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Actualités France

Nitrates en Bretagne : un dossier emblématique

30 juillet 2007 Paru dans le N°303 ( mots)
Nitrates en Bretagne : un dossier emblématique Un véritable serpent de mer ce dossier des nitrates bretons'Mais intéressant, car emblématique de quarante années de politique de l'eau qui n'ont jamais tout à fait intégré les conséquences environnementales de notre politique agricole. Déjà, en 2001, la Cour de justice avait jugé que la France ne respectait pas la directive de 1975 visant à protéger les eaux de surface destinées à la production d'eau potable. A cette époque, la concentration en nitrates de 37 rivières de Bretagne était supérieure à 50 mg/l. Depuis, un certain nombre de mesures ont été mises en ?uvre pour réduire la quantité d'azote épandu sur les terres agricoles. Mais pour 9 rivières, elles se sont révélées insuffisantes. Et le plan proposé en catastrophe en mars 2007 pour amadouer Bruxelles n?a suscité l'adhésion que d'un tout petit nombre d'exploitants, bien insuffisant pour augurer d'un rapide retour à la conformité de ces rivières. C?est donc tout à fait logiquement que la France, en infraction sur ce dossier depuis plus de 20 ans, se trouve menacée d'une amende supérieure à 28 millions d'euros assortie d'astreintes journalières de 117.882 euros. Que faire à présent pour mettre fin à une forme de pollution qui favorise l'eutrophisation des cours d'eau, la rends impropre à la consommation et favorise la prolifération d'algues provoquant ces fameuses marées vertes qui rongent le littoral breton ? Pour étayer l'émergence d'une « dynamique nouvelle », le gouvernement a présenté un nouveau plan d'action. Etalé sur 5 ans, il prévoit le déblocage d'une aide de 60 millions d'euros, et la création d'un groupe de travail permanent placé sous la double tutelle des ministères de l'Écologie et de l'Agriculture. Mais les mesures qu'il contient, obligatoires à partir du 1er janvier 2008, soulèvent déjà de nombreuses protestations au sein du monde agricole qui dénonce une diabolisation excessive des nitrates. Pourtant, quels que soient les résultats de ce énième plan, il ne faut pas s'y tromper : c'est bien d'un nouveau modèle de développement dont la Bretagne a besoin. Un modèle qui pérennise la filière agricole en garantissant sa viabilité économique tout en maitrisant l'impact de ses activités sur l'environnement. Il faudra également se livrer à une analyse critique sur le rôle de l'Etat et de ses relais dans ce dossier. La sénatrice du Bas-Rhin, Fabienne Keller, responsable de la mission "Ecologie et développement durable", s'y est déjà employée à l'occasion de la présentation, le 27 juin dernier, de son rapport sur la politique de l'eau en France. Les conclusions de ce rapport sont claires : en matière d'organisation administrative, de budget et de coordination des actions de l'Etat et des collectivités territoriales, la France est au milieu du gué et les marges de progression importantes. Le rapport regrette notamment que l'environnement, qui ne dispose pas de relais administratifs propres au niveau départemental ait du s'appuyer sur les directions départementales de l'agriculture et de la forêt pour mettre en ?uvre sa police des eaux. Une situation qui a pu peser sur le dossier breton. Car les directions départementales de l'agriculture et de la forêt comme d'ailleurs les directions départementales de l'équipement dont les attributions en matière d'eau sont significatives, ne sont pas placées sous l'autorité directe du ministère chargé de l'écologie. « Leur pilotage s'en trouve affaibli, notamment par l'impossibilité pour le ministère chargé de l'écologie de maîtriser les effectifs consacrés à la politique de l'eau ou par la possible survenue de conflits d'intérêts au sein des directions entre les missions « eau » et les missions « agriculture » ou « équipement » » précise le rapport. La constitution d'un grand ministère de l'écologie, du développement et de l'aménagement durables dont Jean-Louis Borloo a dessiné les premiers contours le 29 juin dernier peut-elle résoudre le problème ? Rien n?est moins sûr car même si l'écologie se trouve désormais au centre d'un ministère qui détient un vrai pouvoir de décision, rien n?indique que les conflits d'intérêts entre l'agriculture et l'environnement soient appelés à diminuer. Rassembler en un seul ministère coiffé d'un secrétariat général unique cinq administrations jusqu'ici indépendantes et souvent antagonistes ne sera pas forcément chose facile?