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HydroScreen, ou comment identifier les molécules responsables de toxicité ?

12 février 2020 Paru dans le N°429 à la page 30 ( mots)

En corrélant les données physico-chimiques avec les données éco-toxicologiques acquises sur les échantillons d’eau, le projet HydroScreen porté par Lodiag constitue une option prometteuse pour analyser les risques liés aux micropolluants.

En 2027, 100 % des masses d’eau devront être en bon état. Tel est l’objectif de la directive cadre sur l’eau vers lequel doivent tendre tous les États membres, dont la France. L’action des agences de l’eau permet de tendre vers cet objectif, néanmoins de nombreux micropolluants (dont des polluants émergents) sont encore retrouvés dans les masses d’eau à des concentrations significatives, entrainant des risques éco-toxicologiques tels que de la perturbation endocrinienne, de la génotoxicité, du stress médicamenteux ou encore de la reprotoxicité.

Principalement basées sur l’analyse physico-chimique, les mesures actuelles de détection et d’évaluation des substances permettent d’identifier les molécules ou pesticides présents dans l’eau mais ne déterminent pas la toxicité et le potentiel effet cocktail des mélanges de ces substances chimiques.

En fédérant le programme HydroScreen, l’entreprise Lodiag, spin-off de Profilomic SA, propose une vision radicalement nouvelle : analyser les échantillons à la fois sur les paramètres physico-chimiques par des approches non-ciblées et sur leur toxicité intrinsèque pour établir des corrélations permettant de quantifier la toxicité que fait peser chaque polluant.

Pour relever le défi, la start-up Lodiag, qui est spécialisée dans le développement d’outils d’intelligence artificielle et l’exploration de bases de données dans le domaine de l’environnement, s’est adjoint les compétences biotechnologiques de Tame-Water. « L’originalité de notre démarche est de rechercher à partir de la toxicité constatée dans les eaux de surface, les molécules responsables de la dégradation de l’environnement. Les approches actuelles reposent sur des analyses basées sur une liste préétablie de molécules dont le seuil de toxicité est souvent fixé arbitrairement à 0,1microg/L ou évaluée expérimentalement par des approches lourdes et onéreuses. Radicalement novatrice, l’idée du programme HydroScreen est de partir de l’éco-toxicité mesurée sur les échantillons pour sélectionner sans apriori les micropolluants qui en sont à l’origine. L’objectif est de prédire le ou les type(s) de toxicité(s) associé(s) a un échantillon d’eau uniquement sur base de l’empreinte spectrale, tout en prenant en compte l’effet cocktail », explique Maité Sarter, responsable de laboratoire chez Lodiag.

L’idée prend forme puisque le projet d’une durée de 3 ans, a été financé par l’ADEME via le programme d’Investissement d’Avenir et labellisé par le pôle de compétitivité, Hydreos. La stratégie consiste à prédire, par une approche d’intelligence artificielle non-supervisée basée sur l’analyse de 1000 échantillons d’eaux de surface prélevés à l’échelle nationale, la toxicité des échantillons d’après leur empreinte spectrale. « En corrélant la présence des signatures chimiques des échantillonnages avec les effets environnementaux, nous allons pouvoir modéliser les comportements toxiques des substances et établir un outil prédictif des effets des micropolluants dans l’eau sur le vivant en prenant en compte la variabilité spatiale et temporelle des émissions » souligne David Halter, directeur scientifique de Lodiag.

Aujourd’hui, la première étape du projet consiste à mettre en place un programme de prélèvement démonstrateur avec l’agence de l’eau Rhin Meuse. « Dans le cadre d’un partenariat technique avec l’AERM, nous allons nous intéresser en particulier aux échantillons recueillis sur 60 points de prélèvements dans les eaux de surface du bassin hydrographique Rhin-Meuse, et faire la preuve de l’efficacité logistique du concept».Cette campagne test sera alors généralisée sur les autres bassins hydrographiques métropolitains ce qui permettra d’alimenter le modèle mathématique visant à prédire les effets des micropolluants aquatiques sur le vivant. Rendez-vous fin 2022 pour apprécier les premières applications commerciales s’appuyant sur cet outil d’intelligence artificielle.

Pascale Meeschaert

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