. Pensez-vous que n’importe quel garagiste, habitué à une marque donnée, va apporter le service d’entretien nécessaire à n’importe quel véhicule ? Il est bien évident que non et s’il s’avère capable d’identifier les raisons d’une panne, cela ne sera sans doute pas suffisant pour réaliser une réparation efficace et rapide, dans des conditions technico-économiques acceptables. Aujourd’hui, l’entretien ne se résume pas à une vidange aussi souvent que possible, mais à une vidange le plus tard possible – dont la régularité est à apprécier produit par produit – et au suivi précis de pièces d’usure.

L’étude in situ Tarn montre qu’un tiers des armoires de commande électriques dysfonctionnent, stoppant l’ouvrage concerné, que la moitié des pompes de relevage ont eu au moins une fois en cinq ans un gros souci de fonctionnement, bloquant la filière. Qui pourrait penser que ces sujets, des plus communs, souffrent de lacunes aussi importantes ? Pourtant cette réalité est incontestable.

La conséquence immédiate de cette réalité in situ est la nécessité de la mise en place d’un vrai suivi des ouvrages, adapté à leurs spécificités, alimenté par l’expérience emmagasinée par les retours du terrain. Nous sortons ici des actions théoriques de suivi d’un procédé pour intégrer les réalités des équipements, de leurs forces et de leurs faiblesses pour assurer une vraie continuité de fonctionnement. Ce suivi adapté aux ouvrages et à leur réalité in situ, réalité différant de celle du produit au catalogue, est à mettre en place aujourd’hui avec la collaboration de l’ensemble des professionnels de l’ANC. Un référentiel des taches d’exploitation doit être mis en place avec les organisations professionnelles, car si l’on sait exploiter ces ouvrages, rien n’existe au plan réglementaire pour le faire. On laisse même à croire dans les décrets qu’un particulier pourrait assumer cette exploitation, en omettant de dire que s’il n’est pas un professionnel des tâches d’exploitation, mieux vaudrait qu’il y renonce. N’importe qui n’est plus aujourd’hui à même de « jouer au garagiste » avec sa voiture, cet âge est aussi révolu pour l’ANC.

Conclusion

En 2015, l’ANC est un marché sur le point d’éclore. Dans toute l’Europe, l’environnement est un sujet mis en avant. Partout, les tailles des marchés potentiels attirent des professionnels. Pourtant, en France, depuis l’arrêté du 7 septembre 2009 modifié par celui du 7 mars 2012, comment interpréter la relative stagnation du marché actif ? Tout au plus constate-t-on un marché composé à 95 % de filières traditionnelles en 2009 et constitué en 2015 de 30 % de filières compactes agréées.

Le marché européen est, à quelques détails près, dans la même situation. Nous restons très éloignés des 400 000 installations annuelles que la France devrait voir se mettre en place pour 80 % en réhabilitation, le chiffre virtuel du marché européen dépassant le million d’unités annuelles.

Pourtant, on ne peut que constater la maturité des produits proposés, dont des produits très bien développés depuis des dizaines d’années, offrant une sécurité de fonctionnement de haut niveau.

Les agréments nationaux, par leurs exigences minimalistes, tirent vers le bas la qualité des produits mis sur le marché : le meilleur des produits agréés n’a de fait que la valeur du plus mauvais.

Cet aspect va devenir d’ici quelques années très préoccupant pour les professionnels, puisqu’il va alimenter tous les détracteurs des filières compactes : un mauvais exemple de produit faisant plus le « buzz » que des milliers qui fonctionnent sans histoire. Rajoutons l’identification d’un produit à un process : on ne dit pas que le filtre XY est défectueux, c’est la filière dans son ensemble qui est mise au banc des accusés par les censeurs, trop souvent dépourvus de compétences et du recul indispensables. Le domaine de l’ANC est le royaume du « cas particulier », à partir duquel rien ne va plus et à cause de qui il faut tout modifier. Il serait salutaire de « raison garder » et, plutôt que de tenir force réunions et groupes de travail, envoyer sur le terrain tous ces experts pour qu’ils appliquent vraiment ce qui existe et remontent des informations scientifiques, non colportées par la rumeur de réunions en conférences. Il est aujourd’hui possible, comme nous le montre l’étude in situ du Tarn sur plus de cinq ans, de se doter d’excellents filtres, d’excellentes unités compactes de cultures fixées, d’excellents SBR.

Puisqu’il en est ainsi pour le constat scientifique, c’est aux professionnels – qui qu’ils soient : industriels manufacturiers, bureaux d’études, installateurs et exploitants – de mettre en avant leur excellence professionnelle.

La tradition en ANC veut que la réglementation prédomine. Aujourd’hui, il faut que les meilleurs professionnels passent en tête, montrent l’exemple en valorisant leurs qualités différenciantes. La vérité doit éclater, de façon limpide, en promouvant le succès logique des meilleurs produits, des meilleurs réalisateurs d’études, des meilleurs installateurs, des meilleurs exploitants, en résumé des meilleurs professionnels.

Car cet ANC, longtemps considéré comme un sous-assainissement destiné aux « bouseux des campagnes », est en fait un mode d’assainissement à part entière, qui restera non seulement sur ses terrains initiaux de prédilection mais va à court terme pénétrer le périurbain et l’urbain.

La croissance effrénée des centres urbains n’a pas été anticipée au niveau de l’assainissement, système « rigide » s’il en est. La densification de la population nécessite de trouver des solutions nouvelles en assainissement, l’ANC en est une. Il peut être raccordé à l’immeuble par le sous-sol, comme n’importe quel autre équipement, et renvoyer ses eaux traitées, voire même désinfectées, dans le collecteur d’assainissement pluvial. Dans un contexte de réduction des finances des collectivités locales, cette solution offerte à l’immeuble arrive à point nommé pour s’accorder au développement des villes. Rien n’empêchera une gestion collective de ces équipements, dans un service public d’assainissement concernant tous les citoyens, à niveau égal.

Cet article est réservé aux abonnés, pour lire l'article en entier abonnez vous ou achetez le
Acheter cet article Voir les abonnements