Your browser does not support JavaScript!

Pompes : quand la maintenance redessine la relation client...

15 juillet 2019 Paru dans le N°423 à la page 69 ( mots)
Rédigé par : Christophe BOUCHET de EDITIONS JOHANET

Aujourd’hui, les interventions sur une pompe ont lieu le plus souvent soit lorsqu’elle est défaillante (maintenance corrective), soit de façon programmée (maintenance préventive) en fonction de son état supposé, qui peut différer de son état réel. Si la maintenance préventive permet de planifier les activités des équipes et de limiter les pannes et leurs conséquences, cette méthode n’est pas optimale?: la pompe aurait peut-être pu continuer à fonctionner sans changement prématuré de pièces. La maintenance prédictive, servie par des outils opérationnels reposant sur l’IIoT, est en train de s’imposer tant du point de vue des coûts opérationnels que de la disponibilité des installations. A la clé, une baisse substantielle des coûts de maintenance mais aussi une redéfinition complète de la relation-client qui unit les fabricants de pompes et leur client. Explications.

Qu’il s’agisse d’eaux claires, d’eaux usées, ou d’eaux de process, le coût d’une pompe reste trop souvent encore réduit à son seul prix à l’achat.
Chez Vogelsang, sur la série IQ, le nombre de pièces a été divisé par deux par rapport aux architectures conventionnelles, ce qui permet de diminuer d’autant le nombre de références et donc de réduire les coûts.

Les professionnels le savent pourtant parfaitement : celui-ci n’entre que pour une très faible part dans le coût total de possession (TCO, Total Cost Ownership) ou de LCC (Life Cycle Cost) d’une pompe. La méthode permettant un calcul précis du LCC n’est pas le fruit d’une démarche marketing quelconque. Elle résulte d’une longue collaboration entre trois organismes de référence mondiale que sont l’“Hydraulic Institute”, “Europump” et l’“Office of Industrial Technologies” (OIT) du “Department of Energy” aux États-Unis. Elle montre que les coûts les plus importants associés à une installation de pompage sont ceux qui sont liés à l’énergie consommée, qui représentent à eux seuls autour de 45 % des dépenses totales du cycle de vie d’une pompe. Viennent ensuite ceux associés à la maintenance, avec 33 % des dépenses. Quant au coût de l’investissement, qui détermine encore si souvent le choix des investisseurs, il n’excéderait que très rarement 10 % des dépenses totales engagées dans le cadre du cycle de vie d’une pompe. « C’est évidemment une moyenne, souligne François Morsch, Responsable national des contrats de services chez KSB. Tout dépend de la machine, de sa puissance, de sa criticité, de sa taille, et de son environnement… etc. Mais même si des variations importantes peuvent être observées, cet ordre reste bien souvent le bon ». Pour l’exploitant, le LCC constitue un indicateur précieux pour définir une approche pertinente permettant d’abaisser notablement son coût total de possession. Inutile d’espérer réaliser de grosses économies sans se pencher sur le poste énergie. Les fabricants le savent bien qui ont fait ces dernières années de gros efforts en revoyant parfois de fond en comble la conception de leurs pompes, en redessinant leurs hydrauliques et/ou en changeant leurs moteurs pour abaisser la consommation d’énergie et augmenter le rendement (Voir EIN n° 414).

Mais qu’en est-il de la maintenance, qui représente, en moyenne, le tiers des coûts d’exploitation d’une pompe ?


