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A Bordeaux, l'eau usée est sous haute surveillance

30 juillet 1990 Paru dans le N°138 à la page 48 ( mots)
Rédigé par : A BOULANGER, D DEJEAN, J-cl SEROPIAN et 1 autres personnes

Lyonnaise des Eaux

Le souci permanent de tout exploitant d'une unité d’épuration des eaux usées est la protection de l'environnement et principalement du milieu récepteur. Cette protection passe obligatoirement par un contrôle de la qualité des effluents traités et par un suivi en continu du fonctionnement des équipements électromécaniques.

Cette double mission relève de la responsabilité du personnel exploitant les stations d'épuration, mais il s’avère de plus en plus difficile pour les petites stations de maintenir sur place un laboratoire d’analyses et des agents qualifiés chargés de cette surveillance. Au niveau du contrôle qualitatif des effluents traités il a été ainsi développé depuis quelques années le principe d’une analyse de la turbidité qui présente l'avantage d’une analyse rapide et continue pouvant déclencher une alarme. Il est bien évident que la turbidimétrie ne remplace pas les opérations d’autocontrôles mais c'est un paramètre fiable pour un suivi simple de la qualité du rejet d'une unité d’épuration. Cette information ainsi que toutes celles relatives à l’état de fonctionnement des équipements électromécaniques doivent être transmises à une structure centralisée de contrôle et d’intervention. C’est le service offert par l’outil moderne que constitue la télétransmission.

En accord avec cette logique l’exploitant a souhaité moderniser davantage encore le système de télétransmission et s’en servir non seulement pour recevoir une information ou une alarme mais aussi pour agir à distance sur certains organes de commande de l'usine d’épuration. C’est ainsi que la deuxième génération de télésurveillance a été développée en une télégestion de l’épuration des eaux usées et de la protection de l'environnement.

[Photo : Station d'épuration de Cantinolle (Communauté urbaine de Bordeaux, 50 000 équivalent/habitants)]

L’épuration des eaux usées de la communauté urbaine de Bordeaux (CUB)

La Communauté Urbaine de Bordeaux, qui a confié à la Lyonnaise des Eaux la gestion de ses services des eaux et de l'assainissement, regroupe 27 communes, soit une population de près de 600 000 habitants, dont les eaux usées sont traitées dans 13 stations d’épuration, la principale étant la station Louis-Fargue (capacité 300 000 équivalent/habitants).

Dans l'enceinte de cette dernière station et depuis sa création, un service de télécontrôle a été installé avec pour mission principale la gestion permanente des écoulements des eaux pluviales. La topographie particulière du site (zone plane) ainsi que l’importance des zones potentiellement inondables (25 % du territoire de la CUB, soit 13 500 ha, sont situés sous le niveau des plus hautes eaux de la Garonne) ont défini le rôle primordial du service de télécontrôle. Actuellement 50 postes de télétransmission utilisant des lignes spécialisées envoient en temps réel 2 000 informations complétées au niveau de l'unité opérationnelle du télécontrôle par les mesures des pluviographes, des limnigraphes, des marégraphes et les images radar de la Météorologie Nationale pour la progression des événements pluvieux. De plus, la station Louis-Fargue s'est dotée d'un service d'exploitation autonome, d'où la nécessité de développer pour les 12 autres stations dites « stations périphériques » une exploitation décentralisée.

Situation de l’exploitation des stations périphériques

L'ensemble des stations d’épuration périphériques forme un système complexe et délicat à gérer. Cette complexité est essentiellement due aux caractéristiques suivantes :

— une large gamme de taille de stations comprise entre 400 à 90 000 équivalent/habitants ;

— une diversité des procédés de traitement : lits bactériens ou boues activées pour le traitement des eaux, digestion anaérobie ou stabilisation chimique pour le traitement des boues ;

— une grande dispersion géographique nécessitant une division du territoire en trois zones d'exploitation.

