Que ce soit pour surveiller l'état des réseaux d'assainissement et qualifier leurs dégradations, évaluer la qualité de travaux de réhabilitation à entreprendre ou bien vérifier la conformité d'un nouveau réseau, l'inspection télévisuelle des canalisations est un outil précieux pour gérer ce patrimoine. Aujourd'hui, les équipements proposés sont de plus en plus multifonctionnels et offrent des outils de réhabilitation très pointus.
Par , Technoscope
Que ce soit pour surveiller l'état des réseaux d’assainissement et qualifier leurs dégradations, évaluer la qualité de travaux de réhabilitation à entreprendre ou bien vérifier la conformité d’un nouveau réseau, l’inspection télévisuelle des canalisations est un outil précieux pour gérer ce patrimoine. Aujourd’hui, les équipements proposés sont de plus en plus multifonctionnels et offrent des outils de réhabilitation très pointus.
Le décret du 27 janvier 2012 (Grenelle 2) oblige les collectivités à réaliser un descriptif détaillé des réseaux d'eau et à élaborer un plan d’action pour réduire les pertes et augmenter ainsi leur rendement. Dans ce contexte, l’inspection télévisuelle des canalisations est un outil de surveillance, de nature préventive, sur un réseau ancien. Les inspections permettent de connaître l'état du réseau afin d’être en mesure de décider si on laisse en l’état, si on prévoit une réparation ponctuelle ou une réhabilitation, ou si l’on condamne le réseau pour en construire un autre ; elles permettent également de planifier les interventions en fonction de
leur degré d’urgence. Outil décisionnel pour le propriétaire du réseau, l’inspection télévisuelle, ou vidéo, est également utilisée pour vérifier les travaux effectués ou pour s’assurer de la conformité d’un nouveau réseau préalablement à sa mise en service.
« L’inspection vidéo est une méthode très utilisée en Europe, explique Philippe Roumegue, ECA Robotics. Elle consiste à introduire dans les canalisations une caméra ou un robot équipé d’une caméra embarquée dans le but d’avoir des images de l’état structurel et hydraulique du réseau. Cette inspection doit être réalisée sur des canalisations préalablement hydrocurées, sinon on ne voit pas les fissures localisées sous les dépôts ». La caméra fournit des images vidéo en temps réel qu’un opérateur, à l’extérieur, suit en direct pour établir un diagnostic. Il peut détecter des fissures, des effondrements, des dépôts, des déconnexions, des branchements pénétrants, l’impact de corrosion, etc. Il évalue également l’impact de ces détériorations sur l’hydraulique du réseau. La manipulation de la plupart des équipements et l’interprétation des images nécessitent une formation et une bonne expérience de l’inspection sur le terrain.
Un rapport d’inspection est fourni par l’opérateur. Il répertorie les défauts identifiés selon la norme européenne 13508-2 qui définit tous les types de défaut par leur description et l’attribution d’un code. Les constructeurs proposent avec les équipements les logiciels de diagnostic qui permettent de retrouver dans une bibliothèque les défauts repérés pour les intégrer dans le document de diagnostic.
De l’inspection rapide au diagnostic normalisé
Les caméras perche, ou de regard, proposées par de nombreux constructeurs comme ECA Robotics, Hydrovideo ou Rov Développement sont destinées à faire un diagnostic rapide. La caméra, équipée d’un zoom et d’un système d’éclairage, est descendue dans le regard pour estimer l’état des canalisations sur une distance d’une trentaine de mètres maximum, c’est-à-dire lorsque les conditions de visibilité sont bonnes (diamètre et inclinaison de la canalisation, matériau réfléchissant comme le PVC ou non, coude, …). « Cette technique est intéressante pour vérifier le bon hydrocurage des canalisations avant de procéder à une inspection par exemple, ou bien pour identifier la présence de gros obstacles ou de branchements pénétrants, explique Philippe Roumegue. Il sert en particulier pour planifier les inspections et les opérations de nettoyage, ou bien établir des devis ». Grâce à son zoom X18, son éclairage par Leds haute luminosité et son câble de liaison anti-giratoire, la caméra Hydrozoom V2 de Hydrovidéo, par exemple, est capable de faire l’état des lieux de conduites de 150 à 1000 mm de diamètre jusqu’à 15 mètres de profondeur.
L’opérateur observe les images transmises sur un module portatif avec harnais. Hydrovideo a développé une version de ce produit destinée à être utilisée dans des canalisations visitables. Il s’agit de la Visitazoom. Dans ce cas, l’opérateur porte le pupitre de commande devant lui grâce au harnais et il peut, soit tenir la caméra zoom à la main pour viser, soit la fixer sous le pupitre de commande. Il pilote ensuite le zoom à sa convenance.
