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15 ans d'expérience d'un procédé performant de déminéralisation des eaux avec régénération à contre courant

30 avril 1995 Paru dans le N°181 à la page 51 ( mots)
Rédigé par : Alain COUSIN et Somboum NARPOOLMIN

15 ans après la première application d'un procédé de déminéralisation à régénération contre-courant avec blocage mécanique du lit de résine, le retour d'expériences menées sur 200 sites industriels, confirmé par le témoignage d'un exploitant, permet de dresser un bilan très positif du procédé tant sous son aspect technique (simplicité, fiabilité, automaticité du procédé, qualité de l'eau traitée, faible volume d'effluent, peu d'usure des résines...) que sur le plan des résultats d'exploitation (économies de réactifs et d'eau de service).

Dans de nombreux secteurs industriels (centrales énergétiques, automobiles, agro-alimentaire, pétrochimie, papeterie, électronique, etc.), la déminéralisation des eaux par échanges d’ions constitue une étape essentielle dans la filière des traitements, ayant pour but l’alimentation des installations industrielles en eau de haute qualité (chaudières, procédés de fabrications, etc.). Deux techniques principales, dites à régénération co-courant et contre-courant, sont proposées aux utilisateurs. Aujourd’hui la régénération à contre-courant a, depuis longtemps, fait ses preuves : économie de réactif de régénération, meilleure qualité de l’eau traitée, fiabilité plus grande de l’exploitation.

Pour être efficace, une régénération à contre-courant doit gérer au mieux le maintien en lit compact des résines afin d’éviter le bouleversement des couches et l’apparition des chemins préférentiels.

La technique de blocage mécanique des résines entre deux planchers ou plateaux s’est peu à peu généralisée pour devenir le procédé de référence proposé aux utilisateurs. Nous avons, pour notre part, mis au point, dès le début des années 80, un tel procédé breveté dénommé UFD (Up Flow Degrémont).

Le procédé UFD et ses avantages

L’échangeur d’ions est constitué par une colonne comportant deux plateaux à buselures entre lesquels est bloqué le lit de résine. En production, le flux s’écoule de haut en bas de l’échangeur, la régénération s’effectuant de bas en haut. Environ 95 % du volume compris entre les deux plateaux est rempli de résine afin d’éviter la fluidisation éventuelle du lit au cours de la régénération.

De par sa simplicité, ce procédé présente de nombreux avantages :

● Fiabilité d’exploitation : les changements de débit et les arrêts éventuels n’affectent pas le bon fonctionnement du système eu égard au sens de l’écoulement du fluide. Son exploitation demeure ainsi à l’abri des aléas tels que, par exemple, l’arrêt de l’alimentation en eau brute.

● Tolérance sur la qualité de l’eau brute : dans tous les procédés mettant en œuvre la régénération à contre-courant, l’eau brute doit être de très bonne qualité et exempte de Matières En Suspension (MES). Cependant, l’UFD est moins sensible aux MES résiduelles que d’autres procédés. En effet, les billes les plus fines, constituant la couche supérieure du lit de résine, retiennent majoritairement d’éventuelles MES encore contenues dans l’eau brute. Sous l’effet de la vitesse relativement élevée du courant lors de la phase n° 1 de « compactage » de la régénération (figure 1), une part importante de ces MES retenues traverse la couche de résine inerte et est évacuée à l’égout, réalisant ainsi un nettoyage partiel du lit de résine à chaque régénération.

Par ailleurs, la couche supérieure du lit de résine étant la seule affectée par les MES, son nettoyage est, en général, suffisant sans avoir à bouleverser les couches inférieures qui assurent la finition du traitement, ce qui facilite le redémarrage après nettoyage, sans altération significative de la qualité d’eau traitée.

● Mise en œuvre d’importantes hauteurs de résine (jusqu’à 3 m) qui améliorent la qualité du traitement.

[Photo : L’UFD en phases de fonctionnement et de régénération.]
[Photo : L’UFD en phase de lavage de la résine.]

Possibilité de réaliser des échangeurs à plusieurs compartiments superposés, par exemple : cation faible - cation fort ou anion faible - anion fort.

Les autres avantages sont inhérents à la technique de la régénération à contre-courant :

- faible quantité de réactifs de régénération : on se rapproche de la quantité stœchiométrique ; - excellente qualité de l'eau traitée grâce à l’efficacité de la couche de finition ; - rinçages très courts des résines en fin de régénération d'où une obtention très rapide de la qualité de l’eau traitée au redémarrage et un volume de rejets minimisé.

[Photo : Chaîne de déminéralisation.]

En raison de sa conception, le blocage mécanique entre planchers ne permet pas le nettoyage et le défringage in situ des résines, celles-ci devant être sorties hydrauliquement de l’échangeur pour être lavées dans une colonne externe et transférées de nouveau dans l’échangeur après lavage. Cependant, ces opérations de transfert, très peu fréquentes grâce aux avantages intrinsèques du procédé UFD précités, sont courtes, simples à réaliser et ne présentent aucun risque (figure 2).