Les difficultés classiques d'une exploitation de stations d'épuration sont augmentées par des conditions de fonctionnement sévères, communes à toutes les stations périphériques :

— des flux de pollution proches des capacités nominales nécessitant des réglages « pointus ».

  • — des milieux récepteurs très sensibles présentant des débits d’étiage très faibles par rapport aux débits rejetés ;
  • — un âge moyen des stations assez élevé, du fait que la CUB, sensibilisée à la protection du milieu récepteur, a investi depuis de nombreuses années déjà dans le traitement de ses eaux usées.

Les observations effectuées depuis longtemps sur cet ensemble de stations d’épuration ont montré que 90 % des cas de dysfonctionnement observés sont d'origine électromécanique alors que 10 % des cas sont liés aux procédés biologiques mis en œuvre.

La détection des défauts électromécaniques était initialement à la charge du personnel d’exploitation, qui assurait des tournées de visite systématiques et régulières. Cette procédure, outre son coût élevé, nécessitait souvent des délais d'intervention très longs pouvant occasionner des perturbations importantes du milieu récepteur.

Par la suite, les stations d'une taille importante ont été reliées à un réseau de télésurveillance qui, en cas de problème de fonctionnement, fait appel à une intervention immédiate du service d’astreinte sans spécifier le degré d’urgence du défaut.

Cet état de fait a conduit à une réflexion fondamentale orientée vers des systèmes performants de télésurveillance/télégestion.

Définition des besoins

Afin de lui permettre de mener à bien sa mission de protection de l’environnement, l'exploitant a besoin d'un système de télégestion qui permette de disposer dans des délais brefs :

  • — des informations relatives à toute crise ;
  • — des éléments pour juger de l'urgence de la situation ;
  • — d'une évaluation des moyens nécessaires à mettre en œuvre pour rétablir un fonctionnement normal.

Un programme a été défini pour équiper les dix stations d’épuration les plus importantes.

Les qualités requises d'un tel système peuvent être résumées par les points principaux suivants concernant son utilisation :

[Photo : Fig. 2 - Organigramme fonctionnel Aquaveil I.]
  • — il doit constituer un serveur télématique industriel ; c’est-à-dire un outil au service de l'exploitant, combinant les moyens informatiques avec ceux de la télécommunication. Cet appareillage doit remplir diverses fonctions : téléalarmes, télécomptage, télémesures, télécommande, messagerie… Ces informations devant transiter par un réseau autocommuté, nous avons adopté comme terminal informatique le Minitel. Ce choix est justifié par la simplicité d'utilisation de ce terminal et par l’accessibilité aux informations qu'il permet à partir de tout point du territoire et au moyen d’une simple ligne téléphonique ;
  • — convivialité : le matériel doit être un outil prêt à l'emploi donc utilisable par un personnel peu spécialisé avec un vocabulaire adapté au métier de l'épuration des eaux usées sans pour autant nécessiter une formation complexe ;
  • — décentralisation des informations : notre service d’exploitation des stations d'épuration périphériques étant organisé en trois zones géographiques distinctes, les informations doivent donc être transmises au centre opérationnel de la zone afin d’assurer durant les heures ouvrables une intervention rapide du personnel concerné ;
  • — centralisation des informations : toutes les informations doivent être transmises au siège du télécontrôle de la station Louis-Fargue afin qu’en dehors des heures ouvrables, le personnel d’astreinte soit contacté directement par téléphone ou par radio-messagerie, mais aussi pour permettre d’effectuer les opérations classiques de gestion de compteurs, de statistiques, etc. ;
  • — évolutivité : le système à installer doit être de conception évolutive pour s'adapter à des stations d'épuration de tailles différentes pouvant faire l'objet de travaux d’extension. Un développement de ce réseau de télégestion est d’ores et déjà envisagé au domaine des usines de pompage spécifiques au réseau pluvial.

Toutes ces contraintes ont servi à constituer le dossier de base de la sélection du système à adopter.

