97 % des stations d’épuration produisent des boues conformes à la réglementation (arrêté du 8 janvier 1998). Pour les 3 % restants, les lots contaminés ont été évacués en incinération ou en centre d’enfouissement. Dans 2 cas identifiés, les boues ont malgré tout été épandues en raison de la mauvaise organisation des collectivités concernées.
Les teneurs moyennes en polluants (éléments traces métalliques et composés traces organiques) sont largement inférieures aux seuils réglementaires.
50 % des collectivités produisent des boues de qualité suffisante pour fabriquer du compost normé commercialisable (NFU 44095). Les seuils de la norme pour le compost sont en effet plus stricts que les seuils.
[Encart : Le cuivre est responsable de 50 % des non-conformités identifiées sur les boues. Il provient :
- de l’agriculture : le cuivre est le principe actif de produits phytosanitaires utilisés en viticulture et arboriculture. Les effluents phytosanitaires (eaux de rinçage du matériel de pulvérisation et fonds de cuve) sont parfois déversés dans le réseau d’assainissement ;
- de l’industrie : traitement de surface, sidérurgie, blanchisserie, traitement du bois…
Plus ponctuellement, des cuves en cuivre utilisées en fromagerie (ex : Franche-Comté, Ain) ou des canalisations d’eau potable en cuivre des particuliers (ex : Haute-Saône, Ain, Doubs).]
De la réglementation, en particulier pour le cuivre et le zinc. L’Agence de l’eau estime que les boues dont les concentrations en éléments traces métalliques dépassent des seuils indicateurs sont plus difficiles à transformer en compost normé. Elles nécessitent de mettre en œuvre un effet de dilution, par des boues de meilleure qualité, par des coproduits fins ou en augmentant la maille de criblage, ce qui accroît la part de co-produit dans le compost final. C’est pourquoi l’Agence accorde un bonus sur la prime pour épuration versée aux collectivités dont les boues respectent ces seuils indicateurs. Dix pour cent des stations ont eu au moins une fois dans l’année un lot de boues non conforme ou proche de la non-conformité (au moins une valeur > 75 % du seuil) et sont donc considérées comme fragiles. En 2010, l’Agence a identifié 145 stations d’épuration dans ce cas.
Évolution positive sur la période 2000-2010
Entre 2000 et 2010, le pourcentage de stations d’épuration produisant des boues conformes est passé de 93 % à 97 %. Les concentrations de tous les paramètres analysés sont en baisse, sauf pour le cuivre dont la concentration moyenne reste stable et le zinc qui évolue légèrement à la hausse.
[Photo : Éléments Traces Métalliques]
[Photo : Composés Traces Organiques]
[Photo : Destination des boues produites par les stations d’épuration de plus de 2000 Eq. habitants (en tonnes de matières sèches, 2009).]
60 % des boues d’épuration urbaines sont recyclées en agriculture, en direct ou après compostage. Les boues contiennent de l’azote et du phosphore qui sont des éléments fertilisants pour les plantes. Sous forme compostée, elles permettent d’entretenir la matière organique du sol. L’épandage de boues en agriculture est une solution écologique et économique, à condition que la sécurité soit garantie du producteur de boues jusqu’à l’utilisateur.
Teneurs moyennes en micropolluants des boues recyclées sur Rhône-Méditerranée et Corse.
Origine des données sur la qualité des boues urbaines
Les analyses de boues sont réalisées par les exploitants de station d’épuration dans le cadre de leur autosurveillance. Ces analyses ont été recueillies et transmises à l’Agence par les missions d’expertise et de suivi des épandages (boues épandues en 2009), ainsi que par les exploitants des centres de compostage de boues (boues produites).
[Encart : Mieux gérer les boues d’épuration avec le schéma départemental de gestion et de valorisation des déchets. L’exemple du Conseil général des Hautes-Alpes
En 2010, 65 % de la production des boues d’épuration du département étaient encore exportés et valorisés en dehors de son territoire. Depuis, aidé par l’Agence de l’eau, le Conseil général a mis en place son schéma départemental de gestion et de valorisation des déchets de l’assainissement collectif et non collectif. Ce document de référence, intégré à la révision du Plan Départemental de Prévention et Gestion des Déchets Non Dangereux, guide les collectivités dans le traitement de leurs déchets issus de l’assainissement des eaux usées.
Deux nouveaux sites de dépotage
Afin de présenter une politique globale de gestion et de valorisation, le Conseil général a souhaité prendre en compte l’ensemble des déchets de l’assainissement collectif et non collectif. Il a ainsi référencé l’ensemble des sites de traitement existants et comptabilisé les productions de chaque déchet. Cela a permis de définir cinq territoires pour lesquels des scénarios ont été soumis à l’ensemble des élus, techniciens et gestionnaires des services assainissement.
Le déploiement de sites de dépotage de matières de vidange est un exemple de proposition faite. Le département bénéficie aujourd’hui de cinq sites de dépotage. En 2011, deux nouveaux sites de dépotage ont été intégrés à des travaux de mises aux normes de station d’épuration pour offrir une meilleure couverture géographique aux entreprises de vidange.