Des réponses différenciées selon les applications

« Chaque pompe, quelle que soit son application, contient des pièces d’usure qui doivent être changées régulièrement, rappelle Hervé Ascencio, Directeur Technique et Qualité chez Grundfos. Les garnitures mécaniques, les roulements moteurs, les bagues d’usure nécessitent d’être périodiquement remplacées. A défaut, on observera une baisse des performances, jusqu’à l’apparition de phénomènes anormaux tels que des vibrations excessives ou une fuite au niveau de la garniture mécanique, souvent précurseurs d’une instabilité et d’un arrêt total de la pompe ». Face à ces besoins, les exploitants répondent de manière très différente. « Dans certains domaines comme en génie climatique, la panne a longtemps constitué l’élément déclencheur de la maintenance, voire le remplacement pur et simple de la pompe, même si l’essor du concept HQE pousse désormais vers une maintenance programmée, explique Hervé Ascencio. En revanche, en process industriels ou l’arrêt d’une pompe peut signifier l’arrêt de la production, avec les coûts potentiels que cela représente, la maintenance programmée, voire préventive, s’est imposée bien plus rapidement ».
Flygt Concertor™ de Xylem intègre un système de surveillance automatique qui empêche la surchauffe et les défaillances du moteur liées aux conditions externes. L’association d’un moteur innovant et de la fonction « Optimisation de l’énergie » augmente la durée de vie des moteurs, des garnitures mécaniques et des roulements.

Au-delà des pratiques différenciées selon les applications et les secteurs d’activités, un autre phénomène a joué sur les comportements des exploitants : la baisse, parfois importante, des prix de vente des pompes, notamment sur les séries standards et normalisées, a pu, dans certains cas, remettre en cause, au moins au plan économique, le bien-fondé d’une révision ou d’une remise en état. « Sur certaines applications, ces évolutions ont parfois poussé les exploitants à privilégier un remplacement pur et simple » confirme Jean-François Delorme, directeur régional activités service pour la région Paris Nord-est chez KSB. La pompe devient alors un simple consommable que l’on change lorsque les risques de défaillances se précisent. Avec, en corollaire, un inconvénient important, susceptible de générer des coûts cachés élevés sur le long terme : le renouvellement à l’identique, sans réel réexamen des besoins ni prise en compte de l’évolution de l’environnement de la pompe.

Et sans voir ou revoir le dimensionnement. « La meilleure façon de réduire les frais de maintenance et d’entretien des pompes est de la dimensionner de façon optimale, souligne Augustin Berge chez Hidrostal. Que ce soit sur les matériaux de fabrication, le type d’hydraulique ou le positionnement du point de fonctionnement sur la courbe de la pompe, une mauvaise appréciation lors de l’achat de la pompe aura une grande influence sur le coût de cycle de vie de la pompe ».
Pour inciter les exploitants à soigner la maintenance et réduire les coûts associés, les fabricants se sont d’abord engagés à la simplifier en revoyant parfois de fond en comble la conception de leurs modèles.

Simplifier la maintenance pour réduire les coûts associés

Tirant parti des enseignements collectés par leurs réseaux de réparateurs et leurs propres ateliers, les fabricants de pompes centrifuges comme KSB, Grundfos, Xylem, Sulzer, Hidrostal, Lewa ou encore Wilo ont très tôt travaillé à la simplification de la maintenance de leurs pompes et à la réduction des temps d’arrêt. Avec quelques concepts assez simples reposant sur une diminution du nombre de pièces, la simplification des assemblages, la modularité, une augmentation de la résistance à l’usure et un montage simplifié des garnitures mécaniques, une normalisation des moteurs… etc. Des maîtres mots simples en apparence, mais qui ont parfois conduit à une refonte totale de certains modèles.
Les Grundfos iSOLUTIONS reposent sur des pompes intelligentes, un Cloud et des services numériques pour des applications en eau potable, eaux usées et eaux industrielles. Elles permettent de réduire les temps d’arrêt, la maintenance et la complexité des systèmes, tout en réduisant les coûts du cycle de vie.  

Ainsi, sur sa série normalisée SNE EN73, Rovatti a privilégié une construction modulaire qui se traduit par un démontage simplifié de la partie hydraulique sans dépose du moteur, un accès direct à la turbine pour un remplacement aisé de sa bague d’usure et une étanchéité par garniture mécanique ou tresse presse-étoupe dont le remplacement est facilité par un Twinner System®. Mêmes principes sur la 2ème génération de la pompe Warman® WGR® lancée par Weir Minerals et dont l’une des exigences fonctionnelles clé repose sur la conception des composants sujets à usure pour qu’ils arrivent en fin de vie au même moment, réduisant ainsi les arrêts de maintenance et les immobilisations.

