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Conductivité : la mesure incontournable

30 avril 2020 Paru dans le N°431 à la page 51 ( mots)
Rédigé par : Jacques-olivier BARUCH

Capteurs conductifs à deux ou quatre électrodes ou capteurs inductifs, comment bien choisir son capteur et sur quels critères?? Petit panorama des capteurs de conductivité disponibles sur le marché.

I l y a eau et eau. Cet élément vital n’est quasiment jamais pur. Il contient très souvent des sels minéraux dissous en différentes quantités sous forme d’ions. La mesure de cette teneur en ions n’est pas obtenue directement mais par un autre paramètre auquel il est relié simplement, la conductivité. Bien qu’elle n’existe pas sur Terre, l’eau ne contenant que des molécules d’H2O ne contient aucun ion. Mais elle conduit tout de même l’électricité quoique que très faiblement du fait de la présence d’ions OH- et H2O+. Sa conductivité est de 0,054 µs/cm (microSiemens par centimètre). L’industrie microélectronique utilise de l’eau ultrapure issue de la distillation à environ 0,5 µs/cm. L’industrie pharmaceutique reconnaît quant à elle trois niveaux de purification en fonction des applications : l’Eau Purifiée (EP), l’Eau Hautement Purifiée (EHP), et l’Eau Pour Préparation Injectable (EPPI). Ces qualités sont physiquement très proches les unes des autres et correspondent à un niveau de conductivité inférieur à 1,1 µs/cm. La conductivité de l’eau des chaudières doit être inférieure à 150 µs/com pour éviter l’entartage. L’eau potable, quant à elle, doit contenir des ions indispensables au corps humain. Mais pas trop. Sa conductivité maximale doit être comprise entre 180 à 1.000 µs/cm (soit 1 ms/cm), la norme de l’Union européenne la fixant à 0,25 ms/cm. Rien à voir avec les eaux usées et encore moins l’eau de mer dont la conductivité atteint 56 ms/cm et la saumure 200 ms/cm.
La sonde SE600 de Knick à 4 électrodes convient aux applications à haute pression et températures élevées, dans une grande plage de mesure de l’eau pure jusqu’à des niveaux de conductivité élevés (jusqu’à 600 mS/cm).

Que ce soit pour l’alimentation ou les process industriels, il faut sans cesse s’assurer de la qualité de l’eau et donc mesurer sa conductivité.

De nombreux fabricants proposent une large gamme de capteurs. Parmi eux, on trouve Acta Mesures, Bürkert, Endress+Hauser, Cometec, Swan, Krohne, Datalink, S::can, Hach, Walchem (distribué en France par TMR) ou encore AMS Alliance, Jumo ou Yokogawa. Les exploitants du secteur de l’eau ou les industriels en sont tous équipés, la plupart du temps pour s’assurer de la stabilité de la qualité de leur eau, que celle-ci est bien adaptée à l’application, pour diminuer sa teneur en minéraux, mais aussi parfois pour la renforcer. « En montagne, l’eau est généralement captée avant d’avoir eu le temps de se minéraliser, explique Damien Jacquier, responsable de la division eau chez Krohne. On la fait passer à travers des coquilles de calcaire pour qu’elle se charge en calcium et en magnésium jusqu’à ce qu’elle soit suffisamment minéralisée, c’est-à-dire jusqu’à ce que sa conductivité soit satisfaisante ».

La sonde TetraCon® 700 IQ est une sonde de mesure numérique de conductivité à 4 électrodes avec fonctionnement sans débit pour des conductivités élevées. Elle dispose d’une très grande plage de mesure de 10 µS/cm … 500 mS/cm, d’une très haute linéarité et est extrêmement peu sensible à la saleté grâce au système à 4 électrodes.

Les instruments proposés par Kobold sont fixes ou portatifs. L’appareil de mesure portatif HND-C a un capteur connecté en permanence qui peut lire de manière fiable la conductivité et la température du milieu. Différentes versions de ces appareils peuvent déterminer simultanément la conductivité et la température des liquides, et disposent de fonctions supplémentaires pour renseigner la résistance et la salinité du liquide en quelques étapes.


Véritable produit IoT sans fil et autonome en énergie, la sonde solution multi-paramètres Multi-Probe+ d’EFS (Étude Fabrication Service) peut transférer à distance directement sur serveur ftp toutes les données mesurées localement telles que la conductivité, le redox, la turbidité, la conductivité, le pH, le débit, la pression, la température et la vitesse d’écoulement.