CMR SMR
Commande devant lui grâce au harnais et il peut, soit tenir la caméra zoom à la main pour viser, soit la fixer sous le pupitre de commande. Il pilote ensuite le zoom à sa convenance.
Une inspection plus poussée passe par l'introduction d'une caméra dans les conduites avec l'identification des détériorations sur les images transmises en temps réel sur un écran de contrôle situé à l'extérieur, le plus souvent dans un camion équipé. C'est pourquoi un soin tout particulier a été déployé les vingt dernières années pour améliorer la qualité des images, augmenter la distance accessible et réduire les dimensions afin de naviguer le plus aisément possible dans les petites canalisations ou passer des coudes. Dans le cas des canalisations des réseaux secondaires de diamètres compris entre 80 et 250 mm, la technologie qui s'est imposée est celle de la caméra poussée, c'est-à-dire positionnée sur un jonc semi-rigide enroulé sur un touret manuel ou un treuil motorisé, introduite et poussée manuellement par l'opérateur.
Des sociétés comme ECA Robotics, CMR SMR, Hydro-vidéo, Ted Motion, GE Sensing Inspection Technologies, Vidhop, Envirmat, S3C, Rivard (Rausch) ou Eufor Inter proposent toutes une gamme de caméras adaptées à des diamètres de conduite de plus en plus petits jusqu'à 25 à 30 mm de diamètre, avec ou sans tête rotative, avec ou sans dispositif de centrage, et des longueurs de jonc de 30 à 150 mètres selon les utilisations et les constructeurs.
Nouvelle sur le marché, la caméra Mincam 360° proposée par CMR SMR figure parmi les plus petites. Elle passe dans les canalisations du DN 70 et les coudes de 90°, avec jusqu'à 90 mètres de jonc ; elle est équipée d'une tête rotative sans fin et capable de pivoter de ‑10 à +100°.
Lorsque les canalisations ont un diamètre suffisant, on peut y introduire des chariots motorisés, équipés de caméras mais également d'instruments de mesure. On trouve sur le marché des caméras disposant de 200 à 500 mètres de câble pour des canalisations allant de 150 à 1200 mm de diamètre. La caméra rotative est quasiment obligatoire dans ce cas afin de pouvoir inspecter l’ensemble de la paroi. De même, la caméra de recul est indispensable pour guider le retour du robot : vérifier que le câble s'enroule bien, éviter les obstacles, prendre les courbes. Les robots sont multidirectionnels et équipés d'un système qui alerte l'opérateur dès que l’assiette du robot dépasse un certain angle afin qu'il se remette dans l'axe. Ils sont pilotés à partir d'un pupitre de commande avec joystick. De nombreux acteurs comme Agrippa, Rov Développement, ECA Robotics, Hydrovideo, Robocana, Ibak ou Idetec proposent des robots de ce type, équipés en général.
de capteurs permettant de mesurer par laser la largeur des fissures, par accéléromètre l’inclinaison de la canalisation, ou la déformation des conduits en matériaux souples de type PVC ou PEHD. « La mesure d’ovalisation du conduit est notamment intéressante pour vérifier le bon compactage au moment de la pose des canalisations, souligne Philippe Roumegues. Un bon compactage induit une légère ovalisation de 1 à 2 %. S’il n’y a aucune ovalisation, le compactage est insuffisant ; si elle est supérieure, le compactage est trop important et induit un risque de rupture ». Hydrovidéo a ainsi intégré sur ses nouveaux robots le dimensionnement précis des anomalies (taille des défauts, pourcentage d’ovalisation) ainsi que la mesure de la hauteur d’eau, et prévoit la géolocalisation des anomalies à travers les SIG pour les rapports d’inspection.
Le nouveau système d’inspection Riezler FW 100, commercialisé par Agrippa, est doté d’une caméra axiale ayant un angle de vision de 130° et une tête rotative avec zoom, ainsi que d’un pantographe pour les conduits de gros diamètre. Afin de connaître en temps réel la position de la caméra d’inspection, ce système d’inspection vidéo peut être équipé d’une sonde. Le système complet comprend un chariot motorisé, une régie de commande, un enrouleur manuel (jusqu’à 150 m) ou motorisé (jusqu’à 250 m), une tête axiale et/ou une tête rotative avec zoom.
