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Depuis 1984, la décharge de Braseux, à Vert le Grand dans l’Essonne, accueille les déchets de 104 communes du SIREDOM, le deuxième syndicat intercommunal de France pour le traitement des déchets. Quinze ans plus tard, le site s’équipe d’une station de traitement des lixiviats. Conçue par Proserpol, c’est la première unité de traitement par osmose inverse en direct installée en France pour traiter ces rejets en vue d'une valorisation totale.
Le centre de traitement des lixiviats, une station de valorisation des biogaz (en énergie électrique) et l’unité d’incinération font partie des nouvelles réalisations de l’Ecosite de Vert le Grand dans l’Essonne. Elles seront inaugurées début 1999 et compléteront les installations déjà en place, à savoir un centre d’enfouissement technique (CET), une plateforme de compostage, deux centres de tri : un pour les déchets industriels banals (DIB) et un autre pour les déchets recyclables. Le personnel de l’Ecosite s’occupe
[Photo : Conditionnement des lixiviats]
Aussi de la surveillance de l’ancienne décharge de Montaubert en fonctionnement entre 1962 et 1983 et du suivi environnemental de celle de Braseux. Un pavillon de communication complète le dispositif.
Mais voilà. Ce vaste complexe est installé sur les plateaux agricoles dominant la vallée protégée de l’Essonne. Il n'est donc pas question de risquer une quelconque pollution des nappes phréatiques ni même de rejeter le moindre effluent dans le milieu naturel. Le site doit tourner sans rejet. Les lixiviats et les eaux pluviales (qui risqueraient d’être contaminées) doivent donc être traités.
Protéger le milieu naturel
Si le site de Montaubert est en fin de vie, il n’en est pas de même du CET de Braseux, où l’on estime à 300 000 m³ le volume des lixiviats qui saturent les couches profondes de la décharge. Ces lixiviats sont dus essentiellement au lessivage des déchets par les eaux pluviales et aux jus de décomposition. Pour limiter l’apport d'eau externe, une réhabilitation du site a été entreprise. Le programme de réhabilitation mené par la Semardel, la Société d’Économie Mixte gestionnaire de la décharge de Braseux, inclut la couverture de la décharge, la valorisation du biogaz et le traitement des lixiviats. La maîtrise d’œuvre de ce vaste chantier est assurée par Fairtec.
C'est Proserpol qui a réalisé l'ingénierie du traitement des lixiviats. L’unité mise en place a dû se plier à la contrainte du site : l'eau traitée devait être recyclée et valorisée sur place du fait de la contrainte « zéro rejet liquide ».
Deux qualités de lixiviats
Les lixiviats à traiter proviennent de deux zones du CET. Une première analyse a montré que, selon leur origine, leurs caractéristiques physico-chimiques sont très différentes. Les uns sont des lixiviats encore concentrés en matières organiques biodégradables et sont prétraités par voie anaérobie au cœur de la décharge. Les autres, en fin d’évolution, sont pris en charge directement par le Centre de traitement des lixiviats, sans risque pour les membranes d’osmose inverse.
Cette configuration particulière du site a conduit Proserpol à proposer un procédé novateur associant à la fois traitement et valorisation. Celui-ci comprend :
- le traitement des lixiviats par osmose inverse directe avec recyclage de l’eau osmosée vers le lavage des gaz et la production d’eau déminéralisée nécessaire aux fours d'incinération du CITD (Centre Intégré de Traitement des Déchets). Cette option permet d’atteindre le zéro rejet ;
- l’activation de la décomposition biologique du CET par réinjection des lixiviats fortement concentrés et des concentrats. Cet apport hydrique renforce la production de biogaz. Ce traitement est assuré en deux étapes.
Un traitement en deux étapes
C'est la couverture du CET qui a permis à la DRIRE d’autoriser le développement d’un prétraitement biologique anaérobie. Celui-ci favorise la production de biogaz, transformé en énergie électrique. La couverture du site permet aussi de contrôler l’humidité des déchets. L’humidité est maintenue à son optimum en injectant les lixiviats encore trop fortement concentrés en matières organiques biodégradables, d’une part ; les concentrats d’osmose, d’autre part. Cette opération accélère la vitesse de stabilisation des déchets.