De leur côté, les sondes Seametrics CT2X d’AnHydre mesurent température/conductivité/salinité. Dotées d'une électronique numérique embarquée, elles délivrent des sorties ModBus RTU et SDI-12 pour une intégration facile avec une gestion centralisée, une transmission à distance. Avec leur enregistreur intégré et un compartiment pour piles, les CT2X peuvent aussi être déployées sur de nombreuses applications, par exemple la surveillance des nappes phréatiques soumises aux entrées d'eau salée. Une mesure de niveau peut également être intégrée pour le suivi du marnage des forages.

La Smartpat Cond 5200 de Krohne (échelle de mesure pour la constante de cellule c=1 : 10 µS/cm…15 mS/cm) est conçue pour l'utilisation sur les process de séparation lors du traitement de l'eau ou des eaux usées dans les industries chimiques, pétrochimiques et dans l'industrie de l'eau et des eaux usées.

Avec deux ou quatre électrodes ?

Deux techniques de mesure sont utilisées. La première et la plus ancienne est celle par électrodes dite aussi conductive. Elle consiste à appliquer une tension aux bornes des 2 électrodes du capteur et à mesurer la résistance du courant. C’est sur ce principe que repose le capteur UP-Con1000 de Swan, le Condumax CLS15D ou CLS21D d’Endress+Hauser, le SE 604 ou 610 de Knick, la gamme SmartPat Cond de Krohne, le 8222 de Bürkert ou de son MS03, conçu pour fonctionner sur une backplane fluidique dans le système d’analyse en ligne 8905 ou encore les appareils de la gamme MultiLine (Multi 3510, Multi 3620 et Multi 3630) avec sonde TetraCon 925 et LR 325 de Xylem, qui couvrent une large gamme d'utilisations, de l'eau déminéralisée jusqu'aux solutions fortement concentrées.
Le Condumax CLS15D d’Endress+Hauser est dédié aux mesures de conductivité dans les gammes de mesure basses. ll est notamment utilisé pour des applications standards dans l'eau pure et ultra pure et se caractérise  par une faible maintenance et une longue durée de vie. Grâce à la technologie Memosens, il combine intégrité maximale du process et des données et fonctionnement simple. Il résiste à la corrosion et à l’humidité, permet l’étalonnage en laboratoire et facilite la maintenance prédictive.
Le capteur de conductivité MS03 de Burkert (cellule résistive à 2 électrodes) est conçu pour fonctionner sur une backplane fluidique dans le système d’analyse en ligne Type 8905. Il communique via bus, permettant ainsi sa reconnaissance automatique par le système d’analyse en ligne.

Les électrodes sont en platine, en inox, en titane ou en graphite selon les fabricants et la nature de l’eau à analyser. En pratique, le conductivimètre applique une tension alternative à une fréquence adaptée afin de réduire les effets de polarisation des électrodes, c’est-à-dire l’attraction préférentielle des ions vers l’une ou l’autre des deux électrodes. Les sondes de type CAA2690 et CAA2790 de Syclope sont des capteurs de mesure de conductivité avec des électrodes en graphite. Elles fournissent un signal analogique 4-20 mA permettant le raccordement sur de longues distances et disposent d’une sonde de température intégrée permettant la transmission d’un signal compensé en fonction de la température de l’eau. Elles conviennent particulièrement aux applications de mesures de la conductivité dans les eaux peu minéralisées dans les tours aéro-réfrigérantes.

L’échelle de mesure des sondes est programmable en usine ou par le bien d’un logiciel gratuit. La grandeur mesurée est également programmable avec ce même logiciel en conductivité ou salinité ou TDS.
Sonde à insertion Multi-Probe+ avec mesure  de la conductivité parmi
les 7 multi paramètres.

Pour éviter l'effet de polarisation, certains fabricants ont conçu des capteurs à quatre électrodes, comme les TetraCon 700 IQ (SW) de Xylem Analytics, les C4E de Ponsel (Aqualabo), le SE 600 de Knick ou les Shurecon P de Swan, dans lesquels un courant est imposé aux deux électrodes externes de façon à créer une différence de potentiel constante entre les électrodes internes. Comme le potentiel est mesuré en présence d’un courant négligeable, les deux électrodes internes ne sont pas polarisées. « Elles sont moins sensibles à l’encrassement et permettent une plage de mesure plus large », appuie Mathilde Leroy, responsable produits gamme process chez Aqualabo, qui a abandonné ses sondes 2 électrodes C2E au profit de ses C4E. « De plus, une sonde à 4 électrodes comme le Shurecon P permet de lancer une alarme quand la sonde est encrassée, ce qui indique le moment idéal de maintenance et réduit les frais », abonde Guillaume Schneider, responsable des ventes chez Swan.