Au niveau des aides aux contrôles des pompes sur site, Hidrostal propose de son côté des trappes de visite sur les hydrauliques qui permettent de contrôler les jeux internes sans démonter toute la pompe.
Les pompes volumétriques n’ont pas échappé pas à ce mouvement. Chez Börger, par exemple, les gammes de pompes à lobes Blueline et Onixline reposent sur le concept “Maintain in Place” qui signifie que toutes les pièces d’usure peuvent être remplacées facilement et sur site par l’exploitant lui-même, sans démontage de la tuyauterie ni de l’entraînement. Netzsch a aussi beaucoup travaillé pour faciliter la maintenance des pompes Tornado® T2. Le concept Full Service in Place (FSIP) permet une ouverture totale à l’avant pour un accès direct et facile au corps de pompe à la limite de la bride de connexion. Chez Vogelsang, sur la série IQ, en plus du démontage en ligne qui facilite la maintenance, le nombre de pièces a été divisé par deux par rapport aux architectures conventionnelles, ce qui permet de diminuer d’autant le nombre de références et donc de réduire les coûts.
ABB a développé, en coopération avec le fabricant Suisse Egger, un capteur intelligent baptisé ABB Ability™ Sensor, capable de fournir des données sur la vitesse de la pompe, les vibrations globales, le déséquilibre, et travaille sur d'autres développements comme la cavitation et le colmatage.

Même chose sur les pompes à rotor excentré qui ont longtemps souffert d’une maintenance jugée exigeante. La série CC de Vogelsang propose également, avec son système breveté unique sur le marché, une maintenance en ligne, ce qui permet, là encore, de diminuer notablement les coûts d'intervention et de maintenance. La gamme Ezstrip de Nov Mono, commercialisée en France par AxFlow, a de son côté ouvert la voie à un entretien sur place qui a permis de réduire de près de 90 % le temps nécessaire à leur entretien (Voir EIN n° 409). Seepex revendique également une réduction des temps de maintenance pouvant aller jusqu’à 85 % suite au développement de la pompe SCT (Smart conveying Technology) qui permet à une personne seule, grâce à un stator et un rotor constitués de deux parties, d’effectuer facilement la maintenance, sans qu’il soit nécessaire de démonter les tuyauteries amont ou aval. Un système de resserrage intégré permet par ailleurs de rattraper le jeu de fonctionnement rotor/stator en cas d’usure et ainsi de se rapprocher des performances initiales sans qu’il soit nécessaire de remplacer une quelconque pièce.

Mais les fabricants, quelle que soit leur spécialité, ne se sont pas arrêtés là. Pour faciliter le suivi et le bon fonctionnement de leurs pompes, ils les ont très tôt équipés de capteurs pour suivre certains paramètres clés, permettant ainsi de les surveiller en continu.