La gestion des déchets de l’assainissement n’est complète que si leur valorisation est prise en compte. Pour les boues d’épuration, le Conseil Général a souhaité accompagner les collectivités à travers des démarches locales.
Deux projets de centre de compostage
L’Agenda 21 du Conseil Général des Hautes-Alpes propose de traiter localement une part plus importante des boues d’épuration. Tout en renforçant les pratiques d’épandages satisfaisantes et soutenues par la MESE, le schéma départemental a défini des secteurs de production de boues où la mise en place de centres de compostage était pertinente. Parmi les quatre centres de compostage projetés par le schéma départemental deux sont bien avancés, l’un dans le Champsaur et l’autre dans le Dévoluy. Ces deux centres viendront renforcer l’unique centre existant dans le département situé à Gap. À terme, les exportations de boues hors département devraient devenir marginales.
Pour accompagner les collectivités dans leur démarche, le Conseil Général des Hautes-Alpes a inscrit à l’Agenda 21 des solutions alternatives à l’épandage agricole et propose un protocole technique de végétalisation de ses talus routiers. Tous ces projets, inscrits au schéma départemental, offrent aux collectivités des solutions locales et leur permettent de solliciter les aides des cofinanceurs.]
[Photo : Proportions des différentes filières non durables vers lesquelles les boues d’épuration urbaines des départements des bassins RM&C ont été orientées en 2009]
Quantité de boues d'épuration vers une filière non durable (t MS) :
- t < 2 000
- 2 000 < t < 6 000
- 6 000 < t < 12 000
- t > 12 000
Filières non durables :
- - Centres d'incinération techniquement conformes
- - Épandages hors département
- - Exportations vers l'extérieur de la CET
(produites et compostées en 2010).
Échantillon de l'étude :
- • 1 400 stations d’épuration urbaines des bassins Rhône-Méditerranée et Corse ;
- • 4 500 résultats d’analyses des éléments traces métalliques ;
- • 2 540 résultats d'analyses des PCB et HAP.
L'Agence de l'eau recommande des solutions pour sécuriser davantage les filières de recyclage des boues en agriculture. Chaque année, encore 3 % des stations d’épuration n’atteignent pas l’objectif de qualité des boues et 7 % menacent de ne pas l’atteindre. Il est donc nécessaire de repérer les déversements aux réseaux qui présentent un risque et de les traiter.
Points à améliorer et solutions
Déversement régulier dégradant la qualité des boues
Mettre en œuvre des politiques de surveillance des rejets au réseau public d’assainissement et de réduction à la source des émissions de micropolluants : autorisations préalables de raccordement et de déversement d’eaux usées autres que domestiques au réseau d’assainissement, organisation d’opérations de sensibilisation auprès des industriels et artisans... L'Agence de l’eau finance des opérations collectives visant une meilleure gestion des effluents issus des activités industrielles et artisanales.
Exemples : les opérations collectives menées sur les stations de Marignier-Cluses (74), Morez (39) ou Mouans Sartoux (06) – (voir ci-dessous) – ont permis d’obtenir des résultats significatifs sur les teneurs en micropolluants métalliques dans les boues d’épuration.
[Encart : Bien gérer les rejets à la station d’épuration : l’exemple de Mouans Sartoux (06)
En 2007, la ville de Mouans Sartoux a décidé de lancer une opération collective avec les industriels raccordés à la station d’épuration communale afin de maîtriser les rejets « non domestiques » déversés dans le système d'assainissement et d’améliorer la gestion des déchets dangereux qui peuvent se retrouver à terme dans les eaux. Retour sur la démarche avec le directeur de la régie des eaux, Patrick Bortolini.
Agence RM&C : Pourquoi avoir lancé cette opération de contrôle des rejets industriels ?
Patrick Bortolini : Nous avons constaté des pointes de pollution visibles en entrée de la station d’épuration ainsi que des dysfonctionnements liés à l’effluent (mousses, foisonnement de bactéries filamenteuses), avec des impacts sur la qualité des boues. Et surtout, l'apport de pollution toujours plus important à la station d’épuration qui arrivait à pleine capacité, nous a mis face à un choix conséquent sur le plan financier : nous avons donc choisi de diminuer les effluents industriels comme alternative à une extension de la station d’épuration.
Agence RM&C : Comment avez-vous procédé, par quelles étapes ?
P.B. : Nous avons d’abord étudié les rejets d’eaux usées pour déterminer la part d’effluents industriels. Ces derniers représentaient 12 % du débit entrant et 42 % de la charge entrante à la station d’épuration. Une étude plus approfondie nous a permis d’identifier les rejets les plus chargés sur le parc d’activité industrielle et de définir 3 zones de rejet.
Ensuite nous avons appliqué le principe pollueur/payeur et passé des conventions de rejets avec les industriels concernés par des rejets non assimilables aux rejets domestiques. En tout 30 établissements sont désormais conventionnés, avec une redevance assainissement adaptée à leur niveau de rejet.