Le système sélectionné

Après étude détaillée des systèmes de télésurveillance/télégestion disponibles sur le marché, notre choix s'est porté sur l’« Aquaveil », lequel répondait à nos exigences, tout en offrant les caractéristiques complémentaires suivantes :

Système très évolutif

  • Par sa conception de base : il est modulable de 12 ressources (entrées/sorties) à 100 ressources par addition de cartes d’extension, conception qui s'adapte parfaitement à un parc de stations composé d’usines de différentes tailles avec des possibilités d’extension ;
  • par son architecture, car le transmetteur (Aquaveil 1) est autonome. Grâce à cette qualité l'exploitant choisit le degré de

collecte des informations par développement :

  • * horizontal : addition d'autres transmetteurs (exemple : lors de création de nouvelles stations),
  • * vertical : addition de systèmes optionnels tels des centraux (Aquaveil 2) permettant de collecter les informations auprès des transmetteurs ou des micro-ordinateurs PC effectuant la gestion de fichiers (statistiques, graphiques, etc.).

Fonctions complémentaires

  • * formules logiques ET/OU générant des informations en fonction de la demande,
  • * contrôles de fréquence cadence/durée avec seuils « mini-maxi » ; par exemple : détection de passage d’un pont racleur ou d'un râteau de grille courbe, des horloges des entrées virtuelles,
  • * paramétrage facilité par une bibliothèque mémorisée de 128 libellés associant un chiffre à un texte pour déterminer l'état de fonctionnement d'un équipement ; par exemple : 003 Aération/état : normal ou défaut, 053 Groupe électrogène/état : marche ou arrêt.

Dialogue de communication standard

— téléphonique :

  • * en mode signalisation, dans ce cas le transmetteur appelle des directions téléphoniques,
  • * en mode consultation, dans ce cas une personne à l'aide d'un terminal Minitel peut se connecter avec un transmetteur ;

— avec des périphériques : imprimante, automates, micro-ordinateurs en modifiant les protocoles.

Ces systèmes de communication standard sont compatibles avec d'autres appareils de marques différentes.

Mise en route du système

Depuis plus d’un an le système est en fonctionnement. Il permet au personnel affecté au centre opérationnel d’une zone de surveiller de manière quasi continue la qualité de l'effluent traité grâce à la cellule turbidimétrique. De plus, en cas de défaut de fonctionnement l'exploitant est prévenu instantanément et intervient dans les plus brefs délais en connaissant la localisation du dysfonctionnement et sa nature.

Cette procédure a limité l'intervention du personnel exploitant aux visites de maintenance tout en assurant la protection de l'environnement. Tout arrêt d'un râteau de dégrillage ou d’une turbine d’aération ou d'un pont racleur est signalé aux équipes d’intervention pendant les heures ouvrables ou au service de télécontrôle qui avertit l'équipe d’astreinte assurant ainsi la continuité du service.

La nouvelle génération Aquaveil installée depuis le milieu de l'année 89 permet une intervention à distance (par Minitel) d'un opérateur pour modifier les paramètres de fonctionnement de l’unité d'épuration en améliorant ainsi l'efficacité du traitement.

Conclusion

La télégestion appliquée aux stations d’épuration constitue un outil puissant et performant dans la lutte menée pour la protection du milieu naturel. L’utilisation de la télégestion associée à la mesure de la turbidité de l'effluent traité et au développement des moyens de communication facilement accessibles a certainement introduit des modifications importantes dans la profession de l’exploitation des stations d’épuration. Ainsi il devient actuellement possible d’assurer : la surveillance continue de la qualité du rejet (même si cela ne remplace pas les campagnes d'autocontrôles), le diagnostic des perturbations de la vie bactérienne, une collecte régulière des données de fonctionnement et des interventions optimisées, se substituant aux interventions aveugles.

Le dispositif mis en place permet aujourd'hui une meilleure protection du milieu récepteur, en préservant les intérêts des collectivités et tout en améliorant les conditions d'intervention de l'exploitant.

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