Ce sont en tout 120 m³ de lixiviats fortement concentrés récupérés sur la partie ancienne du CET, qui sont ainsi traités chaque jour par la masse de déchets la plus récente. Avec cette opération, l'abattement de DBO₅ est de 80 % pour une concentration d’origine organique voisine de 10 000 mg/l. Pour pouvoir homogénéiser la qualité des lixiviats réinjectés sur la totalité de la masse de
[Photo : Traitement de finition]
[Encart : L’usine d’incinération et de tri (CITD) émet quatre types d’effluents :
– des eaux chimiquement polluées ;
– des eaux pluviales de voirie ;
– des eaux pluviales de toiture ;
– des eaux vannes.
Les installations de traitement des effluents du CITD comprennent une station physico-chimique, une station biologique et des unités de filtration permettant de recycler toutes les eaux du site en fonction de leur qualité.
Les lixiviats traités sur les trois étages d’osmose inverse placés en série produisent une eau osmosée d’excellente qualité qui rejoint les eaux pluviales.
Ainsi, le site fonctionne en « zéro rejet liquide » et ne fait pas appel, dans le principe, au réseau pour appoint d’eau.]
[Photo : Le stockage des perméats]
[Photo : Les modules des membranes tubulaires]
[Photo : Schéma de la gestion intégrée de l'eau du CITD de Vert Le Grand sans rejet liquide]
déchets, ceux-ci sont prélevés et stockés en lagune, avant d’être mélangés aux concentrats d’osmose, puis réinjectés dans le CET.
Les lixiviats moins riches sont récupérés au fond de l'alvéole de la partie la plus récente de la décharge.
Leur volume est estimé 4 300 m³ quotidiens.
Ils sont moins concentrés en matière organique, on estime à 3 000 mg/l la DCO de cet effluent.
La conductivité de ce jus est de 25 000 µS/cm et la concentration d’azote réduite de 3 000 mg/l.
Ces lixiviats sont amenés à l’unité de traitement par une conduite d'environ 2 kilomètres, après stockage en lagune (pour contrôle).
Pour éviter toute pollution due aux fuites (éventuelles), le réseau est construit en polyéthylène double enveloppe.
Le cœur du procédé, mis en œuvre pour la première fois en France, utilise trois étages d’osmose inverse sur des lixiviats bruts.
Les membranes organiques tubulaires qui sont utilisées dans le premier étage travaillent à 40 bars, assurant ainsi un taux de conversion intéressant.
La pression de travail des membranes spirales des deux autres étapes est de 20 bars.
Le cœur du procédé
Avant traitement par osmose inverse, les lixiviats sont filtrés, réchauffés et conditionnés chimiquement.
Ils sont mis en pression par une pompe de gavage et une pompe en ligne.
Les membranes tubulaires sont organisées en modules qui travaillent en circuit fermé sous l'effet d'une pompe centrifuge haute pression.
La concentration du lixiviat augmente d’un module à l'autre jusqu’au dernier module qui est muni d’une vanne qui régule le débit de concentrat.
Le perméat du premier étage est traité dans le second étage puis dans le troisième.
Ces étages sont munis de membranes spiralées et montées en arbre de Noël.
Les concentrats de ces étages de finition sont recyclés.
Le perméat du troisième étage est contrôlé et pompé vers la lagune des eaux pluviales du CITD.
La consommation énergétique, qui est le gros problème des traitements membranaires, est ici en partie résolue.
Le biogaz recueilli sur le site est valorisé en énergie électrique (1,1 MW en première phase), ce qui permet, après autoconsommation, une revente de plus de 700 kW à EDF.
Le coût de l'investissement global est de l’ordre de 20 millions de francs.
Tableau 1 : Effluents traités à Vert Le Grand
Effluents traités |
pH |
DCO (g/l) |
Lixiviats anciens |
neutre |
20 à 60 |
Lixiviats récents |
neutre |
2 à 10 |
Eaux vannes |
neutre |
1 à 4 |
Eaux polluées chimiquement |
2 à 12 |
< 1 |
Eaux pluviales |
neutre |
< 0,1 |