Agence RM&C : Quel a été l’investissement humain et financier pour la collectivité ?
P.B. : La mission a représenté 4,5 Équivalent Temps Plein, étalé sur 5 ans. Nous avons estimé que le temps moyen pour conventionner un établissement est de 47 heures.
Sur le plan strictement financier, les recettes couvrent aujourd’hui les dépenses (environ 30 000 €/an) grâce aux aides de l’Agence de l'Eau Rhône Méditerranée et Corse ainsi qu’aux recettes supplémentaires obtenues avec les conventionnements de raccordement des industries. Sans compter les économies d’énergie, de production de boues voire même la non extension de la station d’épuration ! Autre point important, la facture d’eau de l’abonné domestique a diminué de 5 % (pour 120 m³) grâce à un meilleur équilibrage des redevances.
Agence RM&C : Êtes-vous satisfaits des résultats ?
P.B. : Oui, parfaitement. Depuis 2007, on observe une baisse de 30 % de la DCO rejetée par habitant Mouansois. En 5 ans, nous avons signé 30 conventions avec des industriels qui représentaient 23 % de la pollution organique entrante à la station sur les 52 établissements contrôlés. Depuis, 3 établissements ont retrouvé un effluent de type domestique.
Cette opération a permis une baisse de 77 % de la concentration en plomb dans les boues, de 43 % en zinc et de 20 % en cadmium.
Sur le plan économique, 64 tonnes de boues sont produites en moins sur la station, ce qui fait 10 000 € d'économie de traitement et 6 % de la capacité nominale de la station (charge) a été récupérée.
Agence RM&C : Le mot de la fin ?
P.B. : Comme les bons réseaux font les bonnes stations, les bons rejets font les bonnes boues !]
[Photo : Flux interdépartementaux de boues urbaines en 2010 sur les bassins RM&C : empreinte environnementale]
Boues à des échelles intercommunales (voir carte des filières non durables).
Les Plans de prévention et de gestion des déchets non dangereux, pilotés par les Conseils généraux, doivent proposer des solutions territorialisées de gestion des boues sur la base d’études préalables intégrant les projets des collectivités. L’Agence fait de ces plans un élément incontournable de sa politique ; en effet, les ouvrages intercommunaux de traitement des boues ne sont financés par l’Agence qu’à condition d’être inscrits dans le plan de prévention (cf. encadré sur Conseil Général 05).
Des kilomètres en trop…
Près de 2 000 camions prennent la route chaque année pour transporter les boues vers un centre de compostage d’un département non limitrophe ! (voir carte des flux).
L’exportation de boues hors département doit également être régulée par ces plans en fonction des disponibilités locales.
Les aides de l’Agence de l'eau
[Encart :
Type d’intervention
Lutter contre la pollution dispersée des activités économiques
– Études, animation, soutien aux structures porteuses, opérations de communication et de sensibilisation, investissements relatifs aux effluents et déchets toxiques, collecte et élimination des déchets des PME par des prestataires conventionnés par l’Agence
Taux de subvention : 30 à 70 %*
Supprimer les pollutions ponctuelles
– Mise en place d’une aire de lavage et de remplissage
– Études et diagnostics préalables
– Investissement pour la construction et l’équipement de l’aire
Taux de subvention : 50 à 85 %*
Fiabiliser la gestion des boues
– Création d’un ouvrage intercommunal de traitement des boues (compostage, incinération, séchage…)
Taux de subvention : 30 %
– Mise en conformité de la filière de traitement des boues (ouvrages de stockage, de déshydratation…)
Taux de subvention : 30 %
– Soutien à l’action des Missions d’Expertise et de Suivi de l’Épandage des boues (MESE)
Taux de subvention : 70 %
– Étude préalable à l’épandage de boues
Taux de subvention : 50 %
* Taux définis sur « assainissement », volet « eaux »
]
L’Agence de l'eau subventionne également la création d’aires de remplissage et de lavage des pulvérisateurs de produits phytosanitaires permettant de réduire efficacement les teneurs en cuivre d’origine agricole dans les boues.
Déversement ponctuel ou accidentel
Si la pollution des boues ne peut être totalement évitée, l’exploitant peut en revanche maîtriser la filière de recyclage afin d’éviter que des boues polluées soient épandues.
Disposer d’un ouvrage de stockage permettant de gérer les boues par lot, chaque lot étant caractérisé par une analyse complète, disponible avant épandage. En cas de pollution, un lot peut être évacué en décharge ou en incinération.
Boues évacuées en centre d’enfouissement technique
La mise en décharge, interdite depuis juillet 2002, est tolérée dans les départements insuffisamment équipés en ouvrages de traitement des boues (ex. : PACA et Corse). L’Agence dissuade les collectivités de cette pratique et supprimera la prime pour épuration des collectivités concernées à partir de 2012.
L’Agence de l'eau consacre 8,5 millions d’euros tous les ans pour la mise en œuvre de ces solutions visant à améliorer la qualité des boues produites.
En savoir plus sur :
www.eaurmc.fr/boues