Le CAMEROV® TOR 200™ de chez Rov Développement, se déplaçant sur galets et chenilles et équipé d’un pantographe électrique et d’un petit bras de préhension, est particulièrement conçu pour les interventions dans les ouvrages sous voies ferrées. La SNCF a déjà fait l’acquisition d’une vingtaine de ces robots.
ECA Robotics a particulièrement soigné l’étanchéité de ses robots qui sont même utilisés pour des applications sous-marines et à grande profondeur, par exemple pour
Inspecter un forage hydraulique.
Cette entreprise dispose également de profileurs qui relèvent le profil de la canalisation pour en déduire la sédimentation. Le VSLPC (Video scanner laser for TV inspection and measurement of pipe profiles) inclut un scanner laser avec tête à balayage circulaire fournissant une mesure très précise des contours internes de la conduite (jusqu’à 3 600 points par tour). Une caméra assure la vision frontale de la canalisation et une caméra radiale rotative permet de visualiser la zone balayée par le pointeur laser pour réaliser l’inspection radiale de la conduite. « Une autre de nos spécificités est d’avoir développé des robots adaptés à l’exploration des collecteurs de plusieurs mètres de diamètre pour les eaux usées, indique Philippe Roumegue. Ces robots sur porteurs flottants mesurent les sédiments par sonar. Lorsque le collecteur est en demi-charge, nous ajoutons une caméra pour inspecter la voûte. La compagnie des eaux de Mexico par exemple a acquis ce matériel. »
De l’inspection à la réhabilitation
Le marché de l’inspection vidéo est mûr en France, mais continue néanmoins d’innover. « Ce qui se développe depuis déjà quelques années, ce sont les robots de réhabilitation sans tranchée, indique Philippe Roumegue de ECA Robotics. Ils permettent de réaliser certaines opérations de réhabilitation de l’intérieur de la canalisation. » Cette société dispose en effet de robots de réparation qui peuvent être équipés pour fraiser, buriner, décaper, colmater, etc. Il suffit de configurer le robot à chacune des opérations à effectuer avant de l'introduire dans la canalisation. « Le Pipe Renovator est compatible avec le système d’inspection Pipe Cruiser : on utilise la même unité de contrôle VSR65, le même treuil motorisé et le même câble ombilical pour l’alimentation électrique. Nous sommes les seuls à proposer une telle compatibilité en Europe. » Ce robot multifonctions autorise les interventions dans des canalisations de 125 à 700 mm de diamètre grâce à une caméra vidéo avec une fonction essuie-glace et un outil pneumatique de 1 500 W permettant, en montant les outils adaptés, de rouvrir des branchements, de poser des chapeaux ou des selles de débordement, d’injecter de la résine ou
de l’acrylique... La tête de fraisage, avec rehausse possible pour des diamètres de 400 à 700, est adaptée pour le béton, le PVC, les gaines, la fonte. La caméra offre une rotation de 360° sans butée grâce à un module 3 axes, comme l'ensemble des mouvements nécessaires à l’intervention. Outre la réparation proprement dite, le robot permet les travaux préparatoires mais aussi l’entretien des canalisations en éliminant les obstacles (racines, branchements pénétrants, joints, dépôts).
Les robots de réhabilitation ne permettent cependant pas d’intervenir dans les canalisations de plus petites dimensions. Une autre solution consiste alors à refaire un revêtement intérieur qui efface ainsi toutes les fissures et dégradations des canalisations.
CMR SMR commercialise une technologie particulière pour restaurer un revêtement intérieur solide dans les branchements domestiques défectueux souvent difficilement accessibles, le Brawoliner. Ce tissu textile 100 % polyester et sans couture a la forme d’une conduite. Il est associé à une enveloppe flexible et à une résine époxy qui garantit une résistance exceptionnelle après le durcissement à froid contre les parois. Un hydrocurage des conduites et l'élimination des dépôts et autres obstacles à l’écoulement sont indispensables au préalable. Le tissu est imprégné de résine par un dispositif mécanisé, puis fixé sur le coude d'inversion et propulsé sous pression dans la canalisation dont il vient recouvrir les parois sans faire de pli, même dans les coudes à 90°, grâce aux propriétés élastiques du matériau de support. Brawoliner a reçu toutes les certifications requises sur le plan de la statique, de l’étanchéité, du respect de l’environnement et de la sécurité physiologique. Un des avantages de cette technologie, et non des moindres, est d’éviter les réparations longues et onéreuses par tranchées, et de respecter ainsi les vieux édifices, monuments, parcs et chemins.