Des capteurs pour surveiller les pompes en temps réel

Depuis une quinzaine d’années, KSB monte par exemple en standard sur certains de ces modèles le PumpMeter, une unité de surveillance dotée de deux capteurs de pression et d’un module d’affichage. PumpMeter analyse et affiche en continu le profil de charge de la pompe et ses caractéristiques de fonctionnement : pressions d’aspiration et de refoulement, pression différentielle, hauteur manométrique, point de fonctionnement instantané… Si le débit s’avère par exemple trop faible, PumpMeter signale les gains potentiels d’optimisation énergétique. « Aujourd’hui, le parc installé est devenu important et il continue à croître rapidement. Nous le proposons désormais en rétrofit sur des machines KSB qui n’auraient pas été équipées, voire sur des pompes de la concurrence que l’on peut également équiper de ce boîtier » explique Jean-François Delorme. En complément, KSB a développé une autre application baptisée “Sonolyzer”, capable d’enregistrer via une tablette ou un smartphone, le son émis par une pompe asynchrone en déduisant si elle est, ou pas, à son point de fonctionnement optimal. « Utilisée par les équipes KSB autant que par les exploitants, elle doit être regardée comme un premier élément d’analyse qui peut ensuite générer une prestation pour établir un diagnostic plus précis ou une intervention » explique Jean-François Delorme. Même si tous les PumpMeter et Sonolyser implantés ne sont pas utilisés par les exploitants, ils constituent une base installée importante qui permet aujourd’hui à KSB de proposer à ses clients des prestations d’exploitation des données sans avoir à déployer de gros moyens.
Le WEG Motor Scan repose sur un capteur sans fil, intelligent, connecté, et facile à installer sur tous les moteurs de la marque dans des boîtiers de taille 63 à 450. Il mesure les performances du moteur telles que la température, les vibrations et les heures de fonctionnement et travaille aussi avec des alertes pour aider la maintenance prédictive.

De même, Grundfos a très tôt équipé ses pompes de capteurs permettant de suivre leur fonctionnement. « Les mesures d’intensité, et en particulier les phénomènes de sur ou de sous-intensité qui disent déjà beaucoup sur le fonctionnement de la pompe, ont fait partie des premières paramètres surveillés, explique Hervé Ascencio. Nous avons ensuite équipé de nombreux modèles de capteurs de détection de liquide tel que le LiqTec permettant de vérifier les conditions de fonctionnement au niveau des garnitures, puis de sondes de température placées dans les enroulements moteurs ». L’objectif est toujours le même, il s’agit de suivre le fonctionnement de la pompe en détectant au plus tôt l’anomalie annonciatrice d’un dysfonctionnement. « Plus la pompe est sophistiquée et plus le process dans lequel elle s’insère est sensible, plus elle intègrera de sécurités qui, raccordées à des relais situés dans l’armoire de contrôle-commande, permettront de signaler le problème ». Mais sur des process plus simples, et pour continuer à proposer des équipements à des prix compétitifs, ces sécurités restent souvent proposées à l’état d’option.

Reste que si l’apport de ses capteurs dans le domaine de la maintenance est réel, il est limité par le fait que l’information est délivrée localement par le biais d’un écran d’affichage, même si elle peut être relayée vers une zone de contrôle, ou sur des applications plus importantes, vers un SCADA. Elle n’est donc exploitable que par le fabricant s’il se déplace, ou par l’exploitant, s’il décide de s’en saisir puis de se tourner vers le fabricant pour l’interpréter et y remédier.
« Mais surtout, explique Hervé Ascencio chez Grundfos, on restait dans le cadre d’une surveillance de paramètres instantanés, qui sont utiles dans le cadre d’un suivi de la pompe mais qui n’ont pas de valeur prédictive réelle ». L’apparition de capteurs plus intelligents, et surtout connectés, va ouvrir la voie à la mise en place de stratégies de maintenance prédictive et/ou préventive bien plus élaborées.

Des capteurs plus intelligents et connectés

Contrairement à la maintenance préventive, planifiée à l’avance sur des périodes prédéfinies sur les recommandations du constructeur, la maintenance prédictive permet d’anticiper et de prévenir les pannes potentielles en surveillant la machine sur la base de ses conditions réelles de fonctionnement. « L’apparition, il y a quelques années, de l'unité électronique MP 204 permettant de faire de la mesure de résistance d’isolement a permis de franchir un nouveau cap en apportant une information liée au vieillissement de la pompe et non plus seulement à son fonctionnement instantané, explique Hervé Ascencio chez Grundfos. De même, les capteurs de vibration renseignent sur le fonctionnement de l’environnement de la pompe en termes d’hydraulique grâce au suivi de trois éléments : coups de bélier, cavitation et vibration mécanique. Au suivi du fonctionnement en temps réel de la pompe, s’ajoutent donc des considérations précieuses sur son environnement de fonctionnement. Connectés à l’Internet des objets via le cloud, ces nouveaux capteurs rendent pour la première fois la disponibilité de l’information totalement transparente ». Les iSOLUTIONS développées par Grundfos permettent donc de détecter précocement des changements dans le fonctionnement de la pompe et ainsi de mieux planifier les interventions de maintenance, sans nécessité pour l’utilisateur de se trouver sur place.
Tsurumi mise sur une conception simple pour que ses pompes de chantiers puissent être réparées rapidement et sur place par le personnel exploitant.