Sonde de conductivité graphite CAA2790 de Syclope avec sortie de mesure en 4-20 mA. Un kit de connexion hydraulique permet une utilisation en piquage sur canalisation ou en utilisation sur une canne plongeante pour bassin.

La mesure ne donne pas directement la conductivité d’une solution, mais sa conductance ou plus précisément son inverse, la résistance électrique. Pour calculer la conductivité, il faut multiplier cette conductance par un paramètre lié à la géométrie du capteur, la constante de cellule. Elle est proportionnelle à la surface des électrodes et inversement proportionnelle à la distance entre les 2 électrodes. Les fabricants en proposent à diverses valeurs. Pour les eaux pures ou ultrapures, la constante de cellule devra être de 0,01 à 0,1 cm-1, de 0,4 à 1 cm-1 pour les eaux potables ou industrielles et jusqu’à 10 cm-1 pour les eaux très chargées. « La constante de cellule d’un capteur est déterminée en banc de test avec 2 ou 3 chiffres après la virgule et indiquée sur l’appareil », explique Olivier Bertrand, responsable du marché eau chez Bürkert.

Le capteur CTZN Ponsel d’Aqualabo est un capteur de conductivité à Induction adapté aux milieux de mesure les plus encrassant et qui se connecte à tout type d’enregistreur, transmetteur, système de télégestion ou automate, doté d’une entrée Modbus RS-485 ou SDI-12.
Grâce à l’indexation du capteur,
plus de 200 capteurs peuvent être connectés sur un enregistreur.

Krohne pousse la précision à 6 chiffres. Mais l’exploitant la vérifiera avec un étalon dont la conductivité est connue, comme la solution de chlorure de potassium KCl 0,01M, vendue par Hach et dont la conductivité à 25 °C est de 1.413 µS/cm ±0,5 %. « Pour les basses valeurs, cela ne sert à rien, avertit cependant Guillaume Schneider, car dès que la solution est en contact avec l’air, sa conductivité augmente et peut même doubler de valeur ».

Capteur toroïdal en PVC-C raccordé à une électronique communicante Série 600 pour une application en tour aéroréfrigérante avec purge et injection des réactifs. Réalisation TMR.

Mais cette constante de cellule change dans le temps, comme l’écrit IGZ Instruments dans ses documents. « Certaines modifications apparaissent à la suite d’une contamination ou à cause de modifications physico-chimiques dans le cas des cellules platinées. Il est donc recommandé d’étalonner la cellule au moins une fois par semaine ». Mais avant tout, de nettoyer les capteurs, toutes les semaines pour les eaux usées et toutes les deux semaines en eau claire, des graisses et dépôts de toutes sortes qui faussent la mesure.

L’induction : pour les eaux chargées

La seconde méthode, qui évite aussi cet effet de polarisation, repose sur l’induction. Une bobine émettrice traversée par un courant électrique induit un champ magnétique dans le liquide. Les ions présents dans le liquide sont alors traversés par un courant. Celui-ci est mesuré au niveau d’une bobine réceptrice. C’est ce principe qu’utilisent les SE 655 de Knick, les CLS50D d’Endress+Hauser, les CTZN de Ponsel (Aqualabo), les ISC40 de Yokogawa, les Optisys IND 8100 et les gammes Optisens de Krohne, les Inducon 1000 de Swan, les cellules electodless de Walchem, les 8228 de Bürkert ou le LCI de Kobold. « Le marché de l’inductif est à la marge, estime Guillaume Schneider, chez Swan. On vend plus de 95 % de nos capteurs sous forme conductive ». En cause, l’habitude des exploitants qui préfèrent conserver une technique qu’ils connaissent, mais le prix aussi puisqu’un capteur inductif coûte environ le double d’un capteur conductif. En revanche, ils n’ont pas le défaut des capteurs conductifs de s’encrasser régulièrement.
Panoplie de conductivité AMI Solicon 4 de Swan équipée du capteur Shurecon P à 4 électrodes. La panoplie est aussi équipée d’une mesure du débit de l’échantillon pour valider une mesure dynamique.

Mais il faut tenir compte de la nature de l’eau à mesurer puisque les capteurs inductifs ne sont pas adaptés aux eaux pures dont la conductivité est inférieure à 500 µs/cm. « Nous en vendons essentiellement pour les applications en eau de mer dont la conductivité avoisine les 50 mS/cm, annonce Mathilde Leroy. L’élevage des saumons en Norvège en est friand ». Le grand avantage de cette méthode inductive est l’absence d’encrassement. La maintenance se limite à une vérification de la calibration une fois par an. Mais le coût est important. À peu près égal à celui des capteurs de 4 électrodes, il varie de 1,5 à 2 fois plus que celui des capteurs à 2 électrodes.