15 ans d’expérience dans l'industrie

Depuis 15 ans, le procédé UFD a été adopté pour équiper plus de 200 installations industrielles parmi lesquelles la raffinerie Esso de Port-Jérôme, dont le compte rendu ci-dessous donnera un éclairage particulier quant aux différents aspects du procédé en exploitation à l’échelle industrielle.

Quelques données préliminaires :

- Débit : 325 m³/h en déminéralisation

- Chaînage :

1 échangeur de cation faible : diamètre 3,5 m

1 échangeur de cation fort UFD : diamètre 3,5 m

1 éliminateur de CO₂

1 échangeur d’anion faible et fort superposé UFD : diamètre 3,5 m

- Eau à traiter : eau de forage ou eau de Norville

- Régénération : acide sulfurique et soude

[Encart : Les échangeurs d’ions sont des substances granulaires insolubles, comportant dans leur structure moléculaire des radicaux acides ou basiques susceptibles de permuter, sans modification apparente de leur aspect physique, et sans altération ou solubilisation, les ions positifs ou négatifs, fixés sur ces radicaux, contre des ions de même signe se trouvant en solution liquide à leur contact. Cette permutation appelée échange d’ions, permet de modifier la composition ionique du liquide objet du traitement, sans modification du nombre total de charges existant dans ce liquide avant l’échange. Il existe deux catégories d’échangeurs d’ions : - les échangeurs de cations, qui possèdent des groupements sulfoniques (—HSO₃) ou carboxyliques (—HCO₃) et qui sont capables d’échanger, d’une manière réversible, un cation quelconque actif ou contre tout autre cation préalablement fixé sur ce groupement ; - les échangeurs d’anions, qui possèdent des groupements de forme générale R-OH et qui sont capables d’échanger, d’une manière réversible, un anion quelconque Cl⁻, SO₄²⁻, NO₃⁻, HCO₃⁻, HSiO₃⁻, etc., contre l’anion OH⁻ lié au groupement actif ou contre tout autre anion préalablement fixé sur ce groupement.]

Tableau I

Eau Industrielle
- TH 38 °F
- TAC 30 °F
- SAF 12,5 °F
- Silice 20 mg/l
Eau Traitée
- Conductivité 0,5 µS/cm
- Silice 12 µg/l

Tableau II

Éléments – Consommation de réactifs – Volume des effluents
- Valeur design : 0,55 kg/m³ (Acide sulfurique) – 0,27 kg/m³ (Soude) – 630 m³
- Valeur mesurée : 0,57 kg/m³ (Acide sulfurique) – 0,29 kg/m³ (Soude) – 599 m³

Le Chef de Projet précise que la nouvelle chaîne était destinée à remplacer des déminéralisations existantes et à faire face aux nouveaux besoins en eau du site. En 1992, après examen des technologies existantes, le choix d’Esso s’est porté sur l’UFD pour trois raisons principales :

  • - procédé compétitif,
  • - avis de l’ingénieur-conseil favorable,
  • - volume d’effluents plus faible.

Après 15 mois de fonctionnement totalisant 313 cycles de production, le responsable de la Technique déminéralisation a résumé comme suit les conditions dans lesquelles il a utilisé le procédé et les conclusions qu’il en tire.

L’installation produit actuellement 110 % de sa capacité nominale de traitement de l’eau de forage et 105 % sur l’eau de Norville en obtenant les performances moyennes portées sur les tableaux I et II :

Ces performances permettraient l’utilisation directe de l’eau déminéralisée pour alimenter en appoint des chaudières à 83 bars sans traitement de polissage. Par ailleurs l’exploitant insiste sur les gains d’eau de service puisqu’il en économise 40 % par rapport aux anciennes chaînes à contre-courant avec blocage à l’air. Il précise que les pertes de charge sont stables, que les résines anioniques n’ont pas été définies, que les cationiques l’ont été une seule fois et qu’aucun apport de résine n’a été effectué depuis la mise en service. En conclusion, l’utilisateur juge le procédé simple, fiable, d’un fonctionnement vraiment automatique et apprécie tout particulièrement le fait de pouvoir arrêter et redémarrer la chaîne sans problèmes pendant le cycle de production.

Conclusion

15 ans d’expérience acquise avec l’UFD sur les cinq continents constituent en soi une consécration du procédé et prouvent son indépendance technologique vis-à-vis des producteurs de résines échangeuses d’ions. Depuis sa première installation aux Pays-Bas en 1980 jusqu’à aujourd’hui, de 7,5 m³/h à 325 m³/h par échangeur, il a équipé pas moins de 200 sites industriels à travers le monde, en totalisant un débit traité de plus de 15 000 m³/h et ce, dans des domaines aussi divers que les centrales énergétiques, l’agro-alimentaire, la papeterie, l’automobile, l’électronique et la chimie-pétro-chimie.

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