C’est aussi ce que permet KSB Guard, une unité de capteurs fixée au support de palier ou à la lanterne d’entraînement de la pompe à l’aide d’un aimant ou de colle et alimentée de façon autonome par un kit de batteries. « Les données collectées sont transférées par radio dans le cloud KSB via une passerelle sécurisée, explique François Morsch. Une application disponible sur portable, tablette ou PC permet à l’exploitant, à tout moment et où qu’il soit, de consulter les caractéristiques de fonctionnement de toutes les pompes sous surveillance, sans être nécessairement présent sur site ».

Chez Wilo, c’est Nexos Intelligence qui équipe par exemple la pompe de relevage Rexa Solid Q qui intègre les outils de surveillance les plus récents. L’interface Digital Data, proposée en option, permet de surveiller les vibrations, collecter et transmettre les données via un serveur Web.
Les motoristes ont également développé leurs solutions, seuls ou en partenariat.
La solution développée par ABB permet aux  exploitants de lire les données via une application sur leur smartphone ou dans un navigateur et même visionner les données d’un assemblage complet pompe, moteur, variateur de fréquence et palier à travers l’interface du PowerTrain.

Weg déploie ainsi ses propres outils de collecte et d’analyse des données pour prévoir et avertir d’une défaillance avant qu’elle ne survienne. Le WEG Motor Scan repose ainsi sur un capteur sans fil, intelligent, connecté, et facile à installer sur tous les moteurs de la marque dans des boîtiers de taille 63 à 450. Il mesure les performances du moteur telles que la température, les vibrations et les heures de fonctionnement et travaille aussi avec des alertes pour aider la maintenance prédictive. Il permet un téléchargement automatique des données sur le Cloud via une passerelle informatique sécurisée. Une première analyse des données peut être effectuée directement sur le smartphone ou plus finement sur le portail internet WEG IoT. « Cette plateforme propose notamment une vision complète et graphique des données stockées, le diagnostic des défauts, la configuration des alarmes, la configuration des usines, souligne Yves Jamet, Responsable Gestion de projets et Marketing chez Weg France. Nos clients dépensent moins, améliorent leur rentabilité et utilisent plus efficacement leurs ressources ».

Après avoir développé ABB Ability™ Smart Sensor pour les moteurs, ABB a développé, en coopération avec le fabricant Suisse Egger, un capteur intelligent baptisé ABB Ability™ Smart Sensor pour les pompes, capable de fournir des données sur la vitesse de la pompe, les vibrations globales, le déséquilibre et d’autres indicateurs clés de performance.
KSB vient de déployer une marque de services Premium baptisée KSB SupremeServ qui repose sur une prestation de services personnalisée et adaptée aux besoins du client reposant sur ses outils connectés dont Pumpmeter et KSB Guard.