Pour calibrer les sondes de faibles valeurs de conductivité, Hach propose le banc de calibration conductivité basse valeur Purecal 9526, à installer en parallèle de la sonde à vérifier/calibrer.
La Smart Sonde Seametrics CT2X d'Anhydre est une sonde submersible conductivité/température avec enregistreur intégré. Elle stocke jusqu'à 349 000 lectures horodatées de conductivité.

Qu’ils soient conductifs ou inductifs, tous les capteurs sont équipés de sondes de température, en général des Pt1000, parfois des Pt100, NTC ou PTC. En effet, la conductivité varie fortement selon la température du milieu, car elle est proportionnelle au temps de relaxation entre deux collisions d’électrons. Or, plus la température augmente, plus le temps de relaxation est court, donc plus la conductivité diminue. « La conductivité peut varier jusqu’à 6 % par degré Celsius. Tout dépend de la nature du produit chimique contrôlé et de sa concentration », explique François Charrier, PDG de TMR, revendeur des capteurs Walchem, filiale d’Iwaki US et spécialisé dans l’équipement pour procédés industriels, notamment des tours aéroréfrigérantes par des capteurs inductifs « pour éviter la maintenance ».

Des innovations relativement rares

Les techniques de mesure de conductivité sont solidement établies et bien appréhendées par les fabricants comme par les exploitants. Les innovations sont donc relativement rares dans le domaine et portent sur la robustesse des produits et des annexes comme les cartes électroniques, les transmetteurs d’informations et les logiciels de traitement de données.

Les fabricants vendent ainsi leurs capteurs avec des transmetteurs adaptés comme le Liquiline M CM42 pour le capteur CLS21D d’Endress+Hauser. La technologie Memosens permet le plug & play avec des capteurs Memosens préétalonnés. Le système de maintenance prédictive détecte lorsqu’un capteur nécessite un nettoyage, un étalonnage ou un remplacement.

De son côté, Aqualabo a intégré depuis 6 ans de l’intelligence dans ses capteurs C4E et CTZN. Ils gardent en mémoire les derniers coefficients de calibration et peuvent donc donner un état sur la qualité de leur mesure même si, comme les autres, la dérive oblige à les recalibrer deux fois par an.

Présent dans les industries agroalimentaire et pharmaceutique, Baumer propose une série de capteurs de conductivité CombiLyz développé pour l›analyse et la différenciation précise de fluides compatibles avec le traitement de l’eau. Outre le compact AFI4, l’AFI5 avec détecteur déporté comprend deux composants différents : le détecteur inductif CombiLyz et le transmetteur intégrant l´afficheur CombiView qui permet de contrôlerles processus grâce aux histogrammes de mesures via IO-Link.

La sonde Optisens Cond 1200 de Krohne convient aux produits à mesurer faiblement contaminés, non corrosifs, tels que l'eau pure, la vapeur et l'eau de refroidissement.

Krohne, qui n’est présent sur ce marché que depuis 2013, a intégré son convertisseur-transmetteur dans ses sondes SmartPat Cond. Les données sont ainsi envoyées directement à l’automate qui gère les process industriels.

La Sonde TetraCon 925 de Xylem. Deux modèles couvrent  la plage de conductivité complète : pour les conductivités moyennes et élevées, la cellule de mesure quadripolaire TetraCon® 925, et pour l’eau ultrapure
et les faibles conductivités, la cellule 
de mesure bipolaire LR 925/01 avec cuve à circulation continue.

« Swan a uniformisé les cartes pour tous les paramètres, ce qui permet de les fiabiliser, comme l’explique Guillaume Schneider. Il n’y a que le logiciel qui change ». Celui-ci permet de compenser en température et selon la nature des ions présents dans la solution, données qu’utilisent presque tous les exploitants. « L’eau des circuits de chaudières est un bon exemple des données intégrées, poursuit Guillaume Schneider. Comme les mesures sont affectées par les produits de conditionnement comme les phosphates ou l’ammoniaque, nous fournissons des abaques idoines ». En revanche, l’industrie pharmaceutique veut une fiabilité absolue de ses sondes de conductivité. Connaissant parfaitement les produits qu’elle utilise, elle se sert d’abaques maison selon les ions que les laboratoires détectent dans l’eau. On est toujours mieux servi par soi-même. 

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