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Entreprises

Dépollution des sols : une première européenne en Belgique

31 mars 2015 Paru dans le N°380 ( mots)

L?inauguration d'une première européenne en matière de dépollution des sols a été initiée le 26 février dernier à Ostende par Joke Schauvliege Ministre belge de l'Environnement, de la Nature et de l'Agriculture. Il s'agit d'un nouveau procédé innovant d'électrothermie importé depuis le continent nord américain.

C?est à Ostende que, le 26 février dernier, Joke Schauvliege Ministre belge de l'Environnement, de la Nature et de l'Agriculture a officiellement lancé l'opération de dépollution du sol sur le site Proximus d'une ancienne usine de traitement du bois à la créosote. Cet évènement est associé à une première en Europe, la dépollution en profondeur par procédé électrothermique, une technologie innovante importée par Euremtech (cf encadré) qui a fait ses preuves outre Atlantique. Ainsi, pour dépolluer sur 15 mètres de profondeur d'un terrain contaminé, Euremtech complète son offre dans la dépollution in situ en lançant ce nouveau mode opératoire à partir d'une technologie électrothermique innovante. « L?Electro-Thermal Dynamic Stripping Process (ET-DSP) consiste, après bilan géophysique du sol pollué, à chauffer électriquement le volume du terrain à traiter puis à volatiliser et pomper par le vide, les effluents qui doivent absolument en être prélevés, explique Guillaume Garcia, Business & Project Manager chez Euremtech BVBA. Sur le site Proximus d'Ostende, l'enjeu est de taille car il s'agit d'extraire de la créosote du sol suite à la destruction d'une ancienne usine. Dangereux, ce produit extrêmement visqueux et collant, assimilé par le terrain durant plus d'un siècle est particulièrement difficile à récupérer afin de nettoyer le sol en profondeur ». Il y a quelques décennies encore, traverses de chemin de fer, poteaux des réseaux téléphoniques voire électriques tout en bois étaient systématiquement traités à la créosote afin de leur assurer entre 25 et 30 années de durée de vie. En Belgique, jusqu'en 1984, ces activités ont été confiées aux « Chantiers de Créosotage d'Ostende », une usine édifiée tout spécialement pour ce type de traitements en 1900. A cette époque, personne n?avait conscience de l'effet fortement polluant des résidus d'application de créosote qui, sans précautions particulières, se sont infiltrés au fur et à mesure profondément dans le sous-sol. L?optimisation énergétique : un souci constant Aujourd'hui, la dépollution du site impose des exigences spécifiques car ce produit reste dangereux puisque constitué de multiples substances dont des hydrocarbures aromatiques polycycliques reconnus comme étant très toxiques et surtout cancérigènes. Afin d'évaluer l'étendue de la contamination, une campagne de carottages a été préalablement effectuée sur le site de l'ancienne fabrique après destruction. Son analyse a permis d'évaluer la complexité du chantier. Elle montre que la pollution se présente tant sous une forme pure flottante dans la nappe phréatique que sous forme pure coulante au fond de l'aquifère. « La première phase consiste à exécuter des tests en laboratoire qui sont ensuite intégrés dans une modélisation numérique développée par le canadien Bruce McGee, concepteur du procédé ET-DSP. Celle-ci va servir à simuler la dépollution en fonction du cas précis étudié et à dimensionner l'installation du chantier en trois dimensions » poursuit Guillaume Garcia. Ensuite, la chauffe du sous sol est effectuée par tranche verticale de cinq mètres de profondeur par l'intermédiaire d'électrodes qui sont fichées verticalement dans le sol à traiter jusqu'à la limite de la contamination ». En surface, une étanchéité est assurée par le coulage d'une dalle de béton projeté très léger, un isolant qui va contenir les risques d'émissions gazeuses à l'atmosphère. De plus, cette dalle va assurer une protection de surface qui renforce l'isolation thermique du chantier dans le cadre d'une meilleure optimisation énergétique. Lorsque électrodes, système d'aspiration et instrumentation sont en place, l'opération de dépollution est lancée. Elle débute par une période de 90 à 100 jours durant lesquels la batterie d'électrodes va chauffer le sous-sol jusqu'aux environ de100°C. Les constituants de la créosote passent ainsi, en grande partie, d'un état visqueux à un état volatil et soluble. A ce stade, le réseau d'extraction hydraulique multi phase, relié à une pompe à vide, va capturer les polluants gazeux puis va les dissoudre afin d'assurer leur traitement en surface par absorption sur du charbon actif. Naturellement cette stratégie de traitement piège aussi la pollution récupérée en phase pure. Un terrain dépollué sur six mois Sur le terrain Proximus d'Ostende, 170 électrodes espacées de six mètres réparties sur 84 points pour une puissance moyenne par électrode de 6,09 kW ont été implantées verticalement. Euremtech applique en plus, un « dynamic stripping », en injectant de l'eau par le biais des électrodes afin que les particules les plus lourdes remontent également en surface. Grâce à l'effet thermique de la convection obtenue autour de chaque électrode, le rayon influencé par le chauffage augmente tout en limitant la consommation électrique. De façon à restreindre toute approximation durant la phase active de dépollution, une multitude de capteurs électroniques communiquent en permanence les données du chantier telles que température, champs électriques, consommation d'énergie et débits du système afin d'assurer la régulation automatique de chaque zone. Ce monitoring en temps réel permet une mesure de la densité énergétique dissipée dans les électrodes. Il sert aussi à anticiper puis rectifier tout risque de dérive des principaux paramètres De manière à surveiller le chauffage du terrain aux environs de 100°C, 325 sondes de température sont réparties en plan et verticalement sur 25 points. Lorsque tout est en action, la créosote imprégnée dans le sol est progressivement récupérée par les 117 puits d'extraction multi phase verticaux et horizontaux. En fin de chantier, les électrodes métalliques seront inertées dans le sol par injection d'un coulis de ciment étanche. « Théoriquement, durant 180 jours, le débit d'extraction du liquide est évalué à 0,58 l/min et 10,4 m3/h de gaz pour chaque puit alors que le débit total d'eau injecté représente 66,81 l/min. Vu la complexité du défi à relever, ce chantier qui va s'étaler sur six mois est relativement rapide dans ce secteur très particulier de la dépollution des sols. Il va permettre de récupérer entre 90% et 95% de la masse de pollution, soit environ 30 tonnes de créosote dans ce massif de 20 000 m3 de terres contaminées », conclut Guillaume Garcia. Jean Guilhem