Les premiers tests, réalisés fin 2017 sur les installations d’Egger en Suisse, se sont révélés prometteurs. Le produit est disponible à la vente depuis février 2019. Le capteur bénéficie du fond numérique de la technologie ABB Ability™ Smart Sensor : les indicateurs de santé et les indicateurs de performance clés sont calculés sur le capteur, envoyés à la plateforme Cloud ABB Ability™ via une passerelle. Les exploitants peuvent lire les données via une application sur leur smartphone ou dans un navigateur et même visionner les données d’un assemblage complet pompe, moteur, variateur de fréquence et palier à travers l’interface du PowerTrain. « La vraie difficulté est maintenant de faire bénéficier les clients de l’analyse des données de ces capteurs intelligents pour qu’ils en retirent le maximum de bénéfices, explique Manuel Oriol, Responsable R&D technologie pour les systèmes IoT et l’analyse des données chez ABB. Dans ce domaine, les progrès sont fulgurants mais beaucoup reste encore à faire ».

Les intégrateurs s’y mettent également. Atlantique Industrie associe ainsi moteurs, variateurs, hydrauliques avec des outils de surveillance, de diagnostic et des automatismes pour collecter et analyser des paramètres clés tels que débit, pression, vitesse, vibration, positionnement, etc. L’objectif est toujours le même : contribuer à rendre l’installation totalement transparente pour l’exploitant qui peut en suivre tous les paramètres clés.

Tous ces outils constituent un socle permettant à la maintenance prédictive de se développer. Mais ce qui est véritablement nouveau, c’est leur intégration même au sein de la pompe et la constitution d’une offre qui permet au constructeur d’accéder pour la première fois à l’ensemble des données du système de pompage de son client. Conséquence : il devient possible pour le fabricant de proposer à ses clients des contrats de maintenance “full service” basés sur un suivi véritable et en temps réel du fonctionnement de la pompe et de son environnement. C’est un nouveau business model qui apparaît et qui permet aux fabricants de pompes d’entrer dans le monde du service.

La digitalisation fait entrer les fabricants de pompes dans le monde du service

Jusqu’à présent, un fabricant de pompe fabriquait, vendait, mettait en route, vendait des pièces de rechange, et parfois intervenait pour réparer. Mais il n’intervenait que très rarement pour faire de la prévention, faute d’accéder aux données de fonctionnement de la pompe et de son environnement. Désormais, il le peut et cette possibilité révolutionne le métier des fabricants de pompes : jadis industriels, ils peuvent désormais prendre pied dans le monde du service. « Jusqu’à présent, les fabricants de pompes avaient très souvent une société de maintenance entre eux et leur client final, confirme Hervé Ascencio chez Grundfos. Ces nouvelles technologies ouvrent la voie à un nouveau business model dont la valeur ajoutée repose sur un suivi à distance des paramètres clés de la pompe et de son environnement qui va nous permettre d’intervenir avant la casse ».
Les fabricants l’ont bien compris qui s’engouffrent dans la brèche.

KSB vient ainsi de déployer une marque de services Premium baptisée KSB SupremeServ qui repose sur une prestation de services personnalisée et adaptée aux besoins du client reposant sur ses outils connectés dont Pumpmeter et KSB Guard. « L’un des objectifs de KSB SupremeServ, c’est de passer de l’ère de la réparation ou de la révision de machine, à l’ère de la prévention. C’est de faire le bon geste au bon moment », explique Jean-François Delorme chez KSB. Moins d’interventions, donc moins de temps d’arrêt, et surtout des interventions au bon endroit et au bon moment avec, à la clé, une gestion optimisée du stock des pièces de rechange et une optimisation du cycle de vie de la pompe. « L’autre intérêt de ces outils, c’est qu’ils vont également se nourrir des informations collectées sur l’ensemble des parcs, explique François Morsch. Associés à des algorithmes, ils vont nous permettre, par rapport à une taille de machine donnée et aux évolutions des paramètres surveillés, de pouvoir prévoir les interventions, les pièces de rechange nécessaires et le vieillissement de la pompe ».

La marque, lancée à l’échelle mondiale par le groupe KSB, est opérationnelle aujourd’hui. Elle s’adresse à tous les clients qu’ils soient collectivités ou industriels.

De son côté, Grundfos a regroupé ses outils digitaux au sein de iSOLUTIONS, un concept qui repose sur le meilleur des pompes intelligentes, combinant connectivité et services numériques, pour atteindre un niveau élevé de performance des installations : surveillance en temps réel, contrôle à distance, maintenance prédictive et pompage optimisé. Là encore, l’objectif est de proposer aux industriels des contrats sur mesure, spécifiquement centrés sur leurs besoins, en exploitant, via le Cloud, les données collectées et en les analysant de manière à initier une maintenance plus adaptée et moins chère.

C’est aussi une réponse à la baisse du nombre de personnels exploitants et peut être également le moyen d’augmenter la qualité des prestations. « La division qui a le plus progressé chez nous ces dernières années, c’est le département “services” », souligne Hervé Ascencio chez Grundfos.
Le développement des services concerne tous les types de pompes. « Nous avons constaté que malgré la dimension liée à la sécurité des biens et des personnes, les maintenances ou périodes d’essais n’étaient pas toujours respectées, malgré nos formations auprès des opérateurs à la mise en service des équipements, explique Gérald Verjat, Directeur Général chez SPP Pumps, spécialisée dans la fabrication de pompes à incendie depuis plus de 150 ans. C’est pourquoi nous avons développé l’offre Total Fire Care qui inclue pendant la période de garantie les maintenances obligatoires et réglementaires de nos équipements trop souvent non réalisées. Le Total Fire Care est la capacité d’accompagnement sur les 30 ans de la durée de vie de son installation. Nous pilotons et traçons l’ensemble des interventions sur les pompes dans le Cloud, et proposons de manière prédictive des maintenances sur la base des informations collectés sur les armoires de commande. Nous allons lancer prochainement des services de supervision à distance des essais qui permettront au opérationnels hebdomadaires de pouvoir sécuriser leurs interventions, mais aussi de répondre rapidement et éviter tout dysfonctionnement majeur ».
Avec le « Pump Monitor », Seepex s’engage dans la surveillance à distance d'une pompe à vis excentrée : les informations collectées peuvent être affichées sur site via une application, dans le système de gestion du client ou dans le cloud. Les avertissements et les alertes permettent d’intervenir en temps utile ; l'affichage des tendances et l'enregistrement des données permettent d'élargir les analyses.

De son côté, Seepex a développé un concept global de solutions digitales qui comprend la maintenance assistée grâce à la réalité virtuelle, la gestion numérique du parc de pompes, et des prestations de service basées sur l’analyse des données. Les deux applications de maintenance « Seepex Service Point » et « Seepex VR » simplifient la gestion des pompes sur site. « Elles offrent au technicien de maintenance tout ce qui est nécessaire pour optimiser son travail quotidien, détaille Olivier Gallesio, directeur des ventes chez Seepex. Elles permettent la commande de pièces de rechange avec un QR code à scanner sur la pompe, l’assistance à la maintenance de pompe avec des animations 3D, étape par étape, ou encore la possibilité de gérer des pompes numériquement dans un journal de bord. L'application permet également de contacter directement le service après-vente Seepex pour des informations techniques ou des demandes de devis sans modifier les processus internes du client ».

Par ailleurs, avec le « Seepex Pump Monitor », Seepex s’engage dans la surveillance à distance d'une pompe à vis excentrée : les informations collectées peuvent être affichées sur site via une application, dans le système de gestion du client ou dans le cloud. Les avertissements et les alertes permettent d’intervenir en temps utile ; l'affichage des tendances et l'enregistrement des données permettent d'élargir les analyses. Pour tout cela, la solution sur le cloud « Seepex Connected Services » joue un rôle central. Sur la base des informations collectées sur le terrain, Seepex pourra proposer des prestations de service et assurer le fonctionnement optimal des pompes à vis excentrée.
Mais quelles sont les économies qu’un exploitant peut espérer réaliser grâce à ces outils ?
« La valeur ajoutée de ces nouveaux outils est énorme, car en plus de la maintenance, ils permettent aussi de progresser sur la consommation énergétique qui, avec l’entretien et la maintenance, représentent des coûts importants pour les utilisateurs, estime Julien Chalet, Responsable technique Chez Evolis, l'association française représentant les fabricants de pompes, anciennement connue sous le nom de Profluid. Mais ces nouvelles technologies et ces nouveaux services représentent aussi un investissement ou des achats de nouveaux services et abonnements. Et il faut réfléchir en termes de coût total de possession des équipements pour se rendre compte de la rentabilité de ces dépenses ». Il y a quelques mois, Evolis a organisé des échanges entre ses adhérents, fabricants de pompes et autres équipements, avec un groupement d’acheteurs du secteur de la Chimie. Ce travail a montré le besoin de promouvoir et structurer la prise en compte du TCO auprès des acheteurs pour que toutes ces innovations apportent leur plein bénéfice.

Yves Jamet, chez Weg France, cite une étude du cabinet McKinsey qui anticipe, grâce aux outils liés à l’Industrie 4.0, une réduction des coûts de maintenance de 10 à 40 % avec, en plus, une optimisation des ressources comprise entre 10 et 25 %. Une fourchette assez large, qui souligne combien chaque secteur d’activités et chaque cas est particulier. « Nous ne sommes encore qu’au tout début du mouvement », souligne par ailleurs Jean-François Delorme chez KSB. Ce qui est sûr, c’est que la relation client s’en trouve bouleversée. « Aujourd’hui, on se doit de bien comprendre les besoins du client en termes de maintenance de façon à lui apporter les services les plus appropriés qui vont lui faire gagner du temps et de l’argent, explique Jean-François Delorme. Nous sommes désormais en relation directe avec lui et par conséquent beaucoup plus proches dans la compréhension de son mode de fonctionnement ».

Cette relation directe qui se créée est aussi, pour les fabricants de pompes, une opportunité exceptionnelle puisqu’elle leur permet de fidéliser le client grâce à une connaissance bien plus précise de son parc et de ses besoins. Mais elle impliquera sans doute aussi un redimensionnement et une redéfinition du rôle des réseaux de réparateurs. Elle annonce également probablement de féroces batailles pour gagner des parts de marché. KSB Guard, par exemple, équipe les machines neuves, mais pas seulement. L’outil peut aussi être implanté en rétrofit sur le parc installé, et pas uniquement sur les pompes de la marque…

« Un autre apport de la digitalisation à la maintenance est l’apparition des jumeaux numériques (ou BIM Building Information Model), souligne Julien Chalet, Evolis, anciennement Profluid. De plus en plus de nouvelles installations de pompages sont désormais conçues en BIM. Très vite, chaque station de pompage bénéficiera d’un jumeau numérique qui contiendra un grand nombre d’informations facilitant la maintenance. Le jumeau numérique sera aussi le lieu pour tracer l’ensemble des opérations de maintenance réalisées sur le site ».

Les jumeaux numériques, comme les solutions contribuant à rendre les pompes intelligentes, vont très vite converger vers des solutions normalisées et des langages communs à tous les fabricants et tous les prestataires. « C’est d’ailleurs l’un des thèmes majeurs de discussions des pompistes et autres équipementiers (vannes…) regroupés au sein d'Evolis », ajoute Julien Chalet. L'intervention humaine restera nécessaire. « On peut parfaitement supposer, voire admettre, que la notion de pré...dictive sera, pour un service de maintenance, préférable à la pré..ventive, mais ce qui est certain, c’est que seule la pré..sence humaine sur site saura assurer la mission d’entretien : Action de tenir et de conserver en bon état… » commente Bruno Deschamps, Directeur de la société de maintenance AMI Assainissement qui intervient sur les installations de relevage. 
Cet article est réservé aux abonnés, pour lire l'article en entier abonnez vous ou achetez le
Acheter cet article Voir les abonnements
Entreprises liées
Produits liés
Activités liées
Contenus liés